Texte intégral
Je suis heureux de vous rencontrer aujourd'hui, à peine plus de deux semaines après ma prise de fonctions. J'ai d'abord souhaité ce rendez-vous rapide pour présenter sans attendre à nos concitoyens, la méthode que j'entends mettre en oeuvre pour conduire la politique économique de notre pays et les premières priorités que je me suis fixé sur lesquelles j'entends régulièrement faire le point avec l'opinion.
Cette méthode, je le crois profondément vous le savez, sera faite de transparence et de responsabilité :
- transparence tant sur l'analyse de la situation que sur l'action engagée ;
- responsabilité en rendant compte régulièrement des résultats et en les assumant devant les Français ;
Cette démarche repose sur ma conviction profonde que la politique économique doit être lisible et crédible.
La politique économique, les progrès de notre économie doivent être lisibles par tous. C'est la clé de la confiance retrouvée que j'entends mettre au coeur de mon action. Ce n'est pas une posture intellectuelle : c'est une condition première de son efficacité. En effet, elle vise toujours, d'une manière ou d'une autre, à orienter le comportement des acteurs. Comment atteindre ce résultat si elle n'est pas parfaitement intelligible à tous les niveaux de la société, si les Français ne peuvent pas s'approprier et comprendre ce qui marche et ce qui ne marche pas ?
La crédibilité est la seconde exigence de la politique économique. L'action doit être conduite conformément aux engagements ; les résultats de l'action doivent être scrupuleusement évalués et rendus publics. Cet engagement est pleinement le mien ; je vais revenir précisément sur ce point dans quelques minutes.
Je vais bien entendu consacrer une partie de mon propos de ce matin à vous faire part de mon analyse de la situation économique et financière de la France en ce début 2005. Mais au-delà des chiffres du moment que je commenterai dans quelques instants, je souhaite d'abord replacer notre situation d'aujourd'hui en perspective historique.
Le regard que nous portons sur notre économie est, en effet, insuffisamment mis en perspective. Nous recevons toutes les semaines des indices, des chiffres, des données dont la multiplicité et la succession conduisent trop souvent à perdre de vue l'ampleur et la profondeur des transformations de notre économie.
A trop regarder le quotidien, on en oublie parfois les tendances lourdes qui sont les nôtres depuis 25 ans. Pourtant, un bref survol de cette période fournit des clés de lecture utiles à la bonne compréhension de la situation d'aujourd'hui.
Il ne s'agit pas pour moi de porter un jugement ; ce qui a été fait a été fait ! Il s'agit simplement de dresser un constat lucide sur le point de savoir si nous avons collectivement utilisé ces 25 années au mieux pour notre pays, pour notre avenir et celui de nos enfants.
4 constats simples :
1 - Nous avons trop tardé à tirer les conséquences de la transition démographique et des transformations de la société ;
La démographie a une vertu : elle se lit longtemps à l'avance. Nul ne peut prétendre l'ignorer ! Il n'est pas facile dans ces conditions de comprendre comment nous avons pu décider - certes au nom du progrès social - de réduire la durée d'activité sans assurer le financement correspondant pour les retraites alors même que l'allongement de la durée de la vie et " papy boom " étaient une évidence annoncée depuis des années !
Au-delà de cet exemple, on ne peut que constater la difficulté de notre société à adapter ses grands mécanismes aux changements rapides de son environnement (vieillissement, transformation de la société, allongement des études, modification des formes d'activités, ).
Or dans le monde d'aujourd'hui, la réactivité est aussi au coeur de l'efficacité des Etats ! La lenteur dans l'adaptation est coupable sur le plan économique ! Le temps perdu ne se rattrape pas. Ces 25 dernières années n'ont pas toujours été des années " réactives " : trop de temps a été perdu sur des chantiers essentiels !
2 - Nous avons fait des choix collectifs généreux mais " à crédit " ;
La dette est passée de 90 Mds d'euros (20.7 % PIB en 1980) à 1.066 Mds euros en 2004 (65.6% du PIB) ; bien sûr cette dette est en partie le fruit du chômage de masse et d'une croissance ralentie, ce qui a miné les recettes publiques ; mais il faut avoir le courage de reconnaître qu'il y a eu également le refus collectif d'une génération d'adapter les dépenses aux recettes, de réformer ce qui devait l'être, de chasser les gaspillages - et ils sont nombreux - . Cette inaction a conduit à transmettre à la génération d'après le soin de " régler les factures ".
Le poids des factures fait aujourd'hui du remboursement des seuls intérêts de la dette le 3ème poste de dépenses du budget 2005 : 40 Mds d'euros ! C'est presque le montant du déficit : autrement dit, la dette d'hier alimente la dette de demain dans un cercle vicieux qu'il faut impérativement briser !
3 - Nous avons trop souvent stérilisé notre énergie collective dans de coûteux aller- retour ;
Le plus emblématique - que je connais bien - a été celui des nationalisations début 1980, à contre-courant du reste du monde ; outre leur coût financier et les quelques sinistres majeurs que la France paye encore aujourd'hui, force est de constater que l'Etat comme les managers de ces grandes entreprises françaises ont consacré une énergie collective démesurée à faire et à défaire, là où il aurait fallu construire, renforcer et adapter ;
4 - Enfin alors même que la mondialisation faisait émerger de nouveaux et redoutables concurrents qui bouleversent la donne économique, nous nous sommes " assoupis " !
L'affaiblissement régulier de notre croissance depuis les années 60 (plus de 5% à 2% en moyenne) aurait dû être un puissant signal d'alarme sur le besoin de réforme et de dynamisme qui était le nôtre. Paradoxalement, durant ces années, les contraintes sur nos entreprises n'ont cessé d'augmenter, en matière de réglementation et de prélèvements obligatoires.
Comment imaginer qu'on ait pu installer nos concitoyens dans l'illusion qu'en travaillant moins et en produisant moins de richesses, nous serions plus forts face aux défis qui sont les nôtres !
Alors que la compétitivité est la clé de la croissance dans un monde ouvert et concurrentiel, nous avons laissé nos dépenses de recherche trop longtemps stagner à un niveau incompatible (2.2% du PIB) avec nos ambitions pour l'avenir et - surtout - avec les efforts de nos grands concurrents. Nos dépenses publiques - au lieu de se consacrer à l'avenir - ont ainsi été de manière croissante absorbées par le fonctionnement courant ; à l'Etat investisseur et stratège des années 50 et 60 a ainsi succédé un Etat accaparé par la gestion à crédit du quotidien.
I. Situation conjoncturelle 2004 et perspectives pour 2005
Où en sommes-nous plus précisément en ce début 2005? Je voudrais vous dire maintenant quelques mots de la situation conjoncturelle et des perspectives pour cette année. Je vais peut être vous paraître moins positif que ce que justifieraient les bons résultats de 2004 et les perspectives de 2005, mais c'est bien précisément pour distinguer le rebond conjoncturel dont je me réjouis et la nécessité de prendre en compte la perspective à long terme que je viens de vous décrire : je ne serais pas fidèle au discours que je souhaite tenir aux Français si je ne remettais pas d'emblée ces résultats dans une perspective longue.
1. Avec une croissance de +2.5%, l'économie française aura connu en 2004 sa meilleure année depuis 2000 ; c'est environ 2 fois plus qu'en Allemagne et en Italie qui, il est vrai, traversent une passe difficile, et c'est aussi près d'½ point de plus que l'ensemble de la zone euro.
Je m'en réjouis car c'est le signe de la tendance positive que ce Gouvernement a su redonner à l'économie française sous l'impulsion du président de la République, Jacques Chirac. Mais permettez moi de regarder aussi ce 2.5% dans l'absolu, et de penser que ça ne peut pas être un aboutissement : pour que l'économie française redevienne une économie moderne, il faudrait pouvoir retrouver des rythmes de +3 ou +4 % de croissance.
Derrière cette croissance, il y a la consommation des ménages, dont la forte progression, notamment en produits manufacturés (+4.4%) est la plus forte de ces 5 dernières années. C'est sur elle que repose actuellement notre croissance, d'où l'importance du débat ouvert sur le pouvoir d'achat des Français : je vais y revenir. L'investissement productif a également rebondi (+2,8%) après un recul significatif en 2002 (-3.6%) et en 2003 (-1,9%), mais de manière modérée. Enfin, nos exportations ont progressé de +5.7% malgré l'appréciation de l'euro, après avoir reculé en 2003 : la bonne nouvelle, c'est qu'elles peuvent faire mieux !
Mais je constate en même temps que le taux de chômage reste à des niveaux inacceptables (10% en janvier dernier), même si la tendance à la dégradation que l'on observe depuis 2001 a été stoppée. De fait, l'économie française a recommencé à créer des emplois (+38 000 l'an dernier) mais à des rythmes encore insuffisants. Il faut que cette année soit celle d'une nette reprise des créations d'emplois dans le sillage des créations d'entreprises, au plus haut à 220 000 créations l'an dernier.
Enfin, du côté des finances publiques, nous enregistrons des progrès mais la situation reste dégradée : le déficit public revient à -3.7% du PIB en 2004 après -4.2% en 2003. Ce n'est pas pour moi, là non plus, un aboutissement et ce résultat recouvre d'ailleurs des situations contrastées : les comptes de l'Etat, très déficitaires, se redressent en effet (un mieux de 13Md qui permet de ramener le déficit de -56.9 à -43.9 Md) ; en revanche les dépenses des collectivités locales ont progressé à un rythme trop soutenu (+5.5% hors transfert de compétence) et l'évolution des prestations sociales a encore été trop soutenue (+4.5% après +5.6% en 2003), en dépit d'un ralentissement perceptible en fin d'année des dépenses de santé.
Cet assainissement doit donc se poursuivre : la dette publique continue en effet de progresser de 63.9% à 65.6% du PIB l'an dernier, d'où la nécessité de poursuivre une maîtrise rigoureuse de la dépense si le pays veut pouvoir assumer à terme ses engagements de retraite et de protection sociale.
2. Dernière touche optimiste que je tire des résultats de l'année dernière, l'économie française a terminé 2004 sur un rythme de croissance élevé (+3.0% au dernier trimestre), ce qui me rend raisonnablement optimiste pour 2005. Les informations conjoncturelles récentes vont d'ailleurs pour la plupart dans le bon sens :
- la consommation des ménages en produits manufacturés (+1.5% en janvier) reste bien orientée ; c'est le cas également de la production industrielle (dernier chiffre de janvier + 4% sur un an) ;
- l'indice des prix dans la grande distribution en janvier 2005 confirme sa tendance baissière (-0.1%) et plus largement l'inflation est bien contenue (+1.6% sur un an en février) ce qui va fortement soutenir le pouvoir d'achat des ménages cette année.
Toutefois, je veux rester lucide et je dois constater comme tout le monde que l'environnement international est incertain et crée des aléas baissiers suffisamment significatifs pour que je me sente tenu de les prendre en compte, notamment le pétrole (53 $) et le cours du dollar (1 = 1.34 $).
Ces sujets seront d'ailleurs largement débattus ici même dans quelques jours dans le cadre de la Commission Economique de la Nation qui dressera les perspectives de croissance 2005 et 2006. Je prendrai connaissance avec le plus grand intérêt de ses
conclusions.
Mais d'ores et déjà, je souhaite indiquer que dans le domaine des prévisions - où par essence l'incertitude est forte - je n'ai jamais été partisan de chiffrage à la virgule près. J'ai toujours travaillé sur des ordres de grandeurs : c'est pourquoi je me sens parfaitement à l'aise avec le principe de retenir pour 2005 des perspectives de croissance inscrites dans une fourchette +2.0% - +2.5%.
Cette fourchette traduit dans mon esprit deux convictions fortes :
- d'abord celle d'une croissance qui va rester à bon niveau, en tout état de cause au dessus de 2% en 2005 ;
- ensuite ma détermination à faire le maximum pour que la croissance s'inscrive in fine dans la limite haute de la fourchette, aux environs des 2.5% cette année.
Les deux premières mesures " intéressement " et " soutien à la R D " que je vais vous présenter tout à l'heure illustrent bien la réactivité dont je souhaite faire preuve à la tête de ce Ministère dans ce domaine.
Soyez donc sûrs que ce Gouvernement se tient prêt à soutenir la conjoncture si l'environnement le nécessitait. Je souhaite évidemment que ce ne soit pas utile et les aléas baissiers ne vont pas nécessairement durer. Pour le pétrole, le pic de demande se situe traditionnellement en hiver, et pour ce qui est du dollar, les engagements forts du président BUSH pour réduire le déficit public américain plaident pour son renforcement à terme.
3. Du reste, je viens de notifier à Bruxelles notre objectif de déficit public pour 2005, qui repassera sous les 3% cette année, à 2.9%, comme le Gouvernement s'y était engagé. Ce résultat, nous sommes déterminés à y arriver grâce à :
- de bonnes recettes d'impôts sur les sociétés compte tenu des bons résultats
des entreprises sur 2004 ;
- la capacité, dont nous nous sommes désormais dotés, à piloter la dépense d'assurance-maladie : une réunion du Comité d'alerte est prévue en juin si les objectifs n'étaient pas tenus, donnant la possibilité au Gouvernement de prendre des mesures nouvelles en cours d'année 2005 si nécessaire.
- enfin, la mise sous tension du budget de l'Etat pour faire le " 0 volume " tel
qu'il a été voté. C'est pour cela que nous avons décidé la mise en réserve de
4 Mds d'euros en début février. Je participe depuis mon arrivée aux Conférences d'économie structurelle avec mes collègues Ministres pour tracer les chemins de ce " 0 volume " pour l'année prochaine également.
II - Deux priorités immédiates : renforcer le pouvoir d'achat et préparer l'avenir
L'autre bonne nouvelle de ce début d'année ce sont les annonces de bénéfices qu'ont réalisés plusieurs un grand nombre de nos entreprises. J'avoue avoir été perplexe devant l'accueil qui a été réservé à cette nouvelle, à croire qu'il aurait mieux fallu que ces entreprises ne fassent pas de profit du tout! Permettez moi donc d'abord de vous dire que je me félicite de ces profits !
Maintenant, que les annonces des résultats des entreprises alimentent le débat économique et notamment celui sur le partage des fruits de la croissance, je trouve cela normal et sain : qu'on le regrette ou non, ce sont ces échéances trimestrielles qui rythment aujourd'hui la vie économique, et je souhaite pour ma part que le Ministère de l'économie soit dans ce rythme, aussi réactif que nécessaire.
- Et je m'empresse de dire aussitôt que ce débat vaut d'être ouvert : il y a en effet un paradoxe à constater d'un côté les bons résultats de notre économie et des grandes entreprises, et de l'autre la difficulté à utiliser ces bons résultats au service de nos deux priorités que sont le pouvoir d'achat et l'investissement dans l'avenir du pays.
- C'est bien la première question que je me suis posée en arrivant à Bercy : quelle réponse rapide et adaptée apporter à ce paradoxe ?
1. Concernant le pouvoir d'achat, le sujet concerne bien sûr l'ensemble des salariés.
- Vis-à-vis des fonctionnaires, l'Etat assumera pleinement ses responsabilités d'employeur, dans le cadre du dialogue social ainsi que le Premier Ministre l'a annoncé en fin de semaine dernière. Cela se fera bien sûr dans le nécessaire respect de nos équilibres budgétaires. Mais pour ma part, je pense que cette négociation est l'occasion d'un véritable engagement de toute la fonction publique pour la réforme et la modernisation de l'Etat.
- Vis-à-vis du secteur privé, le débat mérite également d'être posé dans toutes ses dimensions.
La première d'entre elles est la négociation salariale qui doit avoir toute sa place. D'ailleurs, Jean-Louis BORLOO doit réunir dès cette semaine la Commission nationale de la négociation collective.
- Parallèlement, et en accord avec le Premier Ministre, je souhaite encourager le recours à l'intéressement des salariés aux résultats des entreprises.
- La bonne piste, celle que je souhaite susciter, certainement pas imposer, c'est donc celle de l'intéressement.
C'est pourquoi j'ai décidé de proposer au Premier Ministre de créer les conditions, dès cette année, au sein des entreprises, d'une prime exceptionnelle d'intéressement. Celle-ci permettra aux partenaires sociaux - à titre exceptionnel -
de majorer le montant de l'intéressement sur les résultats 2004.
- Cette prime pourra représenter jusqu'à 200 euro ou 15 % du montant de l'intéressement normalement prévu s'il y a un accord en cours ;
- Elle devra être versée en numéraire au cours de l'année 2005 ;
- L'Etat contribuera à rendre ce dispositif attractif en traitant ces versements exceptionnels selon les règles fiscales et sociales de l'intéressement et en autorisant l'assimilation fiscale de ce versement de 2005 à une charge 2004, ce qui permettra aux entreprises de réduire le montant de l'IS qui sera versé dès cette année.
- Par ailleurs, et c'est une nouveauté, ce dispositif sera ouvert dans les mêmes conditions aux entreprises qui n'ont pas d'accord d'intéressement. Ainsi, cela mettra le pied à l'étrier des entreprises éloignées jusqu'à présent de ces logiques.
2. Deuxième priorité : saisir chaque opportunité pour préparer de l'avenir de notre pays.
Nos entreprises doivent conserver Il me paraît également nécessaire de permettre de mobiliser au mieux nos bons résultats économiques 2004 au service de la recherche et du financement des projets innovants.et renforcer leur avance technologique pour rester compétitives ; c'est un enjeu essentiel pour l'avenir de notre pays et de l'Europe. Il faut tout faire pour augmenter les dépenses de R D dans notre pays.
A cette fin, j'ai décidé d'aider les entreprises à mobiliser les ressources dégagées en 2004 pour leur permettre de développer des partenariats avec les PME innovantes qui les entourent, et avec les organismes de recherche, en particulier publics. Pour ce faire j'ai donc proposé au Premier Ministre une mesure d'incitation fiscale : dans la limite d'un plafond global de 2.5% de l'IS 2005 sur les résultats 2004 les entreprises pourront cumuler 2 mesures nouvelles :
- La première consiste à donner une incitation aux grands groupes pour qu'ils apportent des financements stables, en fonds propres, à des PME innovantes. L'incitation se monte à une réduction d'IS pour 25% de l'investissement initial.
Les entreprises éligibles seront les PME de moins de 500 personnes, indépendantes, donc les vraies PME innovantes et non les filiales de grands groupes.
Comme toutes les entreprises n'ont pas nécessairement de relations suivies avec des PME innovantes, j'ai décidé d'élargir le dispositif au financement intermédié, qui pourra se faire par des FCPI qui en respecteront les conditions.
La réduction ne sera donc accordée qu'à des souscriptions à des créations d'entreprises ou des augmentations de capital.
- La seconde mesure se traduit par une incitation à développer les partenariats entre les grands groupes et les laboratoires de recherche, en donnant un crédit d'IS de 65% des versements effectués pour financer les projets de recherches des PME innovantes, des laboratoires publics et des organismes de recherche.
III. Confiance - Croissance - Emploi : le tableau de bord
Je voudrais maintenant en venir à la façon dont j'envisage de travailler dans les mois qui viennent. Vous aurez compris à mon discours que je ne souhaite pas me cacher ni cacher aux Français, la difficulté de la tache que j'ai devant moi : ce Gouvernement a le grand mérite d'avoir remis la France dans le bon sens ; mais le chemin est encore long et je pense entre autres choses à la question de l'emploi ou encore à celle des finances publiques.
1. Mon objectif c'est de retrouver une croissance plus forte, plus riche en emploi. Mais regardons les choses en face : la croissance ne se décrète pas ! Mon objectif c'est de créer les conditions de la croissance : je veux que le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie soit le ministère qui AIDE l'économie et les Français A RETROUVER CONFIANCE en eux pour créer de la CROISSANCE et de l'EMPLOI.
Cette confiance en nous elle ne peut exister qu'à trois conditions :
- assumer de voir nos défis tels qu'ils sont, sans les exagérer ou
les sous estimer
;
- savoir construire notre modèle de croissance sur nos points forts ;
- savoir constater régulièrement nos progrès et en rendre compte ;
2. Ma méthode : pragmatisme, transparence
Il n'y a pas d'action en général et d'action publique en particulier qui vaille, si elle ne peut pas être mesurée. Je souhaite donc rendre compte aux Français de mon action à la tête du Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie régulièrement, tous les 3 mois, à travers un tableau de bord simple et compréhensible par tous qui retracera les progrès de notre économie.
En effet, le pilotage de la politique économique d'une grande Nation ne peut se réduire à quelques grands indicateurs macro-économiques : au-delà de chacun d'eux, il y a des réalités multiples, plus précises, qui constituent souvent des points forts, parfois des défis pour notre pays.
C'est pourquoi, le pilotage de l'action économique du Gouvernement doit s'appuyer sur un ensemble d'indicateur de progrès. La première version de ce tableau d'indicateurs que j'ai souhaité présenter aujourd'hui reprend les données traditionnelles, macroéconomiques, que le Gouvernement suit en continu bien évidemment : il ne s'agit donc pas de contourner la réalité de l'économie française.
Je poursuis en réalité trois objectifs :
- Premier objectif : parler aux Français le même langage qu'eux. Les indicateurs macroéconomiques généraux sont de plus en plus décalés par rapport à la réalité de terrain, de tous les jours, des acteurs microéconomiques qu'ils soient entrepreneurs, salariés ou consommateurs. Ils permettent donc de moins en moins de communiquer aux Français sur la réalité qui est la leur. Et c'est sans doute une des raisons de ce socle de défiance que je ressens et que je souhaite combattre : il n'y a pas de croissance, de prise de risque, sans confiance, confiance en l'avenir, confiance en notre économie, confiance en l'Etat...
- Deuxième objectif de ce tableau de bord, pouvoir mesurer au plus près la performance de l'économie et de ces acteurs, l'Etat comme les entreprises : je ne dévoile pas un secret en vous disant que la prise des acteurs nationaux sur les grandeurs macroéconomiques, bien que réelle, est à tout le moins décalée dans le temps ; elle est bien souvent aussi contingente à l'environnement international ; mais surtout, les tendances conjoncturelles, les progrès doivent se mesurer au plus près du terrain et l'action d'un Ministre de l'économie ne fait pas exception à cette règle : son action est aujourd'hui plus microéconomique que macroéconomique.
Troisième objectif : rendre confiance aux Français par le suivi régulier de notre action et de nos progrès : comme la croissance attire la croissance, la confiance se nourrit des victoires, petites ou grandes, que le pays remporte et remportera dans les prochains mois et les prochaines années.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 16 mars 2005)
Cette méthode, je le crois profondément vous le savez, sera faite de transparence et de responsabilité :
- transparence tant sur l'analyse de la situation que sur l'action engagée ;
- responsabilité en rendant compte régulièrement des résultats et en les assumant devant les Français ;
Cette démarche repose sur ma conviction profonde que la politique économique doit être lisible et crédible.
La politique économique, les progrès de notre économie doivent être lisibles par tous. C'est la clé de la confiance retrouvée que j'entends mettre au coeur de mon action. Ce n'est pas une posture intellectuelle : c'est une condition première de son efficacité. En effet, elle vise toujours, d'une manière ou d'une autre, à orienter le comportement des acteurs. Comment atteindre ce résultat si elle n'est pas parfaitement intelligible à tous les niveaux de la société, si les Français ne peuvent pas s'approprier et comprendre ce qui marche et ce qui ne marche pas ?
La crédibilité est la seconde exigence de la politique économique. L'action doit être conduite conformément aux engagements ; les résultats de l'action doivent être scrupuleusement évalués et rendus publics. Cet engagement est pleinement le mien ; je vais revenir précisément sur ce point dans quelques minutes.
Je vais bien entendu consacrer une partie de mon propos de ce matin à vous faire part de mon analyse de la situation économique et financière de la France en ce début 2005. Mais au-delà des chiffres du moment que je commenterai dans quelques instants, je souhaite d'abord replacer notre situation d'aujourd'hui en perspective historique.
Le regard que nous portons sur notre économie est, en effet, insuffisamment mis en perspective. Nous recevons toutes les semaines des indices, des chiffres, des données dont la multiplicité et la succession conduisent trop souvent à perdre de vue l'ampleur et la profondeur des transformations de notre économie.
A trop regarder le quotidien, on en oublie parfois les tendances lourdes qui sont les nôtres depuis 25 ans. Pourtant, un bref survol de cette période fournit des clés de lecture utiles à la bonne compréhension de la situation d'aujourd'hui.
Il ne s'agit pas pour moi de porter un jugement ; ce qui a été fait a été fait ! Il s'agit simplement de dresser un constat lucide sur le point de savoir si nous avons collectivement utilisé ces 25 années au mieux pour notre pays, pour notre avenir et celui de nos enfants.
4 constats simples :
1 - Nous avons trop tardé à tirer les conséquences de la transition démographique et des transformations de la société ;
La démographie a une vertu : elle se lit longtemps à l'avance. Nul ne peut prétendre l'ignorer ! Il n'est pas facile dans ces conditions de comprendre comment nous avons pu décider - certes au nom du progrès social - de réduire la durée d'activité sans assurer le financement correspondant pour les retraites alors même que l'allongement de la durée de la vie et " papy boom " étaient une évidence annoncée depuis des années !
Au-delà de cet exemple, on ne peut que constater la difficulté de notre société à adapter ses grands mécanismes aux changements rapides de son environnement (vieillissement, transformation de la société, allongement des études, modification des formes d'activités, ).
Or dans le monde d'aujourd'hui, la réactivité est aussi au coeur de l'efficacité des Etats ! La lenteur dans l'adaptation est coupable sur le plan économique ! Le temps perdu ne se rattrape pas. Ces 25 dernières années n'ont pas toujours été des années " réactives " : trop de temps a été perdu sur des chantiers essentiels !
2 - Nous avons fait des choix collectifs généreux mais " à crédit " ;
La dette est passée de 90 Mds d'euros (20.7 % PIB en 1980) à 1.066 Mds euros en 2004 (65.6% du PIB) ; bien sûr cette dette est en partie le fruit du chômage de masse et d'une croissance ralentie, ce qui a miné les recettes publiques ; mais il faut avoir le courage de reconnaître qu'il y a eu également le refus collectif d'une génération d'adapter les dépenses aux recettes, de réformer ce qui devait l'être, de chasser les gaspillages - et ils sont nombreux - . Cette inaction a conduit à transmettre à la génération d'après le soin de " régler les factures ".
Le poids des factures fait aujourd'hui du remboursement des seuls intérêts de la dette le 3ème poste de dépenses du budget 2005 : 40 Mds d'euros ! C'est presque le montant du déficit : autrement dit, la dette d'hier alimente la dette de demain dans un cercle vicieux qu'il faut impérativement briser !
3 - Nous avons trop souvent stérilisé notre énergie collective dans de coûteux aller- retour ;
Le plus emblématique - que je connais bien - a été celui des nationalisations début 1980, à contre-courant du reste du monde ; outre leur coût financier et les quelques sinistres majeurs que la France paye encore aujourd'hui, force est de constater que l'Etat comme les managers de ces grandes entreprises françaises ont consacré une énergie collective démesurée à faire et à défaire, là où il aurait fallu construire, renforcer et adapter ;
4 - Enfin alors même que la mondialisation faisait émerger de nouveaux et redoutables concurrents qui bouleversent la donne économique, nous nous sommes " assoupis " !
L'affaiblissement régulier de notre croissance depuis les années 60 (plus de 5% à 2% en moyenne) aurait dû être un puissant signal d'alarme sur le besoin de réforme et de dynamisme qui était le nôtre. Paradoxalement, durant ces années, les contraintes sur nos entreprises n'ont cessé d'augmenter, en matière de réglementation et de prélèvements obligatoires.
Comment imaginer qu'on ait pu installer nos concitoyens dans l'illusion qu'en travaillant moins et en produisant moins de richesses, nous serions plus forts face aux défis qui sont les nôtres !
Alors que la compétitivité est la clé de la croissance dans un monde ouvert et concurrentiel, nous avons laissé nos dépenses de recherche trop longtemps stagner à un niveau incompatible (2.2% du PIB) avec nos ambitions pour l'avenir et - surtout - avec les efforts de nos grands concurrents. Nos dépenses publiques - au lieu de se consacrer à l'avenir - ont ainsi été de manière croissante absorbées par le fonctionnement courant ; à l'Etat investisseur et stratège des années 50 et 60 a ainsi succédé un Etat accaparé par la gestion à crédit du quotidien.
I. Situation conjoncturelle 2004 et perspectives pour 2005
Où en sommes-nous plus précisément en ce début 2005? Je voudrais vous dire maintenant quelques mots de la situation conjoncturelle et des perspectives pour cette année. Je vais peut être vous paraître moins positif que ce que justifieraient les bons résultats de 2004 et les perspectives de 2005, mais c'est bien précisément pour distinguer le rebond conjoncturel dont je me réjouis et la nécessité de prendre en compte la perspective à long terme que je viens de vous décrire : je ne serais pas fidèle au discours que je souhaite tenir aux Français si je ne remettais pas d'emblée ces résultats dans une perspective longue.
1. Avec une croissance de +2.5%, l'économie française aura connu en 2004 sa meilleure année depuis 2000 ; c'est environ 2 fois plus qu'en Allemagne et en Italie qui, il est vrai, traversent une passe difficile, et c'est aussi près d'½ point de plus que l'ensemble de la zone euro.
Je m'en réjouis car c'est le signe de la tendance positive que ce Gouvernement a su redonner à l'économie française sous l'impulsion du président de la République, Jacques Chirac. Mais permettez moi de regarder aussi ce 2.5% dans l'absolu, et de penser que ça ne peut pas être un aboutissement : pour que l'économie française redevienne une économie moderne, il faudrait pouvoir retrouver des rythmes de +3 ou +4 % de croissance.
Derrière cette croissance, il y a la consommation des ménages, dont la forte progression, notamment en produits manufacturés (+4.4%) est la plus forte de ces 5 dernières années. C'est sur elle que repose actuellement notre croissance, d'où l'importance du débat ouvert sur le pouvoir d'achat des Français : je vais y revenir. L'investissement productif a également rebondi (+2,8%) après un recul significatif en 2002 (-3.6%) et en 2003 (-1,9%), mais de manière modérée. Enfin, nos exportations ont progressé de +5.7% malgré l'appréciation de l'euro, après avoir reculé en 2003 : la bonne nouvelle, c'est qu'elles peuvent faire mieux !
Mais je constate en même temps que le taux de chômage reste à des niveaux inacceptables (10% en janvier dernier), même si la tendance à la dégradation que l'on observe depuis 2001 a été stoppée. De fait, l'économie française a recommencé à créer des emplois (+38 000 l'an dernier) mais à des rythmes encore insuffisants. Il faut que cette année soit celle d'une nette reprise des créations d'emplois dans le sillage des créations d'entreprises, au plus haut à 220 000 créations l'an dernier.
Enfin, du côté des finances publiques, nous enregistrons des progrès mais la situation reste dégradée : le déficit public revient à -3.7% du PIB en 2004 après -4.2% en 2003. Ce n'est pas pour moi, là non plus, un aboutissement et ce résultat recouvre d'ailleurs des situations contrastées : les comptes de l'Etat, très déficitaires, se redressent en effet (un mieux de 13Md qui permet de ramener le déficit de -56.9 à -43.9 Md) ; en revanche les dépenses des collectivités locales ont progressé à un rythme trop soutenu (+5.5% hors transfert de compétence) et l'évolution des prestations sociales a encore été trop soutenue (+4.5% après +5.6% en 2003), en dépit d'un ralentissement perceptible en fin d'année des dépenses de santé.
Cet assainissement doit donc se poursuivre : la dette publique continue en effet de progresser de 63.9% à 65.6% du PIB l'an dernier, d'où la nécessité de poursuivre une maîtrise rigoureuse de la dépense si le pays veut pouvoir assumer à terme ses engagements de retraite et de protection sociale.
2. Dernière touche optimiste que je tire des résultats de l'année dernière, l'économie française a terminé 2004 sur un rythme de croissance élevé (+3.0% au dernier trimestre), ce qui me rend raisonnablement optimiste pour 2005. Les informations conjoncturelles récentes vont d'ailleurs pour la plupart dans le bon sens :
- la consommation des ménages en produits manufacturés (+1.5% en janvier) reste bien orientée ; c'est le cas également de la production industrielle (dernier chiffre de janvier + 4% sur un an) ;
- l'indice des prix dans la grande distribution en janvier 2005 confirme sa tendance baissière (-0.1%) et plus largement l'inflation est bien contenue (+1.6% sur un an en février) ce qui va fortement soutenir le pouvoir d'achat des ménages cette année.
Toutefois, je veux rester lucide et je dois constater comme tout le monde que l'environnement international est incertain et crée des aléas baissiers suffisamment significatifs pour que je me sente tenu de les prendre en compte, notamment le pétrole (53 $) et le cours du dollar (1 = 1.34 $).
Ces sujets seront d'ailleurs largement débattus ici même dans quelques jours dans le cadre de la Commission Economique de la Nation qui dressera les perspectives de croissance 2005 et 2006. Je prendrai connaissance avec le plus grand intérêt de ses
conclusions.
Mais d'ores et déjà, je souhaite indiquer que dans le domaine des prévisions - où par essence l'incertitude est forte - je n'ai jamais été partisan de chiffrage à la virgule près. J'ai toujours travaillé sur des ordres de grandeurs : c'est pourquoi je me sens parfaitement à l'aise avec le principe de retenir pour 2005 des perspectives de croissance inscrites dans une fourchette +2.0% - +2.5%.
Cette fourchette traduit dans mon esprit deux convictions fortes :
- d'abord celle d'une croissance qui va rester à bon niveau, en tout état de cause au dessus de 2% en 2005 ;
- ensuite ma détermination à faire le maximum pour que la croissance s'inscrive in fine dans la limite haute de la fourchette, aux environs des 2.5% cette année.
Les deux premières mesures " intéressement " et " soutien à la R D " que je vais vous présenter tout à l'heure illustrent bien la réactivité dont je souhaite faire preuve à la tête de ce Ministère dans ce domaine.
Soyez donc sûrs que ce Gouvernement se tient prêt à soutenir la conjoncture si l'environnement le nécessitait. Je souhaite évidemment que ce ne soit pas utile et les aléas baissiers ne vont pas nécessairement durer. Pour le pétrole, le pic de demande se situe traditionnellement en hiver, et pour ce qui est du dollar, les engagements forts du président BUSH pour réduire le déficit public américain plaident pour son renforcement à terme.
3. Du reste, je viens de notifier à Bruxelles notre objectif de déficit public pour 2005, qui repassera sous les 3% cette année, à 2.9%, comme le Gouvernement s'y était engagé. Ce résultat, nous sommes déterminés à y arriver grâce à :
- de bonnes recettes d'impôts sur les sociétés compte tenu des bons résultats
des entreprises sur 2004 ;
- la capacité, dont nous nous sommes désormais dotés, à piloter la dépense d'assurance-maladie : une réunion du Comité d'alerte est prévue en juin si les objectifs n'étaient pas tenus, donnant la possibilité au Gouvernement de prendre des mesures nouvelles en cours d'année 2005 si nécessaire.
- enfin, la mise sous tension du budget de l'Etat pour faire le " 0 volume " tel
qu'il a été voté. C'est pour cela que nous avons décidé la mise en réserve de
4 Mds d'euros en début février. Je participe depuis mon arrivée aux Conférences d'économie structurelle avec mes collègues Ministres pour tracer les chemins de ce " 0 volume " pour l'année prochaine également.
II - Deux priorités immédiates : renforcer le pouvoir d'achat et préparer l'avenir
L'autre bonne nouvelle de ce début d'année ce sont les annonces de bénéfices qu'ont réalisés plusieurs un grand nombre de nos entreprises. J'avoue avoir été perplexe devant l'accueil qui a été réservé à cette nouvelle, à croire qu'il aurait mieux fallu que ces entreprises ne fassent pas de profit du tout! Permettez moi donc d'abord de vous dire que je me félicite de ces profits !
Maintenant, que les annonces des résultats des entreprises alimentent le débat économique et notamment celui sur le partage des fruits de la croissance, je trouve cela normal et sain : qu'on le regrette ou non, ce sont ces échéances trimestrielles qui rythment aujourd'hui la vie économique, et je souhaite pour ma part que le Ministère de l'économie soit dans ce rythme, aussi réactif que nécessaire.
- Et je m'empresse de dire aussitôt que ce débat vaut d'être ouvert : il y a en effet un paradoxe à constater d'un côté les bons résultats de notre économie et des grandes entreprises, et de l'autre la difficulté à utiliser ces bons résultats au service de nos deux priorités que sont le pouvoir d'achat et l'investissement dans l'avenir du pays.
- C'est bien la première question que je me suis posée en arrivant à Bercy : quelle réponse rapide et adaptée apporter à ce paradoxe ?
1. Concernant le pouvoir d'achat, le sujet concerne bien sûr l'ensemble des salariés.
- Vis-à-vis des fonctionnaires, l'Etat assumera pleinement ses responsabilités d'employeur, dans le cadre du dialogue social ainsi que le Premier Ministre l'a annoncé en fin de semaine dernière. Cela se fera bien sûr dans le nécessaire respect de nos équilibres budgétaires. Mais pour ma part, je pense que cette négociation est l'occasion d'un véritable engagement de toute la fonction publique pour la réforme et la modernisation de l'Etat.
- Vis-à-vis du secteur privé, le débat mérite également d'être posé dans toutes ses dimensions.
La première d'entre elles est la négociation salariale qui doit avoir toute sa place. D'ailleurs, Jean-Louis BORLOO doit réunir dès cette semaine la Commission nationale de la négociation collective.
- Parallèlement, et en accord avec le Premier Ministre, je souhaite encourager le recours à l'intéressement des salariés aux résultats des entreprises.
- La bonne piste, celle que je souhaite susciter, certainement pas imposer, c'est donc celle de l'intéressement.
C'est pourquoi j'ai décidé de proposer au Premier Ministre de créer les conditions, dès cette année, au sein des entreprises, d'une prime exceptionnelle d'intéressement. Celle-ci permettra aux partenaires sociaux - à titre exceptionnel -
de majorer le montant de l'intéressement sur les résultats 2004.
- Cette prime pourra représenter jusqu'à 200 euro ou 15 % du montant de l'intéressement normalement prévu s'il y a un accord en cours ;
- Elle devra être versée en numéraire au cours de l'année 2005 ;
- L'Etat contribuera à rendre ce dispositif attractif en traitant ces versements exceptionnels selon les règles fiscales et sociales de l'intéressement et en autorisant l'assimilation fiscale de ce versement de 2005 à une charge 2004, ce qui permettra aux entreprises de réduire le montant de l'IS qui sera versé dès cette année.
- Par ailleurs, et c'est une nouveauté, ce dispositif sera ouvert dans les mêmes conditions aux entreprises qui n'ont pas d'accord d'intéressement. Ainsi, cela mettra le pied à l'étrier des entreprises éloignées jusqu'à présent de ces logiques.
2. Deuxième priorité : saisir chaque opportunité pour préparer de l'avenir de notre pays.
Nos entreprises doivent conserver Il me paraît également nécessaire de permettre de mobiliser au mieux nos bons résultats économiques 2004 au service de la recherche et du financement des projets innovants.et renforcer leur avance technologique pour rester compétitives ; c'est un enjeu essentiel pour l'avenir de notre pays et de l'Europe. Il faut tout faire pour augmenter les dépenses de R D dans notre pays.
A cette fin, j'ai décidé d'aider les entreprises à mobiliser les ressources dégagées en 2004 pour leur permettre de développer des partenariats avec les PME innovantes qui les entourent, et avec les organismes de recherche, en particulier publics. Pour ce faire j'ai donc proposé au Premier Ministre une mesure d'incitation fiscale : dans la limite d'un plafond global de 2.5% de l'IS 2005 sur les résultats 2004 les entreprises pourront cumuler 2 mesures nouvelles :
- La première consiste à donner une incitation aux grands groupes pour qu'ils apportent des financements stables, en fonds propres, à des PME innovantes. L'incitation se monte à une réduction d'IS pour 25% de l'investissement initial.
Les entreprises éligibles seront les PME de moins de 500 personnes, indépendantes, donc les vraies PME innovantes et non les filiales de grands groupes.
Comme toutes les entreprises n'ont pas nécessairement de relations suivies avec des PME innovantes, j'ai décidé d'élargir le dispositif au financement intermédié, qui pourra se faire par des FCPI qui en respecteront les conditions.
La réduction ne sera donc accordée qu'à des souscriptions à des créations d'entreprises ou des augmentations de capital.
- La seconde mesure se traduit par une incitation à développer les partenariats entre les grands groupes et les laboratoires de recherche, en donnant un crédit d'IS de 65% des versements effectués pour financer les projets de recherches des PME innovantes, des laboratoires publics et des organismes de recherche.
III. Confiance - Croissance - Emploi : le tableau de bord
Je voudrais maintenant en venir à la façon dont j'envisage de travailler dans les mois qui viennent. Vous aurez compris à mon discours que je ne souhaite pas me cacher ni cacher aux Français, la difficulté de la tache que j'ai devant moi : ce Gouvernement a le grand mérite d'avoir remis la France dans le bon sens ; mais le chemin est encore long et je pense entre autres choses à la question de l'emploi ou encore à celle des finances publiques.
1. Mon objectif c'est de retrouver une croissance plus forte, plus riche en emploi. Mais regardons les choses en face : la croissance ne se décrète pas ! Mon objectif c'est de créer les conditions de la croissance : je veux que le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie soit le ministère qui AIDE l'économie et les Français A RETROUVER CONFIANCE en eux pour créer de la CROISSANCE et de l'EMPLOI.
Cette confiance en nous elle ne peut exister qu'à trois conditions :
- assumer de voir nos défis tels qu'ils sont, sans les exagérer ou
les sous estimer
;
- savoir construire notre modèle de croissance sur nos points forts ;
- savoir constater régulièrement nos progrès et en rendre compte ;
2. Ma méthode : pragmatisme, transparence
Il n'y a pas d'action en général et d'action publique en particulier qui vaille, si elle ne peut pas être mesurée. Je souhaite donc rendre compte aux Français de mon action à la tête du Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie régulièrement, tous les 3 mois, à travers un tableau de bord simple et compréhensible par tous qui retracera les progrès de notre économie.
En effet, le pilotage de la politique économique d'une grande Nation ne peut se réduire à quelques grands indicateurs macro-économiques : au-delà de chacun d'eux, il y a des réalités multiples, plus précises, qui constituent souvent des points forts, parfois des défis pour notre pays.
C'est pourquoi, le pilotage de l'action économique du Gouvernement doit s'appuyer sur un ensemble d'indicateur de progrès. La première version de ce tableau d'indicateurs que j'ai souhaité présenter aujourd'hui reprend les données traditionnelles, macroéconomiques, que le Gouvernement suit en continu bien évidemment : il ne s'agit donc pas de contourner la réalité de l'économie française.
Je poursuis en réalité trois objectifs :
- Premier objectif : parler aux Français le même langage qu'eux. Les indicateurs macroéconomiques généraux sont de plus en plus décalés par rapport à la réalité de terrain, de tous les jours, des acteurs microéconomiques qu'ils soient entrepreneurs, salariés ou consommateurs. Ils permettent donc de moins en moins de communiquer aux Français sur la réalité qui est la leur. Et c'est sans doute une des raisons de ce socle de défiance que je ressens et que je souhaite combattre : il n'y a pas de croissance, de prise de risque, sans confiance, confiance en l'avenir, confiance en notre économie, confiance en l'Etat...
- Deuxième objectif de ce tableau de bord, pouvoir mesurer au plus près la performance de l'économie et de ces acteurs, l'Etat comme les entreprises : je ne dévoile pas un secret en vous disant que la prise des acteurs nationaux sur les grandeurs macroéconomiques, bien que réelle, est à tout le moins décalée dans le temps ; elle est bien souvent aussi contingente à l'environnement international ; mais surtout, les tendances conjoncturelles, les progrès doivent se mesurer au plus près du terrain et l'action d'un Ministre de l'économie ne fait pas exception à cette règle : son action est aujourd'hui plus microéconomique que macroéconomique.
Troisième objectif : rendre confiance aux Français par le suivi régulier de notre action et de nos progrès : comme la croissance attire la croissance, la confiance se nourrit des victoires, petites ou grandes, que le pays remporte et remportera dans les prochains mois et les prochaines années.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 16 mars 2005)