Texte intégral
Monsieur le Proviseur, Mesdames et messieurs,
Merci pour votre présence et votre accueil.
Je suis particulièrement heureux de partager avec vous ce moment fort qu'est la rentrée scolaire. C'est, à vos côtés, que j'ai voulu marquer ce nouveau départ. Je crois en effet utile de montrer à nos concitoyens qu'ici, à la Courneuve, comme partout en France, l'Éducation nationale est mobilisée.
À la même heure, dans près de 60 000 écoles, collèges et lycées, les personnels d'encadrement affinent leur organisation, les agents administratifs et techniques sont sur le " pont " ; quant aux enseignants, ils s'apprêtent à accueillir leurs élèves.
Certains d'entre vous sont d'ailleurs déjà à l'uvre - m'a-t-on dit - depuis le 25 août, pour épauler, de façon originale, une soixantaine d'élèves éprouvant des difficultés scolaires.
On parle souvent du sentiment d'angoisse qu'éprouvent les enfants durant ces premiers jours de rentrée Mais il existe aussi, je le sais, une forme d'appréhension chez tous ceux qui, pendant une année, devront les accompagner vers la réussite.
Ma mère fut enseignante. J'ai donc quelques souvenirs de ces veilles de rentrée Dans ces moments, je crois que beaucoup d'enseignants s'interrogent secrètement : arriverai-je à porter les adolescents vers le meilleur d'eux-mêmes ? Arriverai-je à susciter chez eux cette étincelle d'intérêt et de passion qui, souvent, éclaire, par la suite, une vie entière ?
Eh bien oui Chaque année, des millions d'élèves entrent en classe et en sortent grandis. Bien sûr, il y a des difficultés, des échecs, des déceptions Mais globalement le défi est relevé !
Les critiques, trop souvent injustes, qui sont adressées à l'égard de notre système scolaire, me conduisent - et me conduiront chaque fois que nécessaire - à souligner que notre pays n'a pas à rougir du travail effectué par son école. Si des adaptations et des améliorations sont légitimes, je récuse les discours catastrophistes.
Aujourd'hui - alors que toute une organisation faite de femmes et d'hommes dévoués et souvent attachés à leur métier se met en marche - je veux vous dire la fierté que j'éprouve devant cet élan pour l'éducation de tous. Il est à l'image d'un pays qui, dans ses profondeurs républicaines, n'a jamais cessé de miser sur son École publique.
Dans ce lycée Jacques Brel, la tâche qui vous incombe n'est pas des plus faciles.
À La Courneuve, les enjeux éducatifs ne se posent pas dans les mêmes termes que dans les zones plus privilégiées. Plus qu'ailleurs, les difficultés et les blocages de notre société se répercutent sur votre établissement. Face au délitement social, face à la violence, face à l'absence de repères qui caractérise certaines familles, face aux enjeux de l'intégration, vous êtes, en quelque sorte, plus que d'autres, en mission.
Au regard des multiples initiatives originales qui sont développées dans votre établissement, au regard de votre engagement, je veux vous dire combien votre lycée me paraît être un modèle.
" Encadrer, éduquer, socialiser au quotidien : l'affaire de tous ! " : cette devise que vous vous êtes choisie, résonne comme un superbe mot d'ordre !
Pour moi, pour vous aussi je crois, le terme " Éducation nationale " porte en lui un projet de société que j'estime d'actualité et plus que jamais vital en ces lieux : celui d'instruire et de rassembler. Instruire, c'est offrir à chaque élève les connaissances nécessaires à son épanouissement ; rassembler, c'est contribuer à unir, de façon résolue et fraternelle, notre communauté nationale autour de son idéal républicain.
L'image d'Epinal des " hussards noirs " de la IIIe République est sans doute périmée Mais entre les responsabilités de ces professeurs d'hier et celles que vous assumez aujourd'hui, le fil directeur demeure perceptible : il s'agit toujours de construire la société de demain, une société au sein de laquelle chaque individu, quels que soient son milieu social ou ses origines, soit en mesure de choisir son destin grâce à l'éducation reçue, une société au sein de laquelle les principes éthiques partagés l'emportent sur l'individualisme, le mercantilisme et le rejet de l'autre.
L'institution scolaire incarne bien à cet égard un combat pour des valeurs : la valeur du savoir et de la raison, la valeur du respect et du civisme. Dans ce début de XXIe siècle que je pressens chahuté, tourmenté par le scénario du choc des civilisations, parfois déshumanisé, ce qui est en jeu, c'est bien une certaine idée de l'homme, et ce qui est en cause c'est bien une certaine idée de la France et du vivre ensemble. Votre responsabilité éducative s'inscrit, j'en ai la conviction, dans ce vaste défi.
Être enseignant dans ces murs, dans ce département, ce n'est donc pas qu'un métier, c'est un engagement professionnel et humain ; un engagement difficile mais qui vous honore et respecte l'idée que nous nous faisons de l'égalité des chances. Je vous l'affirme : vous pouvez être légitimement fiers de cet engagement !
Mesdames et messieurs,
Trop d'adolescents - vous le savez mieux que quiconque - restent encore sur le bord de la route.
La question de l'égalité des chances est au cur de toutes les réflexions que nous devons développer pour adapter notre système éducatif. La loi d'orientation sur l'École que nous préparons devra renforcer les efforts engagés pour garantir une École pour tous et un avenir pour chacun.
Cette égalité des chances exige que les moyens humains et financiers soient prioritairement ciblés sur les zones les plus difficiles, car les enjeux éducatifs ne sont pas les mêmes selon que l'on habite à Passy ou à Grigny.
Mais au-delà des moyens, nous avons des ajustements à effectuer et des principes à restaurer.
Au service de l'égalité des chances, trois objectifs me paraissent prioritaires.
Le premier doit être que tous les enfants acquièrent un bagage commun. Tout enfant qui entre en 6e doit savoir lire, écrire, compter. Tous ceux qui connaissent la réalité, savent qu'il n'est pas inutile de le réaffirmer avec force, encore aujourd'hui.
Si cette priorité n'est pas assurée, alors le collège et le lycée ne peuvent pas, en aval, tenir pleinement leur rôle. Dans cette perspective, la poursuite à l'école primaire du plan de prévention de lecture et d'écriture à travers notamment les cours préparatoires dédoublés ou renforcés doit être approfondie et évaluée sur le moyen terme. J'insisterai également prochainement sur la nécessité de revisiter des méthodes d'apprentissage plus traditionnelles et éprouvées en matière de lecture et d'écriture.
Le second objectif est que chacun puisse librement choisir, au terme d'un tronc commun, la voie qui lui est la plus appropriée. Je refuse d'entrer dans les débats un peu théoriques sur le collège unique ou multiple. Il faut que le collège soit pour tous ! C'est-à-dire un collège qui donne les moyens à chacun d'acquérir des savoirs fondamentaux - c'est la notion de " socle " - et qui offre en parallèle une ouverture sur des filières professionnelles qui doivent être motivantes et valorisantes.
Pour cela, il ne faut pas hiérarchiser et opposer les filières. Parce que l'excellence peut être plurielle, il faut de la diversité, il faut des passerelles.
C'est dans cet esprit que j'ai décidé d'engager le projet d'adaptation de la 3ème, qui, parmi les évolutions envisagées, propose un parcours de " découverte professionnelle ". Il permettra d'intégrer la dimension professionnelle comme composante de la " culture scolaire ".
L'ambition de notre système scolaire se situe, vous le savez, dans la perspective des 80 % d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat. Mais derrière ce chiffre ambitieux et symbolique, il y a des réalités plus complexes, des revers silencieux mais douloureux
Face à cette réalité, il faut enrichir notre horizon en visant 100 % des élèves atteignant une qualification, en trouvant leur voie, leur épanouissement. Dans cette perspective, nous devons donner leurs lettres de noblesse à toutes ces filières qui comportent des expériences pratiques et des qualifications professionnelles.
Enfin, le troisième objectif renvoie aux valeurs partagées qui doivent animer l'institution scolaire. L'égalité des chances ne peut s'épanouir dans le désordre.
L'institution scolaire n'est pas un espace comme les autres. Il réunit des enfants et des adolescents de tous milieux, de toutes origines ; il est le lieu du savoir et de l'apprentissage de la citoyenneté. L'École doit être le creuset de la République et non le " ring " de la société française.
L'autorité du chef d'établissement, le respect des professeurs, l'exigence à l'endroit des élèves, sont pour moi des principes cardinaux. Je n'ai en la matière aucun complexe. Là où l'autorité, le respect, le mérite s'effondrent, les plus démunis psychologiquement et socialement sont les premières victimes. À chaque fois que ces principes seront attaqués, sachez que je serai à vos côtés pour les défendre.
Avec les élèves, avec les parents, vous forgez une communauté d'action et de dialogue. Cette communauté doit avancer ensemble, avec ses règles, ses droits et devoirs, et ses espoirs communs.
Cette rentrée 2004, je veux qu'elle soit placée sous le sceau de la fraternité républicaine.
C'est le cur serré que j'évoque devant vous les noms de Christian Chesnot et Georges Malbrunot, ces deux otages français, qui sont les victimes innocentes d'un chantage odieux, cruel et dépourvu de sens. Dans cette douloureuse affaire, la pression n'est pas uniquement mise sur la République Française, c'est aussi une blessure pour l'immense majorité de nos concitoyens musulmans.
Je veux dire aussi - et peut-être ces propos parviendront-ils, au-delà de nos frontières, là où cette loi a été mal interprétée - que la laïcité n'est nullement tournée contre les religions, et donc pas contre la religion musulmane. En la matière, nous récusons tout amalgame. La législation qui concerne tous les signes religieux ostensibles ne s'adresse qu'à l'école afin de permettre à tous les enfants de France de vivre ensemble, en harmonie. Hors l'école, chacun est libre de pratiquer sa religion, s'il en a une.
L'élan unanime de solidarité qu'a suscité la détention de nos deux compatriotes confirme la cohésion de notre démocratie qui fait place à toutes ses composantes.
Faire en sorte que ce qui nous rassemble soit plus fort que ce qui peut nous diviser : c'est ce message d'union et de compréhension mutuelle qui est sous-jacent à notre action en faveur de la laïcité. Ce message fraternel, je vous demande de le faire partager et respecter !
Cette loi ne résume pas, loin s'en faut, le défi de l'intégration. Tant de choses positives et importantes doivent être parallèlement déployées pour assurer l'égalité des chances et la promotion sociale !
Toute cette jeunesse française, souvent issue de l'immigration, et que l'on qualifie inélégamment " des banlieues ", est pleine d'énergie, de talents, de générosité. Il faut savoir lui tendre la main et lui donner confiance ; il faut savoir lui ouvrir les portes de la société en balayant les soupçons et les préjugés qui sont inacceptables.
En France, quels que soient le milieu social, la couleur de la peau ou la confession, on doit avoir les mêmes chances. L'éducation est la pierre angulaire de cette ambition qui se traite au quotidien, parfois avec des mesures spécifiques qu'il appartient à la communauté éducative d'imaginer et de déployer.
Dans votre lycée, vous formez une équipe particulièrement motivée, soudée et créative. Monsieur le Proviseur, ce climat vous doit sans doute beaucoup.
Ici, chaque adolescent porte en lui un avenir dont vous tentez ensemble d'ouvrir les chemins. Pour chercher à améliorer les résultats de vos élèves, pour les accompagner et les escorter vers le bac, puis parfois au-delà, vos initiatives sont exemplaires.
Vous développez une stratégie de soutien aux élèves des terminales S et ES. Vous menez des actions de tutorat qui doivent être saluées. Vous organisez des stages d'été pour assurer la mise à niveau de certains de vos lycéens. Vous organisez des sorties culturelles et artistiques. Je sais que vous avez noué des partenariats d'excellence avec des universités et établi une convention avec l'IEP. Une dizaine de vos jeunes ont ainsi intégré Sciences Politiques.
Par ailleurs, votre lycée accueille chaque année une quinzaine d'étudiants en échec à l'issue de leur premier semestre dans le supérieur. Vous leur offrez ainsi une nouvelle chance en leur proposant une formation qui les conduit au BTS " communication des entreprises ".
Toutes ces initiatives concrètes sont importantes. Elles témoignent de votre investissement, de votre foi et de votre professionnalisme.
Monsieur le Proviseur,
Mesdames et messieurs,
Votre établissement fait honneur à l'École publique. À quelques heures de la rentrée scolaire, nos concitoyens doivent savoir que, sur le terrain, des femmes et des hommes aiment leur métier, s'engagent et se dévouent pour tous les enfants et les adolescents de France.
Merci de votre accueil. Bon courage. Et bonne rentrée !
(Source http://www.education.gouv.fr, le 2 septembre 2004)
Merci pour votre présence et votre accueil.
Je suis particulièrement heureux de partager avec vous ce moment fort qu'est la rentrée scolaire. C'est, à vos côtés, que j'ai voulu marquer ce nouveau départ. Je crois en effet utile de montrer à nos concitoyens qu'ici, à la Courneuve, comme partout en France, l'Éducation nationale est mobilisée.
À la même heure, dans près de 60 000 écoles, collèges et lycées, les personnels d'encadrement affinent leur organisation, les agents administratifs et techniques sont sur le " pont " ; quant aux enseignants, ils s'apprêtent à accueillir leurs élèves.
Certains d'entre vous sont d'ailleurs déjà à l'uvre - m'a-t-on dit - depuis le 25 août, pour épauler, de façon originale, une soixantaine d'élèves éprouvant des difficultés scolaires.
On parle souvent du sentiment d'angoisse qu'éprouvent les enfants durant ces premiers jours de rentrée Mais il existe aussi, je le sais, une forme d'appréhension chez tous ceux qui, pendant une année, devront les accompagner vers la réussite.
Ma mère fut enseignante. J'ai donc quelques souvenirs de ces veilles de rentrée Dans ces moments, je crois que beaucoup d'enseignants s'interrogent secrètement : arriverai-je à porter les adolescents vers le meilleur d'eux-mêmes ? Arriverai-je à susciter chez eux cette étincelle d'intérêt et de passion qui, souvent, éclaire, par la suite, une vie entière ?
Eh bien oui Chaque année, des millions d'élèves entrent en classe et en sortent grandis. Bien sûr, il y a des difficultés, des échecs, des déceptions Mais globalement le défi est relevé !
Les critiques, trop souvent injustes, qui sont adressées à l'égard de notre système scolaire, me conduisent - et me conduiront chaque fois que nécessaire - à souligner que notre pays n'a pas à rougir du travail effectué par son école. Si des adaptations et des améliorations sont légitimes, je récuse les discours catastrophistes.
Aujourd'hui - alors que toute une organisation faite de femmes et d'hommes dévoués et souvent attachés à leur métier se met en marche - je veux vous dire la fierté que j'éprouve devant cet élan pour l'éducation de tous. Il est à l'image d'un pays qui, dans ses profondeurs républicaines, n'a jamais cessé de miser sur son École publique.
Dans ce lycée Jacques Brel, la tâche qui vous incombe n'est pas des plus faciles.
À La Courneuve, les enjeux éducatifs ne se posent pas dans les mêmes termes que dans les zones plus privilégiées. Plus qu'ailleurs, les difficultés et les blocages de notre société se répercutent sur votre établissement. Face au délitement social, face à la violence, face à l'absence de repères qui caractérise certaines familles, face aux enjeux de l'intégration, vous êtes, en quelque sorte, plus que d'autres, en mission.
Au regard des multiples initiatives originales qui sont développées dans votre établissement, au regard de votre engagement, je veux vous dire combien votre lycée me paraît être un modèle.
" Encadrer, éduquer, socialiser au quotidien : l'affaire de tous ! " : cette devise que vous vous êtes choisie, résonne comme un superbe mot d'ordre !
Pour moi, pour vous aussi je crois, le terme " Éducation nationale " porte en lui un projet de société que j'estime d'actualité et plus que jamais vital en ces lieux : celui d'instruire et de rassembler. Instruire, c'est offrir à chaque élève les connaissances nécessaires à son épanouissement ; rassembler, c'est contribuer à unir, de façon résolue et fraternelle, notre communauté nationale autour de son idéal républicain.
L'image d'Epinal des " hussards noirs " de la IIIe République est sans doute périmée Mais entre les responsabilités de ces professeurs d'hier et celles que vous assumez aujourd'hui, le fil directeur demeure perceptible : il s'agit toujours de construire la société de demain, une société au sein de laquelle chaque individu, quels que soient son milieu social ou ses origines, soit en mesure de choisir son destin grâce à l'éducation reçue, une société au sein de laquelle les principes éthiques partagés l'emportent sur l'individualisme, le mercantilisme et le rejet de l'autre.
L'institution scolaire incarne bien à cet égard un combat pour des valeurs : la valeur du savoir et de la raison, la valeur du respect et du civisme. Dans ce début de XXIe siècle que je pressens chahuté, tourmenté par le scénario du choc des civilisations, parfois déshumanisé, ce qui est en jeu, c'est bien une certaine idée de l'homme, et ce qui est en cause c'est bien une certaine idée de la France et du vivre ensemble. Votre responsabilité éducative s'inscrit, j'en ai la conviction, dans ce vaste défi.
Être enseignant dans ces murs, dans ce département, ce n'est donc pas qu'un métier, c'est un engagement professionnel et humain ; un engagement difficile mais qui vous honore et respecte l'idée que nous nous faisons de l'égalité des chances. Je vous l'affirme : vous pouvez être légitimement fiers de cet engagement !
Mesdames et messieurs,
Trop d'adolescents - vous le savez mieux que quiconque - restent encore sur le bord de la route.
La question de l'égalité des chances est au cur de toutes les réflexions que nous devons développer pour adapter notre système éducatif. La loi d'orientation sur l'École que nous préparons devra renforcer les efforts engagés pour garantir une École pour tous et un avenir pour chacun.
Cette égalité des chances exige que les moyens humains et financiers soient prioritairement ciblés sur les zones les plus difficiles, car les enjeux éducatifs ne sont pas les mêmes selon que l'on habite à Passy ou à Grigny.
Mais au-delà des moyens, nous avons des ajustements à effectuer et des principes à restaurer.
Au service de l'égalité des chances, trois objectifs me paraissent prioritaires.
Le premier doit être que tous les enfants acquièrent un bagage commun. Tout enfant qui entre en 6e doit savoir lire, écrire, compter. Tous ceux qui connaissent la réalité, savent qu'il n'est pas inutile de le réaffirmer avec force, encore aujourd'hui.
Si cette priorité n'est pas assurée, alors le collège et le lycée ne peuvent pas, en aval, tenir pleinement leur rôle. Dans cette perspective, la poursuite à l'école primaire du plan de prévention de lecture et d'écriture à travers notamment les cours préparatoires dédoublés ou renforcés doit être approfondie et évaluée sur le moyen terme. J'insisterai également prochainement sur la nécessité de revisiter des méthodes d'apprentissage plus traditionnelles et éprouvées en matière de lecture et d'écriture.
Le second objectif est que chacun puisse librement choisir, au terme d'un tronc commun, la voie qui lui est la plus appropriée. Je refuse d'entrer dans les débats un peu théoriques sur le collège unique ou multiple. Il faut que le collège soit pour tous ! C'est-à-dire un collège qui donne les moyens à chacun d'acquérir des savoirs fondamentaux - c'est la notion de " socle " - et qui offre en parallèle une ouverture sur des filières professionnelles qui doivent être motivantes et valorisantes.
Pour cela, il ne faut pas hiérarchiser et opposer les filières. Parce que l'excellence peut être plurielle, il faut de la diversité, il faut des passerelles.
C'est dans cet esprit que j'ai décidé d'engager le projet d'adaptation de la 3ème, qui, parmi les évolutions envisagées, propose un parcours de " découverte professionnelle ". Il permettra d'intégrer la dimension professionnelle comme composante de la " culture scolaire ".
L'ambition de notre système scolaire se situe, vous le savez, dans la perspective des 80 % d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat. Mais derrière ce chiffre ambitieux et symbolique, il y a des réalités plus complexes, des revers silencieux mais douloureux
Face à cette réalité, il faut enrichir notre horizon en visant 100 % des élèves atteignant une qualification, en trouvant leur voie, leur épanouissement. Dans cette perspective, nous devons donner leurs lettres de noblesse à toutes ces filières qui comportent des expériences pratiques et des qualifications professionnelles.
Enfin, le troisième objectif renvoie aux valeurs partagées qui doivent animer l'institution scolaire. L'égalité des chances ne peut s'épanouir dans le désordre.
L'institution scolaire n'est pas un espace comme les autres. Il réunit des enfants et des adolescents de tous milieux, de toutes origines ; il est le lieu du savoir et de l'apprentissage de la citoyenneté. L'École doit être le creuset de la République et non le " ring " de la société française.
L'autorité du chef d'établissement, le respect des professeurs, l'exigence à l'endroit des élèves, sont pour moi des principes cardinaux. Je n'ai en la matière aucun complexe. Là où l'autorité, le respect, le mérite s'effondrent, les plus démunis psychologiquement et socialement sont les premières victimes. À chaque fois que ces principes seront attaqués, sachez que je serai à vos côtés pour les défendre.
Avec les élèves, avec les parents, vous forgez une communauté d'action et de dialogue. Cette communauté doit avancer ensemble, avec ses règles, ses droits et devoirs, et ses espoirs communs.
Cette rentrée 2004, je veux qu'elle soit placée sous le sceau de la fraternité républicaine.
C'est le cur serré que j'évoque devant vous les noms de Christian Chesnot et Georges Malbrunot, ces deux otages français, qui sont les victimes innocentes d'un chantage odieux, cruel et dépourvu de sens. Dans cette douloureuse affaire, la pression n'est pas uniquement mise sur la République Française, c'est aussi une blessure pour l'immense majorité de nos concitoyens musulmans.
Je veux dire aussi - et peut-être ces propos parviendront-ils, au-delà de nos frontières, là où cette loi a été mal interprétée - que la laïcité n'est nullement tournée contre les religions, et donc pas contre la religion musulmane. En la matière, nous récusons tout amalgame. La législation qui concerne tous les signes religieux ostensibles ne s'adresse qu'à l'école afin de permettre à tous les enfants de France de vivre ensemble, en harmonie. Hors l'école, chacun est libre de pratiquer sa religion, s'il en a une.
L'élan unanime de solidarité qu'a suscité la détention de nos deux compatriotes confirme la cohésion de notre démocratie qui fait place à toutes ses composantes.
Faire en sorte que ce qui nous rassemble soit plus fort que ce qui peut nous diviser : c'est ce message d'union et de compréhension mutuelle qui est sous-jacent à notre action en faveur de la laïcité. Ce message fraternel, je vous demande de le faire partager et respecter !
Cette loi ne résume pas, loin s'en faut, le défi de l'intégration. Tant de choses positives et importantes doivent être parallèlement déployées pour assurer l'égalité des chances et la promotion sociale !
Toute cette jeunesse française, souvent issue de l'immigration, et que l'on qualifie inélégamment " des banlieues ", est pleine d'énergie, de talents, de générosité. Il faut savoir lui tendre la main et lui donner confiance ; il faut savoir lui ouvrir les portes de la société en balayant les soupçons et les préjugés qui sont inacceptables.
En France, quels que soient le milieu social, la couleur de la peau ou la confession, on doit avoir les mêmes chances. L'éducation est la pierre angulaire de cette ambition qui se traite au quotidien, parfois avec des mesures spécifiques qu'il appartient à la communauté éducative d'imaginer et de déployer.
Dans votre lycée, vous formez une équipe particulièrement motivée, soudée et créative. Monsieur le Proviseur, ce climat vous doit sans doute beaucoup.
Ici, chaque adolescent porte en lui un avenir dont vous tentez ensemble d'ouvrir les chemins. Pour chercher à améliorer les résultats de vos élèves, pour les accompagner et les escorter vers le bac, puis parfois au-delà, vos initiatives sont exemplaires.
Vous développez une stratégie de soutien aux élèves des terminales S et ES. Vous menez des actions de tutorat qui doivent être saluées. Vous organisez des stages d'été pour assurer la mise à niveau de certains de vos lycéens. Vous organisez des sorties culturelles et artistiques. Je sais que vous avez noué des partenariats d'excellence avec des universités et établi une convention avec l'IEP. Une dizaine de vos jeunes ont ainsi intégré Sciences Politiques.
Par ailleurs, votre lycée accueille chaque année une quinzaine d'étudiants en échec à l'issue de leur premier semestre dans le supérieur. Vous leur offrez ainsi une nouvelle chance en leur proposant une formation qui les conduit au BTS " communication des entreprises ".
Toutes ces initiatives concrètes sont importantes. Elles témoignent de votre investissement, de votre foi et de votre professionnalisme.
Monsieur le Proviseur,
Mesdames et messieurs,
Votre établissement fait honneur à l'École publique. À quelques heures de la rentrée scolaire, nos concitoyens doivent savoir que, sur le terrain, des femmes et des hommes aiment leur métier, s'engagent et se dévouent pour tous les enfants et les adolescents de France.
Merci de votre accueil. Bon courage. Et bonne rentrée !
(Source http://www.education.gouv.fr, le 2 septembre 2004)