Interview de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, dans "La Charente libre" du 18 septembre 2003, sur la mort de soldats français en mission de maintien de la paix en Côte d'Ivoire et les perspectives de réglement politique dans ce pays.

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Média : La Charente libre

Texte intégral

La Charente Libre :
Vous avez tenu à vous entretenir directement et discrètement avec les soldats du 1er RIMa dont les camarades ont été tués le 25 août...
Mme Alliot-Marie :
Je les ai soutenus moralement. Ces jeunes soldats vivent leur engagement au service de la paix en Côte d'Ivoire avec beaucoup de courage et d'humanité. Je voulais les rencontrer directement, les soutenir car ces évènements ont été très durs à vivre pour eux. Ils m'ont parlé avec foi et enthousiasme de leurs missions, de leur vie au quotidien, de leurs contacts avec les populations locales. Ils avaient des difficultés à parler de leurs camarades tombés au combat. C'est encore très douloureux pour eux. Pour autant, cela ne remet nullement en cause leur engagement au service de leur idéal et leur mission. Pour ces jeunes soldats, l'engagement est quelque chose de très fort. En s'engageant chacun accepte les risques et même la mort, mais sans doute plus facilement la perspective de la sienne que celle d'un copain. Aujourd'hui même (NDLR : lundi), ils repartaient en patrouille. Tous avaient envie de reprendre la mission.
L'opération Licorne est-elle appelée à durer longtemps ?
Cette opération a déjà permis - c'est tout à l'honneur de la France - d'éviter des massacres du type de ceux qu'a connus la région des Grands Lacs (Rwanda, Congo) ou le Libéria. Nous avons aussi évité que nos compatriotes, nombreux en Côte d'Ivoire, des Européens et même des lycéens américains présents au moment de la crise soient pris au milieu des combats. Nos militaires ont réussi à sortir des zones d'affrontements plus de 9 000 personnes. Aujourd'hui, nous contribuons au retour du dialogue, de la réconciliation et nous créons les conditions pour que la Côte d'Ivoire puisse préserver son unité territoriale et parvenir à organiser des élections présidentielles en 2005. Ce retour à la normale passe par un processus de plusieurs étapes, déterminé en commun par les Ivoiriens et la communauté internationale lors des accords de Marcoussis. Sur le terrain, la situation est stabilisée mais il reste beaucoup à faire. Ce qui est important, c'est qu'on avance et que l'on continue à retourner vers la normalité même si ponctuellement des difficultés demeurent. Cela suppose l'extension de la " zone de confiance ", la restauration des structures étatiques sur le terrain, la mise en pratique du regroupement, du désarmement et de la réintégration des soldats rebelles. Il faut aussi réaliser des réformes législatives, notamment celles du Code de la nationalité, afin que chaque Ivoirien puisse participer à des élections véritablement démocratiques. C'est le message que je suis venue transmettre au plus hautes autorités de Côte d'Ivoire.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 24 septembre 2003)