Texte intégral
Messieurs les Présidents,
Madame l'Ambassadeur,
Chers collègues,
Mesdames et Messieurs,
Le Sénat est très heureux d'accueillir aujourd'hui ce colloque économique consacré aux "Balkans" et, plus précisément, à quatre pays issus de l'ex-Yougoslavie (la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, la Macédoine, la Serbie-et-Monténégro), ainsi qu'à l'Albanie.
C'est en fait la première fois que nous abordons cette zone avec nos amis d'UbiFrance -dont je salue la dynamique et sympathique équipe- car jusqu'à présent, nos colloques économiques sur l'Europe centrale et orientale ont surtout porté sur les pays issus de l'ex-Tchécoslovaquie et sur la Roumanie.
Cette remarque m'amène à constater la diversité des thèmes traités lors de ces rencontres qui, au fil des colloques, fournissent aux entreprises et aux investisseurs français un volume d'informations précieux.
Pour m'en tenir au sujet de notre matinée, la première évidence est qu'il existe des différences importantes entre les situations politiques et économiques des cinq pays concernés.
Pour ce qui est des États de l'ex-Yougoslavie, la stabilisation politique progressive permet d'espérer une accélération du redressement économique, même si des incertitudes continuent de peser sur la région, notamment au Kosovo.
La Croatie, en particulier, enregistre déjà des avancées remarquables. L'inflation, qui y atteignait 1 000 % il y a dix ans ( !), a été jugulée pour s'établir aujourd'hui à moins de 3 %, tandis que la croissance, encore négative il y a cinq ans, tourne depuis aux alentours de 4 à 5 % par an.
La Croatie a conclu en 2001 un Accord d'association et de stabilisation avec l'Union européenne, et, selon beaucoup d'observateurs économiques, elle pourrait se qualifier pour l'adhésion en 2007.
La France l'encourage d'ailleurs sur ce chemin -je n'ose pas dire ce parcours du combattant !- comme l'a clairement indiqué le Quai d'Orsay en avril dernier, après l'avis positif émis par la Commission de Bruxelles sur la candidature croate.
Par comparaison, les situations respectives de la Bosnie-Herzégovine et de la Serbie-et-Monténégro paraissent plus fragiles.
Ces deux pays connaissent des taux de chômage élevés, ont accumulé un endettement extérieur préoccupant et restent marqués par le poids de l'économie parallèle. Tout cela retarde ou décourage beaucoup de projets étrangers d'implantation industrielle ou commerciale, comme je le rappelais lundi dernier au Président de Serbie et Monténégro, M. Marovic, que je recevais pour la deuxième fois.
Enfin, en Macédoine et en Albanie -où M. Michel Barnier s'est rendu en septembre dernier- des progrès immenses restent à accomplir avant que ces deux pays se hissent à un niveau de développement comparable à celui de leurs voisins du flanc sud de l'Europe centrale.
L'Albanie, en particulier, accuse les retards les plus flagrants : pratiquement tout reste à faire dans ce pays reclus jusqu'en 1991 dans une autarcie qui tenait de l'enfermement suicidaire.
A ce jour, le pays des Aigles, qui a toute notre sympathie, reste encore un des États européens les moins avancés. Ses fondamentaux économiques -comme on dit dans les journaux- sont, à bien des égards, moins enviables que ceux d'autres pays dits pudiquement " en développement ".
Pour autant, en dépit de leurs différences et de leurs handicaps, ces cinq pays présentent aussi beaucoup de similitudes. Surtout, ils partagent un dénominateur commun auquel nos entreprises ne devraient pas rester insensibles : la certitude d'une expansion économique à rythme soutenu au cours des prochaines années, dans un marché qui totalise plus de 25 millions d'habitants.
Parmi les attraits qu'ils offrent aux investisseurs étrangers, on retiendra d'abord l'afflux des financements internationaux -notamment européens- qui entretiennent la demande tout en apportant des garanties de paiement appréciables.
En outre, ces pays, chacun à son rythme, ont tous entrepris de construire un environnement juridique et commercial propice aux affaires, et adhèrent progressivement à des organisations internationales comme l'OMC (dont la Croatie est membre depuis cinq ans), la Banque européenne de reconstruction et de développement ou le Fonds monétaire international.
Enfin, ces pays, sortis de leur isolationnisme après l'effondrement du bloc de l'Est, n'ont pas d'alternative. S'ils veulent répondre aux attentes de leurs populations et reconstruire leur appareil productif, ils doivent s'ouvrir au commerce international et travailler en partenariat avec des opérateurs étrangers, notamment européens.
Il y a donc là de réelles opportunités d'affaires à saisir pour les entreprises françaises. Je ne doute pas que nos amis d'UbiFrance et les chefs des missions économiques qui nous font aujourd'hui l'honneur de leur présence sauront vous en faire découvrir les recettes.
Toutefois, avant de céder la parole aux spécialistes, je crois indispensable d'ajouter deux recommandations, à mes yeux essentielles.
La première est un encouragement à nos entreprises, car beaucoup, pour le moment, jugent cette zone de l'Europe moins attractive que les nouveaux États membres de l'Union européenne.
Or je constate, une fois de plus, que plusieurs de nos voisins européens se sont déjà montrés plus réactifs que nous sur ce marché, notamment les Allemands et, pour des raisons liées à l'histoire et à la proximité géographique, les Italiens et les Grecs.
La seconde s'adresse aux responsables politiques de la région, et concerne l'importance primordiale de la lutte contre la criminalité économique.
On évoque souvent l'influence occulte des " mafias balkaniques ", auxquelles les conflits armés dans la région ont fourni un terrain d'expansion inégalé.
Mais sans sous-estimer la dangerosité de ces réseaux, les États de la région doivent aussi mettre un terme à diverses pratiques financières très préjudiciables à leurs économies -on pense, notamment, aux détournements d'argent public à grande échelle. Ces dérives sont favorisées par des systèmes bancaires mal contrôlés, et qui gagneraient à s'inspirer des règles prudentielles mises en place dans le reste de l'Europe.
En outre, les circuits de la décision économique sont encore trop souvent tributaires de la corruption ou d'influences qui faussent le jeu de la concurrence et dissuadent les initiatives étrangères.
Je sais que les gouvernements des pays concernés ont déjà pris des mesures sévères pour endiguer ces phénomènes. Ils doivent aussi pouvoir compter sur notre appui, d'autant que plusieurs pays d'Europe de l'Ouest -dont la France- ont élaboré des mécanismes anti-corruption qui pourraient utilement inspirer leur réflexion.
A son niveau, le Sénat, par le canal de ses groupes d'amitié, notamment, peut d'ailleurs les accompagner dans cet effort.
Nous avons, par exemple, reçu en février 2004 une délégation de hauts fonctionnaires de Géorgie, pour les familiariser durant une semaine avec le dispositif français de prévention et de lutte contre les différentes formes de corruption.
Le Sénat s'honore de ce type de coopération parce qu'elle contribue, parmi d'autres mesures, à diffuser des éléments du " modèle français " dans le monde, y compris, bien entendu, au plan économique.
Soyez assurés de notre soutien et, en particulier, de celui de nos groupes d'amitié pour cette partie de l'Europe centrale : France-Albanie, France-Bosnie-Herzégovine, France-Croatie et France-Macédoine, sans oublier France-Serbie-et-Monténégro, qui est aussi le plus jeune de nos groupes, puisqu'il a été créé en juillet 2003 à la suite de la visite au Sénat du Président Marovic, quelques semaines plus tôt.
A tous, je souhaite de bons et fructueux travaux, en espérant que vous garderez un excellent souvenir de votre passage au Sénat et que vous y reviendrez.
(Source http://www.senat.fr, le 30 novembre 2004)
Madame l'Ambassadeur,
Chers collègues,
Mesdames et Messieurs,
Le Sénat est très heureux d'accueillir aujourd'hui ce colloque économique consacré aux "Balkans" et, plus précisément, à quatre pays issus de l'ex-Yougoslavie (la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, la Macédoine, la Serbie-et-Monténégro), ainsi qu'à l'Albanie.
C'est en fait la première fois que nous abordons cette zone avec nos amis d'UbiFrance -dont je salue la dynamique et sympathique équipe- car jusqu'à présent, nos colloques économiques sur l'Europe centrale et orientale ont surtout porté sur les pays issus de l'ex-Tchécoslovaquie et sur la Roumanie.
Cette remarque m'amène à constater la diversité des thèmes traités lors de ces rencontres qui, au fil des colloques, fournissent aux entreprises et aux investisseurs français un volume d'informations précieux.
Pour m'en tenir au sujet de notre matinée, la première évidence est qu'il existe des différences importantes entre les situations politiques et économiques des cinq pays concernés.
Pour ce qui est des États de l'ex-Yougoslavie, la stabilisation politique progressive permet d'espérer une accélération du redressement économique, même si des incertitudes continuent de peser sur la région, notamment au Kosovo.
La Croatie, en particulier, enregistre déjà des avancées remarquables. L'inflation, qui y atteignait 1 000 % il y a dix ans ( !), a été jugulée pour s'établir aujourd'hui à moins de 3 %, tandis que la croissance, encore négative il y a cinq ans, tourne depuis aux alentours de 4 à 5 % par an.
La Croatie a conclu en 2001 un Accord d'association et de stabilisation avec l'Union européenne, et, selon beaucoup d'observateurs économiques, elle pourrait se qualifier pour l'adhésion en 2007.
La France l'encourage d'ailleurs sur ce chemin -je n'ose pas dire ce parcours du combattant !- comme l'a clairement indiqué le Quai d'Orsay en avril dernier, après l'avis positif émis par la Commission de Bruxelles sur la candidature croate.
Par comparaison, les situations respectives de la Bosnie-Herzégovine et de la Serbie-et-Monténégro paraissent plus fragiles.
Ces deux pays connaissent des taux de chômage élevés, ont accumulé un endettement extérieur préoccupant et restent marqués par le poids de l'économie parallèle. Tout cela retarde ou décourage beaucoup de projets étrangers d'implantation industrielle ou commerciale, comme je le rappelais lundi dernier au Président de Serbie et Monténégro, M. Marovic, que je recevais pour la deuxième fois.
Enfin, en Macédoine et en Albanie -où M. Michel Barnier s'est rendu en septembre dernier- des progrès immenses restent à accomplir avant que ces deux pays se hissent à un niveau de développement comparable à celui de leurs voisins du flanc sud de l'Europe centrale.
L'Albanie, en particulier, accuse les retards les plus flagrants : pratiquement tout reste à faire dans ce pays reclus jusqu'en 1991 dans une autarcie qui tenait de l'enfermement suicidaire.
A ce jour, le pays des Aigles, qui a toute notre sympathie, reste encore un des États européens les moins avancés. Ses fondamentaux économiques -comme on dit dans les journaux- sont, à bien des égards, moins enviables que ceux d'autres pays dits pudiquement " en développement ".
Pour autant, en dépit de leurs différences et de leurs handicaps, ces cinq pays présentent aussi beaucoup de similitudes. Surtout, ils partagent un dénominateur commun auquel nos entreprises ne devraient pas rester insensibles : la certitude d'une expansion économique à rythme soutenu au cours des prochaines années, dans un marché qui totalise plus de 25 millions d'habitants.
Parmi les attraits qu'ils offrent aux investisseurs étrangers, on retiendra d'abord l'afflux des financements internationaux -notamment européens- qui entretiennent la demande tout en apportant des garanties de paiement appréciables.
En outre, ces pays, chacun à son rythme, ont tous entrepris de construire un environnement juridique et commercial propice aux affaires, et adhèrent progressivement à des organisations internationales comme l'OMC (dont la Croatie est membre depuis cinq ans), la Banque européenne de reconstruction et de développement ou le Fonds monétaire international.
Enfin, ces pays, sortis de leur isolationnisme après l'effondrement du bloc de l'Est, n'ont pas d'alternative. S'ils veulent répondre aux attentes de leurs populations et reconstruire leur appareil productif, ils doivent s'ouvrir au commerce international et travailler en partenariat avec des opérateurs étrangers, notamment européens.
Il y a donc là de réelles opportunités d'affaires à saisir pour les entreprises françaises. Je ne doute pas que nos amis d'UbiFrance et les chefs des missions économiques qui nous font aujourd'hui l'honneur de leur présence sauront vous en faire découvrir les recettes.
Toutefois, avant de céder la parole aux spécialistes, je crois indispensable d'ajouter deux recommandations, à mes yeux essentielles.
La première est un encouragement à nos entreprises, car beaucoup, pour le moment, jugent cette zone de l'Europe moins attractive que les nouveaux États membres de l'Union européenne.
Or je constate, une fois de plus, que plusieurs de nos voisins européens se sont déjà montrés plus réactifs que nous sur ce marché, notamment les Allemands et, pour des raisons liées à l'histoire et à la proximité géographique, les Italiens et les Grecs.
La seconde s'adresse aux responsables politiques de la région, et concerne l'importance primordiale de la lutte contre la criminalité économique.
On évoque souvent l'influence occulte des " mafias balkaniques ", auxquelles les conflits armés dans la région ont fourni un terrain d'expansion inégalé.
Mais sans sous-estimer la dangerosité de ces réseaux, les États de la région doivent aussi mettre un terme à diverses pratiques financières très préjudiciables à leurs économies -on pense, notamment, aux détournements d'argent public à grande échelle. Ces dérives sont favorisées par des systèmes bancaires mal contrôlés, et qui gagneraient à s'inspirer des règles prudentielles mises en place dans le reste de l'Europe.
En outre, les circuits de la décision économique sont encore trop souvent tributaires de la corruption ou d'influences qui faussent le jeu de la concurrence et dissuadent les initiatives étrangères.
Je sais que les gouvernements des pays concernés ont déjà pris des mesures sévères pour endiguer ces phénomènes. Ils doivent aussi pouvoir compter sur notre appui, d'autant que plusieurs pays d'Europe de l'Ouest -dont la France- ont élaboré des mécanismes anti-corruption qui pourraient utilement inspirer leur réflexion.
A son niveau, le Sénat, par le canal de ses groupes d'amitié, notamment, peut d'ailleurs les accompagner dans cet effort.
Nous avons, par exemple, reçu en février 2004 une délégation de hauts fonctionnaires de Géorgie, pour les familiariser durant une semaine avec le dispositif français de prévention et de lutte contre les différentes formes de corruption.
Le Sénat s'honore de ce type de coopération parce qu'elle contribue, parmi d'autres mesures, à diffuser des éléments du " modèle français " dans le monde, y compris, bien entendu, au plan économique.
Soyez assurés de notre soutien et, en particulier, de celui de nos groupes d'amitié pour cette partie de l'Europe centrale : France-Albanie, France-Bosnie-Herzégovine, France-Croatie et France-Macédoine, sans oublier France-Serbie-et-Monténégro, qui est aussi le plus jeune de nos groupes, puisqu'il a été créé en juillet 2003 à la suite de la visite au Sénat du Président Marovic, quelques semaines plus tôt.
A tous, je souhaite de bons et fructueux travaux, en espérant que vous garderez un excellent souvenir de votre passage au Sénat et que vous y reviendrez.
(Source http://www.senat.fr, le 30 novembre 2004)