Texte intégral
Vous me voyez particulièrement heureux et reconnaissant d'avoir aujourd'hui l'occasion de vous parler, en tant que ministre délégué chargé de la Coopération, préoccupé au quotidien par les questions de Francophonie et d'économie.
En 1935, dans son livre "Soudan, Paris, Bourgogne", le grand africaniste Robert Delavignette invitait ses lecteurs à bien lier ces trois noms dans leurs têtes. (Le "Soudan français" d'alors est aujourd'hui le Mali, dont le nom est bien connu des Français...).
Il voulait dire, déjà, que Paris - essentiellement le gouvernement et les pouvoirs publics - ne pouvait plus rester seul responsable et acteur des relations avec l'Afrique, et que toutes les forces de la France devaient contribuer à les approfondir et les étendre.
Je crois qu'aujourd'hui nous pouvons dire qu'il nous faut bien associer dans nos têtes ces trois mots : économie, Francophonie, Coopération.
La Coopération pour le développement, ce sont, certes, les pouvoirs publics à Paris et en particulier ce ministère.
Mais "Coopération" veut bien dire échange et réciprocité. Et l'implication grandissante des ONG, des collectivités territoriales... et des entreprises françaises en est l'illustration.
La Coopération - ainsi l'avait voulu le général de Gaulle en 1960 - sert le développement de nos partenaires dans tous les domaines, notamment dans celui qui vous est familier. Elle développe nos affaires par la même occasion. Elle sert la Francophonie, c'est-à-dire la présence de la langue française et de notre culture.
C'est donc servir la Coopération, la France et vos intérêts d'hommes d'affaires que d'employer et illustrer la langue française partout où vous le pouvez. Incidemment en Afrique francophone, nos entreprises travaillent en français, emploient des Français et des nationaux francophones, ce qu'elles devraient faire bien davantage dans d'autres pays membres de la communauté francophone : au Liban, en Egypte, en Roumanie et Bulgarie, au Cambodge, au Laos et surtout au Vietnam, lieu du prochain Sommet francophone...
La Francophonie a permis ou facilité, en Afrique, une forte implantation de nos grandes entreprises et de nombreuses PME-PMI, et la communication propice aux affaires. C'est en Afrique que l'on trouve les plus gros effectifs de Français expatriés et que le commerce extérieur de la France enregistre des excédents significatifs. Dans un monde de concurrence exacerbée, où les marchés ne sont plus captifs - comme de bonnes âmes nous le rappellent à l'envi, le fait de partager une langue, des modes de pensée, des valeurs, des réflexes juridiques, des textes, des connivences et des amitiés qui se fondent largement sur ce partage, renforce les liens économiques et commerciaux.
Je crois, du reste, que nous n'avons pas encore suffisamment pris en considération - et en compte - 1e potentiel de valorisation de ces divers intérêts français que la Francophonie représente, notamment en Afrique et par l'Afrique.
Je voudrais rappeler ici quelques chiffres significatifs sur l'importance économique de l'Afrique.
Le continent africain dans son ensemble représente 80 milliards de francs d'exportations pour nos entreprises, qui se compare aux Etats-Unis, 83 milliards, et à l'Asie (hors Japon), 98 milliards.
Le solde commercial de nos échanges est largement excédentaire : près de 24 milliards de francs, soit du même ordre que celui de la France avec l'Union européenne.
La seule Afrique subsaharienne est un marché d'exportation qui dépasse celui de l'Amérique latine, avec plus de 30 milliards de francs d'exportation.
La France est le premier partenaire du continent africain, ses parts de marché sont de l'ordre de 50 % dans les pays de la zone franc.
En Afrique subsaharienne : 1360 filiales d'entreprises françaises emploient un effectif de plus de 250 000 salariés, avec un tissu important de PME à côté des très grandes sociétés.
Mais l'encours d'investissement direct reste relativement modeste, 10 milliards de francs, explicable pour partie par le nombre important de petites PME, la faible intensité capitalistique des secteurs (hors secteur des hydrocarbures), mais aussi par 1a chute des investissements des années 1980.
J'y insiste. L'exemple de la zone franc devrait, dans ce domaine, nous amener à mieux réfléchir aux potentialités recelées par ce que l'on nomme de plus en plus l'Espace économique francophone (EEF).
Le prochain Sommet, en novembre 1997 à Hanoï, sera justement, à la demande pressante des Vietnamiens, axé sur cet espace économique.
Disons tout de suite que ce concept n'a pas été encore précisé. Diverses réunions de travail et colloques (dont celui organisé en novembre 1994 par l'AUPELP-UREF à Ho Chi Minh Ville - ou Saïgon - sur "affaires, entreprises et Francophonie") et les travaux, publications, et projets du Forum francophone des Affaires, en liaison avec le CIAN et le CNPF, ont cependant permis de commencer à mieux cerner ce qu'il peut recouvrir. Il en ressort en tout cas, que cet espace est une réalité et qu'il présente un intérêt potentiel certain, à condition que l'on puisse l'organiser.
Beaucoup de grandes entreprises du Nord ont d'importantes parts de marché (travaux, bâtiments etc.) dans les pays francisants. Air Afrique appartient à 13 pays de la communauté.
L'aide publique au développement y contribue puissamment et illustre parfaitement la solidarité francophone puisque environ 50 % de l'APD, versée par des pays comme la France ou la Belgique, est destinée à des participants, de même qu'une part non négligeable d'autres pays comme le Canada, la Suisse ou le Luxembourg.
De plus en plus, 1a promotion de 1a Francophonie économique, nécessairement intéressante pour la France, consiste à faire vivre un espace fondé moins sur les contraintes de la géographie que sur les réalités de l'histoire.
Réalités culturelles, au sens large du terme, mais qui sont de plus en plus économiques, non seulement parce que la culture fonde l'économie, mais parce que l'économie de la culture connaît un formidable essor. La "mondialisation", si souvent invoquée, le plus souvent à tort et à travers, trop fréquemment abandonnée à la civilisation états-unienne qui, certes, l'accapare volontiers, cette ''mondialisation" progresse surtout dans le secteur tertiaire, des services, des loisirs, des comportements et modes de vie, de l'information, de la communication et de l'internet. Elle retrouve - et bouleverse - la culture, les cultures, les langues.
Celles-ci, dans leur diversité, y ont une place à prendre, toute leur place, notamment sous les formes économiques que prennent les échanges. Livre, film, audiovisuel, disques, chanson, musique, nouveaux supports de l'édition, de l'information, prennent, sous le nom d'industries culturelles, une importance énorme dans l'économie mondiale.
Or, la Francophonie se doit d'être dans la ligne de l'exception culturelle, un facteur à la fois de développement de l'Afrique et de ses autres membres, et de promotion des intérêts économico-culturels de la France, dans des secteurs vitaux pour elle.
Certes, la France et ses partenaires appartiennent à des ensembles continentaux où les échanges économiques sont soumis par des traités à des systèmes préférentiels très contraignants (ALENA, UE...) qui ne facilitent pas la négociation des préférences dans le cadre d'autres ensembles.
Mais, pourquoi baisser les bras ? Entreprenons ! Le FFA, opérateur de la Francophonie économique a ici un rôle important à jouer. Obtenons qu'au Sommet de Hanoï, le FFA qui a derrière lui le monde des entreprises, soit désigné comme opérateur spécialisé, direct, de l'Espace économique francophone. En conclusion, je vous redis ma conviction que la Francophonie sert - et peut servir bien davantage - le développement de l'Afrique et que par là-même, elle sert la France.
Continuons donc toujours à associer ces trois mots de ''Coopération, Francophonie, économie".
Comme La Fontaine le faisait dire aux enfants du laboureur de la fable, la Francophonie nous amène à bien cultiver notre champ, car un trésor est caché dedans...
Vous savez déjà ce qu'est ce trésor
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 novembre 2001)
En 1935, dans son livre "Soudan, Paris, Bourgogne", le grand africaniste Robert Delavignette invitait ses lecteurs à bien lier ces trois noms dans leurs têtes. (Le "Soudan français" d'alors est aujourd'hui le Mali, dont le nom est bien connu des Français...).
Il voulait dire, déjà, que Paris - essentiellement le gouvernement et les pouvoirs publics - ne pouvait plus rester seul responsable et acteur des relations avec l'Afrique, et que toutes les forces de la France devaient contribuer à les approfondir et les étendre.
Je crois qu'aujourd'hui nous pouvons dire qu'il nous faut bien associer dans nos têtes ces trois mots : économie, Francophonie, Coopération.
La Coopération pour le développement, ce sont, certes, les pouvoirs publics à Paris et en particulier ce ministère.
Mais "Coopération" veut bien dire échange et réciprocité. Et l'implication grandissante des ONG, des collectivités territoriales... et des entreprises françaises en est l'illustration.
La Coopération - ainsi l'avait voulu le général de Gaulle en 1960 - sert le développement de nos partenaires dans tous les domaines, notamment dans celui qui vous est familier. Elle développe nos affaires par la même occasion. Elle sert la Francophonie, c'est-à-dire la présence de la langue française et de notre culture.
C'est donc servir la Coopération, la France et vos intérêts d'hommes d'affaires que d'employer et illustrer la langue française partout où vous le pouvez. Incidemment en Afrique francophone, nos entreprises travaillent en français, emploient des Français et des nationaux francophones, ce qu'elles devraient faire bien davantage dans d'autres pays membres de la communauté francophone : au Liban, en Egypte, en Roumanie et Bulgarie, au Cambodge, au Laos et surtout au Vietnam, lieu du prochain Sommet francophone...
La Francophonie a permis ou facilité, en Afrique, une forte implantation de nos grandes entreprises et de nombreuses PME-PMI, et la communication propice aux affaires. C'est en Afrique que l'on trouve les plus gros effectifs de Français expatriés et que le commerce extérieur de la France enregistre des excédents significatifs. Dans un monde de concurrence exacerbée, où les marchés ne sont plus captifs - comme de bonnes âmes nous le rappellent à l'envi, le fait de partager une langue, des modes de pensée, des valeurs, des réflexes juridiques, des textes, des connivences et des amitiés qui se fondent largement sur ce partage, renforce les liens économiques et commerciaux.
Je crois, du reste, que nous n'avons pas encore suffisamment pris en considération - et en compte - 1e potentiel de valorisation de ces divers intérêts français que la Francophonie représente, notamment en Afrique et par l'Afrique.
Je voudrais rappeler ici quelques chiffres significatifs sur l'importance économique de l'Afrique.
Le continent africain dans son ensemble représente 80 milliards de francs d'exportations pour nos entreprises, qui se compare aux Etats-Unis, 83 milliards, et à l'Asie (hors Japon), 98 milliards.
Le solde commercial de nos échanges est largement excédentaire : près de 24 milliards de francs, soit du même ordre que celui de la France avec l'Union européenne.
La seule Afrique subsaharienne est un marché d'exportation qui dépasse celui de l'Amérique latine, avec plus de 30 milliards de francs d'exportation.
La France est le premier partenaire du continent africain, ses parts de marché sont de l'ordre de 50 % dans les pays de la zone franc.
En Afrique subsaharienne : 1360 filiales d'entreprises françaises emploient un effectif de plus de 250 000 salariés, avec un tissu important de PME à côté des très grandes sociétés.
Mais l'encours d'investissement direct reste relativement modeste, 10 milliards de francs, explicable pour partie par le nombre important de petites PME, la faible intensité capitalistique des secteurs (hors secteur des hydrocarbures), mais aussi par 1a chute des investissements des années 1980.
J'y insiste. L'exemple de la zone franc devrait, dans ce domaine, nous amener à mieux réfléchir aux potentialités recelées par ce que l'on nomme de plus en plus l'Espace économique francophone (EEF).
Le prochain Sommet, en novembre 1997 à Hanoï, sera justement, à la demande pressante des Vietnamiens, axé sur cet espace économique.
Disons tout de suite que ce concept n'a pas été encore précisé. Diverses réunions de travail et colloques (dont celui organisé en novembre 1994 par l'AUPELP-UREF à Ho Chi Minh Ville - ou Saïgon - sur "affaires, entreprises et Francophonie") et les travaux, publications, et projets du Forum francophone des Affaires, en liaison avec le CIAN et le CNPF, ont cependant permis de commencer à mieux cerner ce qu'il peut recouvrir. Il en ressort en tout cas, que cet espace est une réalité et qu'il présente un intérêt potentiel certain, à condition que l'on puisse l'organiser.
Beaucoup de grandes entreprises du Nord ont d'importantes parts de marché (travaux, bâtiments etc.) dans les pays francisants. Air Afrique appartient à 13 pays de la communauté.
L'aide publique au développement y contribue puissamment et illustre parfaitement la solidarité francophone puisque environ 50 % de l'APD, versée par des pays comme la France ou la Belgique, est destinée à des participants, de même qu'une part non négligeable d'autres pays comme le Canada, la Suisse ou le Luxembourg.
De plus en plus, 1a promotion de 1a Francophonie économique, nécessairement intéressante pour la France, consiste à faire vivre un espace fondé moins sur les contraintes de la géographie que sur les réalités de l'histoire.
Réalités culturelles, au sens large du terme, mais qui sont de plus en plus économiques, non seulement parce que la culture fonde l'économie, mais parce que l'économie de la culture connaît un formidable essor. La "mondialisation", si souvent invoquée, le plus souvent à tort et à travers, trop fréquemment abandonnée à la civilisation états-unienne qui, certes, l'accapare volontiers, cette ''mondialisation" progresse surtout dans le secteur tertiaire, des services, des loisirs, des comportements et modes de vie, de l'information, de la communication et de l'internet. Elle retrouve - et bouleverse - la culture, les cultures, les langues.
Celles-ci, dans leur diversité, y ont une place à prendre, toute leur place, notamment sous les formes économiques que prennent les échanges. Livre, film, audiovisuel, disques, chanson, musique, nouveaux supports de l'édition, de l'information, prennent, sous le nom d'industries culturelles, une importance énorme dans l'économie mondiale.
Or, la Francophonie se doit d'être dans la ligne de l'exception culturelle, un facteur à la fois de développement de l'Afrique et de ses autres membres, et de promotion des intérêts économico-culturels de la France, dans des secteurs vitaux pour elle.
Certes, la France et ses partenaires appartiennent à des ensembles continentaux où les échanges économiques sont soumis par des traités à des systèmes préférentiels très contraignants (ALENA, UE...) qui ne facilitent pas la négociation des préférences dans le cadre d'autres ensembles.
Mais, pourquoi baisser les bras ? Entreprenons ! Le FFA, opérateur de la Francophonie économique a ici un rôle important à jouer. Obtenons qu'au Sommet de Hanoï, le FFA qui a derrière lui le monde des entreprises, soit désigné comme opérateur spécialisé, direct, de l'Espace économique francophone. En conclusion, je vous redis ma conviction que la Francophonie sert - et peut servir bien davantage - le développement de l'Afrique et que par là-même, elle sert la France.
Continuons donc toujours à associer ces trois mots de ''Coopération, Francophonie, économie".
Comme La Fontaine le faisait dire aux enfants du laboureur de la fable, la Francophonie nous amène à bien cultiver notre champ, car un trésor est caché dedans...
Vous savez déjà ce qu'est ce trésor
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 novembre 2001)