Texte intégral
NICOLAS BEYTOUT : 98 %, c'est un score assez enviable en matière électorale, et c'est le vôtre Ernest-Antoine Seillière. Vous avez été réélu président du MEDEF avec 98 % des mandats. Pour quoi faire ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : D'abord, si vous voulez, ça marque un vrai soutien des entrepreneurs, nous en avons 700 000 dans nos fédérations et nos MEDEF territoriaux et donc je prends ça comme un appui à une attitude qui est la nôtre : s'exprimer fort, dire ce que les entrepreneurs veulent dire. Et donc, c'est un encouragement à continuer pendant trois ans.
NICOLAS BEYTOUT : Le mandat de trois ans va être consacré à la continuation de ce que vous avez déjà fait ou est-ce qu'il y a une réorientation, une modification de votre ligne ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : On va garder la ligne pour l'essentiel, et d'ailleurs, j'ai souligné que nous étions prêts, le cas échéant, je dirais, à amplifier l'attitude, peut-être pas de combat, mais à continuer à nous affirmer très fort parce qu'il n 'y a pas de raison de en pas essayer de faire en sorte que dans notre pays les entrepreneurs arrivent à peser suffisamment pour obtenir ce qui est nécessaire pour maintenir le plein emploi à terme, le maximum d'emplois tout de suite et la croissance. Alors, qu'est-ce que nous avons entendu hier du Premier ministre qui nous donne un peu de raison d'espérer ? D'abord, il a vraiment mis l'accent sur la nécessité de redonner au travail sa pleine place dans l'entreprise et dans pays
NICOLAS BEYTOUT : Et dans la société en général
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Et dans la société en général et c'est pour nous en effet quelque chose de fondamental, vous connaissez notre hostilité aux 35 heures et au changement d'attitude que cela a impliqué vis-à-vis de l'entreprise. Par ailleurs, il a ouvert la voie à la réforme du dialogue social. Vous savez que le dialogue social, nous y croyons et le gouvernement y croit aussi, c'est la manière de faire reculer la réglementation et c'est la manière, évidemment, de moderniser la solution des problèmes de société dans notre pays. Alors, il a beaucoup accentué là-dessus et nous allons appuyer bien sûr fortement la modernisation sociale
NICOLAS BEYTOUT : Par exemple, il vous a demandé de travailler très rapidement à l'amélioration de la formation professionnelle. C'est un domaine dans lequel vous avez déjà, vous, le MEDEF et les syndicats, connu un échec l'an dernier. Vous avez un calendrier aujourd'hui ? Il faut aboutir vite.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oui, l'échec pour nous a été plutôt un échec de circonstances politiques. En fait, les syndicats et les entrepreneurs connaissent l'importance de ce sujet, ils sont assez proches de la manière de le traiter, si bien que la négociation qui s'ouvrira en janvier, interprofessionnelle, nous pensons, nous espérons qu'elle donnera un résultat positif. En tous cas, nous y travaillons très activement.
NICOLAS BEYTOUT : Dans l'histoire de vos relations avec les gouvernements, d'abord, est-ce qu'on peut avoir, au nom du MEDEF ? une attitude différente avec un gouvernement de droite et un gouvernement de gauche ? Est-ce qu'il faut avoir ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non. Le MEDEF a la même attitude. C'est le gouvernement de gauche et de droite qui n'a pas la même attitude vis-à-vis des entrepreneurs.
NICOLAS BEYTOUT : Par exemple, vis-à-vis de ce gouvernement Raffarin, vous avez au début marqué pas mal d'impatience. Aujourd'hui, qu'est-ce qu'il se passe ? Vous avez la même attitude ? Toujours à demander plus que le gouvernement ne veut délivrer ou ne veut faire, ne serait-ce qu'en rythme Ou est-ce que vous avez la conscience aujourd'hui que les marges de manuvre par exemple sont suffisamment faibles pour limiter le pas de al réforme ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non, nous avons été très impatients au départ parce que nous avons eu le sentiment que le gouvernement n'allait pas agir. Et donc, nous avons, dans le domaine économique et social qui est le nôtre, qu'il était sur la priorité de al sécurité et qu'il n'allait pas vraiment entamer les réformes nécessaires dans notre domaine. On 'la dit, on l'a dit fort, ça a surpris et puis ensuite, nous avons eu un débat. Est-ce que nous allons maintenir une attitude pressante, un peu d'opposition ?
NICOLAS BEYTOUT : Presque agressive parfois
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oui, enfin, les entrepreneurs, ils disent ce qu'ils ont à dire ! Ou est-ce que, au contraire, nous allons donner au gouvernement qui nous dit qu'il veut arriver à de vraies réformes, mais selon sa méthode, à son rythme ? Alors, nous lui avons finalement dit : écoutez, prenez en effet la manière et le rythme qui est le vôtre, c'est votre responsabilité politique. Et nous dirons en fin d'année 2003 est-ce que vous avez réussi ou pas réussi et nous calerons à ce moment-là notre attitude sur le résultat.
NICOLAS BEYTOUT : Alors, en faisant cela, évidemment, vous prenez le risque de décevoir les plus revendicatifs parmi vous troupes, en tout cas il en faut, parmi les patrons. Il y en a un certain nombre qui considèrent que vous n'allez pas assez loin. Comment est-ce qu'il faut régler al bonne attitude du MEDEF vis-à-vis, disons, de l'ensemble des réformes ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oh, je pense qu'il faut bien entendu préconiser la réforme, proposer la réforme, proposer nos solutions et puis ensuite faire notre affaire de ce que le milieu entrepreneurial s'unit derrière le MEDEF. C'est le cas. Mais nous avons en effet des entrepreneurs qui n'appartiennent pas au MEDEF et qui sont beaucoup plus impatients que nous. Mais nous avons su contenir dans le milieu entrepreneurial l'extrémisme
NICOLAS BEYTOUT : Donc il faut savoir être quoi ? Une forme de juste milieu entre les patrons qui souhaitent réformer très vite et ceux qui ont une vraie conscience des marges de manuvre ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Il faut être très à l'écoute du terrain, ce que nous sommes, d'ailleurs nous étions encore à Tours hier, nous sommes sur le terrain en permanence, et là, il faut entendre, je dirais, la voix majoritaire, la voix L'on identifie très bien, si vous voulez, les isolés, malgré tout, dans l'expression d'une revendication plus forte de celle que nous avons. Et nous avons l'impression d'être aujourd'hui parfaitement adaptés au fortissimo d'ailleurs que demande le monde de l'entreprise dans la réforme aujourd'hui.
NICOLAS BEYTOUT : Quand on regarde, quand on entend ce que vous dites sur les retraites, on a l'impression que vous poussez la demande, la revendication j'allais dire, assez loin. Quand vous dites qu'il faut augmenter de cinq ans, certains au patronat disent plus que cinq ans, le nombre des annuités de cotisation, vous êtes plutôt au-delà de ce que la musique dominante dit en France.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oui, encore que, si vous voulez, on traduit d'habitude nos propose de façon tronquée et je n'en veux à personne, mais quand nous disons cinq ans, c'est cinq ans sur quarante ans. C'est-à-dire que entre maintenant et 2040
NICOLAS BEYTOUT : Progressivement
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Par année successive, etc. Donc on peut toujours présenter les choses de telle manière que la solution paraisse abusive. En fait, nous sommes, nous, dans le raisonnable. Il y a un allongement de durée de al vie, les rapports entre la population active et la population retraitée commandent qu'on allonge r aisonnablement la durée de cotisation pour avoir la retraite pleine. Tout le monde le sait. On y viendra. C'est inévitable.
NICOLAS BEYTOUT : Quand on voit ce qui s'est passé à EDF avec la CGT qui, au fond, a rejeté majoritairement cet accord, est-ce que vous avez le sentiment que, aujourd'hui, c'est plus difficile de travailler avec un certain nombre de syndicats ? Il y a les réformateurs et il y a les autres. La CGT, on pouvait espérer qu'elle rejoindrait de temps en temps le camp des réformateurs. Aujourd'hui, c'est un rêve ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ecoutez, on n'y a pas compris grand chose. Trois syndicats ont dit oui, le quatrième voulait dire oui, sa base ou une base a dit non, et le gouvernement a dit : moi je lis les textes, je regarde d'ailleurs les propositions des partenaires sociaux pour la réforme, trois syndicats sur cinq qui disent oui à quelque chose.
NICOLAS BEYTOUT : Et là-dessus vous lui donnez raison, sans attendre la fin 2003.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Nous lui donnons raison parce qu'il faut en effet dans le domaine social avoir des règles du jeu.
NICOLAS BEYTOUT : Ernest-Antoine Seillière, merci.
(Source http://www.medef.fr, le 22 janvier 2003)
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : D'abord, si vous voulez, ça marque un vrai soutien des entrepreneurs, nous en avons 700 000 dans nos fédérations et nos MEDEF territoriaux et donc je prends ça comme un appui à une attitude qui est la nôtre : s'exprimer fort, dire ce que les entrepreneurs veulent dire. Et donc, c'est un encouragement à continuer pendant trois ans.
NICOLAS BEYTOUT : Le mandat de trois ans va être consacré à la continuation de ce que vous avez déjà fait ou est-ce qu'il y a une réorientation, une modification de votre ligne ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : On va garder la ligne pour l'essentiel, et d'ailleurs, j'ai souligné que nous étions prêts, le cas échéant, je dirais, à amplifier l'attitude, peut-être pas de combat, mais à continuer à nous affirmer très fort parce qu'il n 'y a pas de raison de en pas essayer de faire en sorte que dans notre pays les entrepreneurs arrivent à peser suffisamment pour obtenir ce qui est nécessaire pour maintenir le plein emploi à terme, le maximum d'emplois tout de suite et la croissance. Alors, qu'est-ce que nous avons entendu hier du Premier ministre qui nous donne un peu de raison d'espérer ? D'abord, il a vraiment mis l'accent sur la nécessité de redonner au travail sa pleine place dans l'entreprise et dans pays
NICOLAS BEYTOUT : Et dans la société en général
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Et dans la société en général et c'est pour nous en effet quelque chose de fondamental, vous connaissez notre hostilité aux 35 heures et au changement d'attitude que cela a impliqué vis-à-vis de l'entreprise. Par ailleurs, il a ouvert la voie à la réforme du dialogue social. Vous savez que le dialogue social, nous y croyons et le gouvernement y croit aussi, c'est la manière de faire reculer la réglementation et c'est la manière, évidemment, de moderniser la solution des problèmes de société dans notre pays. Alors, il a beaucoup accentué là-dessus et nous allons appuyer bien sûr fortement la modernisation sociale
NICOLAS BEYTOUT : Par exemple, il vous a demandé de travailler très rapidement à l'amélioration de la formation professionnelle. C'est un domaine dans lequel vous avez déjà, vous, le MEDEF et les syndicats, connu un échec l'an dernier. Vous avez un calendrier aujourd'hui ? Il faut aboutir vite.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oui, l'échec pour nous a été plutôt un échec de circonstances politiques. En fait, les syndicats et les entrepreneurs connaissent l'importance de ce sujet, ils sont assez proches de la manière de le traiter, si bien que la négociation qui s'ouvrira en janvier, interprofessionnelle, nous pensons, nous espérons qu'elle donnera un résultat positif. En tous cas, nous y travaillons très activement.
NICOLAS BEYTOUT : Dans l'histoire de vos relations avec les gouvernements, d'abord, est-ce qu'on peut avoir, au nom du MEDEF ? une attitude différente avec un gouvernement de droite et un gouvernement de gauche ? Est-ce qu'il faut avoir ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non. Le MEDEF a la même attitude. C'est le gouvernement de gauche et de droite qui n'a pas la même attitude vis-à-vis des entrepreneurs.
NICOLAS BEYTOUT : Par exemple, vis-à-vis de ce gouvernement Raffarin, vous avez au début marqué pas mal d'impatience. Aujourd'hui, qu'est-ce qu'il se passe ? Vous avez la même attitude ? Toujours à demander plus que le gouvernement ne veut délivrer ou ne veut faire, ne serait-ce qu'en rythme Ou est-ce que vous avez la conscience aujourd'hui que les marges de manuvre par exemple sont suffisamment faibles pour limiter le pas de al réforme ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non, nous avons été très impatients au départ parce que nous avons eu le sentiment que le gouvernement n'allait pas agir. Et donc, nous avons, dans le domaine économique et social qui est le nôtre, qu'il était sur la priorité de al sécurité et qu'il n'allait pas vraiment entamer les réformes nécessaires dans notre domaine. On 'la dit, on l'a dit fort, ça a surpris et puis ensuite, nous avons eu un débat. Est-ce que nous allons maintenir une attitude pressante, un peu d'opposition ?
NICOLAS BEYTOUT : Presque agressive parfois
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oui, enfin, les entrepreneurs, ils disent ce qu'ils ont à dire ! Ou est-ce que, au contraire, nous allons donner au gouvernement qui nous dit qu'il veut arriver à de vraies réformes, mais selon sa méthode, à son rythme ? Alors, nous lui avons finalement dit : écoutez, prenez en effet la manière et le rythme qui est le vôtre, c'est votre responsabilité politique. Et nous dirons en fin d'année 2003 est-ce que vous avez réussi ou pas réussi et nous calerons à ce moment-là notre attitude sur le résultat.
NICOLAS BEYTOUT : Alors, en faisant cela, évidemment, vous prenez le risque de décevoir les plus revendicatifs parmi vous troupes, en tout cas il en faut, parmi les patrons. Il y en a un certain nombre qui considèrent que vous n'allez pas assez loin. Comment est-ce qu'il faut régler al bonne attitude du MEDEF vis-à-vis, disons, de l'ensemble des réformes ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oh, je pense qu'il faut bien entendu préconiser la réforme, proposer la réforme, proposer nos solutions et puis ensuite faire notre affaire de ce que le milieu entrepreneurial s'unit derrière le MEDEF. C'est le cas. Mais nous avons en effet des entrepreneurs qui n'appartiennent pas au MEDEF et qui sont beaucoup plus impatients que nous. Mais nous avons su contenir dans le milieu entrepreneurial l'extrémisme
NICOLAS BEYTOUT : Donc il faut savoir être quoi ? Une forme de juste milieu entre les patrons qui souhaitent réformer très vite et ceux qui ont une vraie conscience des marges de manuvre ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Il faut être très à l'écoute du terrain, ce que nous sommes, d'ailleurs nous étions encore à Tours hier, nous sommes sur le terrain en permanence, et là, il faut entendre, je dirais, la voix majoritaire, la voix L'on identifie très bien, si vous voulez, les isolés, malgré tout, dans l'expression d'une revendication plus forte de celle que nous avons. Et nous avons l'impression d'être aujourd'hui parfaitement adaptés au fortissimo d'ailleurs que demande le monde de l'entreprise dans la réforme aujourd'hui.
NICOLAS BEYTOUT : Quand on regarde, quand on entend ce que vous dites sur les retraites, on a l'impression que vous poussez la demande, la revendication j'allais dire, assez loin. Quand vous dites qu'il faut augmenter de cinq ans, certains au patronat disent plus que cinq ans, le nombre des annuités de cotisation, vous êtes plutôt au-delà de ce que la musique dominante dit en France.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oui, encore que, si vous voulez, on traduit d'habitude nos propose de façon tronquée et je n'en veux à personne, mais quand nous disons cinq ans, c'est cinq ans sur quarante ans. C'est-à-dire que entre maintenant et 2040
NICOLAS BEYTOUT : Progressivement
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Par année successive, etc. Donc on peut toujours présenter les choses de telle manière que la solution paraisse abusive. En fait, nous sommes, nous, dans le raisonnable. Il y a un allongement de durée de al vie, les rapports entre la population active et la population retraitée commandent qu'on allonge r aisonnablement la durée de cotisation pour avoir la retraite pleine. Tout le monde le sait. On y viendra. C'est inévitable.
NICOLAS BEYTOUT : Quand on voit ce qui s'est passé à EDF avec la CGT qui, au fond, a rejeté majoritairement cet accord, est-ce que vous avez le sentiment que, aujourd'hui, c'est plus difficile de travailler avec un certain nombre de syndicats ? Il y a les réformateurs et il y a les autres. La CGT, on pouvait espérer qu'elle rejoindrait de temps en temps le camp des réformateurs. Aujourd'hui, c'est un rêve ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ecoutez, on n'y a pas compris grand chose. Trois syndicats ont dit oui, le quatrième voulait dire oui, sa base ou une base a dit non, et le gouvernement a dit : moi je lis les textes, je regarde d'ailleurs les propositions des partenaires sociaux pour la réforme, trois syndicats sur cinq qui disent oui à quelque chose.
NICOLAS BEYTOUT : Et là-dessus vous lui donnez raison, sans attendre la fin 2003.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Nous lui donnons raison parce qu'il faut en effet dans le domaine social avoir des règles du jeu.
NICOLAS BEYTOUT : Ernest-Antoine Seillière, merci.
(Source http://www.medef.fr, le 22 janvier 2003)