Interview de Mme Nicole Notat, secrétaire générale de la CFDT à France 2 le 11 juillet 2000, sur les négociations sur l'Unédic et la convention d'assurance chômage.

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Média : France 2 - Télévision

Texte intégral

Vous êtes venue nous parler de l'Unedic, on en parle depuis des semaines et visiblement le feuilleton n'est pas terminé. Vous avez signé avec le Medef et la CFTC une convention sur l'Unedic et regardez ce que le journal Le Monde pense de cette convention et de votre situation : il vous met dans un bateau avec A. Seillière et visiblement, vous êtes dans une sacrée galère. Alors est-ce qu'effectivement le dessinateur du Monde a raison ? Est-ce que vous êtes embarqués dans une galère avec M. Seillière ?
- "Non, on ne peut pas demander à tout le monde d'avoir toujours autre chose que du mauvais goût. Mais en l'occurrence je crois que ce qui compte c'est l'avenir de l'accord parce que ce qui est en jeu c'est la situation des chômeurs quand même. C'est cela le plus important. Or les chômeurs aujourd'hui, pour un certain nombre, attendent déjà avec retard les mesures qui auraient dû s'appliquer au 1er juillet. Je pense par exemple à l'amélioration de l'indemnisation pour les chômeurs précaires, je pense aussi à l'Arpe qui a été reconduit pour la génération 42. Tout cela est bloqué. Il faut le temps, maintenant, pour que la procédure - comme on dit - d'agrément, suive son cours. Elle est engagée. Elle arrivera donc à son terme. Je crois qu'il faut prendre son temps, mais pas trop, car c'est la situation des chômeurs qui est en jeu."
La situation des chômeurs est en jeu certes, mais pour l'instant la convention précédente a été prorogée. Donc il n'y a pas de vide juridique.
- "Il n'y aura pas de vide juridique pour les chômeurs. Les chômeurs continueront à être payés. Simplement, les conditions qu'ils attendent maintenant c'est qu'en plus de leur indemnisation, des moyens supplémentaires leur seront donnés pour aller plus vite, plus loin vers l'emploi à ce moment où il y a des offres supplémentaires. Je crois que c'est cela l'enjeu de l'application de cette accord et on voit bien que c'est un plus pour tous les chômeurs."
On sent une grosse réticence de la part du Gouvernement sur cet accord. On sent une grosse réticence d'un certain nombre d'élus, notamment socialistes mais aussi communistes, mais aussi Verts. Est-ce que vous n'avez pas l'impression finalement, d'aller à l'affrontement contre beaucoup de gens ?
- "Non, j'ai observé qu'aussitôt après l'accord, il y avait eu une montée au créneau sur un certain nombre de contre-vérités, de procès d'intention sur ce que contenait cet accord. Au moins, sur tout cela, la baudruche est en train de se dégonfler, puisque tout le monde a vu qu'il n'était pas question de mettre en cause l'Anpe, de créer un service privé de l'emploi, qu'il n'était pas question d'obliger les chômeurs..."
Même la CFDT de l'Anpe n'est pas d'accord quand même ! Ce sont des amis à vous...
- "La CFDT de l'Anpe est inquiète sur l'avenir de l'Anpe, c'est normal. Mais je crois que justement, c'est maintenant le moment de discuter des moyens qui seront donnés aux Assedic bien sûr, mais aussi à l'Anpe puisqu'elle restera dans sa mission essentielle pour pouvoir mettre en oeuvre les nouvelles dispositions. De ce point de vue les signataires ont bien évidemment prévu que des comptes ont été provisionnés pour le financement du Pare. Puisque l'Anpe est au centre de ce dispositif, évidemment que l'Anpe recevra une partie de cet argent pour mener à bien sa mission. Je pense qu'elle sera assez rapidement rassurée quand on négociera la convention avec l'Unedic et l'Anpe."
Vous dites qu'on peut continuer à discuter, en même temps, quand quelqu'un comme J. Le Garrec propose que de nouvelles négociations s'ouvrent vous dites : "attendez, ce n'est pas la peine on a déjà signé ; il y a une convention qui existe, on n'a pas besoin de se remettre tous ensemble autour de la table." Est-ce que ce n'est pas une façon de claquer la porte ?
- "Non, je crois que J. Le Garrec peut être de très bon conseil. Mais en l'occurrence, la négociation se passe entre les patrons et les syndicats. Celle-ci a eu lieu. Elle a eu lieu dans des situations très difficiles. Elle n'a pas recueilli une adhésion très large de syndicats. Aujourd'hui, en droit, un accord existe, même si un seul syndicat est signataire. Donc l'accord est là. La convention qui est la traduction pratique et juridique de l'accord est maintenant sous les yeux de la ministre, qui a pu voir d'ailleurs - j'ai entendu à ses quelques déclarations récentes - que la philosophie même de cet accord l'agréait. Parce que finalement, c'est exactement la politique que conduit ce gouvernement, que l'Anpe conduit déjà pour lutter contre le chômage et l'exclusion. Donc je crois que progressivement nous allons trouver les voies et moyens qui iront sur un seul objectif : l'intérêt des chômeurs."

Mais en même temps vous n'avez pas l'impression d'être au centre d'une espèce de conflit qui oppose M. Aubry et le Medef, et puis d'être là un petit peu au milieu. Vous avez pris les options qui sont les vôtres et puis vous êtes un petit peu coincée ?
- "Oui, on a parfois l'impression qu'aux yeux du Gouvernement, dès lors que les tensions, la guérilla entre le Medef et le Gouvernement existe, qu'un syndicat qui jouerait tout simplement son rôle - parce que c'est la fonction naturelle d'un syndicat que de négocier avec le patronat - deviendrait presque suspect aux yeux de certains responsables politiques. C'est un comble. J'espère quand même qu'on en reviendra à des considérations beaucoup plus normales en la matière."

Et vous pensez que d'ici au 21 juillet il peut se passer des choses ? Ou alors que va-t-il se passer ce 21 juillet ?
- "Nous aurons, le 21 juillet au moins, déjà l'avis du Gouvernement lors d'une réunion qui existe au niveau de l'administration. Ce moment approche, le suspens va être rapidement levé."
Si chacun campe sur se positions, c'est la fin du paritarisme ?
- "Pour le moment je ne connais pas la position du Gouvernement, donc je ne sais pas sur quelle position il campera. Je sais qu'il y a une convention, qu'il y a une procédure qui doit être conduite en droit, à son terme. A ce moment-là, le Gouvernement s'exprimera et on avisera."
Donc le prochain épisode c'est le 21 juillet ?
- "Voilà."
Travaillez bien d'ici là.
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 8 janvier 2001)