Texte intégral
Monsieur le Ministre, Cher Gilles,
Monsieur l'Ambassadeur,
Monsieur l'Inspecteur Général,
Mesdames et messieurs,
Chers amis,
En 1960, Etiemble écrivait : "Si nous voulons survivre sur un globe qui comptera dès demain un milliard de Chinois, ne tardons pas à préparer nos lycéens, voire nos écoliers, aux tâches qui seront les leurs... N'accepterons-nous jamais de voir le monde tel qu'il va ?"
Aujourd'hui, nous acceptons enfin de voir le monde tel qu'il est.
D'un côté, l'inégalité des chances, contre laquelle le gouvernement a déclaré la guerre, en particulier sur les fronts de l'éducation et de l'emploi.
De l'autre, la Chine, ce pays continent, cet "Empire du Milieu", qui devient l'horizon économique de l'ensemble des grandes puissances, dont la France et l'Europe.
Pour combattre l'inégalité des chances, les jeunes des banlieues, ceux qui vivent dans les "Zones urbaines sensibles", dans les "quartiers en difficulté", dans les "Etablissements d'éducation prioritaire" doivent pouvoir s'inscrire dans les tendances les plus fortes, les plus dynamiques, du développement mondial.
Afin d'y parvenir, je sais, cher Gilles, tous les efforts que tu mets en oeuvre pour le renforcement de l'Education Prioritaire.
C'est dans cette même dynamique que s'inscrit, pleinement, le développement de l'enseignement du chinois, justement pour ces publics défavorisés.
Je sais qu'aux yeux de certains, cette rencontre entre l'égalité des chances et la langue chinoise peut apparaître surprenante. Mais elle ne l'est qu'en apparence, et elle prend tout son sens dès que l'on change de perspective.
Et aujourd'hui, trois mois après la crise des banlieues, l'urgence est telle, les attentes sont si fortes, que nous avons l'obligation d'être audacieux, de déjouer les habitudes et les conformismes, et de voir les choses en grand.
Dans les écoles, les collèges, les lycées, dans l'enseignement général et l'enseignement technique, dans les CAP et les BEP des zones défavorisées, l'apprentissage du Chinois peut être une chance décisive.
Grâce à ce nouveau savoir, les jeunes acquièrent un nouveau potentiel d'employabilité.
En effet, la demande en jeunes sinisants est multisectorielle : les grandes chaînes hôtelières et les organismes touristiques ont besoin de sinisants, de même que les grands groupes et les PME de l'agro-alimentaire, ou les groupes aéronautiques, ou les salons internationaux comme le Bourget.
Ces entreprises ont non seulement besoin d'ingénieurs et de commerciaux capables de s'adresser à leurs homologues chinois, mais aussi de personnels français, en France, qui puissent accueillir les ressortissants de "l'Empire du Milieu". Et ce, à tous les niveaux d'activité.
De même, la présence chinoise en France ne cesse de s'accroître. Alors qu'il n'y avait que quelques milliers de touristes chinois en France en 1995, il y en a eu près de 600 000 en 2005. Il y avait 4 500 étudiants chinois dans établissements supérieurs en 1995, il y a plus de 20 471 aujourd'hui.
Les jeunes Français, et notamment ceux des banlieues, doivent pouvoir bénéficier de la densification des échanges avec la Chine.
Nous ne sommes pas en avance : aux Etats-Unis, 400 écoles primaires et plus de 700 établissements supérieurs enseignent le chinois.
La même tendance lourde est à l'oeuvre en Angleterre, en Australie, au Japon, en Corée. En Allemagne, des dizaines d'établissement d'enseignement professionnel et de formation technique se jumellent avec des instituts de Pékin et de Shangaï.
L'apprentissage du chinois est donc une mesure importante pour aider les jeunes à accéder à l'emploi.
Il n'y a aucune raison que le développement de cette langue échappe à ceux qui ont besoin d'accéder à l'égalité des chances. Développer l'enseignement du chinois dans l'Education Prioritaire, c'est aussi s'attacher à réduire la fracture sociale.
Mais cette mesure va plus loin : elle s'attaque à l'auto-censure que ces jeunes s'imposent à eux-mêmes, en étant convaincus de ne jamais pouvoir sortir de leur cité, et d'être condamnés à l'échec non seulement professionnel, mais existentiel.
En effet, pour ces publics, le chinois est une langue valorisante. Elle est associée à de grandes vedettes asiatiques comme Bruce Lee ou Jet Li, et, de façon plus générale, à la puissance du "Grand Dragon".
Apprendre le chinois les oblige à effectuer un détour par rapport à eux-mêmes, et à travailler sur leur représentation du monde.
Cet apprentissage est le moyen de faire passer un certain nombre de contenus, en particulier ceux propres au savoir vivre, à la maîtrise de soi, si essentiels pour bien vivre ensemble.
Le chinois rend possible le détour, ce décentrement si essentiel pour s'ouvrir à l'autre, pour découvrir l'inconnu.
Je ne l'apprends à personne, il s'agit d'une langue a priori difficile. Elle nécessite de travailler le sens de l'observation, de l'écoute, ainsi que la mémoire, la rigueur, et le sens des combinaisons.
Mais les jeunes de banlieues, en particulier ceux issus de la diversité, ont déjà l'habitude de passer d'une langue à l'autre. J'ai confiance en leur réussite.
En même temps, l'exigence propre à l'apprentissage du chinois oblige les élèves à une maîtrise plus fine et structurée de leur pensée, et les amène à un retour vers le français.
Ainsi, ils s'inscrivent mieux dans le socle commun de connaissances. Et l'apprentissage de l'anglais en est d'autant facilité.
Par ce biais, ces jeunes peuvent apprendre qu'il leur est possible de sortir des quartiers, et pour cela, ils doivent aussi sortir d'eux-mêmes, de leur mentalité qui les amène à se croire condamnés à rester immobiles, sans avenir, et sans possibilité de réussite.
Au contraire, avec cette mesure, nous allons leur apprendre à bouger, à être mobiles, intellectuellement, géographiquement et professionnellement. C'est un nouveau moyen pour eux pour réussir et, surtout, pour SE réussir.
Le chinois doit leur donner le goût de la mobilité, de l'ascension sociale !
Cela doit les aider, pour ceux qui en ont le désir et la capacité, à aller jusqu'au bac, et au-delà, d'autant plus que les Grandes écoles sont en demande de sinisants, comme les universités.
Mais ceux qui vont en BEP, tout en découvrant cette langue, prouvent bien qu'une formation professionnelle menée à terme, et complétée par la rencontre avec les langues étrangères, est un parcours d'excellence au même titre que des études longues !
Afin d'implanter ce programme en mettant toutes les chances de notre côté, nous allons travailler avec les établissements, en réagissant aux demandes exprimées, qui seront relayées par monsieur l'Inspecteur Général Joel BELLASSEN.
Puis, en fonction des situations locales, nous travaillerons, en fonction du contexte, avec les rectorats, les équipes de réussites éducatives, les préfets à la ville, les Préfets à l'égalité des chances, et les associations.
De cette manière, nous répondrons au mieux à la demande locale, en fonction des moyens existants.
C'est par l'alliance d'une compréhension des grands enjeux d'aujourd'hui, de la nécessité de renforcer l'employabilité des jeunes, et d'un grand pragmatisme que nous allons pouvoir renforcer l'égalité des chances.
Je vous remercie.Source http://www.egalitedeschances.gouv.fr, le 4 juillet 2006
Monsieur l'Ambassadeur,
Monsieur l'Inspecteur Général,
Mesdames et messieurs,
Chers amis,
En 1960, Etiemble écrivait : "Si nous voulons survivre sur un globe qui comptera dès demain un milliard de Chinois, ne tardons pas à préparer nos lycéens, voire nos écoliers, aux tâches qui seront les leurs... N'accepterons-nous jamais de voir le monde tel qu'il va ?"
Aujourd'hui, nous acceptons enfin de voir le monde tel qu'il est.
D'un côté, l'inégalité des chances, contre laquelle le gouvernement a déclaré la guerre, en particulier sur les fronts de l'éducation et de l'emploi.
De l'autre, la Chine, ce pays continent, cet "Empire du Milieu", qui devient l'horizon économique de l'ensemble des grandes puissances, dont la France et l'Europe.
Pour combattre l'inégalité des chances, les jeunes des banlieues, ceux qui vivent dans les "Zones urbaines sensibles", dans les "quartiers en difficulté", dans les "Etablissements d'éducation prioritaire" doivent pouvoir s'inscrire dans les tendances les plus fortes, les plus dynamiques, du développement mondial.
Afin d'y parvenir, je sais, cher Gilles, tous les efforts que tu mets en oeuvre pour le renforcement de l'Education Prioritaire.
C'est dans cette même dynamique que s'inscrit, pleinement, le développement de l'enseignement du chinois, justement pour ces publics défavorisés.
Je sais qu'aux yeux de certains, cette rencontre entre l'égalité des chances et la langue chinoise peut apparaître surprenante. Mais elle ne l'est qu'en apparence, et elle prend tout son sens dès que l'on change de perspective.
Et aujourd'hui, trois mois après la crise des banlieues, l'urgence est telle, les attentes sont si fortes, que nous avons l'obligation d'être audacieux, de déjouer les habitudes et les conformismes, et de voir les choses en grand.
Dans les écoles, les collèges, les lycées, dans l'enseignement général et l'enseignement technique, dans les CAP et les BEP des zones défavorisées, l'apprentissage du Chinois peut être une chance décisive.
Grâce à ce nouveau savoir, les jeunes acquièrent un nouveau potentiel d'employabilité.
En effet, la demande en jeunes sinisants est multisectorielle : les grandes chaînes hôtelières et les organismes touristiques ont besoin de sinisants, de même que les grands groupes et les PME de l'agro-alimentaire, ou les groupes aéronautiques, ou les salons internationaux comme le Bourget.
Ces entreprises ont non seulement besoin d'ingénieurs et de commerciaux capables de s'adresser à leurs homologues chinois, mais aussi de personnels français, en France, qui puissent accueillir les ressortissants de "l'Empire du Milieu". Et ce, à tous les niveaux d'activité.
De même, la présence chinoise en France ne cesse de s'accroître. Alors qu'il n'y avait que quelques milliers de touristes chinois en France en 1995, il y en a eu près de 600 000 en 2005. Il y avait 4 500 étudiants chinois dans établissements supérieurs en 1995, il y a plus de 20 471 aujourd'hui.
Les jeunes Français, et notamment ceux des banlieues, doivent pouvoir bénéficier de la densification des échanges avec la Chine.
Nous ne sommes pas en avance : aux Etats-Unis, 400 écoles primaires et plus de 700 établissements supérieurs enseignent le chinois.
La même tendance lourde est à l'oeuvre en Angleterre, en Australie, au Japon, en Corée. En Allemagne, des dizaines d'établissement d'enseignement professionnel et de formation technique se jumellent avec des instituts de Pékin et de Shangaï.
L'apprentissage du chinois est donc une mesure importante pour aider les jeunes à accéder à l'emploi.
Il n'y a aucune raison que le développement de cette langue échappe à ceux qui ont besoin d'accéder à l'égalité des chances. Développer l'enseignement du chinois dans l'Education Prioritaire, c'est aussi s'attacher à réduire la fracture sociale.
Mais cette mesure va plus loin : elle s'attaque à l'auto-censure que ces jeunes s'imposent à eux-mêmes, en étant convaincus de ne jamais pouvoir sortir de leur cité, et d'être condamnés à l'échec non seulement professionnel, mais existentiel.
En effet, pour ces publics, le chinois est une langue valorisante. Elle est associée à de grandes vedettes asiatiques comme Bruce Lee ou Jet Li, et, de façon plus générale, à la puissance du "Grand Dragon".
Apprendre le chinois les oblige à effectuer un détour par rapport à eux-mêmes, et à travailler sur leur représentation du monde.
Cet apprentissage est le moyen de faire passer un certain nombre de contenus, en particulier ceux propres au savoir vivre, à la maîtrise de soi, si essentiels pour bien vivre ensemble.
Le chinois rend possible le détour, ce décentrement si essentiel pour s'ouvrir à l'autre, pour découvrir l'inconnu.
Je ne l'apprends à personne, il s'agit d'une langue a priori difficile. Elle nécessite de travailler le sens de l'observation, de l'écoute, ainsi que la mémoire, la rigueur, et le sens des combinaisons.
Mais les jeunes de banlieues, en particulier ceux issus de la diversité, ont déjà l'habitude de passer d'une langue à l'autre. J'ai confiance en leur réussite.
En même temps, l'exigence propre à l'apprentissage du chinois oblige les élèves à une maîtrise plus fine et structurée de leur pensée, et les amène à un retour vers le français.
Ainsi, ils s'inscrivent mieux dans le socle commun de connaissances. Et l'apprentissage de l'anglais en est d'autant facilité.
Par ce biais, ces jeunes peuvent apprendre qu'il leur est possible de sortir des quartiers, et pour cela, ils doivent aussi sortir d'eux-mêmes, de leur mentalité qui les amène à se croire condamnés à rester immobiles, sans avenir, et sans possibilité de réussite.
Au contraire, avec cette mesure, nous allons leur apprendre à bouger, à être mobiles, intellectuellement, géographiquement et professionnellement. C'est un nouveau moyen pour eux pour réussir et, surtout, pour SE réussir.
Le chinois doit leur donner le goût de la mobilité, de l'ascension sociale !
Cela doit les aider, pour ceux qui en ont le désir et la capacité, à aller jusqu'au bac, et au-delà, d'autant plus que les Grandes écoles sont en demande de sinisants, comme les universités.
Mais ceux qui vont en BEP, tout en découvrant cette langue, prouvent bien qu'une formation professionnelle menée à terme, et complétée par la rencontre avec les langues étrangères, est un parcours d'excellence au même titre que des études longues !
Afin d'implanter ce programme en mettant toutes les chances de notre côté, nous allons travailler avec les établissements, en réagissant aux demandes exprimées, qui seront relayées par monsieur l'Inspecteur Général Joel BELLASSEN.
Puis, en fonction des situations locales, nous travaillerons, en fonction du contexte, avec les rectorats, les équipes de réussites éducatives, les préfets à la ville, les Préfets à l'égalité des chances, et les associations.
De cette manière, nous répondrons au mieux à la demande locale, en fonction des moyens existants.
C'est par l'alliance d'une compréhension des grands enjeux d'aujourd'hui, de la nécessité de renforcer l'employabilité des jeunes, et d'un grand pragmatisme que nous allons pouvoir renforcer l'égalité des chances.
Je vous remercie.Source http://www.egalitedeschances.gouv.fr, le 4 juillet 2006