Texte intégral
Jean-Claude Gaudin, Sénateur-Maire de Marseille, Vice-Président délégué de l'UMP explique les positions de l'UMP sur les enjeux européens : le rôle de l'Europe dans le monde, les raisons de l'opposition à l'entrée de la Turquie dans l'Union.
Il donne aussi son opinion sur le projet d'Europe Sociale du Parti Socialiste et explique aux électeurs dont le vote serait encore incertain pourquoi ils doivent voter pour la liste UMP.
Q - Pour l'UMP, quel rôle doit jouer l'Europe désormais réunie dans les affaires du monde ?
R - L'Europe doit constituer un facteur de stabilité dans le monde : union économique et politique depuis un demi-siècle, l'Europe a fait ses preuves en matière de règlement pacifique des crises.
Cet ensemble est également homogène du point de vue culturel. L'Europe tout au long de son histoire a façonné son identité à partir d'une double influence : gréco-latine et judéo-chrétienne. Pour cette raison, je me réjouis de voir l'Europe réunifiée depuis ce printemps, avec l'entrée des pays libérés du communisme. Certes, leur intégration sera difficile, notamment du fait de leur retard économique par rapport à l'Europe occidentale, mais la joie de leur libération et de leur retour à la maison commune domine largement. Désormais, il faut que ces valeurs européennes, nous soyons capables de les faire rayonner. Cela implique que l'Europe parle d'une seule voix et participe aux différentes médiations dans les " conflits ", à l'inverse de ce qui s'est passé durant la crise irakienne. Il est temps que la première puissance économique du monde exerce ses responsabilités politiques dans les affaires du monde.
Q - Pour quelles raisons l'UMP s'oppose-t-elle à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne ?
R - La première raison est naturellement historique et culturelle. Qu'on le veuille ou non, la Turquie est fille de l'empire ottoman. Or, c'est en grande partie contre cet empire ottoman que l'Europe a pris conscience d'elle-même.
Il existe également une raison géographique. Chacun sait que l'immense majorité de la Turquie se trouve en Asie. Le professeur Rémi Brague faisait remarquer que deux très grands pays se trouvent aux portes de l'Union européenne : la Turquie et la Russie. Si l'on accepte l'un, il faut accepter l'autre. Ce qui signifie une Europe allant jusqu'à Vladivostok, c'est-à-dire jusqu'au Pacifique et aux portes de la Chine...
Si la Turquie entre dans l'Union européenne, il est clair que, du même coup, le projet politique européen changera de nature : il ne s'agira plus de l'union d'un continent largement imprégné d'une même culture mais d'un conglomérat ayant à terme vocation à englober toute la planète. Si tel est le cas, que cela soit dit clairement !
J'entends beaucoup les socialistes parler de la Turquie en faisant référence aux droits de l'homme ou au développement économique. Je ne crois pas qu'il soit raisonnable de laisser croire à une nation aussi importante que la Turquie, tant démographiquement que stratégiquement - et même, à certains égards, religieusement, puisqu'elle offre un des rares exemples de confrontation entre l'islam et la modernité -, que sa simple progression économique ou l'abolition de la peine de mort suffirait à en faire une nation européenne. Autant, je suis favorable à une alliance économique et stratégique avec la Turquie, autant je ne crois pas que la Turquie soit une nation européenne et donc une nation ayant vocation à entrer dans l'Union européenne. Je rappelle d'ailleurs que ces alliances existent déjà, puisque la Turquie fait partie de l'OTAN et qu'elle entretient des liens économiques privilégiés avec l'UE.
Vous permettrez un dernier mot au maire de Marseille, c'est-à-dire au maire de la plus importante communauté arménienne de France. Il est de mon devoir de dire qu'il est absolument scandaleux que la Turquie refuse encore de reconnaître le génocide arménien, premier génocide " méthodique " de l'histoire. Tous les progrès que la Turquie pourra faire dans le domaine des droits de l'homme n'empêcheront pas que, pour l'apaisement de cette région du monde et pour l'apaisement de la mémoire, il faudra bien un jour que les Turcs recherchent dans la vérité le pardon des Arméniens.
Q - Que dissimule le projet d'Europe sociale du Parti socialiste ?
R - A la vérité, l'Europe sociale dissimule mal une absence de projet. Alors que l'UMP s'est engagée clairement sur les deux points essentiels du débat européen contemporain : l'entrée de la Turquie, à laquelle nous nous opposons, et le texte de constitution préparé par Valéry Giscard d'Estaing que nous soutenons afin de créer les conditions d'une véritable union politique européenne.
Sur ce dernier point, je dois dire que j'aurais, pour ma part, été favorable à la reconnaissance des racines chrétiennes de l'Europe. C'est un fait évident pour toute personne qui regarde l'histoire que le christianisme a réussi le premier l'unité de notre continent au Moyen Âge. Et je ne vois pas pourquoi cette reconnaissance mettrait en péril l'édifice fragile des relations actuelles entre les Eglises et les Etats. Mais, la position de plusieurs chefs de la majorité, à commencer par le chef de l'Etat, ne va pas dans ce sens. Dont acte. Cela prouve que l'union que nous avons voulue à l'UMP n'est pas l'uniformité !
L'Europe sociale, pour nous, c'est l'Europe où la croissance permet l'amélioration des conditions de vie de chacun. Pour nous, l'économie est au service de l'homme, mais elle a aussi ses lois propres ; les violer n'avance à rien d'autre qu'à opprimer les plus faibles. Pour en revenir à l'Europe sociale des socialistes, soit il s'agit d'un slogan vide de sens, soit il s'agit du vieux rêve d'une Europe collectiviste. Je tiens trop à nos libertés pour ne pas combattre un tel projet... J'ajoute que je trouve particulièrement insultant pour les pays de l'Est qui viennent tout récemment de nous rejoindre de leur proposer un retour à ce qu'ils ont fui.
Q - Que diriez-vous à un électeur dont le choix de vote reste incertain, afin de l'inciter à voter pour la liste UMP ?
R - Ces élections ont deux enjeux. Un enjeu européen, bien sûr. Là-dessus, l'UMP a un avantage sur les quelque vingt autres listes : elle a dit clairement ce qu'elle voulait de l'Europe et ce qu'elle ne voulait pas. Nous ne voulons pas de la Turquie. Nous souhaitons l'adoption de la constitution. Nous souhaitons avancer dans le sens d'une Europe politique, mais sans perdre nos identités nationales. Notre discours a l'avantage de la clarté. Il y a également un enjeu national. Ceux qui considèrent que les réformes ont trop attendu et que l'immobilisme socialiste ne peut que conduire à la catastrophe doivent le manifester en soutenant le gouvernement et donc l'UMP.
Je sais bien que, pour beaucoup, les élections européennes sont une occasion de se défouler en votant pour des listes " originales ". Mais il ne faut pas perdre de vue que c'est la dernière consultation électorale avant les prochaines présidentielles et que son résultat influera donc décisivement sur la politique menée jusqu'en 2007. Et il ne faut surtout pas oublier que l'influence de la France en Europe - avec tout ce que cela comporte, puisqu'une large partie de notre politique, notamment économique, industrielle ou environnementale, se fait désormais à Bruxelles - se jouera le 13 juin. Pour donner du sens à son vote je ne peux que recommander le vote responsable et clair de l'UMP.
(source http://www.ump-europeennes2004.org, le 9 juin 2004)
Il donne aussi son opinion sur le projet d'Europe Sociale du Parti Socialiste et explique aux électeurs dont le vote serait encore incertain pourquoi ils doivent voter pour la liste UMP.
Q - Pour l'UMP, quel rôle doit jouer l'Europe désormais réunie dans les affaires du monde ?
R - L'Europe doit constituer un facteur de stabilité dans le monde : union économique et politique depuis un demi-siècle, l'Europe a fait ses preuves en matière de règlement pacifique des crises.
Cet ensemble est également homogène du point de vue culturel. L'Europe tout au long de son histoire a façonné son identité à partir d'une double influence : gréco-latine et judéo-chrétienne. Pour cette raison, je me réjouis de voir l'Europe réunifiée depuis ce printemps, avec l'entrée des pays libérés du communisme. Certes, leur intégration sera difficile, notamment du fait de leur retard économique par rapport à l'Europe occidentale, mais la joie de leur libération et de leur retour à la maison commune domine largement. Désormais, il faut que ces valeurs européennes, nous soyons capables de les faire rayonner. Cela implique que l'Europe parle d'une seule voix et participe aux différentes médiations dans les " conflits ", à l'inverse de ce qui s'est passé durant la crise irakienne. Il est temps que la première puissance économique du monde exerce ses responsabilités politiques dans les affaires du monde.
Q - Pour quelles raisons l'UMP s'oppose-t-elle à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne ?
R - La première raison est naturellement historique et culturelle. Qu'on le veuille ou non, la Turquie est fille de l'empire ottoman. Or, c'est en grande partie contre cet empire ottoman que l'Europe a pris conscience d'elle-même.
Il existe également une raison géographique. Chacun sait que l'immense majorité de la Turquie se trouve en Asie. Le professeur Rémi Brague faisait remarquer que deux très grands pays se trouvent aux portes de l'Union européenne : la Turquie et la Russie. Si l'on accepte l'un, il faut accepter l'autre. Ce qui signifie une Europe allant jusqu'à Vladivostok, c'est-à-dire jusqu'au Pacifique et aux portes de la Chine...
Si la Turquie entre dans l'Union européenne, il est clair que, du même coup, le projet politique européen changera de nature : il ne s'agira plus de l'union d'un continent largement imprégné d'une même culture mais d'un conglomérat ayant à terme vocation à englober toute la planète. Si tel est le cas, que cela soit dit clairement !
J'entends beaucoup les socialistes parler de la Turquie en faisant référence aux droits de l'homme ou au développement économique. Je ne crois pas qu'il soit raisonnable de laisser croire à une nation aussi importante que la Turquie, tant démographiquement que stratégiquement - et même, à certains égards, religieusement, puisqu'elle offre un des rares exemples de confrontation entre l'islam et la modernité -, que sa simple progression économique ou l'abolition de la peine de mort suffirait à en faire une nation européenne. Autant, je suis favorable à une alliance économique et stratégique avec la Turquie, autant je ne crois pas que la Turquie soit une nation européenne et donc une nation ayant vocation à entrer dans l'Union européenne. Je rappelle d'ailleurs que ces alliances existent déjà, puisque la Turquie fait partie de l'OTAN et qu'elle entretient des liens économiques privilégiés avec l'UE.
Vous permettrez un dernier mot au maire de Marseille, c'est-à-dire au maire de la plus importante communauté arménienne de France. Il est de mon devoir de dire qu'il est absolument scandaleux que la Turquie refuse encore de reconnaître le génocide arménien, premier génocide " méthodique " de l'histoire. Tous les progrès que la Turquie pourra faire dans le domaine des droits de l'homme n'empêcheront pas que, pour l'apaisement de cette région du monde et pour l'apaisement de la mémoire, il faudra bien un jour que les Turcs recherchent dans la vérité le pardon des Arméniens.
Q - Que dissimule le projet d'Europe sociale du Parti socialiste ?
R - A la vérité, l'Europe sociale dissimule mal une absence de projet. Alors que l'UMP s'est engagée clairement sur les deux points essentiels du débat européen contemporain : l'entrée de la Turquie, à laquelle nous nous opposons, et le texte de constitution préparé par Valéry Giscard d'Estaing que nous soutenons afin de créer les conditions d'une véritable union politique européenne.
Sur ce dernier point, je dois dire que j'aurais, pour ma part, été favorable à la reconnaissance des racines chrétiennes de l'Europe. C'est un fait évident pour toute personne qui regarde l'histoire que le christianisme a réussi le premier l'unité de notre continent au Moyen Âge. Et je ne vois pas pourquoi cette reconnaissance mettrait en péril l'édifice fragile des relations actuelles entre les Eglises et les Etats. Mais, la position de plusieurs chefs de la majorité, à commencer par le chef de l'Etat, ne va pas dans ce sens. Dont acte. Cela prouve que l'union que nous avons voulue à l'UMP n'est pas l'uniformité !
L'Europe sociale, pour nous, c'est l'Europe où la croissance permet l'amélioration des conditions de vie de chacun. Pour nous, l'économie est au service de l'homme, mais elle a aussi ses lois propres ; les violer n'avance à rien d'autre qu'à opprimer les plus faibles. Pour en revenir à l'Europe sociale des socialistes, soit il s'agit d'un slogan vide de sens, soit il s'agit du vieux rêve d'une Europe collectiviste. Je tiens trop à nos libertés pour ne pas combattre un tel projet... J'ajoute que je trouve particulièrement insultant pour les pays de l'Est qui viennent tout récemment de nous rejoindre de leur proposer un retour à ce qu'ils ont fui.
Q - Que diriez-vous à un électeur dont le choix de vote reste incertain, afin de l'inciter à voter pour la liste UMP ?
R - Ces élections ont deux enjeux. Un enjeu européen, bien sûr. Là-dessus, l'UMP a un avantage sur les quelque vingt autres listes : elle a dit clairement ce qu'elle voulait de l'Europe et ce qu'elle ne voulait pas. Nous ne voulons pas de la Turquie. Nous souhaitons l'adoption de la constitution. Nous souhaitons avancer dans le sens d'une Europe politique, mais sans perdre nos identités nationales. Notre discours a l'avantage de la clarté. Il y a également un enjeu national. Ceux qui considèrent que les réformes ont trop attendu et que l'immobilisme socialiste ne peut que conduire à la catastrophe doivent le manifester en soutenant le gouvernement et donc l'UMP.
Je sais bien que, pour beaucoup, les élections européennes sont une occasion de se défouler en votant pour des listes " originales ". Mais il ne faut pas perdre de vue que c'est la dernière consultation électorale avant les prochaines présidentielles et que son résultat influera donc décisivement sur la politique menée jusqu'en 2007. Et il ne faut surtout pas oublier que l'influence de la France en Europe - avec tout ce que cela comporte, puisqu'une large partie de notre politique, notamment économique, industrielle ou environnementale, se fait désormais à Bruxelles - se jouera le 13 juin. Pour donner du sens à son vote je ne peux que recommander le vote responsable et clair de l'UMP.
(source http://www.ump-europeennes2004.org, le 9 juin 2004)