Texte intégral
Monsieur le Délégué à l'Éducation prioritaire,
Mesdames et Messieurs les Inspecteurs généraux et Inspecteurs,
Mesdames et Messieurs les Principaux,
Mesdames et Messieurs,
Depuis mon entrée en fonction, il y a un an, j'ai souhaité relancer l'Éducation prioritaire.
Le 8 février dernier, je présentais le plan de relance, élaboré au terme de six mois de réflexion et de concertation.
Et j'annonçais à cette occasion la réunion pour le printemps des responsables des réseaux « Ambition réussite ».
C'était il y a moins de quatre mois.
Eh bien, en vous voyant tous réunis aujourd'hui, pour cette journée nationale, je me dis que nous avançons à un bon rythme !
Nous le devons à l'efficacité des recteurs et inspecteurs d'académie, et à celle de M. l'inspecteur général Pierre Polivka, le délégué à l'Éducation prioritaire, que je salue.
Nous le devons aussi d'abord à chacun et chacune d'entre vous.
Et je voudrais profiter de l'occasion qui m'est ici donnée pour rendre hommage à tous les personnels de l'Éducation nationale travaillant dans les collèges et écoles de l'enseignement prioritaire.
Lors de mes visites dans les établissements, j'ai rencontré des enseignants, des équipes, des principaux, des coordonnateurs de ZEP, absolument remarquables de dévouement, de ténacité, de foi dans leur mission éducative et sociale.
À tous ceux-là, je voudrais dire ma sincère admiration.
Dans cette tâche, les principaux ont naturellement un rôle essentiel à jouer.
Tous les enseignants que j'ai pu rencontrer me l'ont confirmé : la présence d'un chef d'établissement volontaire, expérimenté et ouvert est déterminante pour le succès des établissements relevant de l'Éducation prioritaire.
En effet, c'est dans les circonstances les plus délicates que vos fonctions sont essentielles pour maintenir la cohésion de l'équipe éducative, lui insuffler une dynamique, la soutenir en cas de difficultés.
Je suis bien conscient de l'importance de ce rôle, et c'est pourquoi j'ai voulu vous donner de nouveaux moyens, plus efficaces, pour l'exercer.
Vous connaissez déjà quelques-unes des mesures-phare pour les écoles et collèges « Ambition réussite » :
la mise en place d'études accompagnées, quatre soirs par semaine, du CE2 jusqu'à la fin
du collège ;
- l'affectation de 1000 enseignants expérimentés supplémentaires ;
- le recrutement de 3000 assistants pédagogiques ;
- la présence d'une infirmière dans tout réseau « Ambition réussite ».
Ces nouveaux moyens sont très conséquents. Car l'Education prioritaire est un des axes majeurs de mon action !
Et vous le constatez, contrairement à ce qu'on a pu dire ou écrire, l'axiome de base de l'Education prioritaire n'a pas changé : il s'agit toujours de donner plus à ceux qui ont moins !
Mais j'ai aussi voulu que des critères précis et indiscutables permettent de distinguer les établissements dont les élèves connaissent les plus grandes difficultés scolaires et sociales.
Aujourd'hui, les 249 collèges sont ici présents à travers vous.
C'est la première fois !
Et j'ai voulu que vous puissiez dialoguer avec les intervenants sur les modalités concrètes de la mise en place de ces réseaux.
Pour ma part, j'aimerais attirer votre attention sur trois sujets pour lesquels votre action est déterminante :
- l'esprit d'initiative ;
- la solidarité ;
- la personnalisation des parcours.
1. L'esprit d'initiative
Je parlerai d'abord de l'esprit d'initiative.
J'ai voulu que les nouveaux moyens apportés aux collèges « Ambition réussite » soient alloués en fonction de projets, proposés à l'initiative des réseaux.
Je l'ai voulu pour une raison bien simple : pour progresser, je préfère faire confiance aux femmes et aux hommes (c'est-à-dire à vous !) plutôt qu'aux statistiques !
Je suis en effet convaincu qu'il ne sert à rien d'avancer tel ou tel budget, tel ou tel chiffre, si derrière tout cela il n'y a pas un objectif clair, et surtout, des personnes prêtes à s'investir !
Cette démarche par projet possède quatre avantages :
1er avantage : cibler les moyens
L'existence d'un projet va d'abord vous permettre de cibler les moyens.
Je prends un exemple qui vous concerne directement : les enseignants supplémentaires mis à la disposition des réseaux « Ambition réussite » sont recrutés d'après leur profil spécifique, et selon les nécessités du projet pédagogique que vous avez défini.
Et c'est vous qui aurez la charge de veiller à l'utilisation optimale des compétences de ces enseignants.
2e avantage : créer une dynamique commune entre collèges et écoles
Ensuite, le projet va vous permettre de créer une dynamique commune entre les collèges et les écoles des réseaux.
En effet, ces réseaux ne sont pas des regroupements administratifs obligatoires. Les réseaux lient des établissements et des personnes qui partagent un même projet. Le ciment de ce réseau, c'est le projet !
Je compte donc sur vous pour entretenir la dynamique qui a présidé à l'élaboration des projets.
Car les avoir conçus est une chose. Mais il est tout aussi important de faire vivre ces projets au quotidien , pour qu'ils ne demeurent pas un cadre vide, ou une liste de voeux pieux !
Et, là encore, votre rôle est déterminant.
3e avantage : permettre la liberté d'initiative
Enfin, la démarche par projet vous donne une grande autonomie.
Je veux en effet qu'une grande liberté soit donnée aux initiatives des réseaux « Ambition réussite ».
Cette liberté, elle se situe d'abord en amont, dans la définition des projets.
C'est pourquoi j'ai souhaité qu'une grande latitude vous soit donnée pour la définition des projets pédagogiques.
La démarche par projet, c'est d'abord un appel à l'initiative, à l'invention, à la création !
La liberté, elle est aussi en aval. En effet, comme je l'ai dit en février, vous avez une grande latitude dans la gestion des moyens supplémentaires qui vous seront attribués.
Je préfère en effet jouer la carte de la confiance envers vous plutôt que celle du contrôle tatillon !
Aujourd'hui, l'un des messages que je voudrais vous livrer est le suivant : vous avez fait preuve d'invention pour la définition des projets. Eh bien, faites-en preuve aussi dans leur mise en oeuvre ! Je veux que les réseaux « Ambition réussite » soient des écoles et des collèges de l'innovation, de l'originalité !
N'ayez donc pas peur de proposer et d'innover ! Et soyez sûrs que je veillerai personnellement à ce que les initiatives soient encouragées et non découragées !
4e avantage : organiser les partenariats
C'est tout spécialement vrai pour la recherche de partenariat.
Dans un collège du 18e arrondissement de Paris, j'ai récemment assisté à la cérémonie de parrainage d'un projet théâtral labellisé « Ambition réussite » par la fille de Gérard Philipe, Anne Philipe. Et je peux vous assurer que les enseignants et surtout les élèves en étaient très fiers. Cette fierté retrouvée est déjà une victoire.
Je pense aussi au futur parrainage d'un collège par le Stade de France ; ce sera pour les élèves, vous l'imaginez facilement, une fierté immense !
Je pense enfin à l'opération dont vous a parlé tout à l'heure Alexandre Jardin, et qui associe l'Éducation prioritaire, l'association « Lire et faire lire » et La Poste - j'en ai parlé ce matin même avec son président, M. Bailly.
Mais bien d'autres partenariats sont à inventer.
Et je vous invite à faire connaître vos demandes en termes de partenariat au délégué à l'Education prioritaire ou aux recteurs.
Là encore, j'aimerais vous dire : faites preuve d'originalité ! Dites-nous vos souhaits, et nous tâcherons de les exaucer !
J'ajoute que cette grande liberté qui vous est accordée doit s'accompagner d'une évaluation des résultats !
Et c'est pourquoi chaque réseau « Ambition réussite » sera personnellement suivi par un inspecteur général de l'Education nationale, chargé de l'évaluer.
2. La solidarité
La solidarité est le deuxième sujet pour lequel votre action est déterminante.
a. Solidarité de tout l'État avec l'Éducation prioritaire
La solidarité, c'est d'abord celle de l'ensemble de l'État avec l'Éducation prioritaire.
N'oublions pas que les écoles et collèges de l'Éducation prioritaire sont souvent environnés de quartiers où sévissent le chômage, l'exclusion, et parfois les violences.
C'est donc tout un contexte que nous devons traiter par des mesures appropriées et coordonnées.
Et c'est pourquoi nous devons faire un effort de coordination entre les initiatives du ministère de l'Education nationale et celles des autres ministères.
Vous avez entendu ma collègue Mme Catherine Vautrin ce matin à propos des équipes de réussite éducative.
Je souhaite que dans les mois qui viennent, les équipes locales de pilotage des réseaux « Ambition réussite » s'associent aux projets de réussite éducative.
Car nous devons jouer sur tous les tableaux ! Aussi, c'est à vous de travailler à mettre en oeuvre toutes les synergies possibles !
b. Solidarité de toute l'Éducation nationale avec l'Éducation prioritaire
La solidarité, c'est celle aussi de toute l'Éducation nationale avec les collèges et écoles de l'Éducation prioritaire, et en particulier ceux des réseaux « Ambition réussite ».
Car, je vous le dis avec force : vous ne serez pas seuls ! À tous les niveaux de responsabilité, vous trouverez des interlocuteurs ouverts et disponibles.
D'abord, la nouvelle organisation du ministère crée un poste de délégué à l'Éducation prioritaire. M. Pierre Polivka sera en quelque sorte votre ambassadeur, qui pourra faire entendre votre voix au plus haut niveau, puisqu'il est directement placé auprès du directeur général de l'enseignement scolaire.
J'ai voulu qu'il y ait désormais un pilote de l'Éducation prioritaire. N'hésitez donc pas à le solliciter !
Dans les académies, les recteurs doivent veiller à cette solidarité nécessaire, notamment dans l'attribution des fonds sociaux. Je le leur rappellerai mardi, lors de leur réunion mensuelle.
Par ailleurs, les inspecteurs pédagogiques régionaux et les inspecteurs de l'Éducation nationale vous aideront à veiller au suivi des élèves, notamment grâce à la mise en place du livret de compétences .
Et enfin, le point n'est pas négligeable, les services académiques seront chargés de valoriser auprès des enseignants les affectations en zone d'éducation prioritaire, notamment en facilitant leur promotion.
Le fait de pouvoir compter sur des enseignants volontaires et sur une équipe plus stable contribuera au dynamisme et à l'efficacité de votre action.
d. Solidarité des réseaux « Ambition réussite » avec les parents
La solidarité, enfin, elle s'adresse aussi aux parents.
Vous le savez bien, les parents d'élèves en difficulté sont eux-mêmes dans des situations difficiles.
Pour de multiples raisons, problème de langue, ou défiance à l'égard d'un monde éducatif qu'ils connaissent mal, ils sont peu présents à l'école.
C'est pourquoi je vous demande de veiller avec une attention particulière à faire en sorte que les parents puissent s'investir davantage dans l'école.
Et la première condition pour cela, c'est qu'ils puissent y trouver un lieu qui leur soit consacré !
C'est pourquoi l'aménagement d'une salle d'accueil pour les parents est souhaitable dans tous les établissements qui le peuvent.
Rencontrer les parents, faciliter les permanences d'associations de parents est déjà un point fondamental.
Mais cela l'est tout autant de s'assurer que les parents comprennent les règles de l'école, ses exigences. L'obligation d'assiduité, la nécessité du travail personnel et régulier doivent leur être clairement exposées.
Ils doivent aussi connaître les aides qui sont offertes à leurs enfants : les études après la classe, les dispositifs Ecole ouverte, l'apprentissage junior, etc...
Je vous demande donc de veiller tout particulièrement à ce que les efforts que vous faites pour les élèves soient compris des parents.
3. La personnalisation des parcours
J'en viens au troisième sujet de notre action : la personnalisation des parcours.
Dans le cadre des réseaux « Ambition réussite », votre tâche est à la fois globale et locale : en effet, vous êtes tout à la fois les chevilles ouvrières d'un projet d'ensemble, mais aussi vous devez veiller dans votre établissement au suivi individuel des élèves.
Le plan de relance de l'Éducation prioritaire vous donne les moyens de jouer sur les deux échelles.
Il met en oeuvre des projets communs, mais aussi des moyens supplémentaires pour un meilleur suivi individualisé des difficultés et des parcours.
Aussi, vous ne devez pas hésiter à vous servir de ces nouvelles dispositions.
Je pense d'abord aux programmes personnalisés de réussite éducative , pour lesquels vous pourrez mobiliser les enseignants supplémentaires mis à votre disposition.
Je pense aussi à l'initiative « 100 000 étudiants pour 100 000 élèves », qui permet à un étudiant de parrainer un élève d'un établissement de l'Éducation prioritaire. Ne négligez pas cette possibilité qui vous est offerte !
Dans toutes les académies les recteurs ont mobilisé les établissements d'enseignement supérieur, universités et grandes écoles pour que leurs étudiants s'investissent à vos cotés pour accompagner vos élèves vers l'enseignement supérieur et plus généralement les ouvrir au monde extérieur. Appuyez-vous sur ce renfort et cette énergie de notre jeunesse.
J'attire aussi votre attention sur l'apprentissage junior et les possibilités qu'il ouvre aux collégiens. C'est l'opportunité pour un jeune de 14 ans d'envisager une formation par la voie de l'apprentissage.
Les classes d'apprentis juniors ouvriront en lycées professionnels et en centres de formation d'apprentis, les premières à la rentrée 2006, et seront plus largement déployées en 2007.
Ce parcours pourra répondre aux attentes de certains de vos élèves, qui recherchent une formation plus concrète, en contact direct avec le monde professionnel.
Vous serez bien évidemment étroitement associés au développement de ces parcours, car il est prévu que le collège d'origine continue à suivre ses élèves en apprentissage junior jusqu'à l'âge de 16 ans : un professeur référent du collège effectuera ce suivi pour s'assurer des progrès du jeune, et notamment de sa bonne acquisition du socle commun de connaissances.
De même, vous savez que vous pouvez, si vous le jugez utile, avancer à la classe de 4 ème l'option de découverte professionnelle.
Enfin, il convient de trouver une réponse adaptée aux situations où le comportement des élèves ne permet plus à l'ensemble de la classe de travailler dans des conditions normales.
Il serait bien évidemment désastreux pour les établissements « Ambition réussite » que des projets ambitieux soient mis en péril par une poignée d'élèves.
Pour ceux-là, il convient de les orienter vers les classes-relais où ils trouveront temporairement un cadre approprié.
Là encore, j'ai voulu que vous disposiez des moyens adaptés, et c'est pourquoi les 200 dispositifs relais supplémentaires crées en 2006 seront en priorité mis à votre service.
Mesdames et Messieurs,
Je crois qu'à l'aide des dispositions qui ont été prises, vous avez en main des moyens nombreux : à vous et vos équipes de les rendre efficaces.
Honnêtement, je ne vois pas comment on pourrait croire que mon action participerait d'une « logique de renoncement », alors que le principe même de notre action, la mienne comme la vôtre, c'est l'ambition pour les élèves !
Mais j'en reviens à vous.
Demain, vous allez retrouver le terrain.
Demain, vous serez à votre poste et vous devrez agir. Et ce sera à vous de mettre en oeuvre concrètement les réseaux « Ambition réussite ».
Je vous ai dit un mot des mesures les plus concrètes dont vous pourrez vous saisir. Mais il y a une chose fondamentale, qui ne peut ni se réglementer, ni se quantifier, c'est la volonté et l'ambition.
Et je crois précisément que votre mission est d'être les porteurs d'une volonté de réussite nouvelle dans des quartiers et auprès d'élèves qui en ont perdu jusqu'à l'idée.
Si nous parvenons à faire en sorte que l'école ne soit plus seulement pour les élèves un lieu de contrainte, mais aussi un lieu d'ambition, nous aurons remporté une belle victoire.
Car nous aurons restauré ce désir de réussite qui est le vrai moteur de l'ascenseur social !
C'est mon ambition. Je sais que c'est aussi la vôtre.
Et je vous remercie très chaleureusement.
Source http://www.education.gouv.fr, le 31 mai 2006
Mesdames et Messieurs les Inspecteurs généraux et Inspecteurs,
Mesdames et Messieurs les Principaux,
Mesdames et Messieurs,
Depuis mon entrée en fonction, il y a un an, j'ai souhaité relancer l'Éducation prioritaire.
Le 8 février dernier, je présentais le plan de relance, élaboré au terme de six mois de réflexion et de concertation.
Et j'annonçais à cette occasion la réunion pour le printemps des responsables des réseaux « Ambition réussite ».
C'était il y a moins de quatre mois.
Eh bien, en vous voyant tous réunis aujourd'hui, pour cette journée nationale, je me dis que nous avançons à un bon rythme !
Nous le devons à l'efficacité des recteurs et inspecteurs d'académie, et à celle de M. l'inspecteur général Pierre Polivka, le délégué à l'Éducation prioritaire, que je salue.
Nous le devons aussi d'abord à chacun et chacune d'entre vous.
Et je voudrais profiter de l'occasion qui m'est ici donnée pour rendre hommage à tous les personnels de l'Éducation nationale travaillant dans les collèges et écoles de l'enseignement prioritaire.
Lors de mes visites dans les établissements, j'ai rencontré des enseignants, des équipes, des principaux, des coordonnateurs de ZEP, absolument remarquables de dévouement, de ténacité, de foi dans leur mission éducative et sociale.
À tous ceux-là, je voudrais dire ma sincère admiration.
Dans cette tâche, les principaux ont naturellement un rôle essentiel à jouer.
Tous les enseignants que j'ai pu rencontrer me l'ont confirmé : la présence d'un chef d'établissement volontaire, expérimenté et ouvert est déterminante pour le succès des établissements relevant de l'Éducation prioritaire.
En effet, c'est dans les circonstances les plus délicates que vos fonctions sont essentielles pour maintenir la cohésion de l'équipe éducative, lui insuffler une dynamique, la soutenir en cas de difficultés.
Je suis bien conscient de l'importance de ce rôle, et c'est pourquoi j'ai voulu vous donner de nouveaux moyens, plus efficaces, pour l'exercer.
Vous connaissez déjà quelques-unes des mesures-phare pour les écoles et collèges « Ambition réussite » :
la mise en place d'études accompagnées, quatre soirs par semaine, du CE2 jusqu'à la fin
du collège ;
- l'affectation de 1000 enseignants expérimentés supplémentaires ;
- le recrutement de 3000 assistants pédagogiques ;
- la présence d'une infirmière dans tout réseau « Ambition réussite ».
Ces nouveaux moyens sont très conséquents. Car l'Education prioritaire est un des axes majeurs de mon action !
Et vous le constatez, contrairement à ce qu'on a pu dire ou écrire, l'axiome de base de l'Education prioritaire n'a pas changé : il s'agit toujours de donner plus à ceux qui ont moins !
Mais j'ai aussi voulu que des critères précis et indiscutables permettent de distinguer les établissements dont les élèves connaissent les plus grandes difficultés scolaires et sociales.
Aujourd'hui, les 249 collèges sont ici présents à travers vous.
C'est la première fois !
Et j'ai voulu que vous puissiez dialoguer avec les intervenants sur les modalités concrètes de la mise en place de ces réseaux.
Pour ma part, j'aimerais attirer votre attention sur trois sujets pour lesquels votre action est déterminante :
- l'esprit d'initiative ;
- la solidarité ;
- la personnalisation des parcours.
1. L'esprit d'initiative
Je parlerai d'abord de l'esprit d'initiative.
J'ai voulu que les nouveaux moyens apportés aux collèges « Ambition réussite » soient alloués en fonction de projets, proposés à l'initiative des réseaux.
Je l'ai voulu pour une raison bien simple : pour progresser, je préfère faire confiance aux femmes et aux hommes (c'est-à-dire à vous !) plutôt qu'aux statistiques !
Je suis en effet convaincu qu'il ne sert à rien d'avancer tel ou tel budget, tel ou tel chiffre, si derrière tout cela il n'y a pas un objectif clair, et surtout, des personnes prêtes à s'investir !
Cette démarche par projet possède quatre avantages :
1er avantage : cibler les moyens
L'existence d'un projet va d'abord vous permettre de cibler les moyens.
Je prends un exemple qui vous concerne directement : les enseignants supplémentaires mis à la disposition des réseaux « Ambition réussite » sont recrutés d'après leur profil spécifique, et selon les nécessités du projet pédagogique que vous avez défini.
Et c'est vous qui aurez la charge de veiller à l'utilisation optimale des compétences de ces enseignants.
2e avantage : créer une dynamique commune entre collèges et écoles
Ensuite, le projet va vous permettre de créer une dynamique commune entre les collèges et les écoles des réseaux.
En effet, ces réseaux ne sont pas des regroupements administratifs obligatoires. Les réseaux lient des établissements et des personnes qui partagent un même projet. Le ciment de ce réseau, c'est le projet !
Je compte donc sur vous pour entretenir la dynamique qui a présidé à l'élaboration des projets.
Car les avoir conçus est une chose. Mais il est tout aussi important de faire vivre ces projets au quotidien , pour qu'ils ne demeurent pas un cadre vide, ou une liste de voeux pieux !
Et, là encore, votre rôle est déterminant.
3e avantage : permettre la liberté d'initiative
Enfin, la démarche par projet vous donne une grande autonomie.
Je veux en effet qu'une grande liberté soit donnée aux initiatives des réseaux « Ambition réussite ».
Cette liberté, elle se situe d'abord en amont, dans la définition des projets.
C'est pourquoi j'ai souhaité qu'une grande latitude vous soit donnée pour la définition des projets pédagogiques.
La démarche par projet, c'est d'abord un appel à l'initiative, à l'invention, à la création !
La liberté, elle est aussi en aval. En effet, comme je l'ai dit en février, vous avez une grande latitude dans la gestion des moyens supplémentaires qui vous seront attribués.
Je préfère en effet jouer la carte de la confiance envers vous plutôt que celle du contrôle tatillon !
Aujourd'hui, l'un des messages que je voudrais vous livrer est le suivant : vous avez fait preuve d'invention pour la définition des projets. Eh bien, faites-en preuve aussi dans leur mise en oeuvre ! Je veux que les réseaux « Ambition réussite » soient des écoles et des collèges de l'innovation, de l'originalité !
N'ayez donc pas peur de proposer et d'innover ! Et soyez sûrs que je veillerai personnellement à ce que les initiatives soient encouragées et non découragées !
4e avantage : organiser les partenariats
C'est tout spécialement vrai pour la recherche de partenariat.
Dans un collège du 18e arrondissement de Paris, j'ai récemment assisté à la cérémonie de parrainage d'un projet théâtral labellisé « Ambition réussite » par la fille de Gérard Philipe, Anne Philipe. Et je peux vous assurer que les enseignants et surtout les élèves en étaient très fiers. Cette fierté retrouvée est déjà une victoire.
Je pense aussi au futur parrainage d'un collège par le Stade de France ; ce sera pour les élèves, vous l'imaginez facilement, une fierté immense !
Je pense enfin à l'opération dont vous a parlé tout à l'heure Alexandre Jardin, et qui associe l'Éducation prioritaire, l'association « Lire et faire lire » et La Poste - j'en ai parlé ce matin même avec son président, M. Bailly.
Mais bien d'autres partenariats sont à inventer.
Et je vous invite à faire connaître vos demandes en termes de partenariat au délégué à l'Education prioritaire ou aux recteurs.
Là encore, j'aimerais vous dire : faites preuve d'originalité ! Dites-nous vos souhaits, et nous tâcherons de les exaucer !
J'ajoute que cette grande liberté qui vous est accordée doit s'accompagner d'une évaluation des résultats !
Et c'est pourquoi chaque réseau « Ambition réussite » sera personnellement suivi par un inspecteur général de l'Education nationale, chargé de l'évaluer.
2. La solidarité
La solidarité est le deuxième sujet pour lequel votre action est déterminante.
a. Solidarité de tout l'État avec l'Éducation prioritaire
La solidarité, c'est d'abord celle de l'ensemble de l'État avec l'Éducation prioritaire.
N'oublions pas que les écoles et collèges de l'Éducation prioritaire sont souvent environnés de quartiers où sévissent le chômage, l'exclusion, et parfois les violences.
C'est donc tout un contexte que nous devons traiter par des mesures appropriées et coordonnées.
Et c'est pourquoi nous devons faire un effort de coordination entre les initiatives du ministère de l'Education nationale et celles des autres ministères.
Vous avez entendu ma collègue Mme Catherine Vautrin ce matin à propos des équipes de réussite éducative.
Je souhaite que dans les mois qui viennent, les équipes locales de pilotage des réseaux « Ambition réussite » s'associent aux projets de réussite éducative.
Car nous devons jouer sur tous les tableaux ! Aussi, c'est à vous de travailler à mettre en oeuvre toutes les synergies possibles !
b. Solidarité de toute l'Éducation nationale avec l'Éducation prioritaire
La solidarité, c'est celle aussi de toute l'Éducation nationale avec les collèges et écoles de l'Éducation prioritaire, et en particulier ceux des réseaux « Ambition réussite ».
Car, je vous le dis avec force : vous ne serez pas seuls ! À tous les niveaux de responsabilité, vous trouverez des interlocuteurs ouverts et disponibles.
D'abord, la nouvelle organisation du ministère crée un poste de délégué à l'Éducation prioritaire. M. Pierre Polivka sera en quelque sorte votre ambassadeur, qui pourra faire entendre votre voix au plus haut niveau, puisqu'il est directement placé auprès du directeur général de l'enseignement scolaire.
J'ai voulu qu'il y ait désormais un pilote de l'Éducation prioritaire. N'hésitez donc pas à le solliciter !
Dans les académies, les recteurs doivent veiller à cette solidarité nécessaire, notamment dans l'attribution des fonds sociaux. Je le leur rappellerai mardi, lors de leur réunion mensuelle.
Par ailleurs, les inspecteurs pédagogiques régionaux et les inspecteurs de l'Éducation nationale vous aideront à veiller au suivi des élèves, notamment grâce à la mise en place du livret de compétences .
Et enfin, le point n'est pas négligeable, les services académiques seront chargés de valoriser auprès des enseignants les affectations en zone d'éducation prioritaire, notamment en facilitant leur promotion.
Le fait de pouvoir compter sur des enseignants volontaires et sur une équipe plus stable contribuera au dynamisme et à l'efficacité de votre action.
d. Solidarité des réseaux « Ambition réussite » avec les parents
La solidarité, enfin, elle s'adresse aussi aux parents.
Vous le savez bien, les parents d'élèves en difficulté sont eux-mêmes dans des situations difficiles.
Pour de multiples raisons, problème de langue, ou défiance à l'égard d'un monde éducatif qu'ils connaissent mal, ils sont peu présents à l'école.
C'est pourquoi je vous demande de veiller avec une attention particulière à faire en sorte que les parents puissent s'investir davantage dans l'école.
Et la première condition pour cela, c'est qu'ils puissent y trouver un lieu qui leur soit consacré !
C'est pourquoi l'aménagement d'une salle d'accueil pour les parents est souhaitable dans tous les établissements qui le peuvent.
Rencontrer les parents, faciliter les permanences d'associations de parents est déjà un point fondamental.
Mais cela l'est tout autant de s'assurer que les parents comprennent les règles de l'école, ses exigences. L'obligation d'assiduité, la nécessité du travail personnel et régulier doivent leur être clairement exposées.
Ils doivent aussi connaître les aides qui sont offertes à leurs enfants : les études après la classe, les dispositifs Ecole ouverte, l'apprentissage junior, etc...
Je vous demande donc de veiller tout particulièrement à ce que les efforts que vous faites pour les élèves soient compris des parents.
3. La personnalisation des parcours
J'en viens au troisième sujet de notre action : la personnalisation des parcours.
Dans le cadre des réseaux « Ambition réussite », votre tâche est à la fois globale et locale : en effet, vous êtes tout à la fois les chevilles ouvrières d'un projet d'ensemble, mais aussi vous devez veiller dans votre établissement au suivi individuel des élèves.
Le plan de relance de l'Éducation prioritaire vous donne les moyens de jouer sur les deux échelles.
Il met en oeuvre des projets communs, mais aussi des moyens supplémentaires pour un meilleur suivi individualisé des difficultés et des parcours.
Aussi, vous ne devez pas hésiter à vous servir de ces nouvelles dispositions.
Je pense d'abord aux programmes personnalisés de réussite éducative , pour lesquels vous pourrez mobiliser les enseignants supplémentaires mis à votre disposition.
Je pense aussi à l'initiative « 100 000 étudiants pour 100 000 élèves », qui permet à un étudiant de parrainer un élève d'un établissement de l'Éducation prioritaire. Ne négligez pas cette possibilité qui vous est offerte !
Dans toutes les académies les recteurs ont mobilisé les établissements d'enseignement supérieur, universités et grandes écoles pour que leurs étudiants s'investissent à vos cotés pour accompagner vos élèves vers l'enseignement supérieur et plus généralement les ouvrir au monde extérieur. Appuyez-vous sur ce renfort et cette énergie de notre jeunesse.
J'attire aussi votre attention sur l'apprentissage junior et les possibilités qu'il ouvre aux collégiens. C'est l'opportunité pour un jeune de 14 ans d'envisager une formation par la voie de l'apprentissage.
Les classes d'apprentis juniors ouvriront en lycées professionnels et en centres de formation d'apprentis, les premières à la rentrée 2006, et seront plus largement déployées en 2007.
Ce parcours pourra répondre aux attentes de certains de vos élèves, qui recherchent une formation plus concrète, en contact direct avec le monde professionnel.
Vous serez bien évidemment étroitement associés au développement de ces parcours, car il est prévu que le collège d'origine continue à suivre ses élèves en apprentissage junior jusqu'à l'âge de 16 ans : un professeur référent du collège effectuera ce suivi pour s'assurer des progrès du jeune, et notamment de sa bonne acquisition du socle commun de connaissances.
De même, vous savez que vous pouvez, si vous le jugez utile, avancer à la classe de 4 ème l'option de découverte professionnelle.
Enfin, il convient de trouver une réponse adaptée aux situations où le comportement des élèves ne permet plus à l'ensemble de la classe de travailler dans des conditions normales.
Il serait bien évidemment désastreux pour les établissements « Ambition réussite » que des projets ambitieux soient mis en péril par une poignée d'élèves.
Pour ceux-là, il convient de les orienter vers les classes-relais où ils trouveront temporairement un cadre approprié.
Là encore, j'ai voulu que vous disposiez des moyens adaptés, et c'est pourquoi les 200 dispositifs relais supplémentaires crées en 2006 seront en priorité mis à votre service.
Mesdames et Messieurs,
Je crois qu'à l'aide des dispositions qui ont été prises, vous avez en main des moyens nombreux : à vous et vos équipes de les rendre efficaces.
Honnêtement, je ne vois pas comment on pourrait croire que mon action participerait d'une « logique de renoncement », alors que le principe même de notre action, la mienne comme la vôtre, c'est l'ambition pour les élèves !
Mais j'en reviens à vous.
Demain, vous allez retrouver le terrain.
Demain, vous serez à votre poste et vous devrez agir. Et ce sera à vous de mettre en oeuvre concrètement les réseaux « Ambition réussite ».
Je vous ai dit un mot des mesures les plus concrètes dont vous pourrez vous saisir. Mais il y a une chose fondamentale, qui ne peut ni se réglementer, ni se quantifier, c'est la volonté et l'ambition.
Et je crois précisément que votre mission est d'être les porteurs d'une volonté de réussite nouvelle dans des quartiers et auprès d'élèves qui en ont perdu jusqu'à l'idée.
Si nous parvenons à faire en sorte que l'école ne soit plus seulement pour les élèves un lieu de contrainte, mais aussi un lieu d'ambition, nous aurons remporté une belle victoire.
Car nous aurons restauré ce désir de réussite qui est le vrai moteur de l'ascenseur social !
C'est mon ambition. Je sais que c'est aussi la vôtre.
Et je vous remercie très chaleureusement.
Source http://www.education.gouv.fr, le 31 mai 2006