Texte intégral
Q - Monsieur le Ministre, le président Chirac a critiqué l'attitude de l'Europe dans la crise du Liban. Qu'est-ce que la France attendait de ses partenaires européens ?
R - L'Union européenne doit devenir une Europe politique et nous avons fait beaucoup de progrès dans la Politique étrangère et de sécurité commune. Mais il est vrai, si l'on regarde les événements depuis le début de la crise israélo-libanaise, que les uns et les autres ont pu être amenés à réagir un peu personnellement. Il n'y a pas eu une image, un visage européen qui s'est exprimé.
J'ai vu avec plaisir, à la fin du mois de juillet, que mes homologues européens se ralliaient aux positions françaises. Je crois qu'il faut tirer deux leçons de cette crise : d'une part, le succès diplomatique de l'Europe, puisque c'est l'Union européenne qui forme la colonne vertébrale de la FINUL renforcée et, d'autre part, un manque de rapidité, de réactivité politique.
Q - Pour parvenir à cela, même si ce n'est qu'un projet, sera-t-il mieux que les positions de l'Union européenne prises au niveau de la politique extérieure soient votées à la majorité qualifiée par exemple ?
R - C'est le grand sujet de la Constitution. C'est aussi le poste du ministre des Affaires étrangères européen dont vous parlez.
Ce qui est sûr, c'est que si l'Union européenne veut, demain, jouer un rôle politique à l'échelle mondiale, ce que nous souhaitons, à un niveau politique, il faudra, en effet, qu'il y ait une plus grande rapidité de réaction. Dans ce cas particulier, ce n'est pas la majorité qualifiée qui aurait changé les choses, car la plupart des partenaires étaient d'accord.
Q - Retournons au Liban. Dans un pays comme celui-ci, une situation avec une organisation politique armée par le Hezbollah sur son territoire, est-ce viable ?
R - Je crois que le désarmement des milices et en particulier du Hezbollah se fera à partir de deux éléments : le déploiement de l'armée libanaise au Sud-Liban qui peut, si elle trouve des armes, les prendre - M. Nabih Berri, le président du Parlement libanais me l'a dit lorsque je suis allé à Beyrouth à plusieurs reprises - et par ailleurs, le fait qu'il y ait une sorte de progressivité dans le passage du mouvement armé Hezbollah au parti politique Hezbollah.
Q - On peut penser que ce sera difficile car l'une des conséquences de cette guerre est que le Hezbollah a gagné beaucoup de notoriété, pas seulement au Liban mais aussi dans le monde arabe et musulman.
R - Il y a une radicalisation progressive de l'opinion publique de part et d'autre, que ce soit dans les pays arabes ou au niveau israélien. Je suis très préoccupé par cette radicalisation parce qu'elle peut, à un moment donné, se servir du sentiment d'humiliation, de pauvreté, du fossé qui se creuse entre l'Occident, d'un côté, et ces pays, de l'autre, en termes d'éducation, de santé publique et tout simplement du niveau de vie, pour radicaliser encore plus les mouvements. C'est ainsi qu'est né le Hamas, c'est comme cela qu'existe le Hezbollah.
Q - L'une des conséquences de ce conflit, c'est le retour des forces libanaises pro-syriennes. Dans ce contexte, la France maintiendra-t-elle sa position de fermeté à l'égard de la Syrie ?
R - Nous avons une position internationale sur cette région du monde, c'est la résolution 1595 qui a été votée à l'unanimité du Conseil de sécurité des Nations unies, y compris par le représentant de la Ligue arabe. Il s'agit tout simplement de faire une Commission d'enquête judiciaire internationale pour savoir qui est responsable des assassinats de plusieurs personnalités du monde politique, le Premier ministre Rafic Hariri, mais aussi des personnalités du monde politique parlementaire ou encore du monde journalistique qui ont eu lieu depuis plusieurs mois au Liban.
Le juge Brammertz travaille. Il faut que les autorités syriennes, comme les autorités libanaises ou toute autre autorité, les responsables politique du monde, jouent le jeu en toute transparence et en toute vérité. Nous devons savoir qui a tué ces personnalités.
Q - Israël maintient son blocus aérien et maritime sur le Liban. Est-ce justifié selon vous ?
R - Je demande aux autorités israéliennes de lever l'embargo sur l'aéroport de Beyrouth et les ports libanais. Il ne peut pas y avoir de reconstruction politique, il ne peut pas y avoir de redémarrage économique du Liban avec un blocus.
Q - La France votera-t-elle pour les sanctions à l'ONU contre l'Iran si Téhéran rejette la demande de la communauté internationale d'arrêter son programme d'enrichissement de l'uranium ?
R - J'entends que les Iraniens ont envie de mettre en place des négociations ou des discussions. Je tiens à dire ici que la France souhaite aussi entamer un dialogue avec les Iraniens, à condition que ce soit un dialogue concret, transparent et constructif avec nos partenaires. Cela ne veut pas dire que nous ne mettons pas la suspension aussi comme condition, mais il est important, dans la mesure où les Iraniens veulent dialoguer, de le faire avec eux. En effet, la France fera tout pour éviter une confrontation. Il ne faut pas que la communauté internationale puisse se diviser, se couper en deux car alors, ce serait une victoire pour les Iraniens.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1er septembre 2006
R - L'Union européenne doit devenir une Europe politique et nous avons fait beaucoup de progrès dans la Politique étrangère et de sécurité commune. Mais il est vrai, si l'on regarde les événements depuis le début de la crise israélo-libanaise, que les uns et les autres ont pu être amenés à réagir un peu personnellement. Il n'y a pas eu une image, un visage européen qui s'est exprimé.
J'ai vu avec plaisir, à la fin du mois de juillet, que mes homologues européens se ralliaient aux positions françaises. Je crois qu'il faut tirer deux leçons de cette crise : d'une part, le succès diplomatique de l'Europe, puisque c'est l'Union européenne qui forme la colonne vertébrale de la FINUL renforcée et, d'autre part, un manque de rapidité, de réactivité politique.
Q - Pour parvenir à cela, même si ce n'est qu'un projet, sera-t-il mieux que les positions de l'Union européenne prises au niveau de la politique extérieure soient votées à la majorité qualifiée par exemple ?
R - C'est le grand sujet de la Constitution. C'est aussi le poste du ministre des Affaires étrangères européen dont vous parlez.
Ce qui est sûr, c'est que si l'Union européenne veut, demain, jouer un rôle politique à l'échelle mondiale, ce que nous souhaitons, à un niveau politique, il faudra, en effet, qu'il y ait une plus grande rapidité de réaction. Dans ce cas particulier, ce n'est pas la majorité qualifiée qui aurait changé les choses, car la plupart des partenaires étaient d'accord.
Q - Retournons au Liban. Dans un pays comme celui-ci, une situation avec une organisation politique armée par le Hezbollah sur son territoire, est-ce viable ?
R - Je crois que le désarmement des milices et en particulier du Hezbollah se fera à partir de deux éléments : le déploiement de l'armée libanaise au Sud-Liban qui peut, si elle trouve des armes, les prendre - M. Nabih Berri, le président du Parlement libanais me l'a dit lorsque je suis allé à Beyrouth à plusieurs reprises - et par ailleurs, le fait qu'il y ait une sorte de progressivité dans le passage du mouvement armé Hezbollah au parti politique Hezbollah.
Q - On peut penser que ce sera difficile car l'une des conséquences de cette guerre est que le Hezbollah a gagné beaucoup de notoriété, pas seulement au Liban mais aussi dans le monde arabe et musulman.
R - Il y a une radicalisation progressive de l'opinion publique de part et d'autre, que ce soit dans les pays arabes ou au niveau israélien. Je suis très préoccupé par cette radicalisation parce qu'elle peut, à un moment donné, se servir du sentiment d'humiliation, de pauvreté, du fossé qui se creuse entre l'Occident, d'un côté, et ces pays, de l'autre, en termes d'éducation, de santé publique et tout simplement du niveau de vie, pour radicaliser encore plus les mouvements. C'est ainsi qu'est né le Hamas, c'est comme cela qu'existe le Hezbollah.
Q - L'une des conséquences de ce conflit, c'est le retour des forces libanaises pro-syriennes. Dans ce contexte, la France maintiendra-t-elle sa position de fermeté à l'égard de la Syrie ?
R - Nous avons une position internationale sur cette région du monde, c'est la résolution 1595 qui a été votée à l'unanimité du Conseil de sécurité des Nations unies, y compris par le représentant de la Ligue arabe. Il s'agit tout simplement de faire une Commission d'enquête judiciaire internationale pour savoir qui est responsable des assassinats de plusieurs personnalités du monde politique, le Premier ministre Rafic Hariri, mais aussi des personnalités du monde politique parlementaire ou encore du monde journalistique qui ont eu lieu depuis plusieurs mois au Liban.
Le juge Brammertz travaille. Il faut que les autorités syriennes, comme les autorités libanaises ou toute autre autorité, les responsables politique du monde, jouent le jeu en toute transparence et en toute vérité. Nous devons savoir qui a tué ces personnalités.
Q - Israël maintient son blocus aérien et maritime sur le Liban. Est-ce justifié selon vous ?
R - Je demande aux autorités israéliennes de lever l'embargo sur l'aéroport de Beyrouth et les ports libanais. Il ne peut pas y avoir de reconstruction politique, il ne peut pas y avoir de redémarrage économique du Liban avec un blocus.
Q - La France votera-t-elle pour les sanctions à l'ONU contre l'Iran si Téhéran rejette la demande de la communauté internationale d'arrêter son programme d'enrichissement de l'uranium ?
R - J'entends que les Iraniens ont envie de mettre en place des négociations ou des discussions. Je tiens à dire ici que la France souhaite aussi entamer un dialogue avec les Iraniens, à condition que ce soit un dialogue concret, transparent et constructif avec nos partenaires. Cela ne veut pas dire que nous ne mettons pas la suspension aussi comme condition, mais il est important, dans la mesure où les Iraniens veulent dialoguer, de le faire avec eux. En effet, la France fera tout pour éviter une confrontation. Il ne faut pas que la communauté internationale puisse se diviser, se couper en deux car alors, ce serait une victoire pour les Iraniens.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1er septembre 2006