Texte intégral
Claude BARTOLONE.- Chers camarades, vous avez tous en tête les résultats que le gouvernement a su obtenir en moins de trois ans sur le front de l'emploi, à un rythme de créations jamais atteint jusqu'alors.
Mais au-delà des chiffres bruts, j'aimerais apporter un éclairage particulier sur quelques données récentes qui témoignent de la profondeur de la reprise et des efforts du gouvernement pour qu'elle profite à tous :
- La décrue du chômage s'accélère en rythme pour les jeunes et pour les chômeurs de longue durée.
- Les 6 millions d'habitants des quartiers en difficulté commencent eux aussi à en profiter, ce qui est une donnée nouvelle et particulièrement satisfaisante pour moi qui avait alerté le gouvernement sur les oubliés de la ville. L'écart ne se réduit pas encore (le chômage y est encore deux fois plus important), mais au moins, il ne s'accroît plus, ce qui est une première victoire.
- Le nombre de Rmistes a décru pour la première fois au premier semestre 2001. C'est une donnée fondamentale, une réponse cinglante à ceux qui font de la fracture sociale leur fonds de commerce, le temps d'une campagne électorale.
Pourtant, ce bilan exceptionnel ne doit pas nous conduire à baisser la garde. Ne boudons pas notre plaisir, mais préparons nous à livrer une bataille encore plus difficile.
Car l'espoir que ce bilan suscite est à la mesure de l'impatience de ceux qui n'en profitent pas encore, que la crise a envoyé au tapis. La violence qui se manifeste dans certaines banlieues ou dans de récents conflits sociaux est dure. Le désespoir qui les motive nous interpelle fortement à l'heure où la télévision diffuse les images d'un bonheur publicitaire, les succès de la nouvelle économie et les communiqués victorieux sur le front de l'emploi.
Oui, le plus dur reste à faire et pour aller jusqu'au bout de ce défi du retour de la société du travail qu'a tracé Lionel JOSPIN, il nous faudra savoir repousser des limites.
Les limites de notre appareil productif sont aujourd'hui atteintes. Il ne s'agit pas seulement d'une surchauffe économique, d'une insuffisance conjoncturelle de capacités de production et d'investissement. Il s'agit d'une crise plus grave, qui nécessite un renouvellement profond du tissu économique et surtout du discours entreprenarial. Ce discours, largement accaparé par le MEDEF, a en héritage une culture patronale dont la référence reste les Trente Glorieuses et qui voudrait aujourd'hui appliquer au pays les mêmes recettes libéralo-étatiques : une main d'uvre sans droits et bon marché, l'absence de dialogue social, la défiscalisation massive des profits, l'extra-territorialité. Après la fronde contre les 35 heures, le PARE, il prépare le terrain à un recours massif de la main d'uvre immigrée, faisant l'impasse sur les femmes et les hommes qui sont encore au chômage. Il faut casser le monopole de ce discours, pour faire entendre la voix d'autres entrepreneurs ou de jeunes créateurs qui ont compris l'importance du dialogue social, des ressources humaines et de la richesse des territoires.
Il faudra également inventer de nouvelles modalités d'intervention pour l'Etat et les acteurs locaux, afin de repousser encore les limites de notre politique de l'emploi. Le problème n'est plus le traitement social du chômage de masse, ou le coût pour les entreprises du travail non qualifié. L'enjeu est désormais, à l'image du nouveau départ mis en uvre par Martine AUBRY, de permettre à chacun de bénéficier d'un accompagnement individualisé, à chaque moment de sa vie : pour s'insérer, pour se réinsérer, pour évoluer. C'est l'un des termes du grand chantier de la formation tout au long de la vie, qui doit permettre en particulier aux plus fragiles de bénéficier toujours d'une nouvelle chance. Il se traduira pour les plus jeunes, et en priorité ceux qui sont en souffrance, par cette belle idée du contrat d'autonomie dont je défends le principe depuis longtemps.
Mes camarades, les militants de notre parti doivent avoir conscience que nous vivons un moment historique. Pour la première fois depuis longtemps, un gouvernement de gauche est aux commandes pendant un cycle long de croissance, qu'il a su amorcer. Les limites de notre économie ne peuvent être repoussées par des recettes des années 1960. Les entreprises ont besoin de main d'uvre abondante et qualifiée, soit. Alors, il faut qu'elles acceptent d'entendre parler salaires, résorption de la précarité, dialogue social, lutte contre la discrimination raciale à l'embauche, développement de la formation. Beaucoup sont prêtes à entendre ce discours, je le sais. Face à la mondialisation, c'est notre meilleure chance pour remédier à la dualisation de notre société, qui, si nous n'y prenons garde, ajoutera à la désormais fameuse fracture sociale une véritable fracture territoriale.
Chers camarades, les plus fragiles n'attendent qu'un message, un seul. Ils attendent qu'on leur dise plus fort : oui, vous avez souffert et la collectivité vous doit réparation. Oui, la société du travail a besoin de vos talents et vous fera une place.
En tant que Ministre de la Ville, je peux vous dire que ce message touchera particulièrement les jeunes des quartiers en difficulté, et plus encore ceux, nombreux, dont les familles ont connu l'immigration, qui souffrent de discriminations intolérables en raison de la couleur de leur peau, de leur nom ou même, aujourd'hui, du nom de leur adresse.
Ces jeunes n'attendent pas tout, tout de suite. Ils attendent des signaux forts, politiques, une invitation à prendre part à notre dessein collectif. Chers camarades, ces jeunes aussi peuvent nous entendre en cette période de préparation des élections municipales. A nous de montrer qu'à côté du travail que nous ferons au lendemain des élections présidentielles, pour permettre de donner aux immigrés le droit de vote aux élections locales, et avant de réussir cette grande réforme, nous pouvons, quel que soit celui qui est actuellement à l'Elysée, quelle que soit la majorité au Sénat, leur donner une grande lisibilité en leur permettant d'être élus sur les listes que nous présenterons aux prochaines élections municipales. (applaudissements)
Chers camarades, il est des moments où en politique, les symboles sont forts. A ces jeunes français dont les parents ont connu l'immigration, montrons que nous pouvons parler d'eux en termes de lutte contre les discriminations au niveau du logement, au niveau de l'emploi, au niveau de la culture, montrons que nous pouvons nous occuper de leurs parents en ayant le courage de parler des lieux de culte, en ayant le courage de parler du vieillissement de la population immigrée, en ayant le courage de parler des quartiers musulmans dans nos cimetières. Croyez-moi, à travers les symboles, ils verront que les socialistes auront su aborder les élections municipales en leur permettant de retrouver confiance en la République.
(applaudissements)
(source http://www.parti-socialiste.fr, le 27 novembre 2000)
Mais au-delà des chiffres bruts, j'aimerais apporter un éclairage particulier sur quelques données récentes qui témoignent de la profondeur de la reprise et des efforts du gouvernement pour qu'elle profite à tous :
- La décrue du chômage s'accélère en rythme pour les jeunes et pour les chômeurs de longue durée.
- Les 6 millions d'habitants des quartiers en difficulté commencent eux aussi à en profiter, ce qui est une donnée nouvelle et particulièrement satisfaisante pour moi qui avait alerté le gouvernement sur les oubliés de la ville. L'écart ne se réduit pas encore (le chômage y est encore deux fois plus important), mais au moins, il ne s'accroît plus, ce qui est une première victoire.
- Le nombre de Rmistes a décru pour la première fois au premier semestre 2001. C'est une donnée fondamentale, une réponse cinglante à ceux qui font de la fracture sociale leur fonds de commerce, le temps d'une campagne électorale.
Pourtant, ce bilan exceptionnel ne doit pas nous conduire à baisser la garde. Ne boudons pas notre plaisir, mais préparons nous à livrer une bataille encore plus difficile.
Car l'espoir que ce bilan suscite est à la mesure de l'impatience de ceux qui n'en profitent pas encore, que la crise a envoyé au tapis. La violence qui se manifeste dans certaines banlieues ou dans de récents conflits sociaux est dure. Le désespoir qui les motive nous interpelle fortement à l'heure où la télévision diffuse les images d'un bonheur publicitaire, les succès de la nouvelle économie et les communiqués victorieux sur le front de l'emploi.
Oui, le plus dur reste à faire et pour aller jusqu'au bout de ce défi du retour de la société du travail qu'a tracé Lionel JOSPIN, il nous faudra savoir repousser des limites.
Les limites de notre appareil productif sont aujourd'hui atteintes. Il ne s'agit pas seulement d'une surchauffe économique, d'une insuffisance conjoncturelle de capacités de production et d'investissement. Il s'agit d'une crise plus grave, qui nécessite un renouvellement profond du tissu économique et surtout du discours entreprenarial. Ce discours, largement accaparé par le MEDEF, a en héritage une culture patronale dont la référence reste les Trente Glorieuses et qui voudrait aujourd'hui appliquer au pays les mêmes recettes libéralo-étatiques : une main d'uvre sans droits et bon marché, l'absence de dialogue social, la défiscalisation massive des profits, l'extra-territorialité. Après la fronde contre les 35 heures, le PARE, il prépare le terrain à un recours massif de la main d'uvre immigrée, faisant l'impasse sur les femmes et les hommes qui sont encore au chômage. Il faut casser le monopole de ce discours, pour faire entendre la voix d'autres entrepreneurs ou de jeunes créateurs qui ont compris l'importance du dialogue social, des ressources humaines et de la richesse des territoires.
Il faudra également inventer de nouvelles modalités d'intervention pour l'Etat et les acteurs locaux, afin de repousser encore les limites de notre politique de l'emploi. Le problème n'est plus le traitement social du chômage de masse, ou le coût pour les entreprises du travail non qualifié. L'enjeu est désormais, à l'image du nouveau départ mis en uvre par Martine AUBRY, de permettre à chacun de bénéficier d'un accompagnement individualisé, à chaque moment de sa vie : pour s'insérer, pour se réinsérer, pour évoluer. C'est l'un des termes du grand chantier de la formation tout au long de la vie, qui doit permettre en particulier aux plus fragiles de bénéficier toujours d'une nouvelle chance. Il se traduira pour les plus jeunes, et en priorité ceux qui sont en souffrance, par cette belle idée du contrat d'autonomie dont je défends le principe depuis longtemps.
Mes camarades, les militants de notre parti doivent avoir conscience que nous vivons un moment historique. Pour la première fois depuis longtemps, un gouvernement de gauche est aux commandes pendant un cycle long de croissance, qu'il a su amorcer. Les limites de notre économie ne peuvent être repoussées par des recettes des années 1960. Les entreprises ont besoin de main d'uvre abondante et qualifiée, soit. Alors, il faut qu'elles acceptent d'entendre parler salaires, résorption de la précarité, dialogue social, lutte contre la discrimination raciale à l'embauche, développement de la formation. Beaucoup sont prêtes à entendre ce discours, je le sais. Face à la mondialisation, c'est notre meilleure chance pour remédier à la dualisation de notre société, qui, si nous n'y prenons garde, ajoutera à la désormais fameuse fracture sociale une véritable fracture territoriale.
Chers camarades, les plus fragiles n'attendent qu'un message, un seul. Ils attendent qu'on leur dise plus fort : oui, vous avez souffert et la collectivité vous doit réparation. Oui, la société du travail a besoin de vos talents et vous fera une place.
En tant que Ministre de la Ville, je peux vous dire que ce message touchera particulièrement les jeunes des quartiers en difficulté, et plus encore ceux, nombreux, dont les familles ont connu l'immigration, qui souffrent de discriminations intolérables en raison de la couleur de leur peau, de leur nom ou même, aujourd'hui, du nom de leur adresse.
Ces jeunes n'attendent pas tout, tout de suite. Ils attendent des signaux forts, politiques, une invitation à prendre part à notre dessein collectif. Chers camarades, ces jeunes aussi peuvent nous entendre en cette période de préparation des élections municipales. A nous de montrer qu'à côté du travail que nous ferons au lendemain des élections présidentielles, pour permettre de donner aux immigrés le droit de vote aux élections locales, et avant de réussir cette grande réforme, nous pouvons, quel que soit celui qui est actuellement à l'Elysée, quelle que soit la majorité au Sénat, leur donner une grande lisibilité en leur permettant d'être élus sur les listes que nous présenterons aux prochaines élections municipales. (applaudissements)
Chers camarades, il est des moments où en politique, les symboles sont forts. A ces jeunes français dont les parents ont connu l'immigration, montrons que nous pouvons parler d'eux en termes de lutte contre les discriminations au niveau du logement, au niveau de l'emploi, au niveau de la culture, montrons que nous pouvons nous occuper de leurs parents en ayant le courage de parler des lieux de culte, en ayant le courage de parler du vieillissement de la population immigrée, en ayant le courage de parler des quartiers musulmans dans nos cimetières. Croyez-moi, à travers les symboles, ils verront que les socialistes auront su aborder les élections municipales en leur permettant de retrouver confiance en la République.
(applaudissements)
(source http://www.parti-socialiste.fr, le 27 novembre 2000)