Texte intégral
Au mois de septembre dernier, lorsque nous nous sommes réunis à Paris, nous sommes convenus d'un projet "de promotion de l'investissement privé dans les pays de la Zone franc" et je souhaite aujourd'hui vous rendre compte de son état d'avancement.
Nous étions partis du constat que la santé économique de la Zone n'avait pas été aussi satisfaisante depuis longtemps. Et pourtant deux points restaient et restent encore inquiétants ou au moins préoccupants :
- le premier vaut pour l'ensemble du continent africain, donc la Zone franc. Même avec des taux de croissance substantiels - c'est le cas aujourd'hui puisqu'ils atteignent ou dépassent 5% en tendance - la résorption du différentiel de développement avec les pays du Nord et l'éradication de la grande pauvreté restent des objectifs de long terme et cela n'est, ni politiquement ni socialement, acceptable par personne.
- le second point d'inquiétude est un effet ou une cause du premier. L'investissement, et cela est plus particulier à la Zone franc, reste trop faible pour garantir les conditions d'un développement durable. Le taux d'investissement global moyen est proche de 16 % pour la Zone UEMOA et de 20 % pour la Zone CEMAC où il est principalement constitué des investissements dans le secteur pétrolier. Malgré leur importance, ils restent sensiblement inférieurs aux taux d'investissement qui ont permis aux pays de l'Asie du Sud-Est de décoller durant la période 1975-1990. Et l'expérience des derniers mois nous démontre que même ceux-là n'étaient pas des garanties suffisantes.
Sur ces bases, nous étions parvenus à l'idée que les initiatives des uns et des autres pour stimuler l'investissement devaient être mises en cohérence et articulées entre elles afin de modifier l'image de l'Afrique et d'attirer vers elle des capitaux et des projets.
La tendance est favorable depuis 4 ans, il nous faut la conforter et la renforcer.
A mon sens, trois facteurs de natures différentes expliquent le retournement de tendance intervenu en 1994 :
- le premier tient à la dévaluation du franc CFA et aux mesures que vos Etats ont prises pour en exploiter judicieusement les conséquences. Cet ajustement des économies de la Zone a été socialement douloureux. Mais il a finalement permis, par la signature de nombreux accords conclus au titre de la FASR, négociés avec le FMI et la Banque mondiale, d'abonder les lignes d'aide publique au développement, de restaurer la situation des finances publiques et ainsi, de dégager une épargne intérieure disponible pour l'investissement. Dans le même temps, le Club de Paris a lui aussi contribué au rétablissement des équilibres financiers et donc, indirectement à la création d'un climat de confiance favorable à l'investissement.
- Le deuxième facteur de progression a été celui de l'évolution du cours des matières premières agricoles ou minières, qui s'est révélé favorable plusieurs années de suite au continent africain. Mais il serait dangereux pour l'Afrique de compter sur ces seules circonstances favorables pour asseoir son développement.
Considérez ainsi les cours du pétrole durant le trimestre qui vient de s'écouler : dix cents de moins sur le cours du baril et c'est un milliard de francs CFA de moins sur le budget de quatre Etats de la Zone franc. Même ce facteur évident de richesse est aléatoire et peut receler des dangers pour celui qui s'y fierait trop aveuglément.
- Le troisième facteur de progression, est lui, plus porteur de continuité et d'avenir. Ce sont les réformes structurelles que vous avez entreprises pour promouvoir un nouvel environnement des affaires. Je pense, bien sur, au renforcement du cadre juridique, à l'amélioration du fonctionnement de l'appareil judiciaire, à la lutte déterminée et systématique contre la corruption, bref, à tout ce qui conforte l'Etat de droit, fait que le climat des affaires est favorable et que l'investissement ne fuit plus. Parce que mon pays appuie quelques-unes de ces initiatives, je sais votre détermination et j'ai confiance dans la stabilité des structures que vous mettez en place.
Je pense aussi aux réformes, dont nous avons esquissé les grands traits aujourd'hui, sur l'abaissement des barrières douanières, sur le tarif extérieur commun des douanes, sur la généralisation et la simplification de la TVA, sur la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux, pour ne citer que les plus importantes, entreprises dans la Zone franc depuis quelques années et dont vous récoltez aujourd'hui les premiers fruits.
Et pourtant, malgré ces avancées significatives, l'image de l'Afrique et celle de la zone franc restent, à de nombreux égards, dissuasives. "Quel est celui qui irait placer ses économies sur un continent dont on ne parle que pour évoquer les soubresauts et les drames ?", entend-on souvent. Alors même qu'on constate en plus la fuite des capitaux africains, l'évasion de l'épargne intérieure africaine vers d'autres cieux !
Quant à ceux qui s'y risquent encore, ils se lancent trop souvent dans une stratégie de coups : on joue, on gagne, on rafle la mise et on la retire vite. C'est d'autant plus intéressant que le taux de retour est à la mesure du risque: 15 % sur le continent africain contre 9 % en Europe. Encore un chiffre : sur un an, 34 % de sortie hors du continent des bénéfices réalisés en Afrique contre 2 % en Asie du Sud-Est jusqu'à la crise récente. Cette différence n'est plus justifiée, au regard des indicateurs objectifs de vos économies, de même qu'elle n'est pas soutenable à terme parce qu'elle handicape l'avenir du continent.
De là notre projet qui vise à lutter contre l'aveuglement mondial sur l'état des économies africaines et leur développement pourtant bien réel. Cette situation est pire que de la désinformation. On a calculé que moins de 1 % des données transitant actuellement sur les autoroutes de l'information porte sur l'économie du continent. Personne ne sait ou ne veut savoir ce qui a changé.
Notre projet de promotion par la communication des investissements dans la Zone franc veut être une réponse ambitieuse à ce diagnostic.
Au départ, il y a une volonté : penser la cohérence des actions que nous menons chacun de notre côté et leur permettre de se renforcer les unes les autres. Nous devons raisonner en termes de stratégie de communication, dans la durée, dans l'espace de nos pays, en mettant en oeuvre les outils les plus adaptés pour convaincre les investisseurs potentiels.
Notre projet a deux volets, créer des instruments de communication et organiser l'une des premières manifestations d'envergure pour les présenter aux investisseurs.
Les instruments, tout d'abord : - Un site Internet, dédié principalement à la couverture des besoins d'information des PME/PMI nationales et étrangères, françaises mais plus généralement européennes, rassemblera l'ensemble des données fiables et actualisées sur l'évolution des économies de la Zone franc : données financières, économiques, institutionnelles, juridiques. Sa structure et son contenu sont calés sur les besoins identifiés avec nos partenaires du secteur privé, grâce à une très large enquête sur les conditions de l'investissement en Zone franc réalisée par le CNPF et ses homologues.
- un atlas des marchés et des échanges fournira une information sectorielle riche et inexistante aujourd'hui dans une forme aisément utilisable.
- un guide pratique de l'investisseur recensera les réglementations, les adresses utiles, les conseils et les contacts les plus adaptés, par pays, sous régions et pour la Zone franc.
- enfin, une carte de la zone, largement diffusée, nous servira de support publicitaire visuel et attractif pour conduire notamment les investisseurs vers le site Internet, plus complet et plus convaincant.
La manifestation, à présent : Comme nous l'avions évoqué il y a six mois, Paris se propose d'accueillir en octobre prochain, au lendemain des réunions du Fonds et de la Banque mondiale, une rencontre avec des investisseurs potentiels français et européens pour lancer nos messages sur les potentialités de la zone dans leur direction et mettre en oeuvre nos nouveaux outils de communication.
J'ajoute que notre objectif est de communiquer en plusieurs langues, français, allemand, anglais au départ pour toucher un maximum d'investisseurs. Nous comptons sur nos partenaires de l'Union européenne pour nous aider dans cette tâche.
Notre calendrier est serré. La Coopération a dégagé les moyens nécessaires pour financer cette phase (4,2 MF au titre du FAC et 1,4 MF au titre de l'assistance technique pour le développement du projet).
Mais vous serez d'accord avec moi pour dire que ce projet est avant tout le votre ; ce sont vos institutions qui le bâtiront avec nous, qui le développeront et surtout, qui en assureront la pérennité, puisque ce sont elles qui détiennent l'information attendue par les investisseurs. Le lancement, que j'ai eu le plaisir d'accompagner témoigne que vos institutions ont effectivement l'ambition de se l'approprier dès à présent et d'en assumer au plus tôt le fonctionnement interactif, la mise à jour et bien sûr les coûts récurrents. D'ores et déjà, leur contribution est importante, puisque de quatre experts de haut niveau sont associés au projet et ont eu une première réunion technique.
J'ai eu aussi le plaisir d'ouvrir les travaux du premier comité de pilotage, fin janvier à Abidjan, lorsque les grandes lignes de l'action ont été déterminées. Je sais qu'hier, ce même comité a déjà analysé les esquisses des instruments en développement En bref, je sens leur volonté de réussir dans cette entreprise et je les encourage à accentuer leur effort pour tenir calendrier et objectifs. Enfin, je voudrais, en votre nom, dire toute l'ambition que nous nourrissons, au travers de nos différents projets coordonnés, de convaincre de nouveaux investisseurs, africains et européens, que le pari de l'Afrique est un pari gagnant.
Je vous remercie./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 septembre 2001)
Nous étions partis du constat que la santé économique de la Zone n'avait pas été aussi satisfaisante depuis longtemps. Et pourtant deux points restaient et restent encore inquiétants ou au moins préoccupants :
- le premier vaut pour l'ensemble du continent africain, donc la Zone franc. Même avec des taux de croissance substantiels - c'est le cas aujourd'hui puisqu'ils atteignent ou dépassent 5% en tendance - la résorption du différentiel de développement avec les pays du Nord et l'éradication de la grande pauvreté restent des objectifs de long terme et cela n'est, ni politiquement ni socialement, acceptable par personne.
- le second point d'inquiétude est un effet ou une cause du premier. L'investissement, et cela est plus particulier à la Zone franc, reste trop faible pour garantir les conditions d'un développement durable. Le taux d'investissement global moyen est proche de 16 % pour la Zone UEMOA et de 20 % pour la Zone CEMAC où il est principalement constitué des investissements dans le secteur pétrolier. Malgré leur importance, ils restent sensiblement inférieurs aux taux d'investissement qui ont permis aux pays de l'Asie du Sud-Est de décoller durant la période 1975-1990. Et l'expérience des derniers mois nous démontre que même ceux-là n'étaient pas des garanties suffisantes.
Sur ces bases, nous étions parvenus à l'idée que les initiatives des uns et des autres pour stimuler l'investissement devaient être mises en cohérence et articulées entre elles afin de modifier l'image de l'Afrique et d'attirer vers elle des capitaux et des projets.
La tendance est favorable depuis 4 ans, il nous faut la conforter et la renforcer.
A mon sens, trois facteurs de natures différentes expliquent le retournement de tendance intervenu en 1994 :
- le premier tient à la dévaluation du franc CFA et aux mesures que vos Etats ont prises pour en exploiter judicieusement les conséquences. Cet ajustement des économies de la Zone a été socialement douloureux. Mais il a finalement permis, par la signature de nombreux accords conclus au titre de la FASR, négociés avec le FMI et la Banque mondiale, d'abonder les lignes d'aide publique au développement, de restaurer la situation des finances publiques et ainsi, de dégager une épargne intérieure disponible pour l'investissement. Dans le même temps, le Club de Paris a lui aussi contribué au rétablissement des équilibres financiers et donc, indirectement à la création d'un climat de confiance favorable à l'investissement.
- Le deuxième facteur de progression a été celui de l'évolution du cours des matières premières agricoles ou minières, qui s'est révélé favorable plusieurs années de suite au continent africain. Mais il serait dangereux pour l'Afrique de compter sur ces seules circonstances favorables pour asseoir son développement.
Considérez ainsi les cours du pétrole durant le trimestre qui vient de s'écouler : dix cents de moins sur le cours du baril et c'est un milliard de francs CFA de moins sur le budget de quatre Etats de la Zone franc. Même ce facteur évident de richesse est aléatoire et peut receler des dangers pour celui qui s'y fierait trop aveuglément.
- Le troisième facteur de progression, est lui, plus porteur de continuité et d'avenir. Ce sont les réformes structurelles que vous avez entreprises pour promouvoir un nouvel environnement des affaires. Je pense, bien sur, au renforcement du cadre juridique, à l'amélioration du fonctionnement de l'appareil judiciaire, à la lutte déterminée et systématique contre la corruption, bref, à tout ce qui conforte l'Etat de droit, fait que le climat des affaires est favorable et que l'investissement ne fuit plus. Parce que mon pays appuie quelques-unes de ces initiatives, je sais votre détermination et j'ai confiance dans la stabilité des structures que vous mettez en place.
Je pense aussi aux réformes, dont nous avons esquissé les grands traits aujourd'hui, sur l'abaissement des barrières douanières, sur le tarif extérieur commun des douanes, sur la généralisation et la simplification de la TVA, sur la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux, pour ne citer que les plus importantes, entreprises dans la Zone franc depuis quelques années et dont vous récoltez aujourd'hui les premiers fruits.
Et pourtant, malgré ces avancées significatives, l'image de l'Afrique et celle de la zone franc restent, à de nombreux égards, dissuasives. "Quel est celui qui irait placer ses économies sur un continent dont on ne parle que pour évoquer les soubresauts et les drames ?", entend-on souvent. Alors même qu'on constate en plus la fuite des capitaux africains, l'évasion de l'épargne intérieure africaine vers d'autres cieux !
Quant à ceux qui s'y risquent encore, ils se lancent trop souvent dans une stratégie de coups : on joue, on gagne, on rafle la mise et on la retire vite. C'est d'autant plus intéressant que le taux de retour est à la mesure du risque: 15 % sur le continent africain contre 9 % en Europe. Encore un chiffre : sur un an, 34 % de sortie hors du continent des bénéfices réalisés en Afrique contre 2 % en Asie du Sud-Est jusqu'à la crise récente. Cette différence n'est plus justifiée, au regard des indicateurs objectifs de vos économies, de même qu'elle n'est pas soutenable à terme parce qu'elle handicape l'avenir du continent.
De là notre projet qui vise à lutter contre l'aveuglement mondial sur l'état des économies africaines et leur développement pourtant bien réel. Cette situation est pire que de la désinformation. On a calculé que moins de 1 % des données transitant actuellement sur les autoroutes de l'information porte sur l'économie du continent. Personne ne sait ou ne veut savoir ce qui a changé.
Notre projet de promotion par la communication des investissements dans la Zone franc veut être une réponse ambitieuse à ce diagnostic.
Au départ, il y a une volonté : penser la cohérence des actions que nous menons chacun de notre côté et leur permettre de se renforcer les unes les autres. Nous devons raisonner en termes de stratégie de communication, dans la durée, dans l'espace de nos pays, en mettant en oeuvre les outils les plus adaptés pour convaincre les investisseurs potentiels.
Notre projet a deux volets, créer des instruments de communication et organiser l'une des premières manifestations d'envergure pour les présenter aux investisseurs.
Les instruments, tout d'abord : - Un site Internet, dédié principalement à la couverture des besoins d'information des PME/PMI nationales et étrangères, françaises mais plus généralement européennes, rassemblera l'ensemble des données fiables et actualisées sur l'évolution des économies de la Zone franc : données financières, économiques, institutionnelles, juridiques. Sa structure et son contenu sont calés sur les besoins identifiés avec nos partenaires du secteur privé, grâce à une très large enquête sur les conditions de l'investissement en Zone franc réalisée par le CNPF et ses homologues.
- un atlas des marchés et des échanges fournira une information sectorielle riche et inexistante aujourd'hui dans une forme aisément utilisable.
- un guide pratique de l'investisseur recensera les réglementations, les adresses utiles, les conseils et les contacts les plus adaptés, par pays, sous régions et pour la Zone franc.
- enfin, une carte de la zone, largement diffusée, nous servira de support publicitaire visuel et attractif pour conduire notamment les investisseurs vers le site Internet, plus complet et plus convaincant.
La manifestation, à présent : Comme nous l'avions évoqué il y a six mois, Paris se propose d'accueillir en octobre prochain, au lendemain des réunions du Fonds et de la Banque mondiale, une rencontre avec des investisseurs potentiels français et européens pour lancer nos messages sur les potentialités de la zone dans leur direction et mettre en oeuvre nos nouveaux outils de communication.
J'ajoute que notre objectif est de communiquer en plusieurs langues, français, allemand, anglais au départ pour toucher un maximum d'investisseurs. Nous comptons sur nos partenaires de l'Union européenne pour nous aider dans cette tâche.
Notre calendrier est serré. La Coopération a dégagé les moyens nécessaires pour financer cette phase (4,2 MF au titre du FAC et 1,4 MF au titre de l'assistance technique pour le développement du projet).
Mais vous serez d'accord avec moi pour dire que ce projet est avant tout le votre ; ce sont vos institutions qui le bâtiront avec nous, qui le développeront et surtout, qui en assureront la pérennité, puisque ce sont elles qui détiennent l'information attendue par les investisseurs. Le lancement, que j'ai eu le plaisir d'accompagner témoigne que vos institutions ont effectivement l'ambition de se l'approprier dès à présent et d'en assumer au plus tôt le fonctionnement interactif, la mise à jour et bien sûr les coûts récurrents. D'ores et déjà, leur contribution est importante, puisque de quatre experts de haut niveau sont associés au projet et ont eu une première réunion technique.
J'ai eu aussi le plaisir d'ouvrir les travaux du premier comité de pilotage, fin janvier à Abidjan, lorsque les grandes lignes de l'action ont été déterminées. Je sais qu'hier, ce même comité a déjà analysé les esquisses des instruments en développement En bref, je sens leur volonté de réussir dans cette entreprise et je les encourage à accentuer leur effort pour tenir calendrier et objectifs. Enfin, je voudrais, en votre nom, dire toute l'ambition que nous nourrissons, au travers de nos différents projets coordonnés, de convaincre de nouveaux investisseurs, africains et européens, que le pari de l'Afrique est un pari gagnant.
Je vous remercie./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 septembre 2001)