Déclaration de M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur le manuel d'histoire franco allemand, Sarrebrück le 10 juillet 2006.

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Circonstance : Lancement du manuel d'histoire franco allemand en Allemagne à Sarrebrück le 10 juillet 2006

Texte intégral

Monsieur le Ministre plénipotentiaire, Cher Peter Müller,
Monsieur le Président de la Fondation Union,
Mesdames et Messieurs,
A Péronne, le 4 mai dernier, lors du lancement de la version française du manuel d'histoire franco-allemand, je disais, Cher Peter, que l'amitié ne vit pas seulement de paroles, mais qu'elle se nourrit aussi et surtout d'actes.
La publication d'un manuel d'histoire commun est précisément pour moi l'un des actes forts de la relation franco-allemande des cinquante dernières années.
Car cette publication traduit admirablement la communauté intellectuelle qui existe désormais entre nos deux pays.
Ce manuel s'adresse aux jeunes de nos deux pays qui, à partir de la rentrée prochaine, pourront étudier leur histoire, l'histoire européenne et l'histoire du monde dans le même ouvrage.
Il s'agit là d'une véritable première mondiale, et nous pouvons tous être fiers de cette grande réussite.
Je voudrais dire ici brièvement ce qu'est à mes yeux ce manuel, mais d'abord ce qu'il n'est pas.
Ce que ce manuel n'est pas.
Cet ouvrage n'est évidemment pas un livre officiel. Un comité scientifique bilatéral a élaboré un cahier des charges répondant aux exigences des programmes d'enseignement. Il a suivi la réalisation de l'ouvrage mais ce sont les éditeurs et les auteurs qui, en toute liberté, ont assuré la rédaction de ce livre dont ils assument la responsabilité. Un livre qui, par conséquent, vient enrichir l'offre de manuels d'histoire disponibles dans nos deux pays.
Cet ouvrage n'est pas non plus une tentative de consensus historique à tout prix. Au contraire, le choix a été fait de toujours croiser les regards et de varier les angles de vue, sans céder à la facilité des fausses ressemblances ou des différences apparentes.
Cet ouvrage enfin n'est pas un manuel d'histoire franco-allemande : il y est évidemment question de la France, de l'histoire de l'Allemagne, mais aussi de l'Europe, et des questions internationales. Il s'agissait bien, à travers le prisme franco-allemand, de traiter l'ensemble des programmes scolaires français et allemand, en commençant par la classe terminale pour laquelle paraît aujourd'hui ce premier tome.
Je voudrais dire maintenant quelle sont à mes yeux les caractéristiques majeures de ce livre.
Les grandes caractéristiques du manuel commun
Cet ouvrage est d'abord un formidable instrument éducatif pour les élèves.
Lancé par le Parlement des jeunes réuni à Berlin le 23 janvier 2003, c'est bien aux jeunes que ce projet devenu réalité est destiné. Jamais en France, ni en Allemagne, les élèves n'auront eu une connaissance aussi directe du regard d'un autre pays sur l'histoire !
Il y a près de 80 ans, à Oslo, Marc Bloch plaidait devant le Congrès international des sciences historiques pour une histoire comparée des sociétés européennes. Il déclarait que les Français et les Allemands devaient cesser de se parler d'histoire nationale à histoire nationale sans se comprendre. Eh bien, cet appel trouve aujourd'hui une réponse concrète avec la parution de ce manuel.
La deuxième caractéristique de ce manuel, c'est qu'il contribue en lui-même à la construction européenne.
D'abord parce que c'est bien l'histoire européenne qui est traitée dans le manuel. Mais aussi, nous le savons bien, parce qu'il n'y a pas d'Europe sans dialogue des cultures, et que l'histoire est l'un des instruments de ce dialogue.
Ce manuel est donc une pierre supplémentaire à la construction européenne, laquelle passe évidemment par des institutions communes, mais aussi par la constitution de repères intellectuels communs.
Ce manuel, enfin, est aussi une oeuvre collective. C'est grâce à une équipe solide et solidaire que le projet a pu voir le jour. Avec cette particularité supplémentaire que l'équipe, ici, est franco-allemande.
Je voudrais donc à nouveau, et très chaleureusement, saluer tous ceux qui ont mené à bien ce travail important et difficile.
D'abord le comité scientifique qui a conçu cet ouvrage et qui a surmonté toutes les difficultés liées à l'existence de fortes traditions nationales.
Je pense en particulier à Stefan Krawielicki, à Michael Ott et à Christine Klos, ici présents, qui ont conduit la partie allemande de ce comité avec beaucoup de détermination.
Je n'oublie pas non plus le travail, la rigueur, et le dévouement de tous les historiens du comité. Je ne peux les citer tous mais je voudrais saluer le professeur Rudolf von Thadden, grand historien, et Directeur de " l'Institut de Berlin-Brandebourg pour la coopération franco-allemande en Europe" installé à Genshagen.
En mentionnant Genshagen, c'est aussi la mémoire de Brigitte Sauzay que je voudrais évoquer en pensant au bonheur que lui aurait procuré la sortie de ce manuel d'histoire.
Je voudrais aussi, bien entendu, remercier sincèrement Peter Müller pour l'engagement et la conviction qui ont été les siens et sans lesquels ce projet n'aurait pas pu voir le jour.
Je remercie enfin les éditions Nathan et Klett, en saluant l'engagement personnel de Catherine Lucet et de Françoise Fougeron, et celui de M. Körner-Welleshaus.
Avec leurs équipes d'auteurs, sous la direction de Peter Geiss et Guillaume Le Quintrec, ces deux éditeurs ont accompli ensemble un travail remarquable, en s'engageant sur des chemins éditoriaux inconnus ; je salue leur courage et leur volonté d'aboutir, volonté aujourd'hui récompensée.
Mais l'aventure de ce manuel ne fait que commencer !
Car, ne l'oublions pas, ce premier volume aura une suite : en 2007 et 2008 paraîtront les volumes destinés aux classes de 1ère et de 2nde, sans lesquels le projet perdrait assurément de sa cohérence et de son efficacité.
Comment d'ailleurs ne pas vouloir poursuivre l'entreprise quand on voit l'accueil que les médias ont réservé à la sortie du manuel dans nos deux pays ?
En France, tous les médias nationaux ou régionaux, écrits ou audiovisuels, ont accordé à ce manuel scolaire une place qu'aucun manuel n'avait jamais occupée auparavant.
Je ne doute pas, du reste, que le succès sera aussi au rendez-vous dans les établissements scolaires.
Mesdames et Messieurs,
Avec la parution de cet ouvrage, nous écrivons une page de notre histoire commune.
Cette histoire commune, elle passe aussi, naturellement, par une meilleure connaissance mutuelle de nos langues nationales.
Depuis deux ans, les élèves français apprennent de plus en plus l'allemand dans les écoles et les collèges. Nous devons bien sûr nous en réjouir, comme d'un signe de la vitalité des échanges présents et futurs entre nos deux pays.
Les manuels qui viendront après celui-ci le mentionneront certainement comme une étape significative dans le rapprochement entre nos deux pays.
Avec ce manuel d'histoire, nous tournons ensemble nos regards vers le passé, mais, surtout, nous regardons ensemble vers l'avenir.
Car c'est sur la base d'une vision lucide et partagée de notre passé commun que nous construirons notre avenir commun, au sein de l'Europe !
Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 13 juillet 2006