Déclaration de M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail, sur la formation professionnelle continue et l'amélioration de la formation initiale, Paris le 27 mai 2004.

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Circonstance : Clôture du 40ème forum d'Iéna intitulé "Ecole, formation, emploi : la nouvelle donne" à Paris le 28 mai 2004

Texte intégral

Monsieur le Président,
Monsieur le Doyen,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec un grand plaisir qu'honorant l'engagement pris voici quelques semaines par François FILLON, je clos ce 40éme forum d'IENA intitulé : Ecole, Emploi, Formation : la nouvelle donne.
Le programme de vos échanges au long de cet après-midi en porte témoignage. C'est bien, d'une nouvelle donne qu'il s'agit. En matière d'emploi et de formation, notre pays aborde aujourd'hui un tournant décisif.
L'accord conclu le 20 septembre 2003 et la loi du 4 mai dernier sur la formation tout au long de la vie ont donné une nouvelle vigueur à un système de formation continue qui donnait depuis plusieurs années des signes inquiétants d'essoufflement.
Sur ces bases assainies, il nous faut maintenant relever le double défi de l'insertion professionnelle des jeunes et, à l'autre bout du spectre, de la protection et développement de l'emploi des seniors. Ce double défi est au coeur de l'action que j'entends mener avec Jean-Louis BORLOO et Laurent HENART au sein du pôle cohésion sociale du Gouvernement.
Bien entendu, nous entendons associer étroitement les collectivités territoriales à notre démarche.
Je ne reviendrai que brièvement sur les récentes avancées conventionnelles et législatives accomplies en matière de formation professionnelle qui ont été largement évoquées au cours de la seconde table ronde.
Les défauts qui affectaient jusqu'ici notre système de formation professionnelle sont bien connus : inégalité dans l'accès à la formation selon le niveau d'emploi, le sexe, les secteurs d'activité ou la taille de l'entreprise, insuffisante évaluation des actions mises en oeuvre, complexité des structures et de l'organisation institutionnelle...
Reprenant l'équilibre trouvé par les partenaires sociaux dans l'accord conclu à l'unanimité le 20 septembre 2003, la loi du 4 mai dernier apporte sur ces différents points des réponses à la fois innovantes et pragmatiques, fondées sur la responsabilisation des acteurs, l'égalité des chances et l'accroissement des moyens.
Désormais, chaque salarié, quels que soient la taille de l'entreprise qui l'emplie ou la fonction qu'il occupe, se voit reconnaître un droit individuel à la formation correspondant au minimum à 20 h de formation par an. C'est au salarié lui-même, en accord avec le chef d'entreprise, qu'il appartient de déterminer l'usage qu'il entend faire de ce droit, qui peut se cumuler pendant 6 ans et qui peut notamment être mis en oeuvre en cas de licenciement, afin de faciliter la transition vers un nouvel emploi.
Le partage entre temps de travail et temps de formation est réaménagé, selon un principe de coresponsabilité du salarié et de l'entreprise. La formation peut se faire partiellement en dehors du temps de travail. Elle est en contrepartie rétribuée par l'entreprise, l'Etat apportant sa quote-part sous la forme d'une exonération de cotisations sociales.
La formation en alternance est modernisée et élargie au profit des jeunes et des moins jeunes, grâce à la création de contrats de professionnalisation, associant insertion en entreprise et acquisition d'une qualification professionnelle reconnue.
Les moyens financiers, enfin, sont accrus, notamment au profit des salariés des très petites entreprises. Les circuits de financement sont rendus plus transparents et la solidarité entre organismes collecteurs est renforcée.
Cette réforme, ambitieuse dans son contenu et exemplaire par sa conception, vient tout juste d'entrer en vigueur. Plusieurs textes d'application devront être pris pour assurer sa complète mise en oeuvre. La plupart sont déjà prêts et je veillerai personnellement à ce qu'ils sortent dans les meilleurs délais.
Je ne doute pas que cette réforme, attendue et souhaitée par tous, partenaires sociaux, entreprises, Etat et organismes de formation, produise rapidement les effets bénéfiques que l'on peut en attendre.
Ainsi refondé, notre système de formation professionnelle est prêt à repartir de l'avant. Mais les défis à relever restent nombreux. J'en évoquerai aujourd'hui deux : la formation et l'insertion professionnelle des jeunes, d'une part, l'emploi des seniors, d'autre part.
Le taux de chômage des jeunes reste aujourd'hui deux fois supérieur à la moyenne du chômage en France pour atteindre 20%. Mais ce taux recouvre de grands écarts. Les chiffres montrent que ce sont les jeunes les moins qualifiés, ceux qui sortent sans diplôme du système scolaire, qui sont les plus exposés au risque du chômage et rencontrent les plus grandes difficultés à s'insérer dans la vie active. Or, chaque année, ce sont plus de 60.000 jeunes qui sortent sans qualification aucune du système scolaire.
La solution passe d'abord par la poursuite de l'effort d'amélioration du système de formation initiale engagé par le Gouvernement. C'est l'objet des travaux de la commission du débat national sur l'Ecole qui ont été évoqués lors de la première table ronde.
Elle requiert également un recours plus systématique à la validation des acquis de l'expérience. Certains jeunes au parcours scolaire marqué par l'échec, sont en mesure d'acquérir, une fois placés en situation d'emploi, des compétences qui justifient la délivrance d'un titre, gage de nouvelles perspectives de carrière.
L'apprentissage constitue par ailleurs une autre voie pour faciliter l'insertion professionnelle de jeunes souhaitant s'orienter rapidement vers la vie active.
Le défi est de taille. Comme l'a rappelé le Président de la République devant le corps préfectoral, dans les dix années à venir, en raison des départs à la retraites des générations nombreuses de l'après-guerre, c'est plus de 1 million d'emplois qu'il va falloir pourvoir en salariés qualifiés. Il importe donc de préparer les jeunes à assurer efficacement la relève.
C'est pour cela que nous réfléchissons actuellement, dans le cadre du plan de cohésion sociale que prépare Jean-Louis BORLOO, à un dispositif de nouvelle chance au profit des jeunes sortis du système scolaire sans qualification ainsi qu'à une réforme de l'apprentissage. Ces actions ne pourront être menées à bien sans une coopération active avec les acteurs locaux et notamment avec les régions. L'objectif de 500.000 contrats me paraît être à la mesure des besoins.
Si les jeunes rencontrent, pour certains, de grandes difficultés à trouver leur place sur le marché du travail, les plus âgés ne sont guère mieux traités. Notre pays connaît une situation paradoxale, dans laquelle les cadets comme les aînés sont, plus souvent que les autres, durablement exclus de l'emploi, tandis que plus de 300.000 emplois restent chaque année vacants. Il y a là un véritable gâchis humain, qui met en péril notre développement économique et social.
L'emploi des seniors constitue donc, au même titre que l'emploi des jeunes, le grand défi des années à venir et la logique de la réforme des retraites nous y conduit.
Là encore, la solution passe d'abord par une effort accru de formation, pour permettre aux actifs, tout au long de leur carrière, d'accroître leurs compétences et de s'adapter face à l'évolution des emplois et des m étiers. La loi du 4 mai propose d'ores et déjà un certain nombre d'instruments utiles à cet égard : bilan de compétences après 20 ans d'activité, mise en place d'observatoires des métiers et des qualifications dans les branches...
Il importe maintenant que les entreprises elles-mêmes se servent de ces outils pour se doter d'une véritable politique prévisionnelle de gestion des âges et des compétences. Il en va de leur compétitivité et de leur dynamisme.
Je souhaite sur ce sujet que chacun prenne ses responsabilités. L'Etat prendra les siennes en engageant dans les prochains mois une action résolue en faveur de l'emploi des seniors en matière de santé et de sécurité au travail. Les partenaires sociaux doivent à leur tour, tant au niveau des branches qu'au niveau des entreprises, réfléchir à des solutions concrètes et opérationnelles pour permettre aux salariés les plus âgés de conserver leur employabilité et d'avoir une carrière professionnelle complète. Ces solutions passent nécessairement par un effort tout particulier de formation et de consolidation des compétences professionnelles.
Tels sont les quelques éléments de réflexion dont je souhaiterais vous faire part en conclusion de ce 40ème forum d'Iéna. Mesdames, Messieurs, je vous remercie.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 2 juin 2004)