Texte intégral
Réunion de plus de mille mandataires patronaux
Forum des mandats et fonctions juridictionnelles
sur le thème de l'engagement.
Discours de Laurence Parisot
présidente du MEDEF
Cnit Paris-La Défense - 29 juin 2006
Chers Mandataires Patronaux,
Vous êtes des hommes et des femmes valeureux.
Votre mission n'est pas familière aux Français. Pourtant, elle est ancienne et ancrée au plus profond de notre histoire. Dès l'antiquité, des groupes de métiers ont désigné certains de leurs membres pour les représenter auprès d'institutions politiques ou administratives.
Au Moyen Age, ces associations prennent le nom de guildes ou de hanses -le mot veut dire « troupe » !-. Déjà, il ne s'agissait pas seulement de défendre les intérêts des groupes mais aussi d'organiser l'entraide sociale.
C'est à partir du 13e siècle que l'institutionnalisation de ces associations est acquise. Elles sont présentes dans la sphère politique avec les maîtres jurés et les consuls, dans la sphère judiciaire avec les « preud'hommes », c'est à dire les hommes preux . Certains d'entre eux sont désignés pour participer à la gestion d'institutions de secours aux indigents comme les léproseries ou les hospices.
Ce que l'histoire récente apporte de nouveau c'est la participation des représentants des salariés aux côtés des représentants des métiers, des commerces et des industries. C'est la naissance du paritarisme.
Aujourd'hui, vous êtes chefs d'entreprise, cadres dirigeants d'entreprise et mandataire patronal. Vous êtes , désigné, coopté, élu bref vous êtes celui ou celle qui nous représentez. Vous êtes décisionnaire, co-décisionnaire, conseiller, administrateur, gestionnaire, co-gestionnaire, bref vous êtes un acteur, vous êtes celui, ou celle qui agissez.
Votre mission est exigeante. Elle est bénévole. Elle suppose un haut degré d'informations. Elle repose sur une disponibilité très grande : vous ne comptez pas votre temps, je le sais. Au nom de tous les chefs d'entreprise de France, je vous en remercie. Votre mission nécessite du courage : vous êtes amenés à intervenir publiquement, vous avez à prendre parti. Votre mission, je la connais bien. C'est également la mienne.
Vous incarnez nos valeurs, celles de l'entreprise et du chef d'entreprise. Ainsi, vous développez l'esprit d'ouverture qu'il y a en chaque entrepreneur et que le Medef porte également et j'espère chaque jour plus. Vous vous devez d'être à la fois créatifs et attentifs. Vous savez être vigilants, qualité cardinale du chef d'entreprise à mes yeux. Dans la conduite de vos mandats vous repérez, vous utilisez les informations plus vite que les autres pour attirer l'attention là sur les déséquilibres dangereux là sur les solutions nouvelles. Comme l'entrepreneur dans son action quotidienne, vous endossez les responsabilités sans hésiter.
Pourtant, vous n'êtes pas des entrepreneurs comme les autres. Chers mandataires patronaux, vous avez développé plus que quiconque l'esprit de service et plus que quiconque vous l'avez appliqué à la collectivité. Vous donnez ainsi un sens tout particulier à la vie économique et sociale. . Vous incarnez le lien nécessaire entre l'économique et le social. « Nul ne peut atteindre ses propres objectifs sans considérer ceux des autres » a écrit le grand penseur français du libéralisme, Frédéric Bastiat. Vous êtes des entrepreneurs-citoyens actifs, participatifs, généreux, exemplaires, au service de la collectivité tout entière.
Et c'est pourquoi votre mission est moderne. Elle s'inscrit dans une démarche collective. Votre engagement témoigne de notre conception à nous Mouvement des Entreprises de France de la démocratie. Nous n'avons pas une vision minimaliste de la démocratie. Selon nous la démocratie ne se résume pas au choix de ses dirigeants au travers d'élections libres. Votre engagement c'est la démocratie étendue à la société civile.
Car, vous qui êtes si impliqués dans des instances au plus près du terrain, vous mesurez combien les institutions centrales, toutes légitimes qu'elles soient, émettent des normes abstraites et désincarnées. Elle ne savent pas tout et n'expriment pas tout. Votre engagement témoigne de notre conception de l'intérêt général. Celui-ci ne saurait procéder d'une démarche technocratique venue d'en haut mais bien plutôt d'une confrontation de multiples intérêts particuliers. Vous êtes contributifs à l'intérêt général et constitutifs de l'intérêt général.
Plus que beaucoup d'autres vous connaissez la valeur du dialogue. Dans les instances dans lesquelles vous nous représentez, vous écoutez et vous proposez, vous argumentez et vous échangez. C'est aussi ça la démocratie : la confrontation entre les points de vue, l'élaboration d'idées nouvelles, la capacité à faire changer d'avis ou à changer d'avis au moins un peu. Votre engagement c'est chaque jour une chance nouvelle de revivifier notre démocratie, notre pays.
Plus que beaucoup d'autres vous savez que l'exercice de cette démocratie là demande du temps. Car cette nécessité de réfléchir, de confronter, d'ajuster, ne peut exister qu'en dépassant le très court terme. Souvenons-nous de l'adage humaniste : « hâte-toi lentement ». Certains disent : « nous n'avons pas le temps, la mondialisation est là ». D'autres préfèrent se plier à la tyrannie du statu quo. Du coup, notre pays oscille entre le happening souvent douloureux des décisions non préparées et l'immobilisme pesant des décisions jamais prises. Au-delà de ces deux impasses, il existe une voie : la délibération sociale.
C'est cette délibération sociale que je propose à nos partenaires, les syndicats.
Je dis bien nos partenaires, car la chose la plus importante que j'ai ressentie après les rencontres bilatérales qui se sont déroulées de mai à juin entre nous, le Medef, et FO, la CGC, la CFDT, la CGT et la CFTC, c'est une reconnaissance et un respect mutuel, pour tout dire également une inquiétude et une volonté d'agir . Et plus encore : une conscience partagée des défis à relever. Ouvrir un espace, et un temps de délibération sociale, qu'est-ce que cela veut dire ? C'est accepter ensemble, entre partenaires sociaux de confronter nos opinions, c'est réfléchir, c'est cheminer, c'est envisager chacun que nos positions initiales respectives puissent changer un peu. Quel est le but ? La recherche d'un consensus rationnel et raisonnable sur des enjeux importants pour l'avenir de notre pays. La préparation d'un terrain favorable à l'ouverture de négociations sur des dossiers plus précis.
Trois enjeux méritent d'être mis en débat sans tarder.
Premier enjeu. Le rôle de l'Etat dans l'élaboration de la norme sociale. Quel doit être le champ de compétences et donc d'intervention de l'Etat ? Quel doit être le champ de compétences des partenaires sociaux ? Peut-on élargir l'espace du contrat ? Comment garantir l'autonomie de la négociation collective ? Les événements récents montrent la nécessité de disposer de règles du jeu claires. Tentons de les définir ensemble !
Deuxième enjeu : le marché du travail. Le marché du travail en France fonctionne mal. Comment le dynamiser demanderont certains ? comment le sécuriser diront d'autres ? comment y accéder tout simplement ? Engageons ensemble la réflexion sur toutes les précarités et sur toutes les flexibilités, à partir de la remise à plat de l'assurance chômage, à partir d'une évaluation du contrat de travail et en particulier de la séparabilité, et à partir de l'examen des propositions de sécurisation des parcours.
Troisième enjeu : la situation économique de la France. Le social et l'économique ne sont pas ennemis l'un de l'autre, l'économique et le financier non plus. Avançons dans un diagnostic partagé de la situation économique de notre pays. Echangeons nos points de vue sur une série d'indicateurs clés, sur leur définition et leur interprétation.
Prouvons tous comme vous le faites vous même chaque jour que la pensée et l'action , pour être justes, ne vont pas l'une sans l'autre. Pratiquons la délibération sociale avec le sérieux et l'enthousiasme que mérite un projet au service de notre pays.Source http://www.medef.fr, le 17 juillet 2006
Forum des mandats et fonctions juridictionnelles
sur le thème de l'engagement.
Discours de Laurence Parisot
présidente du MEDEF
Cnit Paris-La Défense - 29 juin 2006
Chers Mandataires Patronaux,
Vous êtes des hommes et des femmes valeureux.
Votre mission n'est pas familière aux Français. Pourtant, elle est ancienne et ancrée au plus profond de notre histoire. Dès l'antiquité, des groupes de métiers ont désigné certains de leurs membres pour les représenter auprès d'institutions politiques ou administratives.
Au Moyen Age, ces associations prennent le nom de guildes ou de hanses -le mot veut dire « troupe » !-. Déjà, il ne s'agissait pas seulement de défendre les intérêts des groupes mais aussi d'organiser l'entraide sociale.
C'est à partir du 13e siècle que l'institutionnalisation de ces associations est acquise. Elles sont présentes dans la sphère politique avec les maîtres jurés et les consuls, dans la sphère judiciaire avec les « preud'hommes », c'est à dire les hommes preux . Certains d'entre eux sont désignés pour participer à la gestion d'institutions de secours aux indigents comme les léproseries ou les hospices.
Ce que l'histoire récente apporte de nouveau c'est la participation des représentants des salariés aux côtés des représentants des métiers, des commerces et des industries. C'est la naissance du paritarisme.
Aujourd'hui, vous êtes chefs d'entreprise, cadres dirigeants d'entreprise et mandataire patronal. Vous êtes , désigné, coopté, élu bref vous êtes celui ou celle qui nous représentez. Vous êtes décisionnaire, co-décisionnaire, conseiller, administrateur, gestionnaire, co-gestionnaire, bref vous êtes un acteur, vous êtes celui, ou celle qui agissez.
Votre mission est exigeante. Elle est bénévole. Elle suppose un haut degré d'informations. Elle repose sur une disponibilité très grande : vous ne comptez pas votre temps, je le sais. Au nom de tous les chefs d'entreprise de France, je vous en remercie. Votre mission nécessite du courage : vous êtes amenés à intervenir publiquement, vous avez à prendre parti. Votre mission, je la connais bien. C'est également la mienne.
Vous incarnez nos valeurs, celles de l'entreprise et du chef d'entreprise. Ainsi, vous développez l'esprit d'ouverture qu'il y a en chaque entrepreneur et que le Medef porte également et j'espère chaque jour plus. Vous vous devez d'être à la fois créatifs et attentifs. Vous savez être vigilants, qualité cardinale du chef d'entreprise à mes yeux. Dans la conduite de vos mandats vous repérez, vous utilisez les informations plus vite que les autres pour attirer l'attention là sur les déséquilibres dangereux là sur les solutions nouvelles. Comme l'entrepreneur dans son action quotidienne, vous endossez les responsabilités sans hésiter.
Pourtant, vous n'êtes pas des entrepreneurs comme les autres. Chers mandataires patronaux, vous avez développé plus que quiconque l'esprit de service et plus que quiconque vous l'avez appliqué à la collectivité. Vous donnez ainsi un sens tout particulier à la vie économique et sociale. . Vous incarnez le lien nécessaire entre l'économique et le social. « Nul ne peut atteindre ses propres objectifs sans considérer ceux des autres » a écrit le grand penseur français du libéralisme, Frédéric Bastiat. Vous êtes des entrepreneurs-citoyens actifs, participatifs, généreux, exemplaires, au service de la collectivité tout entière.
Et c'est pourquoi votre mission est moderne. Elle s'inscrit dans une démarche collective. Votre engagement témoigne de notre conception à nous Mouvement des Entreprises de France de la démocratie. Nous n'avons pas une vision minimaliste de la démocratie. Selon nous la démocratie ne se résume pas au choix de ses dirigeants au travers d'élections libres. Votre engagement c'est la démocratie étendue à la société civile.
Car, vous qui êtes si impliqués dans des instances au plus près du terrain, vous mesurez combien les institutions centrales, toutes légitimes qu'elles soient, émettent des normes abstraites et désincarnées. Elle ne savent pas tout et n'expriment pas tout. Votre engagement témoigne de notre conception de l'intérêt général. Celui-ci ne saurait procéder d'une démarche technocratique venue d'en haut mais bien plutôt d'une confrontation de multiples intérêts particuliers. Vous êtes contributifs à l'intérêt général et constitutifs de l'intérêt général.
Plus que beaucoup d'autres vous connaissez la valeur du dialogue. Dans les instances dans lesquelles vous nous représentez, vous écoutez et vous proposez, vous argumentez et vous échangez. C'est aussi ça la démocratie : la confrontation entre les points de vue, l'élaboration d'idées nouvelles, la capacité à faire changer d'avis ou à changer d'avis au moins un peu. Votre engagement c'est chaque jour une chance nouvelle de revivifier notre démocratie, notre pays.
Plus que beaucoup d'autres vous savez que l'exercice de cette démocratie là demande du temps. Car cette nécessité de réfléchir, de confronter, d'ajuster, ne peut exister qu'en dépassant le très court terme. Souvenons-nous de l'adage humaniste : « hâte-toi lentement ». Certains disent : « nous n'avons pas le temps, la mondialisation est là ». D'autres préfèrent se plier à la tyrannie du statu quo. Du coup, notre pays oscille entre le happening souvent douloureux des décisions non préparées et l'immobilisme pesant des décisions jamais prises. Au-delà de ces deux impasses, il existe une voie : la délibération sociale.
C'est cette délibération sociale que je propose à nos partenaires, les syndicats.
Je dis bien nos partenaires, car la chose la plus importante que j'ai ressentie après les rencontres bilatérales qui se sont déroulées de mai à juin entre nous, le Medef, et FO, la CGC, la CFDT, la CGT et la CFTC, c'est une reconnaissance et un respect mutuel, pour tout dire également une inquiétude et une volonté d'agir . Et plus encore : une conscience partagée des défis à relever. Ouvrir un espace, et un temps de délibération sociale, qu'est-ce que cela veut dire ? C'est accepter ensemble, entre partenaires sociaux de confronter nos opinions, c'est réfléchir, c'est cheminer, c'est envisager chacun que nos positions initiales respectives puissent changer un peu. Quel est le but ? La recherche d'un consensus rationnel et raisonnable sur des enjeux importants pour l'avenir de notre pays. La préparation d'un terrain favorable à l'ouverture de négociations sur des dossiers plus précis.
Trois enjeux méritent d'être mis en débat sans tarder.
Premier enjeu. Le rôle de l'Etat dans l'élaboration de la norme sociale. Quel doit être le champ de compétences et donc d'intervention de l'Etat ? Quel doit être le champ de compétences des partenaires sociaux ? Peut-on élargir l'espace du contrat ? Comment garantir l'autonomie de la négociation collective ? Les événements récents montrent la nécessité de disposer de règles du jeu claires. Tentons de les définir ensemble !
Deuxième enjeu : le marché du travail. Le marché du travail en France fonctionne mal. Comment le dynamiser demanderont certains ? comment le sécuriser diront d'autres ? comment y accéder tout simplement ? Engageons ensemble la réflexion sur toutes les précarités et sur toutes les flexibilités, à partir de la remise à plat de l'assurance chômage, à partir d'une évaluation du contrat de travail et en particulier de la séparabilité, et à partir de l'examen des propositions de sécurisation des parcours.
Troisième enjeu : la situation économique de la France. Le social et l'économique ne sont pas ennemis l'un de l'autre, l'économique et le financier non plus. Avançons dans un diagnostic partagé de la situation économique de notre pays. Echangeons nos points de vue sur une série d'indicateurs clés, sur leur définition et leur interprétation.
Prouvons tous comme vous le faites vous même chaque jour que la pensée et l'action , pour être justes, ne vont pas l'une sans l'autre. Pratiquons la délibération sociale avec le sérieux et l'enthousiasme que mérite un projet au service de notre pays.Source http://www.medef.fr, le 17 juillet 2006