Déclaration de M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, sur la campagne de sensibilisation contre la traite des femmes dans le cadre de la coupe du monde de football, Paris le 24 mai 2006.

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Circonstance : Présentation de la campagne de sensibilisation contre la traite des femmes à Paris le 24 mai 2006

Texte intégral

Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire Général,
Chère Malka,
Mesdames, Messieurs,
Merci d'avoir répondu présent à notre invitation commune pour la présentation de notre campagne de sensibilisation contre la traite des femmes.
Le principal outil de cette campagne résidera dans la diffusion d'un clip de sensibilisation. Ce clip sera projeté samedi prochain au stade de France à l'occasion du match de préparation France-Mexique.
Ce spot, nous allons vous le présenter dans quelques instants. Notre souhait est qu'il soit diffusé le plus de fois possibles par le plus grand nombre de diffuseurs possibles.
Il sera disponible pour toutes les chaînes de télévision sous deux formats : 30 et 15 secondes.
La lutte contre la traite de femmes mérite notre mobilisation à tous. Plusieurs chaînes m'ont annoncé leur volonté de diffuser ce clip. Je souhaite que cela ne se limite pas à un « one shot » par chaîne.
Pourquoi ce clip ?
Trois raisons essentielles, mesdames, messieurs, m'ont encouragé à ne pas rester inerte.
1) J'ai reçu en mars dernier Mme Malka Marcovich, Directrice pour l'Europe de la Coalition Contre la Traite des Femmes (CATWE). J'ai été sensible à son discours. Comme j'avais été interpellé par un édito intitulé du « foot et des passes » signé dans « Elle » par votre consoeur Marie-Ange Colombani.
A l'époque, chère Malka, je vous avais demandé, en quoi pouvais-je être utile ? Vous m'aviez alors répondu : « en en parlant, en en faisant parler et en sensibilisant le monde du sport en général, le monde du football en particulier ». Je suis heureux de vous retrouver à nos côtés pour la présentation de ce clip auquel vous avez eu la gentillesse de bien vouloir vous associer.
2) La deuxième raison, c'est que je me fais du sport une haute idée, celle qui défend le respect de la personne humaine. La prostitution et la traite constituent une négation de ce respect. A mes yeux, la traite des femmes, cet esclavage des temps modernes est contraire à l'éthique du sport et aux valeurs de l'olympisme. Je ne peux admettre que le silence entoure l'existence d'une telle ignominie à l'occasion d'une compétition planétaire.
3) Enfin comme Ministre de la République, il est de mon devoir de rappeler que la France a toujours été à la pointe de ce combat. La France a ratifié plusieurs traités internationaux allant dans ce sens :
La Convention du 2 décembre 1949 pour la répression de la traite des êtres humains et l'exploitation de la prostitution.
La Convention Pour l'Elimination de toutes les formes de discriminations à l'encontre des femmes (CEDAW) qui reprend dans son article 6 le titre de la Convention de 1949 en l'appliquant spécifiquement aux femmes. 30 pays sur 32 engagés dans la coupe du monde ont ratifié la Convention CEDAW.
Le protocole additionnel à la Convention Contre la Criminalité Transnationale Organisée, visant à prévenir, à réprimer et à punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, protocole dit de Palerme (2000).
A ces raisons impérieuses, j'ajouterais que la coupe du monde est une fête, pour tous les continents, il est donc inadmissible qu'elle soit salie. En aucune façon, je ne peux accepter que ces grands rassemblements festifs, que le sport nous offre, soient détournés. Il n'y a aucune fatalité.
La prostitution en Allemagne est légale, je ne peux qu'en prendre acte.
L'Allemagne fait une distinction entre prostitution « libre » et « forcée ». Chacun a son idée. Celle du Malka Markovich me semble honorable. Le législateur allemand a la sienne. A chacun, en son âme et conscience, de se faire son propre jugement.
Mais, ce que je condamne avec véhémence comme l'ensemble des autorités allemandes et comme tous les Européens défenseurs de la dignité humaine : c'est l'intolérable, c'est l'inacceptable, c'est l'organisation de la traite de jeunes femmes.
J'ai eu l'occasion d'évoquer cette grave question avec Madame Ursula VON DER LEYEN, Ministre allemande de la famille et de la jeunesse, lors du sommet franco-allemand tenu à Berlin le 14 mars 2006.
Oui, mesdames, messieurs, notre campagne est avant tout une condamnation pleine et entière de la traite des femmes. Nous nous devons de condamner l'ignominie de certains réseaux mafieux.
C'est dans cet esprit que la FFF et LFP se sont engagées aux côtés du ministère pour la réalisation de ce clip.
C'est également fidèle à une certaine idée du sport et de ses valeurs que des personnalités ont accepté de participer bénévolement à ce clip et je les en remercie très chaleureusement : des championnes olympiques comme Laura Flessel et Marie-Jo Pérrec et des personnalités du football comme le sélectionneur national Raymond Domenech et le Président du comité d'éthique de la FFF, l'ancien international Dominique Rocheteau.
Avec eux, il était de notre devoir d'alerter les médias, d'interpeller les sportifs et de responsabiliser les supporters.
A tous nous disons « ne soyons pas complices »...
Ne soyons pas complices des esclavagistes.
Ne soyons pas complices de ceux qui veulent étiqueter des codes barre sur des jeunes filles parce qu'elles sont pauvres, perdues et abandonnées.
Ne soyons pas complices de ceux qui maltraitent des femmes.
Ne soyons pas complices, il en va de notre propre dignité, il en va de notre conception des valeurs du sport et de notre vision de la condition humaine.Source http://www.sports.gouv.fr, le 31 mai 2006