Texte intégral
Christophe Delay
On va maintenant reparler des péripéties du Clemenceau. Nous sommes en ligne avec la ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie, bonjour.
Michèle Alliot-Marie
Bonjour.
Vous savez vous précisément combien il y a de tonnes d'amiante en ce moment dans
le Clemenceau ?
J'ai effectivement un certain nombre d'estimations à ce sujet. J'entends souvent avancer des chiffres concernant les quantités d'amiante restantes qui parfois paraissent un peu farfelus. J'ai souhaité disposer d'informations qui soient techniquement exactes. C'est la raison pour laquelle j'ai ordonné récemment une enquête qui a été confiée au Contrôle général des armées. Ses conclusions font apparaître de la part de la société TECHNOPURE, la première société prestataire chargée du désamiantage,
Qui a commencé le désamiantage à Toulon.
Oui, il s'agit effectivement de la société qui a commencé le désamiantage à Toulon et qui a été écartée du chantier pour des insuffisances et des manquements notamment à l'information. Les conclusions font apparaître des présomptions d'irrégularité qu'il appartiendra d'ailleurs éventuellement à la justice de confirmer.
C'est-à-dire qu'elle ne vous a pas donné de chiffre exact ?
La société a refusé de nous remettre un certain nombre de documents qui nous permettent de comparer ce qu'elle nous a dit avoir retiré de l'ex-Clemenceau et le poids pesé dans le centre d'enfouissement.
Et la différence, vous la connaissez aujourd'hui ?
La différence, nous ne la connaissons pas puisque nous n'avons pas encore tous les éléments. J'ai donc saisi le procureur de la République de Marseille afin qu'une enquête soit ordonnée sur deux points : d'une part, cet écart constaté entre le poids d'amiante que TECHNOPURE dit avoir retiré de l'ex-Clemenceau et le poids pesé par le centre d'enfouissement.
C'est toujours les trente tonnes d'écart ?
Tout à fait, ce sont les trente tonnes d'écart. Et d'autre part, la disparition d'un certain nombre d'équipements de bord composés de différents autres métaux non-ferreux.
Ils ont emporté des morceaux du Clemenceau ? C'est ce que vous nous dites ?
C'est ce qu'il semble et je demande donc au procureur de la République de Marseille de bien vouloir ordonner une enquête sur ces deux points et de lui donner les suites judiciaires nécessaires, parce que je commence à en avoir un petit peu assez d'entendre le patron de TECHNOPURE, qui a donc été écarté du chantier de désamiantage pour manquement, s'exprimer pour semer le doute ou pour faire pression sur différentes autorités.
Cela veut dire en tout cas que les Indiens disent justes lorsqu'ils disent :'on ne sait pas combien il y a de tonnes d'amiante dans le Clemenceau', du coup ?
Les Indiens ont demandé une nouvelle commission d'expertise ; sur ce point, nous leur fournissons tous les documents qu'ils nous demandent. Ils ont également demandé qu'un certain nombre de militaires soient dans la commission d'expertise, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent. La Cour suprême indienne a estimé avoir besoin de ce type d'experts parce qu'il y avait de grandes différences entre les navires civils et les navires militaires. Je fais entièrement confiance à la Cour suprême indienne et je ne veux d'ailleurs pas entrer dans les polémiques sur les quantités parce que je suis trop respectueuse de ce fait la Cour suprême indienne. Ce sont de très bons juristes, mais de toute façon, soyez certain, que lorsque la Cour aura rendu sa décision, je ne manquerais pas de rétablir toute la vérité.
Vous pensez que cette saga du Clemenceau va s'achever rapidement maintenant ?
Ecoutez, je le souhaite. Pour l'instant, nous sommes dans les délais qui avaient été prévus. Mais je souhaiterais maintenant que cela se termine. N'oublions pas que cela ouvre également des possibilités nouvelles pour le démantèlement des navires.
Oui parce que ce n'est pas le seul?
Il y a des milliers de navires de guerre pour lesquels il n'y a pas de solution de démantèlement et qui sont en train de rouiller dans un certain nombre d'endroits dans le monde, ce qui est extrêmement préjudiciable à l'environnement. Il n'y a pas de chantier de démantèlement en Europe. Il n'y en a pas aux Etats-Unis. Il y avait là une nouvelle voie qui était ouverte, faite par des entreprises indiennes de haute qualité, remplissant les normes ISO. C'était aussi une garantie, et c'est une possibilité qui ouvrait de vraies perspectives pour ces entreprises.
Vous avez peur que tout soit compromis, que cette voie se referme ?
Il est évident que si là, il y a un blocage, ce sont des perspectives de mise en place d'une filière industrielle de démantèlement sur ce type de navire qui se fermerait, bien sûr.
Merci Michèle Alliot-MarieSource http://www.defense.gouv.fr, le 16 février 2006