Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Voici venu le temps d'instaurer en France un véritable système de volontariat civil.
Ce texte est attendu, je le sais, tant en France qu'à l'étranger.
Il est attendu parce qu'il est dès aujourd'hui nécessaire, après la fin de la conscription, de prolonger les formes civiles du service national ; de renforcer une des formes de l'engagement civique de notre jeunesse ; d'assurer le rayonnement culturel et économique de notre pays, et je connais le souci permanent qu'a la haute Assemblée sur ces objectifs et tout particulièrement Mesdames et Messieurs les sénateurs élus par les Français de l'étranger.
L'institution d'un volontariat civil est attendue également car celui-ci va permettre de continuer à répondre à des besoins bien identifiés : besoin de protection ressenti par la population, besoin de cohésion sociale, de solidarité tant nationale qu'internationale.
I - Ce projet de loi répond à plusieurs nécessités :
a) Nécessité de tirer les conséquences de la suppression du service national dans tous les domaines d'intervention des appelés du contingent.
La loi de programmation militaire 1997-2002 et la loi de 1997 portant réforme du service national ont engagé le mouvement vers la professionnalisation des armées (prévue en 2002) et la disparition du service national sous sa forme actuelle.
Les coopérants du service national vont dès lors disparaître.
Le système des coopérants de service national vous est familier.
C'est un système ancien, qui, pendant 35 ans, a permis à des dizaines de milliers de jeunes gens, 150 000 environ, d'effectuer leur service national à l'étranger, d'abord dans le cadre de l'aide aux pays en développement, puis, au fil des années, au service de l'action extérieure de la France, politique, économique et culturelle d'une manière plus générale.
A l'heure actuelle, 5000 jeunes gens environ sont incorporés chaque année au titre de la coopération, ce qui veut dire, compte tenu de la durée du service, de 6000 à 8000 jeunes Français présents simultanément à l'étranger.
Ces jeunes, vous les connaissez bien. Vous les avez rencontrés dans nos ambassades, dans les services de la coopération au développement, dans des organisations non gouvernementales, mais aussi dans des entreprises, dans des laboratoires de recherche. Dans tous ces domaines, ils fournissent, par leur compétence et leur dynamisme, une contribution importante à l'action extérieure de la France, à la présence et au rayonnement de notre pays dans le monde. L'utilité et l'efficacité de leur contribution est reconnue par tous, autant par leurs "employeurs" que par nos correspondants étrangers.
A côté des coopérants du service national proprement dits, il existe d'autres formes de service civil, sur le territoire français, qui offrent aux jeunes Français un choix alternatif.
Depuis 1965, 75 000 objecteurs de conscience et 31 000 volontaires de l'aide technique ont apporté aux structures publiques, parapubliques ou privées, un concours précieux. 70 000 policiers auxiliaires les ont rejoints à partir de 1986, 4 000 sapeurs pompiers et, depuis 1992, 45 000 appelés au titre du "service ville".
Il est devenu nécessaire d'anticiper l'échéance de la disparition de ces formes de service national de façon à assurer la continuité de l'activité des services, des organismes et des sociétés qui y font appel, et à permettre à tous les jeunes Français de trouver dans le volontariat civil une ouverture à leur désir d'engagement civique.
Cette réforme permettra également de progresser encore davantage vers la parité entre les sexes puisque nous allons donc substituer un système ouvert à tous, filles et garçons, à des fonctions jusqu'ici attribuées en priorité aux seuls garçons.
b) Nécessité d'exprimer le lien entre l'individu et la nation.
Le Service national constituait un lien fort entre l'individu et la nation.
Le principe du volontariat civil est lui aussi fondé sur le sentiment d'appartenance à la communauté française et sur la volonté de servir cette communauté.
c) La nécessité d'assurer le rayonnement culturel et économique de la France.
Ce rayonnement implique une présence plus nombreuse de nos compatriotes à l'étranger.
Si l'on compare la France à ses principaux partenaires sur le plan de l'expatriation, notre pays accuse un important retard. Ce retard s'explique en grande partie par l'histoire ; c'est un handicap à l'heure de la mondialisation. Mais cette réalité n'est pas une fatalité.
La fibre de l'étranger se contracte jeune.
Le volontariat civil m'apparaît comme un bon moyen pour donner aux jeunes Françaises et Français l'envie de regarder au-delà des limites de leur univers proche, de leur pays.
C'est un enjeu majeur pour notre action culturelle et, partant, de la réussite de notre combat pour préserver la diversité culturelle. Les Français ne sont bien sûr pas les détenteurs uniques de la volonté de lutter contre l'uniformisation culturelle, mais une présence non arrogante à l'étranger répond souvent à l'attente de nombreux pays. C'est particulièrement le cas pour ce qui est de la défense de notre langue.
C'est essentiel pour notre présence scientifique dans les laboratoires, qu'il faut favoriser dans le monde entier.
C'est vrai également pour notre présence économique, et le développement de nos entreprises.
C'est vrai également pour la poursuite de notre aide au développement notamment au travers des organisations non gouvernementales.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs, si ce Projet de loi est nécessaire car il doit succéder aux formes civiles du service national en France et à l'étranger, il répond également à ...
II - ... Des besoins bien identifiés dans plusieurs domaines.
a) Le besoin de protection des populations.
Dans les domaines de la défense civile , de la sécurité et de l'ordre public comme dans celui de la défense de l'environnement, le système du volontariat civil va permettre de prolonger les formes non militaires du service national sur le territoire français.
De même que les appelés remplissent des tâches et des services essentiels pour la collectivité, il est important de maintenir cette ouverture qui correspond à une attente forte de la part de nos concitoyens et qui se prolonge souvent par une professionnalisation.
b) Le besoin de cohésion sociale et de solidarité.
C'est un besoin en croissance continue, auquel la politique de la ville et les diverses actions en faveur de l'intégration entendent répondre.
Second volet "national" du volontariat civil, la possibilité offerte aux jeunes de s'investir dans l'accompagnement social des rénovations des quartiers dits "sensibles" sous ses différents aspects (enfance, personnes âgées, animation, projets pédagogiques, sport...) prolonge et donne plus de moyens à la politique de la ville, qui est, comme vous le savez, une des priorités de l'action gouvernementale.
Les volontaires, comme aujourd'hui les appelés, seront de précieux auxiliaires des services municipaux, ou départementaux chargés, depuis la loi d'orientation sur la ville, de "remettre de l'Etat dans les quartiers qu'il avait désertés".
c) Le besoin de solidarité internationale.
Parmi les grands pays industrialisés, nous sommes celui qui consacre la part la plus importante de son produit par habitant à l'aide au développement. La France a un rôle particulier, une voie spécifique vers plus de solidarité internationale.
Charles Josselin développera bien entendu ce point, mais je souhaite réaffirmer ici, devant vous, que la France entend contribuer à mobiliser ses énergies pour remplir ce rôle. De toutes les énergies. Et celle de notre jeunesse est assurément la plus féconde, la plus prometteuse.
Pour maintenir ce haut niveau de solidarité internationale, nous avons besoin que de jeunes volontaires s'engagent auprès des services de la coopération et dans les organisations non gouvernementales.
Je voudrais à ce stade cependant préciser un point et peut-être devancer une question. Le volontariat civil n'a pas pour vocation de devenir un service civil pour la paix. Cette tâche incombe en effet aux Nations unies. L'ONU a ses propres modes de recrutement et n'admet d'ailleurs pas les mises à disposition (qui risqueraient de renforcer la domination des pays les plus riches). La France, comme de nombreux autres Etats, contribue à fournir à l'ONU, ou aux organisations multilatérales qu'elle a mandatées, les compétences recherchées.
En toutes occasions, les autorités françaises ne manquent pas de rappeler la place majeure que doivent occuper les Nations unies, pour un monde multipolaire, divers culturellement, géré pacifiquement. Il serait par conséquent paradoxal de mettre en place une réforme qui concernerait directement une des missions principales de l'ONU : la prévention et le maintien de la paix.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Avant de laisser Charles Josselin poursuivre et compléter l'exposé de ce projet de loi, je voudrais simplement vous dire combien je me réjouis des conditions de travail qui ont présidé à la préparation de ce texte, conditions de travail fructueuses et constructives entre d'une part la commission des Affaires étrangères et son rapporteur dont je tiens à saluer ici le travail, et d'autre part avec mon cabinet et l'administration du ministère des Affaires étrangères.
Je ne doute pas que le débat qui va suivre permettra d'améliorer encore ce texte avec pour souci constant de mettre en place un volontariat civil qui donne à la France des moyens supplémentaires dans son action internationale ainsi qu'au plan national, au plus près de nos concitoyens.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 octobre 1999)
Voici venu le temps d'instaurer en France un véritable système de volontariat civil.
Ce texte est attendu, je le sais, tant en France qu'à l'étranger.
Il est attendu parce qu'il est dès aujourd'hui nécessaire, après la fin de la conscription, de prolonger les formes civiles du service national ; de renforcer une des formes de l'engagement civique de notre jeunesse ; d'assurer le rayonnement culturel et économique de notre pays, et je connais le souci permanent qu'a la haute Assemblée sur ces objectifs et tout particulièrement Mesdames et Messieurs les sénateurs élus par les Français de l'étranger.
L'institution d'un volontariat civil est attendue également car celui-ci va permettre de continuer à répondre à des besoins bien identifiés : besoin de protection ressenti par la population, besoin de cohésion sociale, de solidarité tant nationale qu'internationale.
I - Ce projet de loi répond à plusieurs nécessités :
a) Nécessité de tirer les conséquences de la suppression du service national dans tous les domaines d'intervention des appelés du contingent.
La loi de programmation militaire 1997-2002 et la loi de 1997 portant réforme du service national ont engagé le mouvement vers la professionnalisation des armées (prévue en 2002) et la disparition du service national sous sa forme actuelle.
Les coopérants du service national vont dès lors disparaître.
Le système des coopérants de service national vous est familier.
C'est un système ancien, qui, pendant 35 ans, a permis à des dizaines de milliers de jeunes gens, 150 000 environ, d'effectuer leur service national à l'étranger, d'abord dans le cadre de l'aide aux pays en développement, puis, au fil des années, au service de l'action extérieure de la France, politique, économique et culturelle d'une manière plus générale.
A l'heure actuelle, 5000 jeunes gens environ sont incorporés chaque année au titre de la coopération, ce qui veut dire, compte tenu de la durée du service, de 6000 à 8000 jeunes Français présents simultanément à l'étranger.
Ces jeunes, vous les connaissez bien. Vous les avez rencontrés dans nos ambassades, dans les services de la coopération au développement, dans des organisations non gouvernementales, mais aussi dans des entreprises, dans des laboratoires de recherche. Dans tous ces domaines, ils fournissent, par leur compétence et leur dynamisme, une contribution importante à l'action extérieure de la France, à la présence et au rayonnement de notre pays dans le monde. L'utilité et l'efficacité de leur contribution est reconnue par tous, autant par leurs "employeurs" que par nos correspondants étrangers.
A côté des coopérants du service national proprement dits, il existe d'autres formes de service civil, sur le territoire français, qui offrent aux jeunes Français un choix alternatif.
Depuis 1965, 75 000 objecteurs de conscience et 31 000 volontaires de l'aide technique ont apporté aux structures publiques, parapubliques ou privées, un concours précieux. 70 000 policiers auxiliaires les ont rejoints à partir de 1986, 4 000 sapeurs pompiers et, depuis 1992, 45 000 appelés au titre du "service ville".
Il est devenu nécessaire d'anticiper l'échéance de la disparition de ces formes de service national de façon à assurer la continuité de l'activité des services, des organismes et des sociétés qui y font appel, et à permettre à tous les jeunes Français de trouver dans le volontariat civil une ouverture à leur désir d'engagement civique.
Cette réforme permettra également de progresser encore davantage vers la parité entre les sexes puisque nous allons donc substituer un système ouvert à tous, filles et garçons, à des fonctions jusqu'ici attribuées en priorité aux seuls garçons.
b) Nécessité d'exprimer le lien entre l'individu et la nation.
Le Service national constituait un lien fort entre l'individu et la nation.
Le principe du volontariat civil est lui aussi fondé sur le sentiment d'appartenance à la communauté française et sur la volonté de servir cette communauté.
c) La nécessité d'assurer le rayonnement culturel et économique de la France.
Ce rayonnement implique une présence plus nombreuse de nos compatriotes à l'étranger.
Si l'on compare la France à ses principaux partenaires sur le plan de l'expatriation, notre pays accuse un important retard. Ce retard s'explique en grande partie par l'histoire ; c'est un handicap à l'heure de la mondialisation. Mais cette réalité n'est pas une fatalité.
La fibre de l'étranger se contracte jeune.
Le volontariat civil m'apparaît comme un bon moyen pour donner aux jeunes Françaises et Français l'envie de regarder au-delà des limites de leur univers proche, de leur pays.
C'est un enjeu majeur pour notre action culturelle et, partant, de la réussite de notre combat pour préserver la diversité culturelle. Les Français ne sont bien sûr pas les détenteurs uniques de la volonté de lutter contre l'uniformisation culturelle, mais une présence non arrogante à l'étranger répond souvent à l'attente de nombreux pays. C'est particulièrement le cas pour ce qui est de la défense de notre langue.
C'est essentiel pour notre présence scientifique dans les laboratoires, qu'il faut favoriser dans le monde entier.
C'est vrai également pour notre présence économique, et le développement de nos entreprises.
C'est vrai également pour la poursuite de notre aide au développement notamment au travers des organisations non gouvernementales.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs, si ce Projet de loi est nécessaire car il doit succéder aux formes civiles du service national en France et à l'étranger, il répond également à ...
II - ... Des besoins bien identifiés dans plusieurs domaines.
a) Le besoin de protection des populations.
Dans les domaines de la défense civile , de la sécurité et de l'ordre public comme dans celui de la défense de l'environnement, le système du volontariat civil va permettre de prolonger les formes non militaires du service national sur le territoire français.
De même que les appelés remplissent des tâches et des services essentiels pour la collectivité, il est important de maintenir cette ouverture qui correspond à une attente forte de la part de nos concitoyens et qui se prolonge souvent par une professionnalisation.
b) Le besoin de cohésion sociale et de solidarité.
C'est un besoin en croissance continue, auquel la politique de la ville et les diverses actions en faveur de l'intégration entendent répondre.
Second volet "national" du volontariat civil, la possibilité offerte aux jeunes de s'investir dans l'accompagnement social des rénovations des quartiers dits "sensibles" sous ses différents aspects (enfance, personnes âgées, animation, projets pédagogiques, sport...) prolonge et donne plus de moyens à la politique de la ville, qui est, comme vous le savez, une des priorités de l'action gouvernementale.
Les volontaires, comme aujourd'hui les appelés, seront de précieux auxiliaires des services municipaux, ou départementaux chargés, depuis la loi d'orientation sur la ville, de "remettre de l'Etat dans les quartiers qu'il avait désertés".
c) Le besoin de solidarité internationale.
Parmi les grands pays industrialisés, nous sommes celui qui consacre la part la plus importante de son produit par habitant à l'aide au développement. La France a un rôle particulier, une voie spécifique vers plus de solidarité internationale.
Charles Josselin développera bien entendu ce point, mais je souhaite réaffirmer ici, devant vous, que la France entend contribuer à mobiliser ses énergies pour remplir ce rôle. De toutes les énergies. Et celle de notre jeunesse est assurément la plus féconde, la plus prometteuse.
Pour maintenir ce haut niveau de solidarité internationale, nous avons besoin que de jeunes volontaires s'engagent auprès des services de la coopération et dans les organisations non gouvernementales.
Je voudrais à ce stade cependant préciser un point et peut-être devancer une question. Le volontariat civil n'a pas pour vocation de devenir un service civil pour la paix. Cette tâche incombe en effet aux Nations unies. L'ONU a ses propres modes de recrutement et n'admet d'ailleurs pas les mises à disposition (qui risqueraient de renforcer la domination des pays les plus riches). La France, comme de nombreux autres Etats, contribue à fournir à l'ONU, ou aux organisations multilatérales qu'elle a mandatées, les compétences recherchées.
En toutes occasions, les autorités françaises ne manquent pas de rappeler la place majeure que doivent occuper les Nations unies, pour un monde multipolaire, divers culturellement, géré pacifiquement. Il serait par conséquent paradoxal de mettre en place une réforme qui concernerait directement une des missions principales de l'ONU : la prévention et le maintien de la paix.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Avant de laisser Charles Josselin poursuivre et compléter l'exposé de ce projet de loi, je voudrais simplement vous dire combien je me réjouis des conditions de travail qui ont présidé à la préparation de ce texte, conditions de travail fructueuses et constructives entre d'une part la commission des Affaires étrangères et son rapporteur dont je tiens à saluer ici le travail, et d'autre part avec mon cabinet et l'administration du ministère des Affaires étrangères.
Je ne doute pas que le débat qui va suivre permettra d'améliorer encore ce texte avec pour souci constant de mettre en place un volontariat civil qui donne à la France des moyens supplémentaires dans son action internationale ainsi qu'au plan national, au plus près de nos concitoyens.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 octobre 1999)