Texte intégral
E. Martichoux-. P. Douste-Blazy, vous êtes également médecin, ancien ministre de la Santé. La canicule n'est évidemment pas imputable au Gouvernement, tout le monde sera d'accord, mais pour autant, le Gouvernement semble bien avoir mis du temps à réagir aux conséquences dramatiques de cette canicule - les centrales nucléaires surchauffées, des paysans qui souffrent et des hôpitaux qui sont débordés. Pourquoi cette réaction tardive ?
- "Comment pouvez-vous dire que si les agriculteurs souffrent, si les centrales nucléaires surchauffent, c'est dû au Gouvernement ! Ou alors si les urgences augmentent ! Non. Tout simplement, nous sommes devant un problème de catastrophe naturelle, de drame naturel, puisque les records de chaleur, de canicule sont battus, ceux de 1976 et de 1947. Et donc, nous avons, permettez-moi de parler plutôt en médecin, nous sommes devant une augmentation très importante du nombre d'urgences dans les hôpitaux. Prenez Toulouse, par exemple, ou si on prend la période du 1er juin au 11 août, avant-hier, 2003, et si on la compare à la même période 2002, on a eu 41 % de plus de personnes âgées de plus de 80 ans."
Mais, encore une fois, il n'est pas question de dire que c'est la faute du Gouvernement...
- "Ah bon."
... il est question de dire que, le Gouvernement a tardé à réagir, ce qui est différent, aux conséquences de cette catastrophe naturelle.
- "J'ai travaillé pendant 17 ans dans des services d'urgences. Il m'est donc arrivé de voir de temps en temps des pics et aussi des baisses de la fréquentation des hôpitaux. Ce n'est pas le ministre de la Santé de l'époque, je ne sais pas s'il était à droite ou à gauche, ça dépendait, tous les quatre ans ou tous les cinq ans, qui me faisait faire mon travail. Je faisais le travail en fonction des gens qui arrivaient à l'hôpital. Et donc, là, ce qui est important, aujourd'hui, si nous voulons être constructifs aujourd'hui, à la radio, à la télévision, dans les journaux, c'est de dire la chose suivante : il y a, aujourd'hui, lorsqu'il y a des périodes aussi importantes au plan de la chaleur, les nourrissons et il y a les personnes âgées. Aux deux extrêmes de la vie nous sommes très fragilisés. C'est la raison pour laquelle, aujourd'hui... D'abord, pas de panique, tous les gens qui ont besoin des hôpitaux peuvent aller dans les hôpitaux. Les personnes âgées qui ont besoin aujourd'hui des hôpitaux c'est qui ? Ce ne sont pas des gens qui sont en bonne santé, mais ce sont des gens qui sont insuffisants cardiaques ou insuffisants respiratoires chroniques, et qui, parce que la chaleur est très élevée, font ce que l'on appelle "une déshydratation", et donc ils dé-compensent leur maladie antérieure. C'est parce qu'ils étaient déjà malades au plan chronique, qu'ils deviennent malades au plan aigu. C'est la raison pour laquelle il faut, bien sûr, les hospitaliser. Il n'y a pas une personne qui est insuffisante respiratoire aiguë ou insuffisant cardiaque qui n'a pas une place à l'hôpital aujourd'hui en France."
Mais les personnes qui vont à l'hôpital, vous les connaissez bien, en effet, les patients, les familles des patients, qui voient leurs parents, sur une brancard, dans des salles surchauffées, et qui tardent parfois des heures entières à être soignés, est-ce qu'il n'y a pas un peu de désinvolture à dire simplement : mais non, il n'y a pas de problème d'anticipation ; mais non, il n'y a pas eu de problème de gestion de la crise ; mais non, tout va bien. C'est un peu l'impression que le discours donne...
- "Quand des gens sont à l'hôpital, souffrent et parfois meurent, lorsqu'on s'aperçoit qu'il va y avoir une surmortalité, comme toujours quand il y a des catastrophes naturelles - et malheureusement, je fais partie de ceux qui ont été maire à un moment où il y a eu une catastrophe industrielle dans ma ville -, je peux vous assurer que pendant une semaine, il y a eu, bien évidemment, énormément de personnes qui sont arrivées dans les hôpitaux. Il fallait bien faire face. Il y a des moments en médecine où, devant des catastrophes, il faut faire face à une arrivée massive. Donc, les hôpitaux aujourd'hui, et je voudrais vraiment saluer le personnel hospitalier, public comme privé, qui travaille aujourd'hui, au moment où nous parlons, qui n'a pas passé la nuit à dormir mais à travailler, ils font face aujourd'hui. La question, c'est la prévention."
Mais ils dénoncent, encore une fois, - on va y revenir, la prévention c'est important -, mais ils dénoncent, vos anciens confrères, vous les entendez, cette gestion, je cite "scandaleuse" de la canicule par les autorités sanitaires, c'est quand même pas tout à fait la même tonalité.
- "Je vais vous dire - car on ne parle jamais mieux de ce que l'on connaît -, je suis président du conseil d'administration de l'hôpital de Toulouse, comme maire, comme tous les maires. Nous avons reçu une circulaire du ministre de la Santé, qui date du mois de juillet. Et M. Falco, le secrétaire d'Etat aux Personnes âgées, a envoyé une circulaire à toutes les préfectures, à toutes les directions départementales de l'Action sanitaire et sociale, et aux 10 000 maisons de retraite, privées comme publiques, demandant d'appliquer des règles exceptionnelles, de deux manières. Premièrement, la prévention, on va y venir, et surtout, la mise en place d'un système qui permet de différer les opérations, les interventions chirurgicales, qui étaient programmées. Et nous à Toulouse, par exemple, pourquoi arrive-t-on à faire face ? Aujourd'hui, nous avons encore des lits - évidemment il y en a de moins en moins-, mais des lits qui peuvent recevoir des personnes en insuffisance cardiaque, aiguë, ou en déshydratation, parce qu'il y a des patients auxquels nous avons téléphoné, parce que, par exemple, pour l'intervention d'un genou, d'une hanche, nous avons dit : on le fera en septembre, en octobre, vous pouvez attendre un mois."
On les a entendus, en effet. Mais à vous entendre, finalement, tout s'est bien passé, le Gouvernement a bien réagi, en temps et en heure, comme il le fallait, il n'y a pas de...
- "C'est pas le Gouvernement... Non, mais, si vous étiez hospitalière, vous verriez que ce n'est pas le Gouvernement. Ce sont les médecins hospitaliers. Vous ne pouvez pas refuser une personne qui est en insuffisance cardiaque ou respiratoire, mais vous la soignez, quelle que soit votre couleur. Alors, que des professionnels de santé, que des hospitaliers urgentistes, comme je l'ai été longtemps, demandent des moyens supplémentaires, c'est normal, c'est compréhensible et c'est sain."
C'est une absolue nécessité même...
- "Absolument, cela fait partie de notre métier. Mais que des responsables politiques profitent de drames et de catastrophes naturelles à des fins partisanes, est indigne d'une démocratie et ne peut qu'augmenter l'absentéisme lors des prochains scrutins."
Mais est-ce que cela exonère le Gouvernement de se poser des questions ? Est-ce que, sans aller jusqu'à la polémique partisane, la situation n'oblige pas à se poser des questions ?
- "Mais il faut se poser des questions et il va falloir tirer des leçons de cela. Parce que c'est la première fois que nous avons à faire face à une canicule comme cela. Il faut immédiatement, et c'est ce qu'a demandé d'ailleurs le ministre de la Santé, se servir de l'Institut de veille sanitaire qui permet de faire des études épidémiologiques descriptives. Cet institut, je le connais, puisqu'avec B. Kouchner, lui en 92, et moi en 93, c'est nous qui l'avons monté justement pour tirer les conséquences des drames que nous vivons sur le plan hospitalier, sur le plan de la santé publique en général. Notre pays était le seul à ne pas en être doté. Aujourd'hui, nos voisins - regardez l'Italie, regardez les Pays-Bas, regardez l'Espagne -, vous avez les mêmes problèmes dans les hôpitaux, avec les mêmes problèmes d'urgences qui sont en train de se saturer petit à petit. Reprenez l'exemple de Toulouse, 41% de plus de personnes âgées. Donc d'un côté, on assiste à une augmentation de l'espérance de vie considérable avec de plus en plus de personnes de plus de 80 ans, et, en même temps, on a un record historique de canicule avec déshydratation. Permettez-moi simplement de dire que l'idéal, aujourd'hui, c'est surtout de dire que si on a besoin de l'hôpital, on peut avoir besoin de l'hôpital et on peut y aller, et on sera soigné et surtout on peut éviter d'y aller tout simplement en faisant boire des litres d'eau à des personnes âgées ou à des nourrissons."
Mais on le dit un peu tard. Vous parliez de prévention, pourquoi on ne l'a pas dit avant ? Pourquoi est-ce qu'on a l'impression que les autorités politiques se sont mobilisées, lundi, quand l'opposition a élevé la voix ? Qu'est-ce qu'il aurait fallu faire ?
- "Parce que vous pensez franchement, que c'est parce qu l'opposition a levé la voix qu'on a ouvert les hôpitaux aux Français ?"
C'est quand l'opposition a fait entendre sa voix que l'on a entendu les responsables politiques dire que les mesures d'urgence étaient prises.
- "Juste un mot qui me paraît excessivement important. Sur le plan épidémiologique, sur le plan de la santé publique, sur le plan de l'éducation pour la santé, notre pays a besoin de faire des progrès. Et il me semble que ce que nous avions proposer, il y a une dizaine d'années, un certain nombre de médecins hospitaliers, il faudrait que dans la télévision publique, par exemple, il y ait toutes les trois, toutes les quatre heures des petites bulles à côté de ces publicités, de trente secondes, de quarante secondes, pour donner des conseils sur la santé publique. Là, c'est la canicule, mais cela peut être aussi des problèmes d'hypertension artérielle, de diabète, de cholestérol, tout ce qui est préventif n'est pas suffisamment développé dans notre pays."
C'est une proposition que vous allez faire ?
- "C'est une proposition que je fais depuis longtemps, je pense qu'il est tout à fait normal lorsque l'on regarde les budgets des télévisions publiques, de pouvoir donner quelques minutes par jour, des conseils à la population parce que je crois que la médecine est aujourd'hui, individuelle, c'est très bien, mais il faut que demain, elle devienne préventive et communautaire."
La rentrée officielle politique est la semaine prochaine, avec un conseil des ministres, le 21 août, on attend les derniers arbitrages budgétaires. Il nous reste quelques secondes pour évoquer le sujet de la baisse des impôts, la priorité de J. Chirac. Dans quelles proportions significatives souhaitez-vous qu'elle ait lieu ?
- "Comme vous le savez, on vit une période de croissance internationale basse, donc il faut essayer d'avoir une croissance française assez élevée. La seule solution, c'est que la consommation augmente, que vous puissiez, comme moi, dépenser un peu plus d'argent. Pour que vous puissiez dépenser un peu plus d'argent, il vous en faut un peu plus dans les poches, et pour en avoir un peu plus dans les poches, il faut donner un peu moins d'argent aux impôts. Voilà l'idée du Gouvernement, aujourd'hui."
De 1 à 3%, la baisse ?
- "De 1 à 3 %, je crois que c'est le Premier ministre qui va choisir cette baisse des impôts. Ce qui est important, c'est le signe, nous avions dit que nous ferions une baisse des impôts, même si la croissance est molle, je dirais, est basse, parce que sur le plan international, c'est comme cela, je viens de le dire. La baisse des impôts continuera et la baisse des charges sociales sur les bas salaires, parce que tant que vous n'augmenterez pas les salaires directs, vous n'augmenterez pas la consommation de votre pays et vous ne donnerez pas aux gens qui travaillent, plus d'avantages que ceux qui ne travaillent pas."
Mais 1%, cela vous semblerait symbolique, presque inutile ?
- "Ce n'est jamais inutile quand on voit le nombre de personnes qui, au pouvoir, augmentaient les impôts jusqu'à maintenant. Déjà les baisses de 1%, c'est déjà bien, mais c'est le Premier ministre qui décidera, je pense, après en avoir parlé au président de la République qui, lui, a déjà fait connaître son avis."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 13 août 2003)
- "Comment pouvez-vous dire que si les agriculteurs souffrent, si les centrales nucléaires surchauffent, c'est dû au Gouvernement ! Ou alors si les urgences augmentent ! Non. Tout simplement, nous sommes devant un problème de catastrophe naturelle, de drame naturel, puisque les records de chaleur, de canicule sont battus, ceux de 1976 et de 1947. Et donc, nous avons, permettez-moi de parler plutôt en médecin, nous sommes devant une augmentation très importante du nombre d'urgences dans les hôpitaux. Prenez Toulouse, par exemple, ou si on prend la période du 1er juin au 11 août, avant-hier, 2003, et si on la compare à la même période 2002, on a eu 41 % de plus de personnes âgées de plus de 80 ans."
Mais, encore une fois, il n'est pas question de dire que c'est la faute du Gouvernement...
- "Ah bon."
... il est question de dire que, le Gouvernement a tardé à réagir, ce qui est différent, aux conséquences de cette catastrophe naturelle.
- "J'ai travaillé pendant 17 ans dans des services d'urgences. Il m'est donc arrivé de voir de temps en temps des pics et aussi des baisses de la fréquentation des hôpitaux. Ce n'est pas le ministre de la Santé de l'époque, je ne sais pas s'il était à droite ou à gauche, ça dépendait, tous les quatre ans ou tous les cinq ans, qui me faisait faire mon travail. Je faisais le travail en fonction des gens qui arrivaient à l'hôpital. Et donc, là, ce qui est important, aujourd'hui, si nous voulons être constructifs aujourd'hui, à la radio, à la télévision, dans les journaux, c'est de dire la chose suivante : il y a, aujourd'hui, lorsqu'il y a des périodes aussi importantes au plan de la chaleur, les nourrissons et il y a les personnes âgées. Aux deux extrêmes de la vie nous sommes très fragilisés. C'est la raison pour laquelle, aujourd'hui... D'abord, pas de panique, tous les gens qui ont besoin des hôpitaux peuvent aller dans les hôpitaux. Les personnes âgées qui ont besoin aujourd'hui des hôpitaux c'est qui ? Ce ne sont pas des gens qui sont en bonne santé, mais ce sont des gens qui sont insuffisants cardiaques ou insuffisants respiratoires chroniques, et qui, parce que la chaleur est très élevée, font ce que l'on appelle "une déshydratation", et donc ils dé-compensent leur maladie antérieure. C'est parce qu'ils étaient déjà malades au plan chronique, qu'ils deviennent malades au plan aigu. C'est la raison pour laquelle il faut, bien sûr, les hospitaliser. Il n'y a pas une personne qui est insuffisante respiratoire aiguë ou insuffisant cardiaque qui n'a pas une place à l'hôpital aujourd'hui en France."
Mais les personnes qui vont à l'hôpital, vous les connaissez bien, en effet, les patients, les familles des patients, qui voient leurs parents, sur une brancard, dans des salles surchauffées, et qui tardent parfois des heures entières à être soignés, est-ce qu'il n'y a pas un peu de désinvolture à dire simplement : mais non, il n'y a pas de problème d'anticipation ; mais non, il n'y a pas eu de problème de gestion de la crise ; mais non, tout va bien. C'est un peu l'impression que le discours donne...
- "Quand des gens sont à l'hôpital, souffrent et parfois meurent, lorsqu'on s'aperçoit qu'il va y avoir une surmortalité, comme toujours quand il y a des catastrophes naturelles - et malheureusement, je fais partie de ceux qui ont été maire à un moment où il y a eu une catastrophe industrielle dans ma ville -, je peux vous assurer que pendant une semaine, il y a eu, bien évidemment, énormément de personnes qui sont arrivées dans les hôpitaux. Il fallait bien faire face. Il y a des moments en médecine où, devant des catastrophes, il faut faire face à une arrivée massive. Donc, les hôpitaux aujourd'hui, et je voudrais vraiment saluer le personnel hospitalier, public comme privé, qui travaille aujourd'hui, au moment où nous parlons, qui n'a pas passé la nuit à dormir mais à travailler, ils font face aujourd'hui. La question, c'est la prévention."
Mais ils dénoncent, encore une fois, - on va y revenir, la prévention c'est important -, mais ils dénoncent, vos anciens confrères, vous les entendez, cette gestion, je cite "scandaleuse" de la canicule par les autorités sanitaires, c'est quand même pas tout à fait la même tonalité.
- "Je vais vous dire - car on ne parle jamais mieux de ce que l'on connaît -, je suis président du conseil d'administration de l'hôpital de Toulouse, comme maire, comme tous les maires. Nous avons reçu une circulaire du ministre de la Santé, qui date du mois de juillet. Et M. Falco, le secrétaire d'Etat aux Personnes âgées, a envoyé une circulaire à toutes les préfectures, à toutes les directions départementales de l'Action sanitaire et sociale, et aux 10 000 maisons de retraite, privées comme publiques, demandant d'appliquer des règles exceptionnelles, de deux manières. Premièrement, la prévention, on va y venir, et surtout, la mise en place d'un système qui permet de différer les opérations, les interventions chirurgicales, qui étaient programmées. Et nous à Toulouse, par exemple, pourquoi arrive-t-on à faire face ? Aujourd'hui, nous avons encore des lits - évidemment il y en a de moins en moins-, mais des lits qui peuvent recevoir des personnes en insuffisance cardiaque, aiguë, ou en déshydratation, parce qu'il y a des patients auxquels nous avons téléphoné, parce que, par exemple, pour l'intervention d'un genou, d'une hanche, nous avons dit : on le fera en septembre, en octobre, vous pouvez attendre un mois."
On les a entendus, en effet. Mais à vous entendre, finalement, tout s'est bien passé, le Gouvernement a bien réagi, en temps et en heure, comme il le fallait, il n'y a pas de...
- "C'est pas le Gouvernement... Non, mais, si vous étiez hospitalière, vous verriez que ce n'est pas le Gouvernement. Ce sont les médecins hospitaliers. Vous ne pouvez pas refuser une personne qui est en insuffisance cardiaque ou respiratoire, mais vous la soignez, quelle que soit votre couleur. Alors, que des professionnels de santé, que des hospitaliers urgentistes, comme je l'ai été longtemps, demandent des moyens supplémentaires, c'est normal, c'est compréhensible et c'est sain."
C'est une absolue nécessité même...
- "Absolument, cela fait partie de notre métier. Mais que des responsables politiques profitent de drames et de catastrophes naturelles à des fins partisanes, est indigne d'une démocratie et ne peut qu'augmenter l'absentéisme lors des prochains scrutins."
Mais est-ce que cela exonère le Gouvernement de se poser des questions ? Est-ce que, sans aller jusqu'à la polémique partisane, la situation n'oblige pas à se poser des questions ?
- "Mais il faut se poser des questions et il va falloir tirer des leçons de cela. Parce que c'est la première fois que nous avons à faire face à une canicule comme cela. Il faut immédiatement, et c'est ce qu'a demandé d'ailleurs le ministre de la Santé, se servir de l'Institut de veille sanitaire qui permet de faire des études épidémiologiques descriptives. Cet institut, je le connais, puisqu'avec B. Kouchner, lui en 92, et moi en 93, c'est nous qui l'avons monté justement pour tirer les conséquences des drames que nous vivons sur le plan hospitalier, sur le plan de la santé publique en général. Notre pays était le seul à ne pas en être doté. Aujourd'hui, nos voisins - regardez l'Italie, regardez les Pays-Bas, regardez l'Espagne -, vous avez les mêmes problèmes dans les hôpitaux, avec les mêmes problèmes d'urgences qui sont en train de se saturer petit à petit. Reprenez l'exemple de Toulouse, 41% de plus de personnes âgées. Donc d'un côté, on assiste à une augmentation de l'espérance de vie considérable avec de plus en plus de personnes de plus de 80 ans, et, en même temps, on a un record historique de canicule avec déshydratation. Permettez-moi simplement de dire que l'idéal, aujourd'hui, c'est surtout de dire que si on a besoin de l'hôpital, on peut avoir besoin de l'hôpital et on peut y aller, et on sera soigné et surtout on peut éviter d'y aller tout simplement en faisant boire des litres d'eau à des personnes âgées ou à des nourrissons."
Mais on le dit un peu tard. Vous parliez de prévention, pourquoi on ne l'a pas dit avant ? Pourquoi est-ce qu'on a l'impression que les autorités politiques se sont mobilisées, lundi, quand l'opposition a élevé la voix ? Qu'est-ce qu'il aurait fallu faire ?
- "Parce que vous pensez franchement, que c'est parce qu l'opposition a levé la voix qu'on a ouvert les hôpitaux aux Français ?"
C'est quand l'opposition a fait entendre sa voix que l'on a entendu les responsables politiques dire que les mesures d'urgence étaient prises.
- "Juste un mot qui me paraît excessivement important. Sur le plan épidémiologique, sur le plan de la santé publique, sur le plan de l'éducation pour la santé, notre pays a besoin de faire des progrès. Et il me semble que ce que nous avions proposer, il y a une dizaine d'années, un certain nombre de médecins hospitaliers, il faudrait que dans la télévision publique, par exemple, il y ait toutes les trois, toutes les quatre heures des petites bulles à côté de ces publicités, de trente secondes, de quarante secondes, pour donner des conseils sur la santé publique. Là, c'est la canicule, mais cela peut être aussi des problèmes d'hypertension artérielle, de diabète, de cholestérol, tout ce qui est préventif n'est pas suffisamment développé dans notre pays."
C'est une proposition que vous allez faire ?
- "C'est une proposition que je fais depuis longtemps, je pense qu'il est tout à fait normal lorsque l'on regarde les budgets des télévisions publiques, de pouvoir donner quelques minutes par jour, des conseils à la population parce que je crois que la médecine est aujourd'hui, individuelle, c'est très bien, mais il faut que demain, elle devienne préventive et communautaire."
La rentrée officielle politique est la semaine prochaine, avec un conseil des ministres, le 21 août, on attend les derniers arbitrages budgétaires. Il nous reste quelques secondes pour évoquer le sujet de la baisse des impôts, la priorité de J. Chirac. Dans quelles proportions significatives souhaitez-vous qu'elle ait lieu ?
- "Comme vous le savez, on vit une période de croissance internationale basse, donc il faut essayer d'avoir une croissance française assez élevée. La seule solution, c'est que la consommation augmente, que vous puissiez, comme moi, dépenser un peu plus d'argent. Pour que vous puissiez dépenser un peu plus d'argent, il vous en faut un peu plus dans les poches, et pour en avoir un peu plus dans les poches, il faut donner un peu moins d'argent aux impôts. Voilà l'idée du Gouvernement, aujourd'hui."
De 1 à 3%, la baisse ?
- "De 1 à 3 %, je crois que c'est le Premier ministre qui va choisir cette baisse des impôts. Ce qui est important, c'est le signe, nous avions dit que nous ferions une baisse des impôts, même si la croissance est molle, je dirais, est basse, parce que sur le plan international, c'est comme cela, je viens de le dire. La baisse des impôts continuera et la baisse des charges sociales sur les bas salaires, parce que tant que vous n'augmenterez pas les salaires directs, vous n'augmenterez pas la consommation de votre pays et vous ne donnerez pas aux gens qui travaillent, plus d'avantages que ceux qui ne travaillent pas."
Mais 1%, cela vous semblerait symbolique, presque inutile ?
- "Ce n'est jamais inutile quand on voit le nombre de personnes qui, au pouvoir, augmentaient les impôts jusqu'à maintenant. Déjà les baisses de 1%, c'est déjà bien, mais c'est le Premier ministre qui décidera, je pense, après en avoir parlé au président de la République qui, lui, a déjà fait connaître son avis."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 13 août 2003)