Déclaration à la presse et entretiens de M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères, avec France télévision, Radio France, RFI, RTL et TF1 le 30 août au Caire, sur les raisons de sa présence en Egypte et de sa tournée au Proche-Orient après la réception par la France d'un ultimatum des ravisseurs des deux journalistes français enlevés en Irak et les objectifs poursuivis pour leur libération.

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Circonstance : Tournée-éclair en Egypte et au Moyen-Orient de Michel Barnier pour obtenir le soutien des autorités à la libération des deux journalistes français enlevés en Irak, Christian Chesnot et Georges Malbrunot : étape au Caire (Egypte) le 30 août 2004

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Texte intégral

(Déclaration à la presse de Michel Barnier au Caire le 30 août 2004) :
Depuis dix jours, deux journalistes français, Christian Chesnot et Georges Malbrunot, ont disparu en Irak.
Depuis dix jours, sans relâche, je dis bien sans relâche, nous déployons tous nos efforts pour obtenir leur libération.
Notre ambassade à Bagdad, en s'appuyant sur tous nos postes dans cette région, a exploré toutes les pistes, a recherché toutes les informations, a noué tous les contacts possibles. Nous l'avons fait naturellement dans la discrétion parce que nous savons, par expérience, que cette discrétion est une garantie pour la sécurité.
Dans le moment crucial où nous sommes, à la demande du président de la République, Jacques Chirac, et du Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, et après un certain nombre de réunions qui ont eu lieu hier à Paris avec le gouvernement, je suis venu dans la région pour coordonner ces efforts. Avec le même objectif, j'ai demandé au Secrétaire général du ministère des Affaires étrangères, accompagné d'un certain nombre de hauts fonctionnaires, d'être dès ce matin à Bagdad pour renforcer l'action de notre ambassade.
Avant-hier en effet, les ravisseurs de nos deux compatriotes ont adressé à la France un ultimatum.
Ces deux journalistes, Christian Chesnot et Georges Malbrunot, exercent leur métier et le font en Irak pour expliquer au monde, pour témoigner de la réalité de la situation sur le terrain, témoigner des conditions difficiles de vie du peuple irakien.
Ces deux hommes de bien ont toujours manifesté leur compréhension pour le peuple irakien et leur attachement au monde arabe et musulman.
J'appelle à leur libération au nom des principes d'humanité et de respect de l'être humain qui sont au coeur même du message de l'Islam, au coeur même de la pratique religieuse des musulmans. L'Islam est une religion de paix et de tolérance. Il respecte la vie humaine.
D'heure en heure, en France naturellement et à travers le monde, de très nombreuses personnalités, des organisations musulmanes appellent à la libération de nos compatriotes. Leur enlèvement est incompréhensible pour tous ceux qui savent que la France, patrie des Droits de l'Homme, est une terre de tolérance et de respect de l'autre. Voilà la vérité de notre pays.
Notre République assure l'égalité et la protection de toutes les religions dans le cadre de notre loi commune.
Et l'Islam est aujourd'hui la deuxième religion en France. Cinq millions de musulmans y pratiquent librement, pleinement leur religion.
L'impartialité de la République française à l'égard des religions fait partie de notre identité. Cette impartialité garantit à tous et à chacun une totale liberté de culte. Elle protège les croyants, elle assure la cohésion et la diversité de la nation française.
La France a toujours récusé la vision d'un choc entre l'Occident et l'Islam. Elle défend en Irak, en Palestine, au Proche et au Moyen-Orient et partout dans le monde, la justice et la dignité pour les peuples. La France, avec d'autres pays, est à l'avant-garde de la défense du droit international. Partout, elle défend et continuera de défendre la souveraineté des peuples.
Pour toutes ces raisons, mais d'abord parce que le respect de la vie humaine est sacré, j'appelle solennellement à la libération de Christian Chesnot et de Georges Malbrunot.
Mesdames et Messieurs, tous les contacts que je vais nouer ici en Egypte et éventuellement dans d'autres capitales, sur le terrain, sont destinés à expliquer cette réalité telle que je viens de la dire, cette vérité de la société française, fondée sur la tolérance et sur le respect. Ces contacts visent à établir aussi tous les dialogues utiles pour favoriser la libération de nos compatriotes. Et enfin, je souhaite par ce travail relayer et faire relayer, avec le plus de force possible, le plus d'écho possible, cet appel à la libération de nos deux compatriotes.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 août 2004)
(Entretien avec France Télévision au Caire le 30 août 2004) :
Q - Quel est l'objectif de votre présence en Egypte aujourd'hui ?
R - Nous sommes ici à un moment crucial pour favoriser et obtenir la libération de Christian Chesnot et Georges Malbrunot. Ils ont disparu depuis 10 jours en Irak alors même qu'ils faisaient leur métier, alors même que nous savons qu'ils sont attachés à ce peuple, attachés au monde arabe. Depuis 10 jours nous avons multiplié tous les contacts sur place avec notre ambassade à Bagdad, en nous appuyant sur les postes de cette région, pour obtenir cette libération. Nous l'avons fait dans la discrétion parce que nous savons, par expérience, que dans de tels drames, la discrétion est une garantie pour la sécurité. Mais depuis samedi, la situation a changé puisque la France a reçu un ultimatum.
Donc dans cette nouvelle étape, à la demande du président de la République et du Premier ministre, je suis venu ici sur le terrain, pour d'abord relayer l'explication de ce qu'est notre société, de ce qu'est notre République, de ce qu'est notre Constitution. Cette République qui garantit à tous ceux qui vivent sur notre sol en France, la liberté de conscience, la protection, la liberté de religion. Voilà la vérité de la France. Et donc, j'ai l'intention ici au Caire et dans d'autres capitales, d'expliquer à la population des pays arabes, clairement et une nouvelle fois, ce qu'est cette vérité. Nous allons également, naturellement, nouer tous les contacts utiles avec toutes les personnalités civiles et religieuses qui peuvent nous aider à comprendre et à favoriser cette libération.
Q - Est-ce que cela sera l'occasion d'expliquer la politique française vis-à-vis de l'Islam et la politique irakienne de la France ?
R - Je vais expliquer inlassablement ce qu'est la réalité de notre société, qui est une société de tolérance et de respect des opinions, des consciences et des religions. Je vais expliquer en quoi notre loi, la loi commune et notre Constitution garantissent, réellement et naturellement, pour les cinq millions de personnes qui pratiquent cette religion musulmane dans notre pays, la liberté de culte. Je vais expliquer cela.
Et naturellement, on sait aussi que la France est attachée, dans cette région, en Irak, en Palestine, au Proche-Orient, partout dans le monde, à la dignité des peuples, que nous sommes attachés à défendre la souveraineté des peuples dans le cadre des Nations unies et sur le terrain, partout, et nous continuerons à le faire. Oui, je vais expliquer cela.
Je vous remercie.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1e septembre 2004)
(Entretien avec Radio France, RFI et RTL au Caire le 30 août 2004) :
Q - Quel est le but de cette tournée-éclair et surprise au Proche-Orient ?
R - Nous sommes, à propos de l'enlèvement de Christian Chesnot et Georges Malbrunot, dans une étape cruciale et différente depuis samedi. Ils ont disparu depuis 10 jours en Irak alors même qu'ils faisaient leur travail en vrais professionnels, alors même qu'ils sont, nous le savons, attachés à ce peuple irakien et attachés à ce monde musulman et arabe. Ils témoignaient de la réalité de la société irakienne, des difficultés de vie pour le peuple irakien. Ils faisaient leur travail. Depuis 10 jours, nous avons, je vous l'assure, multiplié avec notre ambassade à Bagdad, et en nous appuyant sur tous nos postes dans la région, tous les contacts utiles. Nous avons cherché toutes les informations pour favoriser leur libération, sans relâche.
Depuis samedi soir, il y a cet élément nouveau et cet ultimatum que la France a reçu. Et voilà pourquoi, à la demande du président de la République et du Premier ministre, après les réunions qui ont eu lieu au sein du gouvernement hier, dimanche, je suis venu sur le terrain avec plusieurs objectifs. Le premier est d'expliquer aux populations des pays arabes, simplement et sincèrement, ce qu'est la réalité de la société française, ce qu'est notre République, en quoi notre Constitution, notre loi commune, garantit à tous ceux qui vivent en France la liberté de conscience et la liberté de religion. C'est une réalité, c'est une vérité de la société française. Naturellement, dans cette visite ici au Caire et sans doute dans d'autres capitales, je vais nouer des contacts avec toutes celles et tous ceux, toutes les personnalités civiles et religieuses qui peuvent nous aider à relayer ce message et à nouer des dialogues utiles pour favoriser la libération de Christian Chesnot et Georges Malbrunot. Et puis enfin, puisque j'ai lancé ici au Caire un appel à la libération de nos deux compatriotes, je souhaite en étant sur le terrain que cet appel à la libération ait le plus de force et le plus d'écho possible.
Q - Comment expliquez-vous, avec les contacts qui étaient établis depuis déjà 10 jours, que la situation se soit brutalement radicalisée samedi ?
R - Nous n'avons pas d'explication formelle. Nous essayons de comprendre et vous ne m'en voudrez pas de dire, encore une fois, que dans une telle situation très grave, au-delà de tous les contacts que nous prenons et qui sont très divers et très multiples et le plus utiles possible, nous devons travailler dans la discrétion parce que cette discrétion est, autant que faire se peut, une garantie pour la sécurité de nos compatriotes.
Q - Les instances religieuses, jusqu'ici, semblent être compatissantes et ont appelé à la libération de nos compatriotes français. Est-ce que vous allez rencontrer le cheikh d'Al-Azhar ?
R - Je rencontrai ici et j'aurai des contacts, d'une manière ou d'une autre, avec toutes les autorités, toutes les personnalités civiles et religieuses qui peuvent nous aider à relayer ce message sur ce qu'est la société française, en quoi la France est un pays de tolérance et de respect pour toutes les religions et nous aider aussi à avoir des contacts utiles pour favoriser cette libération.
Je vous remercie.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1e septembre 2004)
(Entretien avec TF1 au Caire le 30 août 2004) :
Q - Quelles sont les raisons de votre présence au Caire ?
R - Depuis dix jours, Christian Chesnot et Georges Malbrunot ont disparu en Irak et depuis dix jours, sans relâche, nous avons, avec notre ambassade à Bagdad et tous nos postes dans cette région, noué tous les contacts, cherché toutes les informations. Nous l'avons fait dans la discrétion parce que nous savons, par expérience, que c'est une garantie pour la sécurité dans de tels problèmes.
Depuis samedi, il y a une situation nouvelle avec cet ultimatum qui a été adressé à la France. Et à la demande du président de la République et du Premier ministre, je suis venu sur le terrain dans la région, d'abord dans cette grande capitale, au Caire, pour exprimer comme nous l'avons fait à Paris, hier, quelle est la vérité de la société française, quelles sont les garanties qu'apporte notre Constitution, en quoi consiste la loi de la République française qui garantit à chacun et à tous quelle que soit sa croyance, la liberté de conscience et la liberté de religion. Voilà la vérité de la société française et la vérité de la République. Et je veux, ici et dans d'autres capitales, à l'intention de la population, des citoyens des pays arabes, exprimer cette réalité. Nous allons aussi rencontrer un certain nombre de personnalités civiles et religieuses qui peuvent nous aider à favoriser cette libération. Et puis enfin, nous allons relayer ici sur place, avec le plus de force possible, ce message pour la libération de nos deux compatriotes.
Q - Qui allez-vous rencontrer au Caire ?
R - Je vais rencontrer au Caire naturellement les autorités de ce pays mais encore, ici et dans d'autres capitales sans doute, toutes les personnalités civiles et religieuses qui peuvent nous aider à comprendre ce qui se passe, à nouer des contacts et à relayer ce message ou cette explication sur ce qu'est la République française.
Q - ( A propos des contacts noués)
R - Je vais nouer tous les contacts les plus utiles. Ne m'en demandez pas plus.
Q - Quelle est la prochaine phase de votre voyage ?
R - Dans une telle situation, il faut être extrêmement pragmatique et donc je suis aujourd'hui au Caire, sans doute demain dans une autre capitale, je vais nouer des contacts de la manière la plus efficace possible et autant qu'il le faut pour que nous puissions favoriser cette libération.
Je vous remercie.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1e septembre 2004)