Interviews de M. Hubert Védrine, ministre des relations étrangères, à Radio-France et à I-Télévision le 12 juin 2000, sur la libération de M. Brice Fleutiaux, otage en Tchétchénie.

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Circonstance : Annonce de la libération de M. Brice Fleutiaux le 12 juin 2000 par le Quai d'Orsay averti par les autorités russes.

Média : Emission Face à Radio France - I-télévision - Radio France - Télévision

Texte intégral

Entretien à I-Télévision :
Q - Est-ce que vous pouvez nous expliquer dans quelles conditions a été libéré Brice Fleutiaux ?
R - Depuis sa prise en otage début octobre, nous sommes restés mobilisés sans relâche, jour après jour, et nous avons sans arrêt demandé aux Russes d'utiliser leur autorité et leur influence en Tchétchénie pour réussir à obtenir sa libération. Ils l'ont obtenue aujourd'hui et nous les remercions. Nous remercions le président Poutine, nous remercions le ministère de l'Intérieur russe qui a joué un rôle clé et nous remercions M. Ivanov, le ministre des Affaires étrangères, qui a toujours été extrêmement sensible à nos demandes. Aujourd'hui est un jour de joie par conséquent pour Brice Fleutiaux et puis pour ses proches et pour nous aussi.
Q - Comment s'est passé la collaboration avec la diplomatie russe ?
R - Cela s'est passé de façon très coopérative et quotidienne. Nous avons été en contact sans arrêt, sans relâche, à travers notre ambassade à Moscou et à travers le ministère des Affaires étrangères à Paris. Toutes les informations étaient étudiées en commun pour savoir ce qui pouvait être fait ou pas, et finalement ses efforts constants et tenaces dans les détails desquels je ne peux pas rentrer, ont obtenu le résultat. C'est ça qui compte. C'est essentiellement un travail russe.
Q - Est-ce que vous avez tenu régulièrement la famille Fleutiaux au courant de l'avancée par le Quai d'Orsay ?
Naturellement la famille Fleutiaux, c'est-à-dire la femme de Brice Fleutiaux, sa mère, son père, son frère, ont été tenus au courant quasiment chaque jour. Nos relations sont très étroites dans ses moments pénibles. Nous savons que notre travail était bien entendu de tout faire pour obtenir cette libération mais en même temps de tout faire pour atténuer si c'est possible, l'angoisse et la douleur des familles. Enfin il faut surtout penser à se réjouir aujourd'hui.
Q - Et alors justement on parle d'une éventuelle rançon en échange du retour de Brice Fleutiaux ?
R - C'est faux.
Q - D'accord, alors justement il y a une vingtaine d'otages qui avaient été libérés grâce à un échange contre une rançon. Le seul qui n'avait pas pu être libéré, qui n'avait pas de rançon, a été exécuté. Comment peut-on expliquer qu'aujourd'hui Brice Fleutiaux ait pu être libéré sans rançon ?
R - Grâce aux efforts russes.
Q - C'est-à-dire ?
R - Les Russes ont obtenu ce résultat sans avoir à faire autre chose et nous-mêmes nous n'avons rien fait d'autre.
Q - M. Ménard, le secrétaire général de " Reporters sans frontières ", expliquait aussi que sans finalement le tapage médiatique qu'il y avait eu autour de cette histoire des otages en général, cette épreuve de force pour les diplomates, peut-être que cette libération n'aurait pas eu lieu. Qu'est-ce que vous en pensez ?
R - Je pense que c'est le type même de déclaration qu'il aurait mieux valu ne pas faire, surtout aujourd'hui. Il faut penser à la joie de Brice Fleutiaux et de sa famille. La mobilisation a été constante dès le premier jour et cette libération a été obtenue malgré ces efforts désordonnés, et ils l'ont malheureusement compliquée et retardée.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 juin 2000)
Entretien à Radio France :
Un sentiment de joie. Je suis vraiment très heureux pour lui, pour sa femme, sa mère, son père, son frère que j'ai tous rencontrés. La petite fille aussi que je n'ai pas rencontrée mais je pense que, enfin ça va être un moment merveilleux pour elle quand il va rentrer. Il vient juste d'arriver à Moscou. Donc c'est la joie qui domine aujourd'hui.
Q - (Sur le versement d'une rançon)
R - Je ne pense pas. A ma connaissance il n'y a rien eu de tel. Nous devons cette libération aux efforts des autorités russes que nous n'avons cessé de presser de faire tout ce qu'elles pouvaient pour obtenir cette libération depuis le début octobre. Nous avons été mobilisés sans relâche à partir du ministère des Affaires étrangères mais comme vous le savez, tous les dirigeants français ont suivi ça et aujourd'hui nous devons remercier pour cette libération le président Poutine, le ministre de l'Intérieur russe, et M. Ivanov, le ministre des Affaires étrangères russe, qui a toujours été très sensible à notre inquiétude et à nos demandes. C'est l'ensemble de leurs efforts qui ont permis d'aboutir à cette libération.
Q - (Sur le rôle de l'association " Reporters sans frontières ")
R - Ma conviction c'est que cette libération n'est dûe qu'à l'engagement des autorités russes sollicitées par nous.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 juin 2000)