Texte intégral
QUESTION : Comment va Marseille ?
Jean-Claude GAUDIN : Marseille ne va pas bien, Marseille est prise en otage et les emplois sont menacés. Le trafic s'en va vers d'autres ports, la fiabilité n'est plus certaine et, par conséquent, c'est une perte sèche sur l'économie, considérable, pour le petit commerce, pour l'environnement. Et c'est aussi une perte pour l'image, alors qu'il y a dix ans que nous nous efforçons de faire de Marseille une capitale euro méditerranéenne.
QUESTION : Marseille blessée et handicapée, le port fermé, puis entrouvert...
Jean-Claude GAUDIN : Et refermé le lendemain...
QUESTION : Des navires en attente... Avez-vous évalué un premier coût de ces différentes grèves ?
Jean-Claude GAUDIN : C'est considérable. Mais c'est l'état d'esprit sur lequel je voudrais que l'on revienne. On n'a pas le droit de prendre en otage toute une population et de diminuer l'activité d'une ville. Ce n'est pas tolérable, surtout en disant des choses qui ne sont pas conformes à la vérité.
QUESTION : Quand le port est touché, c'est toute la ville, toute la région, qui en prennent les conséquences ?
Jean-Claude GAUDIN : Bien entendu, parce que tout autour du port, il y a de multiples entreprises. Ces entreprises-là, d'ailleurs, on n'en parle pas, elles ne font pas l'objet de reportages à la télévision le soir. Et ce sont des milliers et des milliers d'emplois, aujourd'hui menacés.
QUESTION : A Marseille, s'ajoute une nouvelle grève des transports en commun. Cela veut-il dire que vous voulez privatiser la RTM ?
Jean-Claude GAUDIN : Il n'est pas question de "privatiser" la RTM. Le réseau de bus et le métro existent et ne seront pas touchés. Mais nous faisons de nouvelles lignes de tramway et nous prolongeons le métro. Pour cela, nous avons besoin de 800 millions d'euros. Or l'Etat, le Conseil général, le Conseil régional nous donnent moins de 10 %. Dans ce cas-là, il faut faire un emprunt. On veut le faire à la Banque européenne d'investissement, qui souhaite que pour ces lignes de tramway, on ouvre à la concurrence. On a ouvert à la concurrence. Je pense que la RTM est la mieux placée, en s'associant d'ailleurs avec Connex pour arriver à emporter ce marché...
QUESTION : Ah, Connex aussi !
Jean-Claude GAUDIN : Très peu d'ailleurs ! Bien entendu, il n'est pas question d'aller toucher aux avantages du personnel, aux acquis sociaux que, depuis dix ans, je me suis efforcé d'améliorer.
QUESTION : Y a-t-il un risque que cette grève dure ?
Jean-Claude GAUDIN : Cette grève ne se justifie pas. Et par conséquent, je souhaite que la raison revienne. La subvention d'équilibre que la communauté urbaine de Marseille donne à la RTM est de 116 millions d'euros par an. En l'an 2000, c'était simplement 70 millions d'euros par an. Alors, je pense quand même que l'effort que j'ai pu engager pour la RTM sera, à son juste prix, reconnu. Mais je veux le meilleur service au meilleur coût pour les Marseillais.
QUESTION : Mais cela fait beaucoup pour Marseille, il faut le reconnaître...
Jean-Claude GAUDIN : Évidemment !
QUESTION : A la SNCM, quel est le jour limite de la cessation de paiement, c'est-à-dire du sursis ?
Jean-Claude GAUDIN : A mon avis, c'est à la fin de la semaine. Comme vous le savez, la SNCM perd 30 millions d'euros par an et sa trésorerie sera négative de 90 millions d'euros d'ici à la fin de l'année. Il y a deux ans, j'avais obtenu du gouvernement Raffarin, avec Renaud MUSELIER, qui était ministre à l'époque, qu'il recapitalise, pour 69 millions d'euros, la trésorerie de la SNCM. Aujourd'hui, on ne peut rien reprocher au Gouvernement...
QUESTION : Vous ne croyez pas qu'il doit avancer, promettre encore, verser un peu d'argent ?
Jean-Claude GAUDIN : J'ai toujours souhaité que le Gouvernement reste au capital de la SNCM...
QUESTION : Vous ne vouliez pas, au début, de la privatisation totale ?
Jean-Claude GAUDIN : Evidemment, on peut toujours rêver ! Mais devant la situation et devant l'appel fait aux contribuables français, il y a des sommes, évidemment, où un jour, on est obligé de dire "stop, on ne peut pas aller plus loin !". Et par conséquent, je trouve le plan du Gouvernement sérieux, réaliste et crédible. Aujourd'hui, en peu de mots, il y a 2400 personnes qui travaillent à la SNCM. Que disent les repreneurs, à la fois Connex et à la fois Butler, avec l'accord du Gouvernement ? Qu'il faut 350 à 400 personnes qui s'en aillent. On va négocier leur départ : soit en préretraite, soit en financement... Pas de licenciements secs... Et on conserve 2000 personnes. Alors, si on va au dépôt de bilan à la fin de la semaine, avec ces 2400 personnes qui disparaissent, je préfère encore que ce soient 400 personnes qui soient indemnisées, plutôt que 2.000 qui vont s'arrêter de travailler.
QUESTION : La CGT dit qu'elle ne bougera pas. La faillite vous paraît-elle inévitable, ce matin ?
Jean-Claude GAUDIN : On se dirige vers cela s'il n'y a pas un sursaut. Les ministres sont venus. Le Gouvernement a répondu, par écrit, à seize, dix-sept ou dix-huit questions... Vous avez suivi tout ça, donc on ne peut pas dire que le Gouvernement ne s'est pas expliqué, qu'il n'a pas dialogué, qu'il n'a pas pris en compte les revendications. Par contre, il y en a une qu'il ne peut pas prendre en compte : c'est celle du 29 mai. Que nous disent les syndicats, que nous dit l'ultra gauche aujourd'hui, le Parti communiste etc. ? Qu'il y a eu le 29 mai, que les Français n'ont pas voulu l'Europe, que par conséquent, l'Europe, aujourd'hui, on s'en fout ! Et que le Gouvernement n'a qu'à ne pas tenir compte...
QUESTION : Vous le sentez avec la CGT-Marseille ?
Jean-Claude GAUDIN : Je le sens. J'ai eu cinq heures de débats à la communauté urbaine, lundi matin. C'est la thèse des communistes ! "Passons outre l'Europe et on s'en fout de l'Europe" ! Il n'y a pas de Constitution européenne, c'est vrai. Mais les règles de l'Europe s'imposent encore
à la France !
QUESTION : Mais il faut rappeler que la CGT-Marseille tient le port, les marins, les dockers, la Poste, les cheminots...
Jean-Claude GAUDIN : Eh bien, peut-être que M. Thibault pourrait faire un effort pour essayer de convaincre ses propres amis, que l'on ne peut pas tout tuer au nom de l'idéologie, au nom d'un sectarisme et au nom de théories du passé, qui ont été emportées avec le XXème siècle. On est pragmatique, et on n'est pas idéologue, à Marseille !
QUESTION : Comment le Premier ministre, Dominique de VILLEPIN, gère-t-il cette crise ? Et a-t-il raison de monter en première ligne ?
Jean-Claude GAUDIN : On lui a demandé de monter en première ligne...
QUESTION : Qui ?
Jean-Claude GAUDIN : Un peu tout le monde lui a demandé que le Gouvernement s'explique. Il s'est expliqué, il a essayé de convaincre, il a mis des arguments. Vous savez, le Gouvernement met 25 % dans le capital. Avec ce que l'on offre aux agents, cela veut dire qu'il y a une minorité de blocage. Et j'ai toujours été favorable à ce que l'Etat reste dans la SNCM, parce que c'est une garantie d'équité, de justice et qu'il n'y aura pas de licenciements abusifs.
QUESTION : Donc vous le soutenez. Mais après l'hésitation, il y a la fermeté jusqu'au bout. Est-ce aujourd'hui ce qu'il faut ? Je le demande à celui qui connaît bien Marseille !
Jean-Claude GAUDIN : Je le crois, parce que l'argent public ne vient pas que des Marseillais, il vient aussi de Strasbourg, de Brest et de Paris. Et on ne peut pas dire à ces gens-là, qu'à fonds perdus, il faut toujours garantir un service public. Le service public doit être garanti. Le Gouvernement s'est engagé : unicité de l'entreprise, service public avec la Corse, le RIF qui ne s'applique pas pour la SNCM et pas de licenciement sec. Mais que faut-il faire ?!
QUESTION : Politiquement, pour Dominique de VILLEPIN, est-ce un enjeu, un test de grande ampleur ?
Jean-Claude GAUDIN : Mais bien entendu. Le Premier ministre est en charge de diriger les affaires de notre pays. Et nous, dans la majorité parlementaire qui le soutient, nous souhaitons son succès, car le succès du Premier ministre est le succès de la France.
QUESTION : Vous êtes le vice-président de l'UMP, aux côtés de N. Sarkozy. N. Sarkozy observe et attend ?
Jean-Claude GAUDIN : Non, N. Sarkozy est tout à fait solidaire de ce qui fait sur ce sujet au Gouvernement...
QUESTION : Il vous l'a dit ?
Jean-Claude GAUDIN : Ecoutez, j'assiste, le mardi matin, à une réunion politique, à laquelle Nicolas SARKOZY est toujours présent, à Matignon. Il y a là unanimité de point de vue. Et notre majorité parlementaire soutient le Gouvernement, dans lequel siège aussi Nicolas SARKOZY.
QUESTION : Vous êtes un fin politique et un parfait connaisseur de la carte électorale. Je ne dis pas ça pour faire du baratin, mais c'est vrai ! Vous avez d'ailleurs commencé à donner les investitures hier, pour les législatives prochaines. S'il y avait des présidentielles, dimanche ?
Jean-Claude GAUDIN : Les présidentielles, ce serait peut-être un peu plus difficile aujourd'hui, dans notre pays. Enfin, j'observe que depuis plusieurs mois, toutes les élections partielles qui ont eu lieu, nous les gagnons...
QUESTION : "Difficile", cela veut dire ?
Jean-Claude GAUDIN : Difficile, cela veut dire que le contexte, aujourd'hui, est bien entendu un peu différent de ce qui s'est passé jadis. Mais laissons à chacun le soin de faire son travail. On s'est réjoui de la bonne santé du président de la République. Il est là, il existe, il tient sa place. Le Gouvernement aussi. Quant à Nicolas SARKOZY - et je l'aide pour faire cela - il crée un véritable parti de droite et du Centre, ce qui ne s'est jamais fait dans ce pays.
QUESTION : Et en 2007, même si c'est dans 17 mois, peut-il y avoir face à face, un candidat UMP et un candidat chiraquien ?
Jean-Claude GAUDIN : Personnellement, je suis de ceux qui feront tout pour qu'il y ait qu'un seul et unique candidat de notre bord. Sans quoi, le résultat serait peut-être alors à déplorer. Et je souhaite au contraire que nous puissions perdurer et continuer l'action pour la France.
QUESTION : La presse souligne ce matin, et hier déjà dans Le Monde, que les sénateurs acceptent finalement le calendrier des élections de 2007 en échange de la prolongation d'un an de tous les mandats. C'est-à-dire, le prochain président du Sénat serait élu qu'en 2008. Est-ce pour cette raison, parce que c'est trop long, que l'on cherche à déstabiliser l'actuel président du Sénat ?
Jean-Claude GAUDIN : L'actuel président du Sénat, l'année dernière a été renouvelable, et je l'ai beaucoup aidé pour qu'il conserve cette fonction. Le président du Sénat a "ouvert" le Sénat. Il a permis que cette institution, dans le bicamérisme français, soit mieux connue des Françaises et des Français, et chaque fois que nous ouvrons les portes du Palais du Luxembourg, ce sont des milliers de gens qui viennent s'intéresser à l'activité du Sénat.
QUESTION : Qui veut "sa peau" aujourd'hui" ?
Jean-Claude GAUDIN : Je ne sais pas si quelqu'un veut "sa peau", en tout cas, la majorité soutient le président Poncelet, et ce n'est pas du Sénat que vous attendrez une révolution.
QUESTION : C'est quelqu'un qui connaît le Sénat qui le dit ! Je reviens à Marseille : vous en avez vu de toutes les couleurs et de toutes les manuvres. Etes-vous inquiet ?
Jean-Claude GAUDIN : Oui, je suis inquiet, parce que c'est une perte de potentialités, c'est une perte d'unité de cette ville. Cette ville, je veux qu'elle soit forte, qu'elle soit prospère, qu'elle soit compétitive. Or, aujourd'hui, ce qui se passe, c'est l'inverse. Par conséquent, je dis : ça suffit ! Que la raison l'emporte, que le bon sens l'emporte ! Et j'espère que dans les jours qui viennent, pour la SNCM, en particulier, ce sera le cas. Quant à la RTM, honnêtement, il n'y a pas lieu de s'inquiéter.
QUESTION : Hier, j'entendais J.-P. ISRAËL, il dit : "Pourquoi la région Paca, Corse, Marseille, n'ont-elles pas envie de remplacer l'Etat et de créer une société régionale" ?
Jean-Claude GAUDIN : Parce que l'on n'a pas les moyens de le faire ! Parce que c'est impossible ! Parce que cela, c'est un rêve que les Corses peut-être, eux-mêmes, souhaitaient. Enfin...les syndicalistes corses. Et le président Camille de ROCCA-SERRA, a déjà indiqué que cela n'était pas possible. Et cela l'est encore moins pour Paca. Enfin, ce n'est plus moi qui préside Paca, c'est Michel VAUZELLE, auquel d'ailleurs, je souhaite un prompt rétablissement parce qu'il est souffrant. Mais à l'époque où j'ai présidé la PACA, jamais nous n'aurions eu les moyens financiers de nous transformer en armateurs !
QUESTION : Pendant nos querelles, il y a le Pakistan, l'Allemagne a une chancelière, la grippe aviaire approche, l'Iran prépare ses bombes nucléaires. On a l'impression de temps en temps qu'il y a quand même un danger à danser sur le Titanic et à ne pas s'en rendre compte.
Jean-Claude GAUDIN : Absolument.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 12 octobre 2005)
Jean-Claude GAUDIN : Marseille ne va pas bien, Marseille est prise en otage et les emplois sont menacés. Le trafic s'en va vers d'autres ports, la fiabilité n'est plus certaine et, par conséquent, c'est une perte sèche sur l'économie, considérable, pour le petit commerce, pour l'environnement. Et c'est aussi une perte pour l'image, alors qu'il y a dix ans que nous nous efforçons de faire de Marseille une capitale euro méditerranéenne.
QUESTION : Marseille blessée et handicapée, le port fermé, puis entrouvert...
Jean-Claude GAUDIN : Et refermé le lendemain...
QUESTION : Des navires en attente... Avez-vous évalué un premier coût de ces différentes grèves ?
Jean-Claude GAUDIN : C'est considérable. Mais c'est l'état d'esprit sur lequel je voudrais que l'on revienne. On n'a pas le droit de prendre en otage toute une population et de diminuer l'activité d'une ville. Ce n'est pas tolérable, surtout en disant des choses qui ne sont pas conformes à la vérité.
QUESTION : Quand le port est touché, c'est toute la ville, toute la région, qui en prennent les conséquences ?
Jean-Claude GAUDIN : Bien entendu, parce que tout autour du port, il y a de multiples entreprises. Ces entreprises-là, d'ailleurs, on n'en parle pas, elles ne font pas l'objet de reportages à la télévision le soir. Et ce sont des milliers et des milliers d'emplois, aujourd'hui menacés.
QUESTION : A Marseille, s'ajoute une nouvelle grève des transports en commun. Cela veut-il dire que vous voulez privatiser la RTM ?
Jean-Claude GAUDIN : Il n'est pas question de "privatiser" la RTM. Le réseau de bus et le métro existent et ne seront pas touchés. Mais nous faisons de nouvelles lignes de tramway et nous prolongeons le métro. Pour cela, nous avons besoin de 800 millions d'euros. Or l'Etat, le Conseil général, le Conseil régional nous donnent moins de 10 %. Dans ce cas-là, il faut faire un emprunt. On veut le faire à la Banque européenne d'investissement, qui souhaite que pour ces lignes de tramway, on ouvre à la concurrence. On a ouvert à la concurrence. Je pense que la RTM est la mieux placée, en s'associant d'ailleurs avec Connex pour arriver à emporter ce marché...
QUESTION : Ah, Connex aussi !
Jean-Claude GAUDIN : Très peu d'ailleurs ! Bien entendu, il n'est pas question d'aller toucher aux avantages du personnel, aux acquis sociaux que, depuis dix ans, je me suis efforcé d'améliorer.
QUESTION : Y a-t-il un risque que cette grève dure ?
Jean-Claude GAUDIN : Cette grève ne se justifie pas. Et par conséquent, je souhaite que la raison revienne. La subvention d'équilibre que la communauté urbaine de Marseille donne à la RTM est de 116 millions d'euros par an. En l'an 2000, c'était simplement 70 millions d'euros par an. Alors, je pense quand même que l'effort que j'ai pu engager pour la RTM sera, à son juste prix, reconnu. Mais je veux le meilleur service au meilleur coût pour les Marseillais.
QUESTION : Mais cela fait beaucoup pour Marseille, il faut le reconnaître...
Jean-Claude GAUDIN : Évidemment !
QUESTION : A la SNCM, quel est le jour limite de la cessation de paiement, c'est-à-dire du sursis ?
Jean-Claude GAUDIN : A mon avis, c'est à la fin de la semaine. Comme vous le savez, la SNCM perd 30 millions d'euros par an et sa trésorerie sera négative de 90 millions d'euros d'ici à la fin de l'année. Il y a deux ans, j'avais obtenu du gouvernement Raffarin, avec Renaud MUSELIER, qui était ministre à l'époque, qu'il recapitalise, pour 69 millions d'euros, la trésorerie de la SNCM. Aujourd'hui, on ne peut rien reprocher au Gouvernement...
QUESTION : Vous ne croyez pas qu'il doit avancer, promettre encore, verser un peu d'argent ?
Jean-Claude GAUDIN : J'ai toujours souhaité que le Gouvernement reste au capital de la SNCM...
QUESTION : Vous ne vouliez pas, au début, de la privatisation totale ?
Jean-Claude GAUDIN : Evidemment, on peut toujours rêver ! Mais devant la situation et devant l'appel fait aux contribuables français, il y a des sommes, évidemment, où un jour, on est obligé de dire "stop, on ne peut pas aller plus loin !". Et par conséquent, je trouve le plan du Gouvernement sérieux, réaliste et crédible. Aujourd'hui, en peu de mots, il y a 2400 personnes qui travaillent à la SNCM. Que disent les repreneurs, à la fois Connex et à la fois Butler, avec l'accord du Gouvernement ? Qu'il faut 350 à 400 personnes qui s'en aillent. On va négocier leur départ : soit en préretraite, soit en financement... Pas de licenciements secs... Et on conserve 2000 personnes. Alors, si on va au dépôt de bilan à la fin de la semaine, avec ces 2400 personnes qui disparaissent, je préfère encore que ce soient 400 personnes qui soient indemnisées, plutôt que 2.000 qui vont s'arrêter de travailler.
QUESTION : La CGT dit qu'elle ne bougera pas. La faillite vous paraît-elle inévitable, ce matin ?
Jean-Claude GAUDIN : On se dirige vers cela s'il n'y a pas un sursaut. Les ministres sont venus. Le Gouvernement a répondu, par écrit, à seize, dix-sept ou dix-huit questions... Vous avez suivi tout ça, donc on ne peut pas dire que le Gouvernement ne s'est pas expliqué, qu'il n'a pas dialogué, qu'il n'a pas pris en compte les revendications. Par contre, il y en a une qu'il ne peut pas prendre en compte : c'est celle du 29 mai. Que nous disent les syndicats, que nous dit l'ultra gauche aujourd'hui, le Parti communiste etc. ? Qu'il y a eu le 29 mai, que les Français n'ont pas voulu l'Europe, que par conséquent, l'Europe, aujourd'hui, on s'en fout ! Et que le Gouvernement n'a qu'à ne pas tenir compte...
QUESTION : Vous le sentez avec la CGT-Marseille ?
Jean-Claude GAUDIN : Je le sens. J'ai eu cinq heures de débats à la communauté urbaine, lundi matin. C'est la thèse des communistes ! "Passons outre l'Europe et on s'en fout de l'Europe" ! Il n'y a pas de Constitution européenne, c'est vrai. Mais les règles de l'Europe s'imposent encore
à la France !
QUESTION : Mais il faut rappeler que la CGT-Marseille tient le port, les marins, les dockers, la Poste, les cheminots...
Jean-Claude GAUDIN : Eh bien, peut-être que M. Thibault pourrait faire un effort pour essayer de convaincre ses propres amis, que l'on ne peut pas tout tuer au nom de l'idéologie, au nom d'un sectarisme et au nom de théories du passé, qui ont été emportées avec le XXème siècle. On est pragmatique, et on n'est pas idéologue, à Marseille !
QUESTION : Comment le Premier ministre, Dominique de VILLEPIN, gère-t-il cette crise ? Et a-t-il raison de monter en première ligne ?
Jean-Claude GAUDIN : On lui a demandé de monter en première ligne...
QUESTION : Qui ?
Jean-Claude GAUDIN : Un peu tout le monde lui a demandé que le Gouvernement s'explique. Il s'est expliqué, il a essayé de convaincre, il a mis des arguments. Vous savez, le Gouvernement met 25 % dans le capital. Avec ce que l'on offre aux agents, cela veut dire qu'il y a une minorité de blocage. Et j'ai toujours été favorable à ce que l'Etat reste dans la SNCM, parce que c'est une garantie d'équité, de justice et qu'il n'y aura pas de licenciements abusifs.
QUESTION : Donc vous le soutenez. Mais après l'hésitation, il y a la fermeté jusqu'au bout. Est-ce aujourd'hui ce qu'il faut ? Je le demande à celui qui connaît bien Marseille !
Jean-Claude GAUDIN : Je le crois, parce que l'argent public ne vient pas que des Marseillais, il vient aussi de Strasbourg, de Brest et de Paris. Et on ne peut pas dire à ces gens-là, qu'à fonds perdus, il faut toujours garantir un service public. Le service public doit être garanti. Le Gouvernement s'est engagé : unicité de l'entreprise, service public avec la Corse, le RIF qui ne s'applique pas pour la SNCM et pas de licenciement sec. Mais que faut-il faire ?!
QUESTION : Politiquement, pour Dominique de VILLEPIN, est-ce un enjeu, un test de grande ampleur ?
Jean-Claude GAUDIN : Mais bien entendu. Le Premier ministre est en charge de diriger les affaires de notre pays. Et nous, dans la majorité parlementaire qui le soutient, nous souhaitons son succès, car le succès du Premier ministre est le succès de la France.
QUESTION : Vous êtes le vice-président de l'UMP, aux côtés de N. Sarkozy. N. Sarkozy observe et attend ?
Jean-Claude GAUDIN : Non, N. Sarkozy est tout à fait solidaire de ce qui fait sur ce sujet au Gouvernement...
QUESTION : Il vous l'a dit ?
Jean-Claude GAUDIN : Ecoutez, j'assiste, le mardi matin, à une réunion politique, à laquelle Nicolas SARKOZY est toujours présent, à Matignon. Il y a là unanimité de point de vue. Et notre majorité parlementaire soutient le Gouvernement, dans lequel siège aussi Nicolas SARKOZY.
QUESTION : Vous êtes un fin politique et un parfait connaisseur de la carte électorale. Je ne dis pas ça pour faire du baratin, mais c'est vrai ! Vous avez d'ailleurs commencé à donner les investitures hier, pour les législatives prochaines. S'il y avait des présidentielles, dimanche ?
Jean-Claude GAUDIN : Les présidentielles, ce serait peut-être un peu plus difficile aujourd'hui, dans notre pays. Enfin, j'observe que depuis plusieurs mois, toutes les élections partielles qui ont eu lieu, nous les gagnons...
QUESTION : "Difficile", cela veut dire ?
Jean-Claude GAUDIN : Difficile, cela veut dire que le contexte, aujourd'hui, est bien entendu un peu différent de ce qui s'est passé jadis. Mais laissons à chacun le soin de faire son travail. On s'est réjoui de la bonne santé du président de la République. Il est là, il existe, il tient sa place. Le Gouvernement aussi. Quant à Nicolas SARKOZY - et je l'aide pour faire cela - il crée un véritable parti de droite et du Centre, ce qui ne s'est jamais fait dans ce pays.
QUESTION : Et en 2007, même si c'est dans 17 mois, peut-il y avoir face à face, un candidat UMP et un candidat chiraquien ?
Jean-Claude GAUDIN : Personnellement, je suis de ceux qui feront tout pour qu'il y ait qu'un seul et unique candidat de notre bord. Sans quoi, le résultat serait peut-être alors à déplorer. Et je souhaite au contraire que nous puissions perdurer et continuer l'action pour la France.
QUESTION : La presse souligne ce matin, et hier déjà dans Le Monde, que les sénateurs acceptent finalement le calendrier des élections de 2007 en échange de la prolongation d'un an de tous les mandats. C'est-à-dire, le prochain président du Sénat serait élu qu'en 2008. Est-ce pour cette raison, parce que c'est trop long, que l'on cherche à déstabiliser l'actuel président du Sénat ?
Jean-Claude GAUDIN : L'actuel président du Sénat, l'année dernière a été renouvelable, et je l'ai beaucoup aidé pour qu'il conserve cette fonction. Le président du Sénat a "ouvert" le Sénat. Il a permis que cette institution, dans le bicamérisme français, soit mieux connue des Françaises et des Français, et chaque fois que nous ouvrons les portes du Palais du Luxembourg, ce sont des milliers de gens qui viennent s'intéresser à l'activité du Sénat.
QUESTION : Qui veut "sa peau" aujourd'hui" ?
Jean-Claude GAUDIN : Je ne sais pas si quelqu'un veut "sa peau", en tout cas, la majorité soutient le président Poncelet, et ce n'est pas du Sénat que vous attendrez une révolution.
QUESTION : C'est quelqu'un qui connaît le Sénat qui le dit ! Je reviens à Marseille : vous en avez vu de toutes les couleurs et de toutes les manuvres. Etes-vous inquiet ?
Jean-Claude GAUDIN : Oui, je suis inquiet, parce que c'est une perte de potentialités, c'est une perte d'unité de cette ville. Cette ville, je veux qu'elle soit forte, qu'elle soit prospère, qu'elle soit compétitive. Or, aujourd'hui, ce qui se passe, c'est l'inverse. Par conséquent, je dis : ça suffit ! Que la raison l'emporte, que le bon sens l'emporte ! Et j'espère que dans les jours qui viennent, pour la SNCM, en particulier, ce sera le cas. Quant à la RTM, honnêtement, il n'y a pas lieu de s'inquiéter.
QUESTION : Hier, j'entendais J.-P. ISRAËL, il dit : "Pourquoi la région Paca, Corse, Marseille, n'ont-elles pas envie de remplacer l'Etat et de créer une société régionale" ?
Jean-Claude GAUDIN : Parce que l'on n'a pas les moyens de le faire ! Parce que c'est impossible ! Parce que cela, c'est un rêve que les Corses peut-être, eux-mêmes, souhaitaient. Enfin...les syndicalistes corses. Et le président Camille de ROCCA-SERRA, a déjà indiqué que cela n'était pas possible. Et cela l'est encore moins pour Paca. Enfin, ce n'est plus moi qui préside Paca, c'est Michel VAUZELLE, auquel d'ailleurs, je souhaite un prompt rétablissement parce qu'il est souffrant. Mais à l'époque où j'ai présidé la PACA, jamais nous n'aurions eu les moyens financiers de nous transformer en armateurs !
QUESTION : Pendant nos querelles, il y a le Pakistan, l'Allemagne a une chancelière, la grippe aviaire approche, l'Iran prépare ses bombes nucléaires. On a l'impression de temps en temps qu'il y a quand même un danger à danser sur le Titanic et à ne pas s'en rendre compte.
Jean-Claude GAUDIN : Absolument.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 12 octobre 2005)