Texte intégral
Q- S. Paoli-. La base des intermittents du spectacle laissera-t-elle au ministre de la Culture le temps qu'il demande pour faire ses propositions ? A défaut de "baguette magique", qui va payer pour les intermittents du spectacle ? C'est l'Unedic, qui vient d'être condamnée à rétablir les indemnités de 35 chômeurs radiés, qui avaient déclenché le conflit avec les intermittents. Quelle est aujourd'hui la marge de négociations possible, après le verdict du tribunal de Marseille ? Le Medef et la CFDT sont-ils prêts à revenir sur la convention signée en juin dernier ? Le festival de Bourges commence aujourd'hui, le festival de Cannes dans trois semaines. La saison des festivals peut-elle à nouveau être compromise ?
La soirée des Molières a été sérieusement perturbée. Les syndicats reconnaissent tous votre volonté d'écoute, mais quelles sont aujourd'hui vos marges de manuvre, à commencer d'abord par celle du temps ? On a l'impression que comme l'an passé, à nouveau, même les syndicats sont un peu débordés par la base.
R- "Pour le moment, on ne peut pas me reprocher de traîner. Je suis là depuis quinze jours, j'ai rencontré chacune des organisations représentatives, je rencontre aussi de manière directe et informelle un certain nombre d'artistes qui ont envie de s'exprimer. J'ai été en Avignon samedi, parce que c'est un lieu symbolique : c'est le lieu à la fois si vous voulez de l'art, de la culture, du patrimoine, de la novation, de la rupture et aussi du dialogue social. Je pense que c'était l'esprit même de J. Vilar. Il y avait sur le mur de la maison de J. Vilar une très belle inscription : "Avignon, un rêve que nous faisons tous". Donc je suis au cur de cette réalité, de l'écoute, du dialogue, pour faire des propositions."
Q- Mais vous voyez bien ce qui se passe, parce que tous les syndicats disent qu'en effet, là il y a quelqu'un qui les écoute. Et puis, comme hier soir, un mouvement démontre à nouveau que la base pousse vite, fort, et qu'elle va vous demander probablement dans des délais très courts, plus courts que ceux que vous aviez vous-même prévus, de faire des propositions ?
R - "J'ai bien conscience de l'impatience et de l'urgence. Je suis quelqu'un qu'on n'intimide pas facilement. Cela veut dire que je vais discuter avec les gens. Et hier soir, quand j'ai compris que les Molières étaient menacés par une grève, j'ai proposé immédiatement au directeur du théâtre d'aller discuter avec les personnels concernés. On a eu une discussion très directe. Voilà, j'ai comme objectif d'être le ministre de "l'emploi culturel", d'être le ministre qui soutient, sur tous les plans, l'exception culturelle française. J'ai d'ailleurs eu, je crois quand même, un premier résultat : c'est l'arbitrage du Premier ministre, qui fait que le budget de la Culture ne sera pas menacé dans les jours et dans les semaines qui viennent et que la priorité que nous affichons pour la défense de l'activité artistique de ce rayonnement nécessaire est garantie par le Gouvernement. Cela vous semble rien, mais pour moi, c'est essentiel, parce que je ne voulais pas qu'il y ait de signal contraire qui soit émis. Mon problème, quel est-il ? C est de rétablir la confiance, de mettre tout sur la table. Que chacun se mette dans la peau de l'autre, moi dans la peau évidemment de celles et ceux qui aujourd'hui sont dans une situation de grande précarité. Parce que les conséquences de l'accord qui a été conclu, on commence à en percevoir les conséquences individuelles : vous en avez qui gagnent plus et d'autres qui gagnent moins ou qui sont éjectés du système. Je ne peux pas l'accepter et je ne l'accepte pas. Et j'ai indiqué la semaine dernière, à l'Assemblée nationale, que le Gouvernement ne se désintéressera pas de la négociation entre les partenaires sociaux. Cela veut dire quoi ? Deux choses !"
Q- Non, mais attendez, juste pour vous suivre pas à pas, parce que ce n'est pas un dossier facile... Il y a des urgences immédiates. Par exemple, la question des congés de maladie, la question des femmes enceintes : considérez-vous que là, il faut apporter une réponse très vite, parce qu'en effet il y a des urgences ? Et considérez-vous que par ailleurs, on peut distinguer, un peu plus tard, pourquoi pas la question de la renégociation du protocole dans un deuxième temps, mais d'abord répondre aux urgences ? Est-ce que cela fait partie de vos objectifs ?
R - "Oui, il y a des urgences et je l'ai indiqué hier. Et hier devant le Conseil national des professions du spectacle, j'ai qualifié un certain nombre de problèmes. J'aurais pu ignorer la réalité. La réalité, elle est là, je l'ai écoutée, un certain nombre mes interlocuteurs ont été très directs, elle a été reçue cinq sur cinq par le Gouvernement. Et hier, j'ai donc franchi une étape dans le discours initial que j'ai fait au Conseil national des professions du spectacle : j'ai identifié un certain nombre de problèmes, je les ai mis en lumière. Cela veut dire quoi ? Qu'à partir du moment où on identifie des problèmes, c'est qu'on a le souci de les régler. La difficulté technique, c'est laquelle ? C'est que je n'ai pas les pleins pouvoirs"
Q- Pourquoi ?
R - "C'est un pouvoir partagé entre les partenaires sociaux et, de l'autre côté, l'Etat. Donc je suis obligé de faire très attention, pour préciser le cadre juridique dans lequel tout cela doit intervenir. Ce n'est pas vouloir différer les solutions que de le dire, c'est la réalité. Simplement ce qui est terminé, c'est peut-être le temps où on laissait faire totalement les partenaires sociaux. Je leur fais confiance, mais ils ont et j'ai une obligation de résultats sur un certain nombre de points."
Q- Et une grande difficulté devant vous... Encore une fois, et le Medef et la CFDT presque sûrement ne vont pas facilement revenir sur le protocole qui a été négocié. Par ailleurs, la situation de l'Unedic aujourd'hui est telle que ses marges de manuvre ne sont pas très larges. Et puis enfin, le budget de la Communication et de la Culture n'est pas aussi important que ce que vous auriez peut-être pu espérer. Donc vos marges de manuvre elles sont très étroites ?
R - "Ok, mais le budget ne diminuera pas..."
Q- Oui, mais il ne vous permet pas de répondre aux enjeux aujourd'hui ?
R - "Non, non, OK... Vous savez, à chacun suffit sa peine."
Q- Oui sûrement, mais comment faites-vous alors ?
R - "Le budget ne diminuera pas et ce qui était prévu sera réalisé. De ce point de vue, le Premier ministre a pris une bonne décision, qui était évidemment très utile et très nécessaire. Je considère qu'il est nécessaire que se conjuguent les efforts, les énergies et les soutiens. Et donc je demande dans un même élan - bien sûr l'Etat, c'est moi qui le représente - aux régions, aux départements, aux communes, au public et à toutes celles et ceux qui financent l'activité artistique, de conjuguer leurs efforts et de ne pas faire grève. Parce que ce qui est important, c'est qu'on arrive à faire fonctionner le maximum d'activités artistiques dans le domaine du cinéma, de l'audiovisuel et du spectacle vivant. Voilà, c'est ça qui est le plus important et il faut que chacun se mette dans la peau de l'autre et il faut qu'on ne considère pas comme incompatibles l'activité artistique et le débat. C'est-à-dire qu'il y a un certain nombre de festivals qui sont devant nous..."
Q- Bourges commence aujourd'hui. C'est là que tout avait commencé l'an passé...
R - "Vous savez, je connais bien le festival de Bourges. Et c'est là qu'en 86 ou en 87 - je ne me rappelle plus de l'année exacte -, quand il avait été question que le Printemps de Bourges s'achève, parce qu'il y avait un problème de déficit, c'est le ministre de la Culture de l'époque, et votre serviteur pour le Conseil régional, qui avons trouvé les crédits pour assurer la survie du Printemps de Bourges. Donc je sais très bien les problèmes de réalité financière et le fait qu'il faut financer l'activité artistique. Je pense aux artistes, je pense aux techniciens. Je sais très bien qu'ils exercent un métier difficile et précaire et qu'ils ont des conditions de vie très particulières. Je le sais, c'est la raison pour laquelle, bec et ongles, je défendrai bien sûr la spécificité du régime des intermittents du spectacle et, plus globalement, la spécificité culturelle française, parce que le pluralisme, la diversité, c'est pour moi une valeur absolument essentielle. Je ne cherche pas à gagner du temps. J'ai conscience de l'urgence. Je vais faire des propositions au Premier ministre, pour qu'on parvienne à de bons résultats. Pour moi l'abrogation n'est pas une fin en soi ; ce qui est l'objectif c'est d'avoir un système qui convienne à chacun ou au maximum possible - parce que je ne pense pas que j'arriverai à faire la paix universelle. Mais je veux tout mettre sur la table. Aujourd'hui, on ne connaît pas la vérité des chiffres. J'ai reçu un certain nombre de demandes de transparence, elles sont tout à fait recevables. Je veux instituer une méthode, avec tout le monde autour de la table, qu'on définisse ensemble un calendrier et que chacun puisse, étape après étape, me prendre au mot, surveiller si je tiens la feuille de route que j'aurai fixée. Je ne devrais pas utiliser le terme de "feuille de route", parce que cette feuille de route a une appellation maintenant, un peu de celle qui va voler en éclats. La mienne, j'espère qu'elle sera solide !"
Q- On le souhaite à tous. Simplement, encore une fois, j'allais dire que c'est un peu la règle dans ce genre de conflit : les festivals commencent : aujourd'hui Bourges, dans trois semaines le festival de Cannes. Ne craignez-vous pas, encore une fois - c'est important, parce que cela s'est déjà produit -, que la base des intermittents déborde les syndicats et que vous vous trouviez dans une situation de négociations un peu dans l'urgence ? Et est-ce que vous êtes prêt à affronter ça aussi ? Ou y a-t-il moyen de convaincre la base, justement que l'enjeu est trop important et qu'il faut peut-être se parler différemment ?
R - "Je vais être très prudent et mesuré dans mes propos sur ce sujet. Parce que si j'appelle à la responsabilité de chacun, on va dire que je fais du chantage, et je ne veux pas le faire. De la même manière que je n'accepte pas de recevoir un ultimatum, parce que c'est le contraire de l'état d'esprit que je viens d'indiquer ? Je comprends l'urgence et l'impatience, je l'ai sur les épaules, elle est vraiment dans mon crâne et je souhaite qu'on ait, tous ensemble - et ce n'est pas un vu pieu -, le souci de faire en sorte qu'il y ait le maximum d'activités culturelles et artistiques dans notre pays. Que ne s'engagent pas des spirales de rupture qui, à ce moment-là, auront l'effet inverse, c'est-à-dire que les troupes les plus précaires, les plus petites compagnies, elles ne seront pas menacées : elles disparaîtront. Et cela mettra donc en cause le pluralisme nécessaire des activités artistiques dans notre pays. Donc je ne fais aucun chantage, je veux tout simplement qu'on essaye de se faire mutuellement confiance. Ce n'est pas pour nier la réalité. Cette réalité, le Gouvernement la reconnaît, en a pris acte. Il faut que l'on sorte de cette crise. "De cette crise" : cela veut dire qu'il y a bien une crise, je le reconnais ! Simplement, je demande tout simplement que vu le nombre de problèmes qu'on a à régler, la nécessité d'un vrai parcours professionnel, la nécessité d'un certain nombre de réformes à mettre en uvre, je demande uniquement qu'on me fasse un tout petit peu confiance, non pas pour être dilatoire, mais pour tout mettre sur la table et avancer progressivement. J'ai compris qu'il y avait un signal initial à donner. J'y travaille et j'espère être en mesure, le plus rapidement possible, de faire des propositions concrètes
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 avril 2004)
La soirée des Molières a été sérieusement perturbée. Les syndicats reconnaissent tous votre volonté d'écoute, mais quelles sont aujourd'hui vos marges de manuvre, à commencer d'abord par celle du temps ? On a l'impression que comme l'an passé, à nouveau, même les syndicats sont un peu débordés par la base.
R- "Pour le moment, on ne peut pas me reprocher de traîner. Je suis là depuis quinze jours, j'ai rencontré chacune des organisations représentatives, je rencontre aussi de manière directe et informelle un certain nombre d'artistes qui ont envie de s'exprimer. J'ai été en Avignon samedi, parce que c'est un lieu symbolique : c'est le lieu à la fois si vous voulez de l'art, de la culture, du patrimoine, de la novation, de la rupture et aussi du dialogue social. Je pense que c'était l'esprit même de J. Vilar. Il y avait sur le mur de la maison de J. Vilar une très belle inscription : "Avignon, un rêve que nous faisons tous". Donc je suis au cur de cette réalité, de l'écoute, du dialogue, pour faire des propositions."
Q- Mais vous voyez bien ce qui se passe, parce que tous les syndicats disent qu'en effet, là il y a quelqu'un qui les écoute. Et puis, comme hier soir, un mouvement démontre à nouveau que la base pousse vite, fort, et qu'elle va vous demander probablement dans des délais très courts, plus courts que ceux que vous aviez vous-même prévus, de faire des propositions ?
R - "J'ai bien conscience de l'impatience et de l'urgence. Je suis quelqu'un qu'on n'intimide pas facilement. Cela veut dire que je vais discuter avec les gens. Et hier soir, quand j'ai compris que les Molières étaient menacés par une grève, j'ai proposé immédiatement au directeur du théâtre d'aller discuter avec les personnels concernés. On a eu une discussion très directe. Voilà, j'ai comme objectif d'être le ministre de "l'emploi culturel", d'être le ministre qui soutient, sur tous les plans, l'exception culturelle française. J'ai d'ailleurs eu, je crois quand même, un premier résultat : c'est l'arbitrage du Premier ministre, qui fait que le budget de la Culture ne sera pas menacé dans les jours et dans les semaines qui viennent et que la priorité que nous affichons pour la défense de l'activité artistique de ce rayonnement nécessaire est garantie par le Gouvernement. Cela vous semble rien, mais pour moi, c'est essentiel, parce que je ne voulais pas qu'il y ait de signal contraire qui soit émis. Mon problème, quel est-il ? C est de rétablir la confiance, de mettre tout sur la table. Que chacun se mette dans la peau de l'autre, moi dans la peau évidemment de celles et ceux qui aujourd'hui sont dans une situation de grande précarité. Parce que les conséquences de l'accord qui a été conclu, on commence à en percevoir les conséquences individuelles : vous en avez qui gagnent plus et d'autres qui gagnent moins ou qui sont éjectés du système. Je ne peux pas l'accepter et je ne l'accepte pas. Et j'ai indiqué la semaine dernière, à l'Assemblée nationale, que le Gouvernement ne se désintéressera pas de la négociation entre les partenaires sociaux. Cela veut dire quoi ? Deux choses !"
Q- Non, mais attendez, juste pour vous suivre pas à pas, parce que ce n'est pas un dossier facile... Il y a des urgences immédiates. Par exemple, la question des congés de maladie, la question des femmes enceintes : considérez-vous que là, il faut apporter une réponse très vite, parce qu'en effet il y a des urgences ? Et considérez-vous que par ailleurs, on peut distinguer, un peu plus tard, pourquoi pas la question de la renégociation du protocole dans un deuxième temps, mais d'abord répondre aux urgences ? Est-ce que cela fait partie de vos objectifs ?
R - "Oui, il y a des urgences et je l'ai indiqué hier. Et hier devant le Conseil national des professions du spectacle, j'ai qualifié un certain nombre de problèmes. J'aurais pu ignorer la réalité. La réalité, elle est là, je l'ai écoutée, un certain nombre mes interlocuteurs ont été très directs, elle a été reçue cinq sur cinq par le Gouvernement. Et hier, j'ai donc franchi une étape dans le discours initial que j'ai fait au Conseil national des professions du spectacle : j'ai identifié un certain nombre de problèmes, je les ai mis en lumière. Cela veut dire quoi ? Qu'à partir du moment où on identifie des problèmes, c'est qu'on a le souci de les régler. La difficulté technique, c'est laquelle ? C'est que je n'ai pas les pleins pouvoirs"
Q- Pourquoi ?
R - "C'est un pouvoir partagé entre les partenaires sociaux et, de l'autre côté, l'Etat. Donc je suis obligé de faire très attention, pour préciser le cadre juridique dans lequel tout cela doit intervenir. Ce n'est pas vouloir différer les solutions que de le dire, c'est la réalité. Simplement ce qui est terminé, c'est peut-être le temps où on laissait faire totalement les partenaires sociaux. Je leur fais confiance, mais ils ont et j'ai une obligation de résultats sur un certain nombre de points."
Q- Et une grande difficulté devant vous... Encore une fois, et le Medef et la CFDT presque sûrement ne vont pas facilement revenir sur le protocole qui a été négocié. Par ailleurs, la situation de l'Unedic aujourd'hui est telle que ses marges de manuvre ne sont pas très larges. Et puis enfin, le budget de la Communication et de la Culture n'est pas aussi important que ce que vous auriez peut-être pu espérer. Donc vos marges de manuvre elles sont très étroites ?
R - "Ok, mais le budget ne diminuera pas..."
Q- Oui, mais il ne vous permet pas de répondre aux enjeux aujourd'hui ?
R - "Non, non, OK... Vous savez, à chacun suffit sa peine."
Q- Oui sûrement, mais comment faites-vous alors ?
R - "Le budget ne diminuera pas et ce qui était prévu sera réalisé. De ce point de vue, le Premier ministre a pris une bonne décision, qui était évidemment très utile et très nécessaire. Je considère qu'il est nécessaire que se conjuguent les efforts, les énergies et les soutiens. Et donc je demande dans un même élan - bien sûr l'Etat, c'est moi qui le représente - aux régions, aux départements, aux communes, au public et à toutes celles et ceux qui financent l'activité artistique, de conjuguer leurs efforts et de ne pas faire grève. Parce que ce qui est important, c'est qu'on arrive à faire fonctionner le maximum d'activités artistiques dans le domaine du cinéma, de l'audiovisuel et du spectacle vivant. Voilà, c'est ça qui est le plus important et il faut que chacun se mette dans la peau de l'autre et il faut qu'on ne considère pas comme incompatibles l'activité artistique et le débat. C'est-à-dire qu'il y a un certain nombre de festivals qui sont devant nous..."
Q- Bourges commence aujourd'hui. C'est là que tout avait commencé l'an passé...
R - "Vous savez, je connais bien le festival de Bourges. Et c'est là qu'en 86 ou en 87 - je ne me rappelle plus de l'année exacte -, quand il avait été question que le Printemps de Bourges s'achève, parce qu'il y avait un problème de déficit, c'est le ministre de la Culture de l'époque, et votre serviteur pour le Conseil régional, qui avons trouvé les crédits pour assurer la survie du Printemps de Bourges. Donc je sais très bien les problèmes de réalité financière et le fait qu'il faut financer l'activité artistique. Je pense aux artistes, je pense aux techniciens. Je sais très bien qu'ils exercent un métier difficile et précaire et qu'ils ont des conditions de vie très particulières. Je le sais, c'est la raison pour laquelle, bec et ongles, je défendrai bien sûr la spécificité du régime des intermittents du spectacle et, plus globalement, la spécificité culturelle française, parce que le pluralisme, la diversité, c'est pour moi une valeur absolument essentielle. Je ne cherche pas à gagner du temps. J'ai conscience de l'urgence. Je vais faire des propositions au Premier ministre, pour qu'on parvienne à de bons résultats. Pour moi l'abrogation n'est pas une fin en soi ; ce qui est l'objectif c'est d'avoir un système qui convienne à chacun ou au maximum possible - parce que je ne pense pas que j'arriverai à faire la paix universelle. Mais je veux tout mettre sur la table. Aujourd'hui, on ne connaît pas la vérité des chiffres. J'ai reçu un certain nombre de demandes de transparence, elles sont tout à fait recevables. Je veux instituer une méthode, avec tout le monde autour de la table, qu'on définisse ensemble un calendrier et que chacun puisse, étape après étape, me prendre au mot, surveiller si je tiens la feuille de route que j'aurai fixée. Je ne devrais pas utiliser le terme de "feuille de route", parce que cette feuille de route a une appellation maintenant, un peu de celle qui va voler en éclats. La mienne, j'espère qu'elle sera solide !"
Q- On le souhaite à tous. Simplement, encore une fois, j'allais dire que c'est un peu la règle dans ce genre de conflit : les festivals commencent : aujourd'hui Bourges, dans trois semaines le festival de Cannes. Ne craignez-vous pas, encore une fois - c'est important, parce que cela s'est déjà produit -, que la base des intermittents déborde les syndicats et que vous vous trouviez dans une situation de négociations un peu dans l'urgence ? Et est-ce que vous êtes prêt à affronter ça aussi ? Ou y a-t-il moyen de convaincre la base, justement que l'enjeu est trop important et qu'il faut peut-être se parler différemment ?
R - "Je vais être très prudent et mesuré dans mes propos sur ce sujet. Parce que si j'appelle à la responsabilité de chacun, on va dire que je fais du chantage, et je ne veux pas le faire. De la même manière que je n'accepte pas de recevoir un ultimatum, parce que c'est le contraire de l'état d'esprit que je viens d'indiquer ? Je comprends l'urgence et l'impatience, je l'ai sur les épaules, elle est vraiment dans mon crâne et je souhaite qu'on ait, tous ensemble - et ce n'est pas un vu pieu -, le souci de faire en sorte qu'il y ait le maximum d'activités culturelles et artistiques dans notre pays. Que ne s'engagent pas des spirales de rupture qui, à ce moment-là, auront l'effet inverse, c'est-à-dire que les troupes les plus précaires, les plus petites compagnies, elles ne seront pas menacées : elles disparaîtront. Et cela mettra donc en cause le pluralisme nécessaire des activités artistiques dans notre pays. Donc je ne fais aucun chantage, je veux tout simplement qu'on essaye de se faire mutuellement confiance. Ce n'est pas pour nier la réalité. Cette réalité, le Gouvernement la reconnaît, en a pris acte. Il faut que l'on sorte de cette crise. "De cette crise" : cela veut dire qu'il y a bien une crise, je le reconnais ! Simplement, je demande tout simplement que vu le nombre de problèmes qu'on a à régler, la nécessité d'un vrai parcours professionnel, la nécessité d'un certain nombre de réformes à mettre en uvre, je demande uniquement qu'on me fasse un tout petit peu confiance, non pas pour être dilatoire, mais pour tout mettre sur la table et avancer progressivement. J'ai compris qu'il y avait un signal initial à donner. J'y travaille et j'espère être en mesure, le plus rapidement possible, de faire des propositions concrètes
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 avril 2004)