Déclaration de M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères, et entretiens avec Al Arabiya,Radio France internationale et l'Agence France presse à Alger le 22 mars 2005, sur le soutien de l'Union européenne aux réformes dans les pays arabes, au processus de paix au Proche-Orient et au retour à la souveraineté nationale au Liban.

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Circonstance : Réunion du Sommet de la Ligue arabe à Alger le 22 mars 2005

Média : Agence de presse - Al Arabiya - Presse étrangère - Radio France Internationale - Télévision

Texte intégral

(Allocution à Alger le 22 mars 2005) :
Monsieur le Président,
Majesté,
Altesse,
Excellences,
Mes premiers mots sont pour vous remercier de nous avoir invités, et de nous permettre de nous exprimer quelques instants. Je voudrais aussi, à chacune et à chacun, dire le message très amical du président Jacques Chirac qui m'a chargé de vous transmettre ce témoignage.
Vous vous réunissez à Alger, autour de deux défis que doit relever le monde arabe : le défi de la violence, violence des conflits, violence du terrorisme, et puis l'autre défi, celui du développement et de la modernisation.
Face à ces défis, les peuples de vos régions, de vos pays ont besoin de paix, de stabilité, de sécurité. C'est vrai au Proche-Orient où le dialogue renaît, où l'espoir renaît, et nous continuerons d'accompagner cet espoir en soutenant l'objectif, le plus rapidement possible, de la création d'un Etat palestinien viable, souverain, vivant aux côtés d'Israël en paix et en sécurité. Cette paix est possible, nous y travaillerons, et c'est aussi pourquoi, l'autre jour, Monsieur le Président Mahmoud Abbas, nous étions autour de vous à Londres. J'ai dit et je redis que le moment arrive bientôt d'organiser une première conférence internationale prévue par la Feuille de route, comme nous continuerons de soutenir l'initiative de paix adoptée par chacun d'entre vous au Sommet arabe de mars 2002.
Paix et sécurité aussi en Irak où la transition politique doit se poursuivre, conformément à la résolution 1546, afin que le peuple irakien qui a tant souffert retrouve, dans toutes ses composantes, sa souveraineté.
Paix et stabilité encore au Liban, après l'assassinat ignoble et lâche de Rafic Hariri, il faudra connaître toute la vérité sur cet assassinat. La communauté internationale, avec l'implication décisive du monde arabe, s'est mobilisée, avec la résolution 1559. Je veux dire au nom de la France que notre seul objectif, je répète bien, notre seul objectif, c'est que le peuple libanais retrouve la maîtrise de son destin rapidement et que des élections libres soient organisées dans les délais prévus, sous le contrôle d'observateurs indépendants.
Nous exprimons, sur ce point, notre soutien à la mission de l'envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies pour la mise en uvre de cette résolution 1559.
Et puis, Monsieur le Président, l'autre très grand défi que vous devez relever, c'est celui du changement, du progrès démocratique, de la réforme. Vous disiez vous-même, Monsieur le Président Bouteflika, à Tunis l'an dernier, que le monde arabe possède, en lui-même, les ressources de son propre développement. Eh bien, en tant que ministre français, en tant que ministre européen, je veux vous dire que nous voulons accompagner, comme partenaire, ce mouvement et ce partenariat dont parlait tout à l'heure M. Zapatero, qui repose sur un respect réciproque. J'ai la conviction que démocratie et développement, que paix et justice vont ensemble. Le processus de Barcelone doit trouver un nouvel élan à l'occasion de son dixième anniversaire. C'est à travers le dynamisme des sociétés arabes, la volonté de participation des citoyens à l'acte démocratique, l'énergie de vos entrepreneurs, l'aspiration des femmes à tenir toute leur place, la créativité de la jeunesse arabe, la vitalité de vos médias que vous pourrez relever ce nouveau et grand défi.
L'Union européenne veut, dans le même esprit, développer son dialogue avec les pays du Golfe et les pays de la péninsule arabe.
Voilà, Monsieur le Président, le message d'amitié et d'encouragement de la France et au moment où vous fêtez votre 60ème anniversaire, je veux dire que nous continuerons d'appuyer vos efforts. Vous disiez tout à l'heure, Monsieur le Secrétaire général, que le monde entier doit savoir et reconnaître ce qu'il doit à la civilisation arabe à travers les siècles. Nous savons aujourd'hui ce que cette civilisation compte de ressources, de capacités pour tenir, dans notre monde ouvert et concurrentiel, la place qui lui revient. Je vous remercie de m'avoir permis de vous dire ce message de la France.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 mars 2005)
(Entretien avec RFI et l'Agence France presse (AFP) à Alger le 22 mars 2005) :
Q - Dans votre discours, vous avez évoqué les défis auxquels doit faire face le monde arabe, défi de la violence, défi du développement économique, mais la violence n'est pas à l'ordre du jour du sommet ?
R - Et pourtant, plusieurs dirigeants arabes ont évoqué la violence. La violence du terrorisme, la violence des conflits, c'est le premier grand défi des pays arabes qui se réunissent aujourd'hui à Alger et je suis venu dire simplement que la France serait aux côtés des pays arabes pour relever ce défi de la sécurité, en particulier s'agissant de plusieurs conflits ou de plusieurs situations régionales qui ne concernent pas seulement le monde arabe. L'instabilité du monde arabe, c'est notre propre instabilité et voilà pourquoi nous souhaitons accompagner le Processus de paix entre Israéliens et Palestiniens, le nouveau dialogue pour aboutir, le plus tôt possible, à la création d'un Etat palestinien viable et indépendant, vivant aux côtés d'Israël. Voilà pourquoi, nous avons accompagné la transition politique qui est engagée en Irak et voilà aussi pourquoi, avec la résolution 1559, nous souhaitons que le Liban retrouve le plus vite possible, la maîtrise de son propre destin, comme le peuple libanais le souhaite, en même temps que nous souhaitons que la vérité soit faite sur qui a voulu et qui a cherché à assassiner Rafic Hariri.
Il y a ce premier grand défi de la sécurité et de la stabilité qui nous concerne et il y a un autre défi, et les pays arabes l'ont dit à Tunis, ils le redisent aujourd'hui, ils veulent relever le défi du développement, de la réforme, de la démocratie. Et j'ai simplement voulu dire, comme ministre français et en même temps comme ministre européen, que l'Union européenne serait aux côtés des pays arabes, dans le cadre du processus de Barcelone, pour accompagner ce défi de la démocratie et de la réforme.
Q - Avez-vous rencontré des responsables syriens et pensez-vous que la Syrie doit se retirer avant les élections au Liban ?
R - J'ai dit ce que j'avais à dire, dans mon intervention, sur le souhait de la communauté internationale, d'une totale, complète et rapide application de la résolution 1559, qui demande le retrait du Liban des troupes et des services syriens le plus tôt possible, de telle sorte que ce pays puisse retrouver la maîtrise de son destin et puisse organiser, librement et démocratiquement, des élections. Car le moment de vérité sera celui des élections au Liban, au printemps prochain.
Q - A propos du Proche-Orient, la Feuille de route est toujours d'actualité. Or, on continue à construire des logements en Cisjordanie, quelle est votre réaction ?
R - Nous souhaitons que tout soit fait pour préserver, de part et d'autre, ce dialogue fragile qui s'est instauré à Charm el-Cheikh. Voilà l'esprit dans lequel nous avons, l'autre jour, entouré Mahmoud Abbas à Londres, voilà pourquoi nous souhaitons qu'Israël tiennent ses engagements, respecte les résolutions et que, le plus tôt possible, probablement dans la seconde partie de l'année 2005, il y ait cette conférence internationale qui est prévue dans la Feuille de route.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 mars 2005)
(Entretien avec Al Arabiya à Alger le 22 mars 2005) :
Q - Je crois que l'Europe tenait à participer à cette conférence, que pensez-vous de cette réactivation de l'initiative de son Altesse le Prince Abdallah d'Arabie saoudite ?
R - Mais l'Europe a été invitée à cette conférence. C'est bien que nous soyons là, les uns et les autres, pour dire notre solidarité, parce que nous sommes là, de l'autre côté de la Méditerranée. Depuis dix ans, nous avons engagé un dialogue, un partenariat avec le monde arabe, à travers l'initiative de Barcelone et il faut maintenant relancer ce partenariat. Tout ce qui se dit aujourd'hui, autour de la table, est très important pour nous, au moment où nous allons relancer ce processus, dix ans après qu'il a été engagé. Le monde arabe a plusieurs défis à relever en même temps, et voilà pourquoi des initiatives comme celle du Prince Abdallah sont très importantes, c'est le défi de la sécurité, de la lutte contre la violence, violence du terrorisme et violence des conflits, et nous sommes là pour aider à relever ce défi, en même temps que celui du développement, de la démocratie et de la réforme.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 mars 2005)