Interview de M. Jacques Barrot, président du groupe parlementaire UMP à l'Assemblée nationale, dans "Le Figaro" du 2 mars 2004, sur la motion de censure déposée par le groupe socialiste à l'Assemblée nationale et sur la politique sociale du gouvernement.

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Q - Que pensez-vous de ce débat de censure, à moins de trois semaines des élections régionales ?
R - Cette motion de censure ressemble à un aveu de la faible capacité de l'opposition socialiste à mobiliser ceux qu'elle a déçus hier et à redevenir crédible pour ceux qui vont voter demain. Elle relève d'une stratégie de défausse : faute de proposer des alternatives, on caricature la nouvelle étape de décentralisation engagée, en oubliant que la réforme de la constitution permet désormais aux collectivités locales de bénéficier de la part de l'Etat des compensations financières liées aux transferts de compétences. Ce ne fut pas le cas sous le gouvernement de Lionel Jospin, avec notamment l'APA.
Le texte de la motion s'inscrit dans la surenchère permanente à laquelle se voue le PS pour tenter de contenir une extrême gauche de plus en plus menaçante. Mais, dans son outrance, le parti socialiste court le risque de favoriser le vote extrême.
Q - Que répondez-vous aux critiques émises par le groupe socialiste dans le " livre noir " qu'il vient de publier sur la politique d' " abandon social " du gouvernement Raffarin ?
R - Certains excès suffisent à rendre suspect un " bilan " Qui peut soutenir que la réforme des retraites, loin de consolider la retraite par répartition, peut la menacer ? Et il n'est pas honnête de taire les avancées sociales que constituent l'augmentation sans précédent du SMIC, la création d'un droit individuel à la formation, le droit à une retraite anticipée pour ceux qui ont commencé à travailler très tôt
Les socialistes peuvent certes préférer une logique d'assistance, un égalitarisme qui nie la capacité d'initiative, le mérite individuel. Nous préférons mettre en uvre une politique de réinsertion plus active, avec le contrat jeune en entreprise, avec le RMA, passerelle pour le retour sur le marché de l'emploi Les réformes que nous avons entreprises sont attaquées systématiquement, comme si le statu quo hérité du " ni-ni " jospinien constituait un modèle de justice sociale
Q - Après la réforme des retraites, le gouvernement engage la réforme de la protection sociale. Y a-t-il une " méthode Raffarin " pour parvenir à réformer le pays ?
R - Jean-Pierre Raffarin s'efforce d'avancer en évitant deux erreurs : l'excès de précipitation, et l'excès de précaution, qui conduit, en ne voulant mécontenter personne, à ne jamais corriger les injustices.
Dans d'autres pays, l'opposition évite de contrarier les adaptations qui s'avèrent indispensables à l'avenir du pays. Au lieu de souffler sur les braises, l'opposition pourrait également faire des propositions constructives sur l'avenir de la recherche publique française.
Ainsi, l'appel lancé par certains chercheurs et universitaires serait plus convaincant s'ils accompagnaient leurs exigences de l'acceptation d'un effort systématique d'évaluation. Un tel message serait plus convaincant qu'un réflexe corporatiste, exploité cyniquement par le parti socialiste à des fins politiciennes.
Q - Ne craignez-vous pas que les Français profitent de ces élections intermédiaires pour exprimer leur mécontentement ?
R - Notre vraie préoccupation concerne l'abstention Les extrêmes s'efforcent d'exploiter les peurs, mais aussi les mécontentements catégoriels. Mais le pourcentage de ces votes contestataires dépendra directement de la plus ou moins grande abstention des Français. Il faut pour cela expliquer que les élections régionales et cantonales influeront de plus en plus sur la vie quotidienne.
Pour les transports urbains, la formation professionnelle, le pouvoir régional va compter de plus en plus. Les départements vont se trouver au cur de l'action sociale de proximité. Mieux vaut choisir les meilleures équipes possibles.
Même si, avec leur motion de censure, les socialistes tentent de les égarer sur la signification de leur vote, les Français ne doivent pas douter du véritable enjeu : une bonne gouvernance des régions et des départements de France pour assurer leur réussite dans l'Europe de demain.

(source http://www.ump.assemblee-nationale.fr, le 4 mars 2004)