Déclaration de M. Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l'égalité des chances, sur l'école en tant que facteur d'intégration sociale, Oullins le 16 septembre 2005.

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Circonstance : Inauguration d'une école dans un quartier défavorisé à Oullins-la-Saulaie (Lyon) le 16 septembre 2005

Texte intégral

Monsieur le Sénateur Maire,
Monsieur le Député,
Monsieur le Recteur d'Académie,
Monsieur le Conseiller général,
Monsieur l'Inspecteur d'Académie,
Mesdames, Messieurs les Maires,
Mesdames, Messieurs les membres du Conseil Municipal,
Madame la Directrice,
Mesdames, Messieurs les enseignants,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Etre ici aujourd'hui signifie beaucoup pour moi, et à de nombreux titres. Vous le savez tous, l'école compte, et a toujours beaucoup compté pour moi. Je tiens donc à remercier mon ami François Buffet de m'avoir invité ici, ce soir. Ouvrir une école est un acte important de la vie démocratique et républicaine de notre pays, mais c'est aussi un acte important pour les personnes qui vivent à Oullins, pour les enfants et leurs familles. Je sais tout ce qu'une école peut apporter à de jeunes enfants, que ce soit en maternelle, ou en CE1 et CE2. Moi-même, c'est par l'école primaire que j'ai commencé à découvrir un autre monde que mon quotidien d'enfant des bidonvilles de Lyon. C'est l'école de la République qui a donné non pas sa chance, mais ses chances, à un gamin issu de l'immigration, et ayant grandi dans un bidonville. C'est l'Education Nationale, ses instituteurs et ses professeurs, qui m'ont permis d'accéder à l'écrit, et à cette chose magique qu'est le livre. C'est encore grâce à l'Education Nationale que j'ai pu apprendre un métier, l'électro-technique, puis faire le choix des études longues, et devenir chercheur au CNRS... et ministre !
C'est une institutrice, Georgette, qui, la première, m'a amené à comprendre que l'école, c'est l'endroit où l'on reçoit les premières capacités pour s'accomplir, pour se réussir, pour apprendre à vivre bien avec les autres. C'est ici que commence l'égalité des chances.
En fait, l'Education nationale est un acteur aussi essentiel qu'incontournable de toute politique de promotion de l'égalité des chances, cette politique qui reconnaît à chacun le droit de s'accomplir et de s'épanouir, aussi bien en fonction de ses besoins, que de ses aspirations, de son travail et de ses projets. L'Education nationale est donc, de fait, le lieu où les inégalités peuvent être combattues, voire vaincues, en premier.
Or, le projet qui sous-tend la création, et aujourd'hui, l'ouverture, de l'école de la Saulaie, s'inscrit directement dans ces problématiques. Je sais à quel point la municipalité d'Oullins s'est investie pour aider le quartier de la Saulaie à résoudre ses problèmes. Or, la population la plus vulnérable aux situations engendrées par les problèmes sociaux de pauvreté, d'intégration difficile, de chômage, de discrimination, de relégation, c'est celle des enfants les plus jeunes, entre 3 et 8 ans.
On sait aujourd'hui, grâce au travail aussi bien de l'Education Nationale,, des missions locales pour l'emploi, des associations de terrain, que de l'Agence Nationale de Lutte contre l'Illettrisme, que des enfants mis dans des situations économiques, familiales et personnelles difficiles, auront du mal à acquérir les savoirs fondamentaux et les savoir être essentiels. Cela les installe dans des dynamiques d'échec pour le reste de leur parcours scolaire. Ce sont autant de blessures qui taraudent le corps social. De plus en plus d'enfants dans ces situations commencent à être en difficulté d'apprentissage dès l'âge de cinq ans ! ! ! Or, ne pas acquérir les compétences de base à cet âge, c'est être condamné à ne pas connaître la mobilité sociale, l'accès à l'emploi qui sont des droits républicains !
Cet état de fait est insupportable, inadmissible ! Il est une blessure au flanc de la république !
L'école de la Saulaie doit être, et veut être, un moyen de prévention par rapport à ces risques sociaux majeurs. L'école n'est pas "qu'un" endroit pour enseigner : elle est un lieu de vie, qui veut associer les familles, les parents, les enseignants, mais aussi la municipalité, à l'amélioration de la scolarité et des conditions de vie des petits. Grâce à ce travail, il est possible d'espérer que l'école de la Saulaie aide ces enfants à entrer très tôt dans des parcours de réussite, non seulement scolaire, mais existentielle.
La maternelle et le primaire sont les étapes fondatrices du parcours à l'intérieur du circuit scolaire. Les réussir, c'est se donner les plus grandes chances par rapport à l'école, par rapport à la vie. Avec mon collègue Gilles de Robien, nous voulons faire en sorte que cette philosophie de l'égalité des chances imprègne l'ensemble du circuit éducatif, de la maternelle à la fin des études. Pour cela, nous préparons pour 2005 et 2006, des actions concernant le collège, et les stages qui font découvrir le monde professionnel aux jeunes, mais aussi les grandes écoles et l'entrée à l'université. Mais avant de réussir sa formation, qu'elle soit directement professionnelle, généraliste ou universitaire, il faut que les jeunes arrivent du primaire en maîtrisant la lecture, l'écriture, le calcul, mais aussi en sachant se comporter en société. Tout le projet de l'école de la Saulaie est bâti autour de cette préoccupation !
Une action de cet ordre nécessite une mobilisation de tous, comme le démontre le travail accompli entre la municipalité, le Conseil général, et le Rectorat.
Il est remarquable que sur un budget de 30 millions d'euros, la ville d'Oullins ait réservé 3,5 millions d'euros au domaine scolaire (en fonctionnement) et près de 3 millions d'euros aux investissements et à l'entretien des groupes scolaires. L'école de la Saulaie, qui me vaut le plaisir de me trouver parmi vous, a coûté 1 million et demi d'Euros, partagés entre l'Etat dans le cadre de la politique de la ville, le Conseil Général et la Municipalité.
Pour votre ville, c'est quasiment un investissement d'1 million d'euros réparti sur 2 ans pour la construction et l'aménagement de cet espace privilégié de réalisation et d'émancipation de l'esprit humain.
Ces chiffres démontrent la très forte volonté de mobilisation des énergies et des coeurs, en faveur de l'égalité des chances pour tous les enfants d'Oullins qui ont droit, d'espérer et d'escompter se réaliser dans un environnement propice à leur épanouissement.
Grâce à cet effort collectif, tous vos enfants, tous nos enfants, vont bénéficier de chances plus égales. C'est la multiplication de ces efforts et de ces initiatives, au niveau local comme national, que j'impulse, encourage et soutiens.
L'égalité des chances est au coeur de notre république, elle est essentielle à la croissance sociale, et les initiatives comme celle-ci en sont le ciment !
Je vous remercie.
Source http://www.egalitedeschances.gouv.fr, le 4 juillet 2006