Texte intégral
Jean-Michel Aphatie : Bonjour, Jean-Michel Lemétayer.
Jean-Michel Lemétayer : Bonjour.
Jean-Michel Aphatie : Les ventes de volailles, et notamment de poulets, sont en chute libre dans les magasins. On va en parler un peu dans le détail, voire des difficultés des agriculteurs. Mais avant, Jean-Michel Lemétayer, pensez-vous que le gouvernement, les médias peut-être, parlent trop de la grippe aviaire et créent, ainsi, une psychose artificielle ?
Jean-Michel Lemétayer : A partir du moment où l'on parle d'un sujet comme celui-là, on ne fait plus la différence entre le risque qui est celui d'une épizootie sur les volatiles, sur les volailles, et la psychose qui peut naître quant à la consommation et le risque pour le consommateur.
Alors, autant on n'a pas le droit de jouer avec la santé du consommateur, autant il faut, aussi, dire les choses clairement. Le sujet qui est actuellement en cause c'est celui d'un risque et seulement encore d'un risque d'épizootie au niveau des volatiles.
Jean-Michel Aphatie : De risques en France ?
Jean-Michel Lemétayer : Et liée aux migrations de volatiles.
Jean-Michel Aphatie : C'est-à-dire qu'en France encore, redisons-le, on n'a rien noté.
Jean-Michel Lemétayer : Non. En France, il n'y a rien. D'ailleurs si j'ai bien compris les analyses se sont avérées négatives quant à la crainte qu'on avait sur un réunionnais. Donc, cela montre bien qu'il faut pouvoir distinguer les choses pour éviter cette psychose qui s'est traduite immédiatement à partir du moment où on a commencé à parler de ce sujet on a vu tout de suite les évolutions sur la consommation et cela n'a aucune raison d'être.
Je pense que nos consommateurs doivent se sentir totalement sécurisés quant à la consommation de viande de volaille et de tous produits issus de la production de volaille. La question est de pouvoir bien expliquer les choses, bien faire la différence entre les risques et les précautions qu'a pris le gouvernement, et d'autres pays européens, pour éviter toute propagation de cette épizootie qui pourrait toucher aussi, évidemment, la production française. Et je pense que c'est là-dessus qu'il faut être extrêmement clair.
Jean-Michel Aphatie : Et la décision du gouvernement, du ministre de l'Agriculture, de confiner dans 26 départements les élevages, les volailles. Cela vous paraît être une bonne décision ou une mauvaise décision ?
Jean-Michel Lemétayer : C'est plutôt une bonne décision parce qu'il faut, effectivement, prendre le plus de précautions possibles, même si tout cela s'avère d'énormes contraintes pour les éleveurs. Des contraintes et aussi, sans doute, d'énormes conséquences financières : c'est bien là qu'il faudra aussi voir les choses très vite avec le gouvernement.
Jean-Michel Aphatie : Alors, justement. La consommation chute. Des exploitations sont-elles en danger, aujourd'hui, Jean-Michel Lemétayer ?
Jean-Michel Lemétayer : Inévitablement. A partir du moment où on n'arrive plus à écouler sa production ou une partie de l'écoulement de la production est en cause il y a un risque énorme. Il y a d'une part, la baisse de la consommation et puis, il y a un risque immédiat de baisse des prix, inévitablement.
J'ai demandé au ministre de l'Agriculture d'obtenir, parce que cela doit se discuter à l'échelle de l'Europe, tout de suite des décisions, de la part de l'Union Européenne, pour faire du stockage. Parce que, lorsqu'un poulet label, par exemple, arrive à maturité au bout de 75/80 jours on ne va pas le garder dans le poulailler.
Jean-Michel Aphatie : Le stocker ?
Jean-Michel Lemétayer : Donc, il faut bien le sortir de l'exploitation.
Jean-Michel Aphatie : e stocker. Le tuer, le congeler ?
Jean-Michel Lemétayer : Passer à l'abattage et puis, ensuite, s'il n'y a pas de marché, c'est un produit frais.
Jean-Michel Aphatie : Que va-t-on faire de ces stocks, après ? Si on commence à stocker !
Jean-Michel Lemétayer : Je n'en sais rien, pour l'instant. Mais, en tout cas, la première mesure si l'on ne veut pas faire s'écrouler complètement le marché, c'est de pouvoir stocker la viande de volaille. Il y a tellement de gens qui souffrent de manque d'alimentation, que l'on trouvera bien à écouler même peut-être à prix préférentiel cette production.
Jean-Michel Aphatie : Et, pour l'instant à moins que j'ai loupé les trains l'Europe n'a rien décidé ?
Jean-Michel Lemétayer : Non. Il y avait conseil des ministres, en début de semaine.
Jean-Michel Aphatie : Mardi.
Jean-Michel Lemétayer : Et je trouve que, toujours dans le cadre de crise, on ne prend pas les choses suffisamment tôt. On ne prend pas de décision suffisamment tôt. Plus on prend une décision rapidement, moins cela coûte cher pour tout le monde. D'abord, pour les producteurs, mais aussi pour la collectivité.
Après, on nous reprochera de réclamer encore des aides, etc. Si on ne veut pas que cela coûte trop cher, il faut prendre très vite des décisions qui feront qu'on minimisera, le plus possible, les conséquences, notamment financières.
Jean-Michel Aphatie : J'écoutais, hier, Dominique Bussereau, ministre de l'Agriculture. Il était l'invité de L.C.I, hier soir. Il n'a pas annoncé beaucoup de décisions ! Donc, il n'a pas l'air d'avoir compris le message que vous voulez faire passer, Jean-Michel Lemétayer !
Jean-Michel Lemétayer : Je lui ai déjà lancé le message, mais il faudra bien qu'il se rende compte que la situation, si elle doit durer plusieurs semaines, va, forcément, avoir des conséquences extrêmement négatives pour les éleveurs. Donc, il faut qu'il prenne rapidement des décisions. En tout cas, qu'il prenne des engagements de faire un bilan, dès qu'on sera sorti de cette crise, pour indemniser parce qu'il faut parler comme ça il faudra bien indemniser les pertes que vont subir les éleveurs.
Jean-Michel Aphatie : Un autre dossier préoccupe l'agriculture française. Ce sont les négociations, c'est un peu technique et complexe, qui ont lieu dans le cadre de l'O.M.C. On veut libéraliser les échanges des services de l'industrie. Et l'agriculture se trouve aussi dans ces négociations puisque le commissaire au commerce, Peter Mandelson, avec les négociateurs américains et sud-américains, remet en cause, ou semble vouloir remettre en cause, la P.A.C. Vous devez suivre ce dossier avec attention, Jean-Michel Lemétayer. Etes-vous inquiet pour l'agriculture française de ces négociations avec celles de l'O.M.C ?
Jean-Michel Lemétayer : Si nous n'étions pas inquiets, nous ne mettrions pas autant la pression sur le commissaire chargé des négociations, qui est le commissaire Mandelson.
Jean-Michel Aphatie : Britannique. Un ami de Tony Blair : ce n'est pas indifférent !
Jean-Michel Lemétayer : Un ami de Tony Blair, tout à fait, qui n'a rien compris au modèle agricole et alimentaire européen. Je crois qu'il a comme seule vue le modèle britannique, qui n'est absolument pas le nôtre. Ces négociations, c'est effectivement extrêmement complexe, mais l'enjeu, c'est d'abord notre indépendance alimentaire sur le plan de l'Europe, mais c'est tout simplement notre modèle agricole alimentaire. J'allais dire même le modèle social.
Et tout le monde doit se sentir concerné. C'est la raison pour laquelle, Jean-Michel Aphatie, je lance un appel pour que tout le monde se mobilise, de gauche à droite, sur le plan politique mais aussi l'ensemble des syndicats de salariés des entreprises, les petites et moyennes entreprises, les grandes entreprises. Tout le monde doit pouvoir mesurer les conséquences d'un mauvais accord qu'il y aurait sur l'agriculture, dans le cadre de ces négociations.
Regardons ce que cela représente en matière d'emplois. On ne cesse de parler d'emplois même si, Dieu merci, quelques chiffres semblent un peu meilleurs, ces derniers temps. Il n'empêche que l'agriculture, avec tout ce que cela veut dire en matière d'agro-équipement, d'agro-alimentaire, en France : c'est 15 % des emplois. C'est 15 millions d'agriculteurs en Europe. Je crois que les enjeux sont tels que tout le monde doit se sentir concerné et doit se sentir mobilisé.
Jean-Michel Aphatie : Le président Chirac a évoqué, hier, la possibilité d'un veto de la France sur ces négociations à l'O.M.C. Ça vous a rassuré ?
Jean-Michel Lemétayer : Le gouvernement, il faut le dire, se mobilise très fortement sur ces négociations et il n'est, pour une fois, pas isolé. Il est soutenu par un certain nombre de pays, et j'espère que l'on saura expliquer à Monsieur Mandelson qu'il faut arrêter de faire les yeux de Chimène aux américains.
Jean-Michel Aphatie : C'est dit ! C'était Jean-Michel Lemétayer, président de la F.N.S.E.A, sur RTL, ce matin. Bonne journée.
(Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 8 novembre 2005)
Jean-Michel Lemétayer : Bonjour.
Jean-Michel Aphatie : Les ventes de volailles, et notamment de poulets, sont en chute libre dans les magasins. On va en parler un peu dans le détail, voire des difficultés des agriculteurs. Mais avant, Jean-Michel Lemétayer, pensez-vous que le gouvernement, les médias peut-être, parlent trop de la grippe aviaire et créent, ainsi, une psychose artificielle ?
Jean-Michel Lemétayer : A partir du moment où l'on parle d'un sujet comme celui-là, on ne fait plus la différence entre le risque qui est celui d'une épizootie sur les volatiles, sur les volailles, et la psychose qui peut naître quant à la consommation et le risque pour le consommateur.
Alors, autant on n'a pas le droit de jouer avec la santé du consommateur, autant il faut, aussi, dire les choses clairement. Le sujet qui est actuellement en cause c'est celui d'un risque et seulement encore d'un risque d'épizootie au niveau des volatiles.
Jean-Michel Aphatie : De risques en France ?
Jean-Michel Lemétayer : Et liée aux migrations de volatiles.
Jean-Michel Aphatie : C'est-à-dire qu'en France encore, redisons-le, on n'a rien noté.
Jean-Michel Lemétayer : Non. En France, il n'y a rien. D'ailleurs si j'ai bien compris les analyses se sont avérées négatives quant à la crainte qu'on avait sur un réunionnais. Donc, cela montre bien qu'il faut pouvoir distinguer les choses pour éviter cette psychose qui s'est traduite immédiatement à partir du moment où on a commencé à parler de ce sujet on a vu tout de suite les évolutions sur la consommation et cela n'a aucune raison d'être.
Je pense que nos consommateurs doivent se sentir totalement sécurisés quant à la consommation de viande de volaille et de tous produits issus de la production de volaille. La question est de pouvoir bien expliquer les choses, bien faire la différence entre les risques et les précautions qu'a pris le gouvernement, et d'autres pays européens, pour éviter toute propagation de cette épizootie qui pourrait toucher aussi, évidemment, la production française. Et je pense que c'est là-dessus qu'il faut être extrêmement clair.
Jean-Michel Aphatie : Et la décision du gouvernement, du ministre de l'Agriculture, de confiner dans 26 départements les élevages, les volailles. Cela vous paraît être une bonne décision ou une mauvaise décision ?
Jean-Michel Lemétayer : C'est plutôt une bonne décision parce qu'il faut, effectivement, prendre le plus de précautions possibles, même si tout cela s'avère d'énormes contraintes pour les éleveurs. Des contraintes et aussi, sans doute, d'énormes conséquences financières : c'est bien là qu'il faudra aussi voir les choses très vite avec le gouvernement.
Jean-Michel Aphatie : Alors, justement. La consommation chute. Des exploitations sont-elles en danger, aujourd'hui, Jean-Michel Lemétayer ?
Jean-Michel Lemétayer : Inévitablement. A partir du moment où on n'arrive plus à écouler sa production ou une partie de l'écoulement de la production est en cause il y a un risque énorme. Il y a d'une part, la baisse de la consommation et puis, il y a un risque immédiat de baisse des prix, inévitablement.
J'ai demandé au ministre de l'Agriculture d'obtenir, parce que cela doit se discuter à l'échelle de l'Europe, tout de suite des décisions, de la part de l'Union Européenne, pour faire du stockage. Parce que, lorsqu'un poulet label, par exemple, arrive à maturité au bout de 75/80 jours on ne va pas le garder dans le poulailler.
Jean-Michel Aphatie : Le stocker ?
Jean-Michel Lemétayer : Donc, il faut bien le sortir de l'exploitation.
Jean-Michel Aphatie : e stocker. Le tuer, le congeler ?
Jean-Michel Lemétayer : Passer à l'abattage et puis, ensuite, s'il n'y a pas de marché, c'est un produit frais.
Jean-Michel Aphatie : Que va-t-on faire de ces stocks, après ? Si on commence à stocker !
Jean-Michel Lemétayer : Je n'en sais rien, pour l'instant. Mais, en tout cas, la première mesure si l'on ne veut pas faire s'écrouler complètement le marché, c'est de pouvoir stocker la viande de volaille. Il y a tellement de gens qui souffrent de manque d'alimentation, que l'on trouvera bien à écouler même peut-être à prix préférentiel cette production.
Jean-Michel Aphatie : Et, pour l'instant à moins que j'ai loupé les trains l'Europe n'a rien décidé ?
Jean-Michel Lemétayer : Non. Il y avait conseil des ministres, en début de semaine.
Jean-Michel Aphatie : Mardi.
Jean-Michel Lemétayer : Et je trouve que, toujours dans le cadre de crise, on ne prend pas les choses suffisamment tôt. On ne prend pas de décision suffisamment tôt. Plus on prend une décision rapidement, moins cela coûte cher pour tout le monde. D'abord, pour les producteurs, mais aussi pour la collectivité.
Après, on nous reprochera de réclamer encore des aides, etc. Si on ne veut pas que cela coûte trop cher, il faut prendre très vite des décisions qui feront qu'on minimisera, le plus possible, les conséquences, notamment financières.
Jean-Michel Aphatie : J'écoutais, hier, Dominique Bussereau, ministre de l'Agriculture. Il était l'invité de L.C.I, hier soir. Il n'a pas annoncé beaucoup de décisions ! Donc, il n'a pas l'air d'avoir compris le message que vous voulez faire passer, Jean-Michel Lemétayer !
Jean-Michel Lemétayer : Je lui ai déjà lancé le message, mais il faudra bien qu'il se rende compte que la situation, si elle doit durer plusieurs semaines, va, forcément, avoir des conséquences extrêmement négatives pour les éleveurs. Donc, il faut qu'il prenne rapidement des décisions. En tout cas, qu'il prenne des engagements de faire un bilan, dès qu'on sera sorti de cette crise, pour indemniser parce qu'il faut parler comme ça il faudra bien indemniser les pertes que vont subir les éleveurs.
Jean-Michel Aphatie : Un autre dossier préoccupe l'agriculture française. Ce sont les négociations, c'est un peu technique et complexe, qui ont lieu dans le cadre de l'O.M.C. On veut libéraliser les échanges des services de l'industrie. Et l'agriculture se trouve aussi dans ces négociations puisque le commissaire au commerce, Peter Mandelson, avec les négociateurs américains et sud-américains, remet en cause, ou semble vouloir remettre en cause, la P.A.C. Vous devez suivre ce dossier avec attention, Jean-Michel Lemétayer. Etes-vous inquiet pour l'agriculture française de ces négociations avec celles de l'O.M.C ?
Jean-Michel Lemétayer : Si nous n'étions pas inquiets, nous ne mettrions pas autant la pression sur le commissaire chargé des négociations, qui est le commissaire Mandelson.
Jean-Michel Aphatie : Britannique. Un ami de Tony Blair : ce n'est pas indifférent !
Jean-Michel Lemétayer : Un ami de Tony Blair, tout à fait, qui n'a rien compris au modèle agricole et alimentaire européen. Je crois qu'il a comme seule vue le modèle britannique, qui n'est absolument pas le nôtre. Ces négociations, c'est effectivement extrêmement complexe, mais l'enjeu, c'est d'abord notre indépendance alimentaire sur le plan de l'Europe, mais c'est tout simplement notre modèle agricole alimentaire. J'allais dire même le modèle social.
Et tout le monde doit se sentir concerné. C'est la raison pour laquelle, Jean-Michel Aphatie, je lance un appel pour que tout le monde se mobilise, de gauche à droite, sur le plan politique mais aussi l'ensemble des syndicats de salariés des entreprises, les petites et moyennes entreprises, les grandes entreprises. Tout le monde doit pouvoir mesurer les conséquences d'un mauvais accord qu'il y aurait sur l'agriculture, dans le cadre de ces négociations.
Regardons ce que cela représente en matière d'emplois. On ne cesse de parler d'emplois même si, Dieu merci, quelques chiffres semblent un peu meilleurs, ces derniers temps. Il n'empêche que l'agriculture, avec tout ce que cela veut dire en matière d'agro-équipement, d'agro-alimentaire, en France : c'est 15 % des emplois. C'est 15 millions d'agriculteurs en Europe. Je crois que les enjeux sont tels que tout le monde doit se sentir concerné et doit se sentir mobilisé.
Jean-Michel Aphatie : Le président Chirac a évoqué, hier, la possibilité d'un veto de la France sur ces négociations à l'O.M.C. Ça vous a rassuré ?
Jean-Michel Lemétayer : Le gouvernement, il faut le dire, se mobilise très fortement sur ces négociations et il n'est, pour une fois, pas isolé. Il est soutenu par un certain nombre de pays, et j'espère que l'on saura expliquer à Monsieur Mandelson qu'il faut arrêter de faire les yeux de Chimène aux américains.
Jean-Michel Aphatie : C'est dit ! C'était Jean-Michel Lemétayer, président de la F.N.S.E.A, sur RTL, ce matin. Bonne journée.
(Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 8 novembre 2005)