Texte intégral
Q - Dans l'une des thèses que vous développez dans votre ouvrage, on note que pour vous, la France est une puissance moyenne d'expression mondiale. N'y a-t-il pas dans ces termes, une notion de grandeur, qui pourrait être mal perçue hors de France ?
R - Au contraire, s'agissant de la France, je dis : ni "grande puissance à l'ancienne", ni "l'hyperpuissance" (il n'y en a qu'une, les Etats-Unis), ni "puissance moyenne" (sur les 189 pays, nous ne sommes pas "à la moyenne", ni même si nous nous comparons aux quelques trente à quarante puissances) mais nous sommes "puissance d'influence mondiale" comme le sont aussi, avec des caractéristiques un peu différentes que je développe dans le livre, l'Allemagne, la Grande-Bretagne, la Russie, le Japon, la Chine, et l'Inde un jour.
L'Europe, elle, quand elle aura trouvé sa forme finale sera une vraie grande puissance. Donc, pour la France aujourd'hui, pas de vaine nostalgie, ni d'affirmation de grandeur au sens prétentieux du terme, mais pas non plus d'auto dépréciation ou de sous estimation de soi-même. Je crois que ces termes décrivent la réalité actuelle et que pour la France ils incitent à l'optimisme.
Q - Pourquoi, dites-vous, s'agissant de l'Afrique noire, que nos relations doivent être placées sous le triptyque : fidélité, ouverture et adaptation ?
R - Fidélité : nous avons des liens historiques et humains avec l'Afrique. Nous voulons les maintenir alors même que tant de pays ne cherchent que des prétextes pour réduire la coopération avec l'Afrique.
Ouverture : sachons travailler avec toute l'Afrique et non plus seulement avec les Francophones, ce mouvement est d'ailleurs très engagé aujourd'hui. Dans l'intérêt de l'Afrique dépassons les rivalités anciennes avec les autres occidentaux, coopérons tous ensemble.
Adaptation : Adaptons nos formes de relations et de coopération à la nouvelle Afrique, plus globale, à sa démocratisation, à ses nouveaux leaders français et européens. Sachons être des partenaires, dans tous les sens du terme, de la nouvelle Afrique.
Q - On retrouve beaucoup le mot démocratie dans "les Cartes de la France". A cet effet, l'évolution et le contenu de la prochaine Constitution ivoirienne, est-elle, selon vous démocratique ?
R - Apporter l'aide la plus utile et la plus concrète possible aux processus de démocratisation en cours dans le monde est en effet une dimension constante de notre politique étrangère.
S'agissant de la prochaine constitution ivoirienne, le texte proposé aux suffrages des Ivoiriens le 23 juillet prochain a fait l'objet d'un débat sérieux entre les forces politiques, à la mesure des enjeux de ce scrutin pour la stabilité et le développement de la Côte d'Ivoire. Je note, à cet égard, que l'ensemble des partis a appelé à voter "oui" au référendum.
Concernant les dispositions de ce texte, et plus particulièrement celles relatives à la nationalité, nous souhaitons que les décisions qui seront prises lors dépôt des candidatures ne puissent pas être interprétées comme visant à priver les électeurs de leur libre choix. C'est bien à eux, en définitive, qu'il revient de décider en toute connaissance de cause et en dernier ressort car c'est l'expression même de la démocratie.
Q - Et dans le même sens, la notion de démocratie, ne souffre-t-elle pas d'être portée par l'Occident, au point de paraître comme quelque chose d'imposé de l'extérieur ?
R - Je suis conscient de ce risque et je veille à ne pas parler ni agir d'une façon qui alimenterait ce soupçon. Il est exact que beaucoup de forces en Occident cherchent à utiliser l'aspiration universelle à la démocratie pour renforcer leur emprise ou leur domination. D'un autre côté, on ne peut accepter que certains régimes utilisent cette réaction contre les ingérences extérieures comme un prétexte pour refuser toute démocratisation. La démocratisation a toujours été le fruit d'un processus multiforme, économique, social et politique et non d'une conversion brusque. Les facteurs externes ont toujours été déterminants même si les facteurs internes peuvent dans certaines conditions favoriser et faciliter. Chaque peuple a droit à la démocratie. Dans le respect des principes fondamentaux, chacun a le droit de la construire, selon son génie propre, comme le montre la diversité qui existe déjà parmi les pays démocratiques.
Q - A quoi sert le ministère des Affaires étrangères ? Peut-on avoir votre vision personnelle sur le rôle du Quai d'Orsay et les orientations de travail qui doivent être privilégiées ?
R - Le ministère des Affaires étrangères est une sorte de tour de contrôle de l'ensemble des relations internationales de la France, de coordonateur de toutes les négociations où se jouent notre avenir, nos intérêts, nos projets, une vigie pour prévenir ou traiter les crises. Dans un monde composé de 189 Etats et de multiples organisations internationales, où la globalisation entraîne d'immenses mutations, cette tâche est en plus en plus lourde. Mon rôle est de veiller à nos intérêts sur tous ces fronts, de moderniser sans relâche l'outil diplomatique de la France et de contribuer à réinventer notre politique étrangère.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 août 2000).
R - Au contraire, s'agissant de la France, je dis : ni "grande puissance à l'ancienne", ni "l'hyperpuissance" (il n'y en a qu'une, les Etats-Unis), ni "puissance moyenne" (sur les 189 pays, nous ne sommes pas "à la moyenne", ni même si nous nous comparons aux quelques trente à quarante puissances) mais nous sommes "puissance d'influence mondiale" comme le sont aussi, avec des caractéristiques un peu différentes que je développe dans le livre, l'Allemagne, la Grande-Bretagne, la Russie, le Japon, la Chine, et l'Inde un jour.
L'Europe, elle, quand elle aura trouvé sa forme finale sera une vraie grande puissance. Donc, pour la France aujourd'hui, pas de vaine nostalgie, ni d'affirmation de grandeur au sens prétentieux du terme, mais pas non plus d'auto dépréciation ou de sous estimation de soi-même. Je crois que ces termes décrivent la réalité actuelle et que pour la France ils incitent à l'optimisme.
Q - Pourquoi, dites-vous, s'agissant de l'Afrique noire, que nos relations doivent être placées sous le triptyque : fidélité, ouverture et adaptation ?
R - Fidélité : nous avons des liens historiques et humains avec l'Afrique. Nous voulons les maintenir alors même que tant de pays ne cherchent que des prétextes pour réduire la coopération avec l'Afrique.
Ouverture : sachons travailler avec toute l'Afrique et non plus seulement avec les Francophones, ce mouvement est d'ailleurs très engagé aujourd'hui. Dans l'intérêt de l'Afrique dépassons les rivalités anciennes avec les autres occidentaux, coopérons tous ensemble.
Adaptation : Adaptons nos formes de relations et de coopération à la nouvelle Afrique, plus globale, à sa démocratisation, à ses nouveaux leaders français et européens. Sachons être des partenaires, dans tous les sens du terme, de la nouvelle Afrique.
Q - On retrouve beaucoup le mot démocratie dans "les Cartes de la France". A cet effet, l'évolution et le contenu de la prochaine Constitution ivoirienne, est-elle, selon vous démocratique ?
R - Apporter l'aide la plus utile et la plus concrète possible aux processus de démocratisation en cours dans le monde est en effet une dimension constante de notre politique étrangère.
S'agissant de la prochaine constitution ivoirienne, le texte proposé aux suffrages des Ivoiriens le 23 juillet prochain a fait l'objet d'un débat sérieux entre les forces politiques, à la mesure des enjeux de ce scrutin pour la stabilité et le développement de la Côte d'Ivoire. Je note, à cet égard, que l'ensemble des partis a appelé à voter "oui" au référendum.
Concernant les dispositions de ce texte, et plus particulièrement celles relatives à la nationalité, nous souhaitons que les décisions qui seront prises lors dépôt des candidatures ne puissent pas être interprétées comme visant à priver les électeurs de leur libre choix. C'est bien à eux, en définitive, qu'il revient de décider en toute connaissance de cause et en dernier ressort car c'est l'expression même de la démocratie.
Q - Et dans le même sens, la notion de démocratie, ne souffre-t-elle pas d'être portée par l'Occident, au point de paraître comme quelque chose d'imposé de l'extérieur ?
R - Je suis conscient de ce risque et je veille à ne pas parler ni agir d'une façon qui alimenterait ce soupçon. Il est exact que beaucoup de forces en Occident cherchent à utiliser l'aspiration universelle à la démocratie pour renforcer leur emprise ou leur domination. D'un autre côté, on ne peut accepter que certains régimes utilisent cette réaction contre les ingérences extérieures comme un prétexte pour refuser toute démocratisation. La démocratisation a toujours été le fruit d'un processus multiforme, économique, social et politique et non d'une conversion brusque. Les facteurs externes ont toujours été déterminants même si les facteurs internes peuvent dans certaines conditions favoriser et faciliter. Chaque peuple a droit à la démocratie. Dans le respect des principes fondamentaux, chacun a le droit de la construire, selon son génie propre, comme le montre la diversité qui existe déjà parmi les pays démocratiques.
Q - A quoi sert le ministère des Affaires étrangères ? Peut-on avoir votre vision personnelle sur le rôle du Quai d'Orsay et les orientations de travail qui doivent être privilégiées ?
R - Le ministère des Affaires étrangères est une sorte de tour de contrôle de l'ensemble des relations internationales de la France, de coordonateur de toutes les négociations où se jouent notre avenir, nos intérêts, nos projets, une vigie pour prévenir ou traiter les crises. Dans un monde composé de 189 Etats et de multiples organisations internationales, où la globalisation entraîne d'immenses mutations, cette tâche est en plus en plus lourde. Mon rôle est de veiller à nos intérêts sur tous ces fronts, de moderniser sans relâche l'outil diplomatique de la France et de contribuer à réinventer notre politique étrangère.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 août 2000).