Texte intégral
Quel constat dressez-vous de l'enseignement professionnel quatre mois après votre entrée en fonction ?
Il est simple : j'observe d'un côté que les entreprises peinent à recruter et de l'autre que les effectifs formés dans les établissements professionnels diminuent. Pour l'année scolaire 1999-2000, il y a eu 21 000 élèves de moins dans le secondaire dont 15 000 dans l'enseignement professionnel. Pour la rentrée 2000, nous enregistrerons encore 11 000 élèves en moins. C'est bien le signe qu'il y a un problème d'image et de lisibilité du système aujourd'hui.
Comment remédier à cette mauvaise image de l'enseignement professionnel ?
Je ne pense pas que l'on ait besoin d'une grande réforme mais davantage de réglages concrets. Le point de départ est simple: tout parent veut que son enfant réussisse. Or l'enseignement professionnel est vécu aujourd'hui comme une impasse. Nous devons apporter de la fluidité à la filière. Un jeune qui choisit cette voie doit pouvoir poursuivre ses études s'il le souhaite. Nous avons plusieurs pistes de travail. Tout d'abord, tout BEP doit avoir un bac professionnel équivalent. Mes services dressent aujourd'hui un inventaire des deux diplômes pour qu'à l'avenir il n'y ait plus de BEP sans bac pro équivalent. Seconde piste, permettre la poursuite d'études de ces jeunes titulaires d'un bac professionnel. 0,8 % seulement poursuivent en BTS ou DUT. L'échec est patent.
Que proposez-vous pour aider ces jeunes bac pro à poursuivre leurs études ?
Là aussi, plusieurs pistes sont à l'étude: il est envisageable de créer un système de classe préparatoire qui ferait l'interface entre le bac pro et l'enseignement supérieur. Plus prosaïquement, on peut activer le système des premières d'adaptation qui créent des passerelles entre les filières professionnelle et technologique. Cela marche peu aujourd'hui. Améliorons le système. Ne pourrait-on pas, cela existe déjà ici ou là, rassembler dans un même établissement enseignement professionnel et enseignement technologique. Je peux déjà vous annoncer que dès la prochaine rentrée scolaire, tout lycéen qui a eu son bac pro pourra intégrer une autre classe de terminale pour préparer un autre bac tout en conservant le bénéfice des notes de matières générales où il a eu la moyenne. Nous devons multiplier les actions concrètes pour favoriser les synergies.
Par quelles mesures envisagez-vous de rendre l'enseignement professionnel plus attractif ?
L'enseignement professionnel doit d'abord être crédible dans les entreprises pour déboucher sur des emplois. Nous travaillons actuellement avec les professionnels, notamment du BTP, au travers des commissions paritaires consultatives (les CPC), sur le contenu des diplômes. Vis-à-vis des parents, le système doit être lisible, compréhensible. Or, nos filières professionnelles sont aujourd'hui illisibles pour le commun des mortels. Il n'y a pas de lien clair entre le diplôme et le métier. C'est pour cette raison que j'ai souhaité un classement des licences professionnelles par métier. Vis-à-vis des élèves, je suis favorable à ce que tout enfant de 15 ans (soit 1 an avant d'atteindre l'âge limite de la scolarité obligatoire) bénéficie d'une rencontre d'orientation pour se familiariser avec les métiers. Je suis persuadé que cela aidera beaucoup d'enfants désorientés par le système scolaire, à poursuivre leurs études plutôt qu'à sortir de l'enseignement sans bagage professionnel.
Comment envisagez-vous l'avenir du CAP qui est considéré comme un diplôme clé dans le BTP ?
Le CAP correspond à un réel besoin. A l'inverse du BEP, il permet un accès immédiat à l'emploi et répond à une attente des entreprises. Pour autant, nous ne devons pas interdire toute poursuite d'études aux jeunes CAP. J'ouvre actuellement une table ronde avec les syndicats d'enseignants pour en parler. Avec les branches professionnelles, nous travaillons par métier sur le contenu même du diplôme. Plus globalement, je vais réunir l'ensemble des CPC (commissions paritaires consultatives) pour réfléchir sur le contenu des programmes.
Considérez-vous l'apprentissage comme une voie concurrente des lycées professionnels ?
La diversité des voies de formation est une bonne chose. Evitons que les deux se concurrencent inutilement. Maintenant, je ne considère pas, comme je l'ai entendu dire, que l'apprentissage est la voie royale de l'enseignement professionnel, car mieux adaptée aux besoins de l'entreprise. C'est difficile d'enseigner et il existe un fort taux de rupture anticipée de contrats d'apprentissage. Le vrai problème est celui du statut social du jeune en formation. Un jeune apprenti est rémunéré. C'est important.
Etes-vous toujours favorable à une rémunération systématique des stages en entreprise ?
Oui, et je sais que les entreprises n'y sont pas hostiles. Mais il ne s'agirait d'une rétribution et pas d'une rémunération. L'élève resterait donc sous statut scolaire. Nous veillerons à ce que cette nouvelle rétribution n'augmente pas les charges financières des entreprises. Plus globalement, le Premier ministre m'a demandé de négocier avec les partenaires sociaux la mise au point d'un protocole d'accord cadre sur les périodes de formations en entreprises: leur contenu, leur utilité Enfin, pourquoi ne pas envisager la création de contrats de préembauche des jeunes durant leur dernière année de formation avant l'obtention de leur diplôme professionnel.
Allez-vous signer d'autres conventions du même type que celle conclue avec le FFB qui prévoit un échange entre enseignants des lycées professionnels et les entreprises du bâtiment ?
Sûrement. Cette convention est une réussite et je m'en félicite. Elle prouve que les débats idéologiques d'hier sont dépassés et que des échanges sont possibles entre les entreprises et nos établissements scolaires. Plus globalement, cette convention est intéressante car elle fait une place à l'expérimentation qui est vitale pour faire évoluer les choses. Nous ne changerons l'image de l'enseignement professionnel que par des actes concrets. Le comportement des parents évoluera à partir de là.
(source http://www.education.gouv.fr, le 2 octobre 2000)
Il est simple : j'observe d'un côté que les entreprises peinent à recruter et de l'autre que les effectifs formés dans les établissements professionnels diminuent. Pour l'année scolaire 1999-2000, il y a eu 21 000 élèves de moins dans le secondaire dont 15 000 dans l'enseignement professionnel. Pour la rentrée 2000, nous enregistrerons encore 11 000 élèves en moins. C'est bien le signe qu'il y a un problème d'image et de lisibilité du système aujourd'hui.
Comment remédier à cette mauvaise image de l'enseignement professionnel ?
Je ne pense pas que l'on ait besoin d'une grande réforme mais davantage de réglages concrets. Le point de départ est simple: tout parent veut que son enfant réussisse. Or l'enseignement professionnel est vécu aujourd'hui comme une impasse. Nous devons apporter de la fluidité à la filière. Un jeune qui choisit cette voie doit pouvoir poursuivre ses études s'il le souhaite. Nous avons plusieurs pistes de travail. Tout d'abord, tout BEP doit avoir un bac professionnel équivalent. Mes services dressent aujourd'hui un inventaire des deux diplômes pour qu'à l'avenir il n'y ait plus de BEP sans bac pro équivalent. Seconde piste, permettre la poursuite d'études de ces jeunes titulaires d'un bac professionnel. 0,8 % seulement poursuivent en BTS ou DUT. L'échec est patent.
Que proposez-vous pour aider ces jeunes bac pro à poursuivre leurs études ?
Là aussi, plusieurs pistes sont à l'étude: il est envisageable de créer un système de classe préparatoire qui ferait l'interface entre le bac pro et l'enseignement supérieur. Plus prosaïquement, on peut activer le système des premières d'adaptation qui créent des passerelles entre les filières professionnelle et technologique. Cela marche peu aujourd'hui. Améliorons le système. Ne pourrait-on pas, cela existe déjà ici ou là, rassembler dans un même établissement enseignement professionnel et enseignement technologique. Je peux déjà vous annoncer que dès la prochaine rentrée scolaire, tout lycéen qui a eu son bac pro pourra intégrer une autre classe de terminale pour préparer un autre bac tout en conservant le bénéfice des notes de matières générales où il a eu la moyenne. Nous devons multiplier les actions concrètes pour favoriser les synergies.
Par quelles mesures envisagez-vous de rendre l'enseignement professionnel plus attractif ?
L'enseignement professionnel doit d'abord être crédible dans les entreprises pour déboucher sur des emplois. Nous travaillons actuellement avec les professionnels, notamment du BTP, au travers des commissions paritaires consultatives (les CPC), sur le contenu des diplômes. Vis-à-vis des parents, le système doit être lisible, compréhensible. Or, nos filières professionnelles sont aujourd'hui illisibles pour le commun des mortels. Il n'y a pas de lien clair entre le diplôme et le métier. C'est pour cette raison que j'ai souhaité un classement des licences professionnelles par métier. Vis-à-vis des élèves, je suis favorable à ce que tout enfant de 15 ans (soit 1 an avant d'atteindre l'âge limite de la scolarité obligatoire) bénéficie d'une rencontre d'orientation pour se familiariser avec les métiers. Je suis persuadé que cela aidera beaucoup d'enfants désorientés par le système scolaire, à poursuivre leurs études plutôt qu'à sortir de l'enseignement sans bagage professionnel.
Comment envisagez-vous l'avenir du CAP qui est considéré comme un diplôme clé dans le BTP ?
Le CAP correspond à un réel besoin. A l'inverse du BEP, il permet un accès immédiat à l'emploi et répond à une attente des entreprises. Pour autant, nous ne devons pas interdire toute poursuite d'études aux jeunes CAP. J'ouvre actuellement une table ronde avec les syndicats d'enseignants pour en parler. Avec les branches professionnelles, nous travaillons par métier sur le contenu même du diplôme. Plus globalement, je vais réunir l'ensemble des CPC (commissions paritaires consultatives) pour réfléchir sur le contenu des programmes.
Considérez-vous l'apprentissage comme une voie concurrente des lycées professionnels ?
La diversité des voies de formation est une bonne chose. Evitons que les deux se concurrencent inutilement. Maintenant, je ne considère pas, comme je l'ai entendu dire, que l'apprentissage est la voie royale de l'enseignement professionnel, car mieux adaptée aux besoins de l'entreprise. C'est difficile d'enseigner et il existe un fort taux de rupture anticipée de contrats d'apprentissage. Le vrai problème est celui du statut social du jeune en formation. Un jeune apprenti est rémunéré. C'est important.
Etes-vous toujours favorable à une rémunération systématique des stages en entreprise ?
Oui, et je sais que les entreprises n'y sont pas hostiles. Mais il ne s'agirait d'une rétribution et pas d'une rémunération. L'élève resterait donc sous statut scolaire. Nous veillerons à ce que cette nouvelle rétribution n'augmente pas les charges financières des entreprises. Plus globalement, le Premier ministre m'a demandé de négocier avec les partenaires sociaux la mise au point d'un protocole d'accord cadre sur les périodes de formations en entreprises: leur contenu, leur utilité Enfin, pourquoi ne pas envisager la création de contrats de préembauche des jeunes durant leur dernière année de formation avant l'obtention de leur diplôme professionnel.
Allez-vous signer d'autres conventions du même type que celle conclue avec le FFB qui prévoit un échange entre enseignants des lycées professionnels et les entreprises du bâtiment ?
Sûrement. Cette convention est une réussite et je m'en félicite. Elle prouve que les débats idéologiques d'hier sont dépassés et que des échanges sont possibles entre les entreprises et nos établissements scolaires. Plus globalement, cette convention est intéressante car elle fait une place à l'expérimentation qui est vitale pour faire évoluer les choses. Nous ne changerons l'image de l'enseignement professionnel que par des actes concrets. Le comportement des parents évoluera à partir de là.
(source http://www.education.gouv.fr, le 2 octobre 2000)