Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Qu'il me soit d'abord permis, en tant que Président d'Atlanpole, de vous remercier d'être venus si nombreux et souvent de si loin, ici, à Nantes, au cur du Grand Ouest Atlantique. Merci d'avoir fait de ce 7ème Carrefour Européen des Biotechnologies un véritable succès.
Succès par le nombre et la qualité des exposants venus de toute l'Europe mais aussi d'outre Atlantique et d'Asie.
Succès par la richesse des différentes conférences et ateliers qui vous ont été proposés. J'en profite d'ailleurs pour témoigner ma plus vive reconnaissance au Professeur Denis Escande et à son Comité Scientifique ainsi qu'à l'ensemble des orateurs, dont une majorité vient de l'étranger.
Succès enfin par la densité des rencontres initiées au sein de la convention d'affaires ou tout au long du "parcours carrière/jeunes diplômés".
Le Grand Ouest et Atlanpole ont, je crois, pleinement justifié la confiance que nous avait témoignée le Ministère de la Recherche en nous confiant, il y a 18 mois, l'organisation de la 7ème édition de cet événement.
Le succès de cette manifestation est à l'image du dynamisme de l'Ouest français dans le domaine des biotechnologies.
Un engagement qui s'est traduit depuis de nombreuses années par une politique volontariste et ambitieuse autour de 3 axes : le soutien constant au développement de la recherche, la volonté de donner aux entreprises innovantes les moyens de leur réussite et, enfin, la promotion internationale de la bio-région France Atlantique.
Dans ce cadre, nous nous sommes attachés à renforcer les coopérations interrégionales et internationales et à permettre l'émergence d'une véritable communauté scientifique dans ce domaine des sciences du vivant. Par un engagement financier important, nous nous sommes aussi efforcés de donner aux chercheurs et aux entrepreneurs les meilleures conditions de travail et d'action.
Les résultats sont là ! Aujourd'hui, ils témoignent de la pertinence de cette volonté : l'augmentation du nombre d'unités de recherche (et par-là même du nombre de chercheurs) a été considérable, l'Ouest français se situe aujourd'hui au 2ème rang national en nombre de création d'entreprises de biotechnologies, les compétences exprimées dans les différents réseaux de chercheurs ont permis la labellisation de la Génopôle Ouest et plus récemment de l'émergence du Cancéropôle
Les efforts que nous consacrons au développement des biotechnologies procèdent d'une conviction forte : celle que nous avons de leur caractère stratégique pour notre pays.
Stratégique car nous ne pouvons et ne voulons pas laisser nos industries pharmaceutiques dépendre uniquement de la Recherche-développement conduite outre-Atlantique ;
Stratégique car si nous n'offrons pas à nos jeunes diplômés, à nos chercheurs, à nos créateurs d'entreprise les conditions d'épanouissement de leurs talents et de leurs compétences, ils partiront vers des pays qui déjà leur tendent les bras.
Stratégique, enfin, car au-delà même de la seule amélioration de notre santé, les applications issues des sciences du vivant sont immenses et, pour une part d'ailleurs, encore inconnues aujourd'hui.
Qu'un pays, qu'un continent perde pied dans la course qui s'est engagée dans ce domaine des biotechnologies et il pourrait voir, demain, remis en cause certains des éléments de son indépendance, de sa compétitivité économique mais aussi de son rayonnement.
Au delà même du seul domaine des sciences du vivant, cette triple menace guette toutes les nations qui n'auraient pas, plus largement, placé la recherche au coeur de leur projet politique.
Depuis 40 ans, la France a bénéficié de la "certaine idée" que se faisait le Général de Gaulle de la recherche.
Cet effort sans précédent de développement de la recherche publique a permis la création d'organismes nationaux qui ont contribué au développement et au rayonnement de la France.
Dans le cadre de mes précédentes responsabilités ministérielles, j'ai pu mesurer le dévouement de nos chercheurs et le dynamisme de leurs laboratoires. J'en ai acquis la conviction que notre pays dispose d'un appareil scientifique dynamique, jouissant d'une réputation internationale incontestée.
Pour autant les mutations qui affectent la recherche scientifique nous obligent à nous adapter... La concurrence scientifique s'intensifie et devient mondiale : les Etats-Unis y consacrent des masses financières considérables, la Chine la promeut au rang de priorité nationale, les évolutions technologiques s'accélèrent...
Dès lors, l'avenir de la recherche française dépendra de notre capacité à l'adapter aux enjeux qui se posent à elle.
Soyons clairs : dans le domaine de la recherche plus que dans n'importe quel autre, nous ne pouvons nous satisfaire de l'immobilisme ou du statu quo. L'enjeu n'est pas de gérer, il est de réformer. Le retard que nous accumulerions aujourd'hui assombrirait les conditions de notre développement de demain.
Il ne s'agit pas tant ici de bouleverser notre organisation scientifique que de revisiter certaines de ses pratiques et d'engager les évolutions nécessaires dans le cadre d'un plan d'ensemble aux ambitions clairement affichées. C'est l'objectif du Premier ministre et de ma collègue Claudie HAIGNERE.
Notre action est tendue vers une triple évolution.
· L'évolution de notre modèle de recherche, tout d'abord.
Longtemps centralisé et hiérarchisé, il doit continuer de muter vers un modèle plus global associant les laboratoires, les entreprises, les universités et les collectivités locales. La comparaison, dans ce domaine, avec les États-Unis, le Japon ou l'Allemagne, illustre les progrès nécessaires pour atteindre le même niveau de coopération entre ces différents acteurs.
Pour ce faire, le Gouvernement s'est attaché à fonder notre politique de recherche sur une meilleure gouvernance des organismes et des établissements d'enseignement supérieur. Celle-ci oblige à une évaluation vigilante des performances en sachant intégrer, outre la qualité et la rigueur, l'efficacité et l'approche comparée. Elle appelle une stratégie plus collective.
La recherche, nous le savons, demeure encore trop cloisonnée et les échanges de savoirs et de connaissances insuffisants. Mobilisés autour des même objectifs, nous devons tout faire pour renforcer les coopérations et les relations qui existent entre les organismes publics de recherche.
Abattre les cloisons suppose également de mobiliser les entreprises françaises qui doivent s'engager dans des programmes de recherches ambitieux.
C'est une priorité et c'est dans ce sens que mes collègues Claudie HAIGNERE Nicole Fontaine se sont engagées, au travers notamment de trois mesures concernant les "business angels", les jeunes entreprises innovantes et le crédit impôt recherche.
Pour permettre à ceux que l'on nomme les "investisseurs providentiels" de se multiplier, il faut leur donner les moyens d'agir. Nous nous y attachons en les dotant d'un statut (baptisé "société unipersonnelle d'investissement à risque") et en les faisant bénéficier d'avantages fiscaux qui sont la contrepartie de leur prise de risque.
La deuxième mesure visera à aider les jeunes entreprises innovantes à passer le cap de la rentabilité. Pour cela, des exonérations de charges sur les personnels qui participent aux projets de recherche et d'autres exonérations fiscales pourront être proposées.
Enfin, le gouvernement a décidé de réformer le crédit impôt recherche (C.I.R.) en le faisant bénéficier, non seulement aux entreprises qui augmentent leurs dépenses de R D mais aussi de toutes celles qui les maintiennent à niveau. Une part du crédit impôt recherche sera donc assise sur le volume des dépenses et non plus seulement sur leur accroissement. Les taux ont été fixés à 45% pour l'accroissement et à 5% pour le volume. De cette manière, ce crédit pourra jouer un véritable rôle de soutien en période de basse conjoncture. En outre, l'accès au crédit impôt recherche sera facilité.
Ces mesures, attendues depuis longtemps, doivent contribuer à faire de la France l'un des pays les plus accueillants pour les projets de développement d'entreprises innovantes. Elles bénéficieront pour une large part aux entreprises de biotechnologies.
Un plan plus vaste vous a été annoncé hier par la Ministre de la Recherche. L'ambition du gouvernement est d'encourager la création de " biopoles " ayant une visibilité internationale. Par ailleurs, le plan biotechnologie s'articulera autour de trois axes thématiques : la santé, l'agroalimentaire et l'environnement dont les axes de recherche seront définis par un comité d'experts, après consultation de l'ensemble de la communauté scientifique.
Dans le cadre de la nécessaire adaptation de notre système, notre recherche doit pouvoir également se reposer sur de nouveaux leviers telle que la décentralisation. Elle représente une véritable chance pour la performance économique de nos territoires. Les collectivités territoriales, et en particulier les régions, doivent encore plus s'investir, notamment en aidant à la création et au développement de jeunes entreprises innovantes. J'ai pu mesurer ici dans les Pays de la Loire combien la mobilisation de tous les acteurs, publics et privés créait une dynamique au service de la recherche qu'elle soit fondamentale ou appliquée.
Mais, les praticiens de l'innovation que vous êtes le savent bien : nos politiques de recherche ne peuvent se concevoir uniquement sous le seul prisme national.
Pour peser pleinement dans un contexte de concurrence internationale, il est essentiel que nos systèmes de recherche tendent vers un modèle européen.
· C'est la deuxième évolution que le Gouvernement appelle de ses voeux
L'Europe de la recherche est une réalité. Elle est d'ailleurs à l'origine de quelques uns des plus grands succès de la coopération qui unit nos nations.
Pour nos concitoyens, l'Europe qui réussit s'appelle Airbus ou Ariane.
Ces succès nous montrent le chemin à suivre.
Fruits d'une ambition politique commune, ils ont permis de tisser les premiers liens entre les chercheurs européens.
Aujourd'hui, qu'ils soient à Munich ou à Milan, à Londres ou à Nantes, vos laboratoires travaillent ensemble au quotidien. Le développement des nouvelles technologies de l'information a permis de faciliter et d'accélérer encore ce phénomène.
Mais il faut accompagner cette coopération scientifique d'un nouvel élan politique.
Les Etats-Unis ont bien compris le lien qui unit le développement scientifique à la compétitivité économique et à l'emploi. En témoignent les 265 milliards de dollars qu'ils investissent à la recherche quand l'Europe n'en consacre pas la moitié !
La France et l'Allemagne se sont attelées, à l'occasion du récent conseil des ministres conjoint du 18 septembre dernier, à placer cette recherche au coeur de leurs priorités politiques.
Parmi les propositions adoptées lors de Conseil consacré à la relance de la croissance, il a été décidé un fort soutien à 10 grands projets de R D industrielle.
Un des ces 10 chantiers prioritaires concerne directement les biotechnologies.
Cette initiative doit préfigurer une action commune à l'Europe tout entière.
· Enfin, la troisième évolution est celle des esprits
La recherche est au coeur du progrès. Elle épouse le sort de notre condition humaine.
Pour autant, cette conviction n'est plus véritablement partagée.
Le positivisme du 19ème siècle a fait place chez nombre de concitoyens à une méfiance vis à vis de la notion même de progrès.
Ainsi, pour ce qui est de votre propre secteur d'activité, les sciences du vivant, près d'un européen sur quatre juge que le recours aux biotechnologies dégradera globalement notre bien-être. Seuls 40% pensent qu'elles contribueront positivement au progrès.
Nous connaissons naturellement les causes de ce scepticisme. Le 20ème siècle a, de manière terrible, montré les ravages d'un dévoiement de la science. Par ailleurs, mises au service de la productivité, les plus-values scientifiques se sont parfois faites sur des moins values sociales.
Aujourd'hui, dans nos pays, certains ont même fait de ce refus absolu des innovations scientifiques une cause politique. Au nom de l'environnement, ils en sont parfois venus à saccager des champs de cultures transgéniques pourtant destinées à la production de nouvelles molécules de traitement d'une maladie héréditaire grave.
On prend mieux ici la mesure du chemin qu'il nous reste à parcourir pour réconcilier nos concitoyens avec l'idée du progrès scientifique.
Pour cela, il est indispensable de mieux expliquer ce que la recherche apporte concrètement aux individus. Pour lutter efficacement contre la démagogie des uns et le scepticisme des autres, nous ne devons pas craindre la confrontation des idées et le débat en veillant à ce qu'il se déroule dans un esprit constructif et serein.
Il nous faut construire un nouveau mariage entre avancée scientifique et approfondissement éthique. Cette union ne pourra être efficacement nouée que si la recherche trouve une place centrale dans l'espace public.
Il faut favoriser et faciliter l'accès de nos concitoyens à la culture scientifique et technique, en mettant plus particulièrement l'accent sur la jeunesse.
A cet effort de pédagogie, il est indispensable d'ajouter des priorités scientifiquement et socialement reconnues.
Une lutte énergique contre le cancer et les maladies infectieuses, dont le SIDA est la plus terrible, doit mobiliser la recherche bio-médicale. Dans le même esprit, les différentes problématiques afférentes au développement durable doivent fédérer nos scientifiques.
Mesdames, Messieurs,
Au terme de mon propos, permettez-moi quelques mots personnels.
Quels que soient nos domaines de responsabilité, nous devons toujours faire en sorte de placer l'Homme au cur de nos actions.
Travaillant sur les sciences de la vie, vous devez plus que quiconque faire de cette exigence le dessein de votre mission. Elle lui en confère toute la grandeur.
La recherche n'est pas autre chose que la volonté d'approfondir les lignes de la connaissance et les matrices de la vie.
Vous êtes, je le sais, animés de cette énergie créatrice.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 8 octobre 2003)
Qu'il me soit d'abord permis, en tant que Président d'Atlanpole, de vous remercier d'être venus si nombreux et souvent de si loin, ici, à Nantes, au cur du Grand Ouest Atlantique. Merci d'avoir fait de ce 7ème Carrefour Européen des Biotechnologies un véritable succès.
Succès par le nombre et la qualité des exposants venus de toute l'Europe mais aussi d'outre Atlantique et d'Asie.
Succès par la richesse des différentes conférences et ateliers qui vous ont été proposés. J'en profite d'ailleurs pour témoigner ma plus vive reconnaissance au Professeur Denis Escande et à son Comité Scientifique ainsi qu'à l'ensemble des orateurs, dont une majorité vient de l'étranger.
Succès enfin par la densité des rencontres initiées au sein de la convention d'affaires ou tout au long du "parcours carrière/jeunes diplômés".
Le Grand Ouest et Atlanpole ont, je crois, pleinement justifié la confiance que nous avait témoignée le Ministère de la Recherche en nous confiant, il y a 18 mois, l'organisation de la 7ème édition de cet événement.
Le succès de cette manifestation est à l'image du dynamisme de l'Ouest français dans le domaine des biotechnologies.
Un engagement qui s'est traduit depuis de nombreuses années par une politique volontariste et ambitieuse autour de 3 axes : le soutien constant au développement de la recherche, la volonté de donner aux entreprises innovantes les moyens de leur réussite et, enfin, la promotion internationale de la bio-région France Atlantique.
Dans ce cadre, nous nous sommes attachés à renforcer les coopérations interrégionales et internationales et à permettre l'émergence d'une véritable communauté scientifique dans ce domaine des sciences du vivant. Par un engagement financier important, nous nous sommes aussi efforcés de donner aux chercheurs et aux entrepreneurs les meilleures conditions de travail et d'action.
Les résultats sont là ! Aujourd'hui, ils témoignent de la pertinence de cette volonté : l'augmentation du nombre d'unités de recherche (et par-là même du nombre de chercheurs) a été considérable, l'Ouest français se situe aujourd'hui au 2ème rang national en nombre de création d'entreprises de biotechnologies, les compétences exprimées dans les différents réseaux de chercheurs ont permis la labellisation de la Génopôle Ouest et plus récemment de l'émergence du Cancéropôle
Les efforts que nous consacrons au développement des biotechnologies procèdent d'une conviction forte : celle que nous avons de leur caractère stratégique pour notre pays.
Stratégique car nous ne pouvons et ne voulons pas laisser nos industries pharmaceutiques dépendre uniquement de la Recherche-développement conduite outre-Atlantique ;
Stratégique car si nous n'offrons pas à nos jeunes diplômés, à nos chercheurs, à nos créateurs d'entreprise les conditions d'épanouissement de leurs talents et de leurs compétences, ils partiront vers des pays qui déjà leur tendent les bras.
Stratégique, enfin, car au-delà même de la seule amélioration de notre santé, les applications issues des sciences du vivant sont immenses et, pour une part d'ailleurs, encore inconnues aujourd'hui.
Qu'un pays, qu'un continent perde pied dans la course qui s'est engagée dans ce domaine des biotechnologies et il pourrait voir, demain, remis en cause certains des éléments de son indépendance, de sa compétitivité économique mais aussi de son rayonnement.
Au delà même du seul domaine des sciences du vivant, cette triple menace guette toutes les nations qui n'auraient pas, plus largement, placé la recherche au coeur de leur projet politique.
Depuis 40 ans, la France a bénéficié de la "certaine idée" que se faisait le Général de Gaulle de la recherche.
Cet effort sans précédent de développement de la recherche publique a permis la création d'organismes nationaux qui ont contribué au développement et au rayonnement de la France.
Dans le cadre de mes précédentes responsabilités ministérielles, j'ai pu mesurer le dévouement de nos chercheurs et le dynamisme de leurs laboratoires. J'en ai acquis la conviction que notre pays dispose d'un appareil scientifique dynamique, jouissant d'une réputation internationale incontestée.
Pour autant les mutations qui affectent la recherche scientifique nous obligent à nous adapter... La concurrence scientifique s'intensifie et devient mondiale : les Etats-Unis y consacrent des masses financières considérables, la Chine la promeut au rang de priorité nationale, les évolutions technologiques s'accélèrent...
Dès lors, l'avenir de la recherche française dépendra de notre capacité à l'adapter aux enjeux qui se posent à elle.
Soyons clairs : dans le domaine de la recherche plus que dans n'importe quel autre, nous ne pouvons nous satisfaire de l'immobilisme ou du statu quo. L'enjeu n'est pas de gérer, il est de réformer. Le retard que nous accumulerions aujourd'hui assombrirait les conditions de notre développement de demain.
Il ne s'agit pas tant ici de bouleverser notre organisation scientifique que de revisiter certaines de ses pratiques et d'engager les évolutions nécessaires dans le cadre d'un plan d'ensemble aux ambitions clairement affichées. C'est l'objectif du Premier ministre et de ma collègue Claudie HAIGNERE.
Notre action est tendue vers une triple évolution.
· L'évolution de notre modèle de recherche, tout d'abord.
Longtemps centralisé et hiérarchisé, il doit continuer de muter vers un modèle plus global associant les laboratoires, les entreprises, les universités et les collectivités locales. La comparaison, dans ce domaine, avec les États-Unis, le Japon ou l'Allemagne, illustre les progrès nécessaires pour atteindre le même niveau de coopération entre ces différents acteurs.
Pour ce faire, le Gouvernement s'est attaché à fonder notre politique de recherche sur une meilleure gouvernance des organismes et des établissements d'enseignement supérieur. Celle-ci oblige à une évaluation vigilante des performances en sachant intégrer, outre la qualité et la rigueur, l'efficacité et l'approche comparée. Elle appelle une stratégie plus collective.
La recherche, nous le savons, demeure encore trop cloisonnée et les échanges de savoirs et de connaissances insuffisants. Mobilisés autour des même objectifs, nous devons tout faire pour renforcer les coopérations et les relations qui existent entre les organismes publics de recherche.
Abattre les cloisons suppose également de mobiliser les entreprises françaises qui doivent s'engager dans des programmes de recherches ambitieux.
C'est une priorité et c'est dans ce sens que mes collègues Claudie HAIGNERE Nicole Fontaine se sont engagées, au travers notamment de trois mesures concernant les "business angels", les jeunes entreprises innovantes et le crédit impôt recherche.
Pour permettre à ceux que l'on nomme les "investisseurs providentiels" de se multiplier, il faut leur donner les moyens d'agir. Nous nous y attachons en les dotant d'un statut (baptisé "société unipersonnelle d'investissement à risque") et en les faisant bénéficier d'avantages fiscaux qui sont la contrepartie de leur prise de risque.
La deuxième mesure visera à aider les jeunes entreprises innovantes à passer le cap de la rentabilité. Pour cela, des exonérations de charges sur les personnels qui participent aux projets de recherche et d'autres exonérations fiscales pourront être proposées.
Enfin, le gouvernement a décidé de réformer le crédit impôt recherche (C.I.R.) en le faisant bénéficier, non seulement aux entreprises qui augmentent leurs dépenses de R D mais aussi de toutes celles qui les maintiennent à niveau. Une part du crédit impôt recherche sera donc assise sur le volume des dépenses et non plus seulement sur leur accroissement. Les taux ont été fixés à 45% pour l'accroissement et à 5% pour le volume. De cette manière, ce crédit pourra jouer un véritable rôle de soutien en période de basse conjoncture. En outre, l'accès au crédit impôt recherche sera facilité.
Ces mesures, attendues depuis longtemps, doivent contribuer à faire de la France l'un des pays les plus accueillants pour les projets de développement d'entreprises innovantes. Elles bénéficieront pour une large part aux entreprises de biotechnologies.
Un plan plus vaste vous a été annoncé hier par la Ministre de la Recherche. L'ambition du gouvernement est d'encourager la création de " biopoles " ayant une visibilité internationale. Par ailleurs, le plan biotechnologie s'articulera autour de trois axes thématiques : la santé, l'agroalimentaire et l'environnement dont les axes de recherche seront définis par un comité d'experts, après consultation de l'ensemble de la communauté scientifique.
Dans le cadre de la nécessaire adaptation de notre système, notre recherche doit pouvoir également se reposer sur de nouveaux leviers telle que la décentralisation. Elle représente une véritable chance pour la performance économique de nos territoires. Les collectivités territoriales, et en particulier les régions, doivent encore plus s'investir, notamment en aidant à la création et au développement de jeunes entreprises innovantes. J'ai pu mesurer ici dans les Pays de la Loire combien la mobilisation de tous les acteurs, publics et privés créait une dynamique au service de la recherche qu'elle soit fondamentale ou appliquée.
Mais, les praticiens de l'innovation que vous êtes le savent bien : nos politiques de recherche ne peuvent se concevoir uniquement sous le seul prisme national.
Pour peser pleinement dans un contexte de concurrence internationale, il est essentiel que nos systèmes de recherche tendent vers un modèle européen.
· C'est la deuxième évolution que le Gouvernement appelle de ses voeux
L'Europe de la recherche est une réalité. Elle est d'ailleurs à l'origine de quelques uns des plus grands succès de la coopération qui unit nos nations.
Pour nos concitoyens, l'Europe qui réussit s'appelle Airbus ou Ariane.
Ces succès nous montrent le chemin à suivre.
Fruits d'une ambition politique commune, ils ont permis de tisser les premiers liens entre les chercheurs européens.
Aujourd'hui, qu'ils soient à Munich ou à Milan, à Londres ou à Nantes, vos laboratoires travaillent ensemble au quotidien. Le développement des nouvelles technologies de l'information a permis de faciliter et d'accélérer encore ce phénomène.
Mais il faut accompagner cette coopération scientifique d'un nouvel élan politique.
Les Etats-Unis ont bien compris le lien qui unit le développement scientifique à la compétitivité économique et à l'emploi. En témoignent les 265 milliards de dollars qu'ils investissent à la recherche quand l'Europe n'en consacre pas la moitié !
La France et l'Allemagne se sont attelées, à l'occasion du récent conseil des ministres conjoint du 18 septembre dernier, à placer cette recherche au coeur de leurs priorités politiques.
Parmi les propositions adoptées lors de Conseil consacré à la relance de la croissance, il a été décidé un fort soutien à 10 grands projets de R D industrielle.
Un des ces 10 chantiers prioritaires concerne directement les biotechnologies.
Cette initiative doit préfigurer une action commune à l'Europe tout entière.
· Enfin, la troisième évolution est celle des esprits
La recherche est au coeur du progrès. Elle épouse le sort de notre condition humaine.
Pour autant, cette conviction n'est plus véritablement partagée.
Le positivisme du 19ème siècle a fait place chez nombre de concitoyens à une méfiance vis à vis de la notion même de progrès.
Ainsi, pour ce qui est de votre propre secteur d'activité, les sciences du vivant, près d'un européen sur quatre juge que le recours aux biotechnologies dégradera globalement notre bien-être. Seuls 40% pensent qu'elles contribueront positivement au progrès.
Nous connaissons naturellement les causes de ce scepticisme. Le 20ème siècle a, de manière terrible, montré les ravages d'un dévoiement de la science. Par ailleurs, mises au service de la productivité, les plus-values scientifiques se sont parfois faites sur des moins values sociales.
Aujourd'hui, dans nos pays, certains ont même fait de ce refus absolu des innovations scientifiques une cause politique. Au nom de l'environnement, ils en sont parfois venus à saccager des champs de cultures transgéniques pourtant destinées à la production de nouvelles molécules de traitement d'une maladie héréditaire grave.
On prend mieux ici la mesure du chemin qu'il nous reste à parcourir pour réconcilier nos concitoyens avec l'idée du progrès scientifique.
Pour cela, il est indispensable de mieux expliquer ce que la recherche apporte concrètement aux individus. Pour lutter efficacement contre la démagogie des uns et le scepticisme des autres, nous ne devons pas craindre la confrontation des idées et le débat en veillant à ce qu'il se déroule dans un esprit constructif et serein.
Il nous faut construire un nouveau mariage entre avancée scientifique et approfondissement éthique. Cette union ne pourra être efficacement nouée que si la recherche trouve une place centrale dans l'espace public.
Il faut favoriser et faciliter l'accès de nos concitoyens à la culture scientifique et technique, en mettant plus particulièrement l'accent sur la jeunesse.
A cet effort de pédagogie, il est indispensable d'ajouter des priorités scientifiquement et socialement reconnues.
Une lutte énergique contre le cancer et les maladies infectieuses, dont le SIDA est la plus terrible, doit mobiliser la recherche bio-médicale. Dans le même esprit, les différentes problématiques afférentes au développement durable doivent fédérer nos scientifiques.
Mesdames, Messieurs,
Au terme de mon propos, permettez-moi quelques mots personnels.
Quels que soient nos domaines de responsabilité, nous devons toujours faire en sorte de placer l'Homme au cur de nos actions.
Travaillant sur les sciences de la vie, vous devez plus que quiconque faire de cette exigence le dessein de votre mission. Elle lui en confère toute la grandeur.
La recherche n'est pas autre chose que la volonté d'approfondir les lignes de la connaissance et les matrices de la vie.
Vous êtes, je le sais, animés de cette énergie créatrice.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 8 octobre 2003)