Déclarations de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, en réponse à une question sur le refus de la France de signer avec la Russie la charte de sécurité de l'OSCE en pleine escalade de l'intervention russe en Tchétchénie, à l'Assemblée nationale le 8 et au Sénat le 9 décembre 1999.

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Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur le Député,
L'action de la France est claire et forte à ce sujet. Cela fait plusieurs semaines, notamment lors du Sommet de l'OSCE à Istanbul, que la France a pris l'initiative de déclarer qu'il n'était pas concevable de signer avec la Russie une charte de sécurité qui était censée apporter un plus aux relations entre les pays de cette organisation, si la Russie ne prenait pas l'engagement d'aller vers ce que nous demandons depuis maintenant des semaines, c'est-à-dire une solution politique. Certes, nous reconnaissons, comme tous les pays au monde, la souveraineté russe dans cette région. Certes, nous ne contestons pas la nécessité de lutter contre le terrorisme qui est par ailleurs une réalité attestée aussi bien en Tchétchénie que dans l'ensemble de la région. Mais, nous rappelons solennellement que nous ne croyons pas à une solution purement militaire, aussi brutale, aussi disproportionnée, avec les conséquences insupportables qu'elle a sur les populations. Nous exigeons que la Russie laisse agir les organisations humanitaires pour porter secours à tous ceux qui ont trouvé refuge en Ingouchie ou ailleurs. Nous demandons que la mission du ministre norvégien, président de l'OSCE, qui doit enfin pouvoir s'y rendre grâce à de fortes pressions lundi et mardi, débouche sur un mécanisme de solution politique. Nous demandons aux Russes de renoncer à toutes les actions militaires qu'ils ont annoncées. Sachez que ce problème sera traité au plus haut niveau en Europe par le Conseil européen d'Helsinki des chefs d'Etat et de gouvernement pour savoir comment modifier le cours de cette politique russe. Les Russes doivent savoir que nous ne pourrons pas continuer longtemps à coopérer avec eux dans ces conditions, comme si de rien n'était, alors qu'ils refusent d'entendre les pressions croissantes de la communauté internationale./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 décembre 1999)
Il est tout à fait clair que nous condamnons cette action militaire brutale, qui frappe les populations de façon massive et indiscriminée.
Nous ne croyons pas qu'un problème qui s'apparente à un problème colonial puisse être réglé de cette manière. Il appelle des solutions politiques.
A Istanbul, nous avions refusé de nous engager dans la charte de sécurité tant que les Russes agiraient de la sorte. Ils ont fait des promesses. Le président de l'OSCE s'est rendu dans la région. Non seulement non n'avons pas eu de réponse, mais ce fut l'escalade, que nous condamnons en demandant le retrait de l'ultimatum et le retour sur le terrain politique.
Nous avons demandé que dès demain matin, la Tchétchénie soit en priorité à l'ordre du jour d'Helsinki. Nous examinerons l'ensemble de nos relations avec la Russie pour voir comment prendre des décisions qui ne soient pas des gesticulations. La Russie doit changer de politique pour mettre fin à la tragédie tchétchène, qui, sinon, deviendra une tragédie russe./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 13 décembre 1999).