Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureuse de rencontrer ici, dans les locaux de l'Académie des sciences, les représentants des Unions scientifiques internationales membres du Conseil International pour la Science (ICSU), et je voudrais avant tout vous adresser à tous un mot de bienvenue chaleureux. C'est une grande joie pour moi de voir réunis aujourd'hui des scientifiques du monde entier. Les Unions scientifiques que vous animez dans tous vos pays respectifs portent une image vivante de l'état de la science dans le monde, et les bénéfices que nous en tirons sont nombreux, tant pour la compréhension de notre temps que pour la cohésion des nations.
Les Unions ont en effet un rôle tout à fait essentiel au sein de la grande famille que constitue l'ICSU car elles sont, par définition, en prise directe avec la recherche à l'intérieur de chaque discipline. Les Unions scientifiques internationales couvrent tout le spectre des disciplines scientifiques.
Elles sont devenues le lieu privilégié où s'initient et s'élaborent de grands programmes de recherche à vocation planétaire, notamment dans le domaine de l'environnement, de l'espace, de l'énergie mais aussi de l'aide à la formation des élites scientifiques dans les pays en développement. La connaissance n'a pas de frontière. La recherche est par essence internationale. Votre contribution à ce véritable socle de toute société qu'est l'extension du savoir par la recherche est essentielle puisque vous participez à la genèse des nouvelles questions, des nouvelles approches et des nouvelles méthodes. La recherche fondamentale ne se programme pas et les découvertes ne se commandent pas. Pourtant, nos concitoyens comme les responsables politiques ont besoin de mieux percevoir cette émergence des nouvelles voies de recherche. C'est notre contribution à l'intelligence du futur. C'est aussi un devoir vis à vis de la société. Voilà, je crois, une belle tâche pour vous tous et le bureau exécutif de l'ICSU.
Pour notre pays et en particulier pour l'Académie des sciences qui représente institutionnellement la France, l'ICSU et les Unions scientifiques internationales constituent un outil original de coopération multilatérale. Le Gouvernement français apporte sa contribution en hébergeant, depuis 1972, le secrétariat de l'ICSU, boulevard de Montmorency à Paris, mais aussi en finançant la participation de la communauté scientifique française aux Unions et Comités de l'ICSU.
En effet, il nous semble capital que les Congrès organisés par les Unions qui ont vocation à rassembler tous les chercheurs et responsables d'une discipline, quelles que soient leurs origines, et à contribuer à la formation des jeunes chercheurs, continuent à jouer un rôle prédominant pour la communauté scientifique dans son ensemble.
Vous participez aussi à l'Europe de la science. On constate depuis plusieurs années le développement croissant de fédérations scientifiques européennes constituées par la réunion de sociétés disciplinaires nationales. L'Europe de la recherche est en marche, la recherche scientifique est un des axes majeurs de la construction de l'Europe. Cette construction progressive de la science européenne est un facteur de progrès. La connaissance et le partage du savoir contribuent à la formation d'une identité européenne.
C'est à l'échelle de l'Europe que peuvent se concevoir les programmes ou les plate-formes de niveau international.
Il faut que les communautés scientifiques européennes collaborent entre elles mais elles doivent le faire aussi avec les autres régions du monde à travers l'ICSU. Il est donc important que l'ICSU et les Unions reconnaissent clairement ces nouvelles structures européennes en tant que partenaires régionaux.
L'organisation duale de l'ICSU qui associe d'une part des membres nationaux, principalement les Académies des sciences et, d'autre part les Unions, est un élément favorable pour tenir compte de l'évolution rapide des sciences et des techniques mais aussi des divers contextes culturels et sociaux. L'existence de réseaux internationaux est essentielle pour prendre en compte les spécificités locales et aider en particulier les pays en développement à réduire la fracture scientifique.
Nous sommes entrés dans un monde nouveau. A bien des égards, ce monde nouveau est le fruit des avancées de la science et de la technologie. L'extraordinaire développement de la biologie permet à l'homme de modifier le vivant comme jamais auparavant. La diffusion de l'information s'étend à une vitesse vertigineuse.
Ce sont les scientifiques qui nous ont aidés à mieux comprendre la fragilité du milieu et les cycles des ressources renouvelables de notre planète.
Or, ce paysage forgé par la science est habité par des sociétés qui expriment des aspirations nouvelles en terme de bien-être et de sécurité, mais aussi de démocratie, d'éthique, de responsabilité et d'anticipation. Et ceci dans un monde dont les politiques économiques doivent favoriser à la fois la création des richesses et l'accès aux biens publics, dont fait partie la connaissance. Un monde qui doit promouvoir des politiques publiques qui concilient le local et le global.
Cette situation impose une nouvelle conception de la démarche scientifique et des politiques de recherche. Cette attente est à la fois forte et légitime. La France a lancé une réflexion sur l'avenir de la recherche ouverte à tous. Je souhaite que cette réflexion s'inscrive dans une perspective internationale. C'est pourquoi j'ai tenu à être parmi vous ce matin. Aucun pays ne peut aujourd'hui définir l'évolution de la recherche sans prendre en compte le contexte international. Dans cette perspective, votre contribution à cette réflexion, relayée par l'Académie des sciences, sera sans conteste de toute première importance, et je saurais rester attentive aux conclusions que vous porterez.
Je compte sur vous tous pour aider à dégager ensemble cette vision du futur de la science.
Je vous remercie de votre attention.
(source http://www.recherche.gouv.fr, le 10 février 2004)