Déclaration de M. Dominique de Villepin, Premier ministre, en réponse à une question sur la politique de l'emploi, notamment en faveur des jeunes, et sur les chiffres du chômage, à l'Assemblée nationale le 28 février 2006.

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Circonstance : Intervention en réponse à une question posée par Ghislain Bray, député (UMP) de Seine-et-Marne, lors de la séance des questions au gouvernement, à l'Assemblée nationale le 28 février 2006

Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,

Je voudrais d'abord, de retour de la Réunion, vous dire toute la satisfaction qui est la mienne de voir l'ensemble de la communauté nationale rassemblée autour des Réunionnaises et des Réunionnais pour leur apporter le juste concours dans cette épreuve. Et il est important que chacun se mobilise sur le terrain, même si, je le dis ici, je le sais mais c'est important, le Parti communiste est extrêmement présent sur le terrain, comme les représentants centristes et de l'UMP. Nous avons regretté quelque peu l'absence des socialistes.
Sur le sujet que vous évoquez et que vous survolez, qui est un sujet complexe et important, je crois, monsieur Besson, qu'il faut revenir à la réalité. Or vous n'avez fait que la survoler à grands traits, je dirais même à la louche. Que s'est-il passé depuis un an ?
Il faut le rappeler, la donne énergétique a changé : le prix du pétrole a atteint un niveau sans précédent, la crise du gaz entre la Russie et l'Ukraine a montré que l'énergie est désormais un enjeu stratégique majeur ; partout émergent de nouveaux géants de l'énergie : c'est vrai en Espagne, c'est vrai en Russie, c'est vrai aux Etats-Unis. Les positions acquises hier sont fragilisées aujourd'hui. Et, dans ce contexte, nous devons relever sans attendre le défi de la sécurité des approvisionnements énergétiques de l'Europe et de la France. Et pour cela, le Gouvernement veut apporter trois réponses.

La première réponse c'est que nous avons besoin de grands groupes puissants, parce que c'est un élément déterminant pour la maîtrise des sources d'énergie.

La deuxième réponse, c'est parce qu'il faut être à la pointe de la recherche et de l'innovation technologique. C'est pourquoi le projet EPR a été engagé. C'est pourquoi nous avons lancé la 4ème génération des réactions nucléaires, comme l'a demandé le Président de la République. C'est pourquoi nous allons développer les énergies renouvelables.

La troisième réponse - vous savez, il est important de rappeler certaines choses qui sont totalement ignorées par celui qui a posé la question - c'est prendre des initiatives internationales pour faire face collectivement à ces enjeux. Nous avons déposé à la Commission européenne, au mois de janvier, un mémorandum sur l'énergie, qui vise à améliorer la concertation et la prospective sur les besoins énergétiques de l'Europe tout entière.
Vous le voyez, face à une situation qui a radicalement changé, nous avons fait des choix qui préparent l'avenir, et je me situe, au-delà de la polémique de votre question, nous avons besoin en effet de nous engager dans l'après-pétrole et c'est ce qui intéresse l'ensemble de nos compatriotes.

Dans ce contexte et je reviens à la question, Gaz de France et Suez nous ont proposé un projet industriel de rapprochement des deux entreprises. Avec Thierry Breton, nous avons donné notre accord à cette opération, et nous l'avons fait pour trois raisons.
La première raison, c'est parce qu'elle permet, et vous y êtes tous sensibles, de créer un champion international de l'énergie de plus de 60 milliards d'euros de chiffre d'affaires, et employant 200 000 personnes dans le monde. La deuxième raison, c'est que l'Etat consolide sa maîtrise de la filière énergétique, en devenant le premier actionnaire de ce nouvel ensemble. Et il exercera un cocontrôle de ce champion industriel, et restera garant des questions stratégiques liées aux missions de service public et à la sécurité des approvisionnements. La troisième raison, c'est qu'il s'agit d'une fusion entre égaux, porteuse pour chacun de développement, et donc créatrice d'emplois et d'investissements.
En termes de méthode, une négociation approfondie aura lieu avec tous les partenaires qui sont parties prenantes : le gouvernement belge, les partenaires sociaux et les salariés. Le Gouvernement entend apporter aux salariés des entreprises concernées toutes les garanties sociales légitimes. Le statut des personnels des industries électriques et gazières sera intégralement préservé, y compris naturellement pour les nouveaux salariés. L'activité de distribution commune entre EDF et GDF sera également intégralement préservée et je sais que cela préoccupe les partenaires sociaux. Les tarifs continueront d'être régulés par l'Etat, et toutes les obligations de service public seront maintenues, notamment l'interdiction de coupures de gaz pendant l'hiver pour les personnes en difficulté. Le Gouvernement sera particulièrement attentif à la représentation des personnels dans les instances paritaires et dans les organes dirigeants de l'entreprise. Il veillera également aux conditions de mise en oeuvre de l'actionnariat des salariés.
Vous le voyez, cette opération est une bonne illustration concrète de ce que j'entends par "patriotisme économique" : le rassemblement de nos forces au niveau français mais aussi au niveau européen. Il est important d'apporter des réponses dans une France qui change, dans un monde qui bouge, et ne pas se situer dans les combats du passé, comme vous le faites, monsieur Besson.

Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 2 mars 2006