Texte intégral
Une communauté de valeurs, pionnière de la diversité culturelle
La France est la gardienne d'un temple dont l'accès est devenu universel. La République démocratique du Congo et l'Algérie compteront bientôt plus de Francophones qu'elle, et nous n'avons pas encore pris l'entière mesure de cette évolution pourtant riche de promesses et de vitalité. La Francophonie peut nous y aider.
S'il est légitime que nous nous arrêtions, une fois par an, pour célébrer notre langue et les liens très étroits qui nous unissent à ces 120 millions de Francophones hors les murs, la Francophonie devrait, pour nous, Français, être une préoccupation de tous les jours. Parce que cet attachement que d'autres éprouvent pour notre langue nous engage, parce que cette diversité dont elle est porteuse façonne notre vie quotidienne et notre imaginaire, la Francophonie nous crée des obligations en même temps qu'elle nous ouvre des horizons.
Il aura fallu que le monde traverse une crise où des enjeux de civilisation sont en cause pour que l'on prenne vraiment conscience au moment même où ces valeurs semblent battues en brèche que la reconnaissance de la diversité est le meilleur fondement de la paix et du développement.
Si la France proclame son exigence d'un monde plus juste et plus équilibré à la tribune des Nations unies, c'est aussi parce qu'elle a fait l'expérience concluante d'un dialogue des cultures concret et fructueux dans le cadre de la Francophonie.
Dans le débat sur la diversité culturelle, la Francophonie a non seulement une valeur d'exemplarité mais elle peut surtout faire entendre une voix singulière. Conçue comme une communauté de valeurs, elle n'est au service d'aucune idéologie et propose seulement la vision maîtrisée d'un avenir partagé entre les Nations. Elle a toujours été en phase avec la conception d'un monde ouvert que nous défendons. S'étant constituée à partir d'un dénominateur linguistique et culturel, la première, elle a forgé le concept d'exception culturelle. Avant toutes les autres organisations internationales, elle a eu l'intuition que la généralisation d'un prêt-à-porter culturel menaçait la richesse des expressions artistiques et intellectuelles du monde et nourrirait des réactions identitaires violentes.
C'est tout le sens du combat que la Francophonie mène pour la diversité culturelle. Le Sommet de ses 56 chefs d'Etat et de gouvernement, à Beyrouth, au mois d'octobre dernier, l'a affirmé avec force : la Francophonie rejette la perspective d'un ordre impérial, gouverné par une économie dominante et une culture uniforme et standardisée, imposant une seule langue de communication internationale. C'est au nom de cette même cause qu'elle s'efforce aujourd'hui de rassembler, bien au-delà de l'espace francophone, une vaste coalition d'Etats issus de toutes les aires linguistiques pour faire triompher la conception d'un monde multiple et tolérant, respectueux des cultures, des croyances et des langues qui, toutes, constituent le vrai patrimoine de l'humanité. Avec la France, la Francophonie souhaite que l'UNESCO élabore une convention internationale sur la diversité culturelle qui donne à chaque Etat les moyens de définir librement sa politique culturelle et les instruments qui y concourent.
Bien sûr, la Francophonie connaît encore des zones d'ombre. Parmi les 49 pays les moins avancés, 25 sont membres de l'Organisation internationale de la Francophonie. La situation politique reste préoccupante chez plusieurs de nos partenaires et l'actualité ivoirienne et centrafricaine conforte cette impression. Est-ce une raison suffisante pour conclure à l'inutilité de la Francophonie ?
Non, bien au contraire. L'Organisation internationale de la Francophonie joue un rôle irremplaçable dans la prévention et le règlement pacifique des conflits, en relation avec les autres organisations internationales compétentes. Cette affirmation du primat du droit est la manifestation de notre attachement à la diversité culturelle. La confrontation des points de vue suppose, pour être efficace et déboucher sur des solutions consensuelles, de se tenir dans des cadres institutionnels et d'être régie par des règles intangibles : les organisations internationales constituent les enceintes naturelles de cette expression pluraliste et la Francophonie tient son rang dans ce système. La proximité de ses membres, les relations de confiance qui les unissent permettent d'entamer un dialogue fécond et de surmonter des clivages auxquels n'échappent pas d'autres organisations internationales.
Enfin, la Francophonie ne saurait se contenter de paroles. Elle est d'abord un mode d'action. Son affirmation de la diversité se décline en programmes. Elle consacre près de 60 % de ses interventions à la culture, la langue et l'éducation. Le cinéma, le théâtre, la danse et les arts plastiques des pays francophones connaissent une création foisonnante. Les talents sont légions mais ils ne sont pas toujours reconnus à leur juste valeur. De ce point de vue, il existe une différence de traitement entre les artistes du Nord et ceux du Sud que la Francophonie peut aider à combler. Si la réputation de Manu Dibango, Lokua Kanza et Khaled n'est plus à faire, des cinéastes aussi talentueux que le Burkinabè Idrissa Ouédraogo ou le Mauritanien Abderrahmane Sissako, dont le superbe "Heremakono" (En attendant le bonheur) vient d'être distingué, n'existeraient pas sans soutien.
Parce que la langue est l'expression la plus achevée de la culture, la Francophonie promeut avec la même détermination le français en Europe et en Afrique où se joue son avenir. Aujourd'hui même s'achèvent à Libreville les Etats généraux sur l'enseignement de la langue française en Afrique en présence de plus de 600 participants, professeurs de français dans leur grande majorité. Accès au savoir, égalité des chances, démocratie : le français est porteur de valeurs qui sont plus actuelles que jamais. Car comme le disait déjà le général de Gaulle : "Notre langue et notre culture constituent un grand nombre d'hommes hors de France et hors du Canada un foyer capital de valeurs, de progrès, de contacts et c'est tout à la fois notre avantage et notre devoir de la pratiquer et de la répandre".
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 mars 2003)
La France est la gardienne d'un temple dont l'accès est devenu universel. La République démocratique du Congo et l'Algérie compteront bientôt plus de Francophones qu'elle, et nous n'avons pas encore pris l'entière mesure de cette évolution pourtant riche de promesses et de vitalité. La Francophonie peut nous y aider.
S'il est légitime que nous nous arrêtions, une fois par an, pour célébrer notre langue et les liens très étroits qui nous unissent à ces 120 millions de Francophones hors les murs, la Francophonie devrait, pour nous, Français, être une préoccupation de tous les jours. Parce que cet attachement que d'autres éprouvent pour notre langue nous engage, parce que cette diversité dont elle est porteuse façonne notre vie quotidienne et notre imaginaire, la Francophonie nous crée des obligations en même temps qu'elle nous ouvre des horizons.
Il aura fallu que le monde traverse une crise où des enjeux de civilisation sont en cause pour que l'on prenne vraiment conscience au moment même où ces valeurs semblent battues en brèche que la reconnaissance de la diversité est le meilleur fondement de la paix et du développement.
Si la France proclame son exigence d'un monde plus juste et plus équilibré à la tribune des Nations unies, c'est aussi parce qu'elle a fait l'expérience concluante d'un dialogue des cultures concret et fructueux dans le cadre de la Francophonie.
Dans le débat sur la diversité culturelle, la Francophonie a non seulement une valeur d'exemplarité mais elle peut surtout faire entendre une voix singulière. Conçue comme une communauté de valeurs, elle n'est au service d'aucune idéologie et propose seulement la vision maîtrisée d'un avenir partagé entre les Nations. Elle a toujours été en phase avec la conception d'un monde ouvert que nous défendons. S'étant constituée à partir d'un dénominateur linguistique et culturel, la première, elle a forgé le concept d'exception culturelle. Avant toutes les autres organisations internationales, elle a eu l'intuition que la généralisation d'un prêt-à-porter culturel menaçait la richesse des expressions artistiques et intellectuelles du monde et nourrirait des réactions identitaires violentes.
C'est tout le sens du combat que la Francophonie mène pour la diversité culturelle. Le Sommet de ses 56 chefs d'Etat et de gouvernement, à Beyrouth, au mois d'octobre dernier, l'a affirmé avec force : la Francophonie rejette la perspective d'un ordre impérial, gouverné par une économie dominante et une culture uniforme et standardisée, imposant une seule langue de communication internationale. C'est au nom de cette même cause qu'elle s'efforce aujourd'hui de rassembler, bien au-delà de l'espace francophone, une vaste coalition d'Etats issus de toutes les aires linguistiques pour faire triompher la conception d'un monde multiple et tolérant, respectueux des cultures, des croyances et des langues qui, toutes, constituent le vrai patrimoine de l'humanité. Avec la France, la Francophonie souhaite que l'UNESCO élabore une convention internationale sur la diversité culturelle qui donne à chaque Etat les moyens de définir librement sa politique culturelle et les instruments qui y concourent.
Bien sûr, la Francophonie connaît encore des zones d'ombre. Parmi les 49 pays les moins avancés, 25 sont membres de l'Organisation internationale de la Francophonie. La situation politique reste préoccupante chez plusieurs de nos partenaires et l'actualité ivoirienne et centrafricaine conforte cette impression. Est-ce une raison suffisante pour conclure à l'inutilité de la Francophonie ?
Non, bien au contraire. L'Organisation internationale de la Francophonie joue un rôle irremplaçable dans la prévention et le règlement pacifique des conflits, en relation avec les autres organisations internationales compétentes. Cette affirmation du primat du droit est la manifestation de notre attachement à la diversité culturelle. La confrontation des points de vue suppose, pour être efficace et déboucher sur des solutions consensuelles, de se tenir dans des cadres institutionnels et d'être régie par des règles intangibles : les organisations internationales constituent les enceintes naturelles de cette expression pluraliste et la Francophonie tient son rang dans ce système. La proximité de ses membres, les relations de confiance qui les unissent permettent d'entamer un dialogue fécond et de surmonter des clivages auxquels n'échappent pas d'autres organisations internationales.
Enfin, la Francophonie ne saurait se contenter de paroles. Elle est d'abord un mode d'action. Son affirmation de la diversité se décline en programmes. Elle consacre près de 60 % de ses interventions à la culture, la langue et l'éducation. Le cinéma, le théâtre, la danse et les arts plastiques des pays francophones connaissent une création foisonnante. Les talents sont légions mais ils ne sont pas toujours reconnus à leur juste valeur. De ce point de vue, il existe une différence de traitement entre les artistes du Nord et ceux du Sud que la Francophonie peut aider à combler. Si la réputation de Manu Dibango, Lokua Kanza et Khaled n'est plus à faire, des cinéastes aussi talentueux que le Burkinabè Idrissa Ouédraogo ou le Mauritanien Abderrahmane Sissako, dont le superbe "Heremakono" (En attendant le bonheur) vient d'être distingué, n'existeraient pas sans soutien.
Parce que la langue est l'expression la plus achevée de la culture, la Francophonie promeut avec la même détermination le français en Europe et en Afrique où se joue son avenir. Aujourd'hui même s'achèvent à Libreville les Etats généraux sur l'enseignement de la langue française en Afrique en présence de plus de 600 participants, professeurs de français dans leur grande majorité. Accès au savoir, égalité des chances, démocratie : le français est porteur de valeurs qui sont plus actuelles que jamais. Car comme le disait déjà le général de Gaulle : "Notre langue et notre culture constituent un grand nombre d'hommes hors de France et hors du Canada un foyer capital de valeurs, de progrès, de contacts et c'est tout à la fois notre avantage et notre devoir de la pratiquer et de la répandre".
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 mars 2003)