Interview de M. Alain Madelin, président de Démocratie Libérale, dans "Le Figaro" et à France 2 le 11 janvier 1999, sur l'UDF.

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Le Figaro : vous étiez favorable à l'élection de Pierre Gascon et non pas d'Anne Marie Comparini. Aujourd'hui, quelle position va adopter votre mouvement, Démocratie Libérale, alors que la droite a donné, une fois de plus, une désastreuse impression de division ?
Alain Madelin : De bout en bout, Démocratie Libérale a choisi la seule solution qui était conforme à ses engagements : pas de connivence, ni avec le FN ni avec la gauche et l'extrême gauche. Ce choix permettait de conserver la région en accord avec ce que souhaite l'immense majorité des électeurs de l'opposition. En effet, en cas d'égalité de nombre entre élus de gauche et élus de la droite républicaine, la loi permettait au doyen d'âge d'être élu. Cela assurait l'élection de Pierre Gascon. Il n'y avait pas d'autre solution.
Quel que soit le brouillard entretenu par certains commentaires favorables au front républicain, c'est une vérité incontournable. Il y avait à l'origine un consensus au sein de l'Alliance sur cette idée. Nous n'étions donc pas favorables à la candidature d'Anne Marie Comparini, annoncée unilatéralement par les centristes, car celle-ci ne pouvait être élue qu'en connivence avec la gauche et l'extrême gauche.
Son élection, acquise par une coalition de 15 voix de l'opposition et de 60 voix de gauche et d'extrême gauche, n'est pas viable. Les électeurs sont floués. Il faut leur redonner la parole.
LF : Le doyen d'âge, Pierre Gascon, dont vous souteniez la candidature, ne risquait-il pas cependant d'être élu avec les voix du Front national ?
AM : Non.D'ailleurs il n'y à qu'à regarder le comportement du FN, qui a tenté vainement d'imposer un accord écrit. Face à l'attitude de Pierre Gascon, qui avait annoncé clairement son refus de toute compromission, le FN a fini par se disperser ou s'abstenir.
LF : Pour vous, front républicain et Front national sont-ils à condamner dans un même élan et de la même façon ?
AM : Ne jouons pas sur les mots. Nous avons pris ensemble l'engagement de refuser toute connivence tant avec la gauche et l'extrême gauche qu'avec l'extrême droite. Les libéraux, en Rhônes Alpes, se sont tenus à cet engagement. De plus, ce que l'on appelle "front républicain", c'est une alliance face au risque d'élection dun Front national. Ce danger n'existait pas en Rhônes ALpes. Il ne s'agissait donc pas d'un front républicain, mais d'un arbitrage imposé par les socialistes en faveur d'un candidat socialistement correct.
LF : Ne craignez-vous pas que cette nouvelle cacophonie ne compromette définitivement la constitution d'une liste d'union aux européennes, comme le souhaite Jacques Chirac ?
AM : Ce la fait déjà plusieurs semaines que les centristes envisagent une liste séparée, au risque de sortir de l'Alliance. J'ose penser que les choses ne sont pas liées.
LF : Au fond, souhaitez-vous vraiment cette liste dunion ? Ne vous sentez-vous pas paradoxalement plus proche aujourd'hui du RPR que des centristes ?
AM : Nous avons fait le choix d'agir pour une union forte de l'opposition républicaine, répondant ainsi à l'attente de nos électeurs. Si démocratie Libérale exprime sur l'Europe des engagements et des convictions -notamment sur le choix d'une Europe fédérale- différents du RPR je reste convaincu que ce qui nous rapproche reste plus fort que ce qui nous sépare.
LF : Un rapprochement RPR- DL afin de constituer un grand parti conservateur à l'anglaise est-il envisageable avant ou après les européennes ?
AM : Notre objectif reste la constitution d'une grande force libérale moderne capable d'entraîner et de réussir l'alternance. Des recompositions seront sans doute nécessaires pour y parvenier, et je me réjouis de voir le progrès des idées libérales au sein du RPR.
LF : L'Alliance née en mai 1998, n'est-elle pas morte dans le nuit de vendredi à samedi ?
AM : Les centristes, en préférant une alliance contre nature avec le PS, le PC et les Verts plutôt que l'union de l'opposition autour du seul candidat capable dêtre élu en toute indépendance, ont porté un coup très dur à la crédibilité de l'Alliance. Elle n'avait pas besoin de cela, d'autant que Mme Comparini s'est présentée indûment comme candidate de l'Alliance.
Ce qui s'est passé en Rhônes Alpes ne sera donc pas sans conséquences. Si l'on ajoute à cela la tentation des centristes de faire une liste séparée aux élections européennes, reconnaissez que cela en fait beaucoup et pose de très sérieux problèmes pour l'organisation à venir de l'opposition. Il va falloir s'expliquer, il va falloir clarifier pour permettre à l'union de l'opposition de prendre un nouveau départ. Je compte évoquer ces questions dans les prochains jours avec Philippe Seguin.
Source http://www.demlib.com, le 7 février 2001)