Déclaration de M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, sur l'augmentation de l'espérance de vie et le vieillissement de la population, Paris le 30 novembre 2006.

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Circonstance : 13èmes rencontres parlementaires sur la longévité "Longévité et innovation technologique" à Paris le 30 novembre 2006

Texte intégral

Monsieur le Député (Denis JACQUAT),
Mesdames, Messieurs,
Le défi de la longévité à l'échelle de l'histoire est un phénomène nouveau. Nous sommes confrontés à un véritable « tsunami » démographique. Aujourd'hui, les personnes de plus de 85 ans sont un peu plus d'un million et dans dix ans, elles seront près du double. Pour la première fois, quatre générations et bientôt cinq, pourrons vivre ensemble. C'est un véritable enjeu de société.
J'entends dire trop souvent que le vieillissement, c'est la dépendance. Pas forcément. La dépendance n'est pas une fatalité. L'espérance de vie augmente en France d'un trimestre par an, c'est vrai. Mais l'espérance de vie dans de bonnes conditions de santé progresse plus vite encore. Nous vieillissons mieux, et cette tendance s'accentue. Savez-vous qu'aujourd'hui en France plus de la moitié des hommes de plus de 90 ans sont autonomes ? C'est la preuve que notre système sanitaire et social est une réussite. Et nous pouvons faire mieux.
C'est pour favoriser un vieillissement de qualité que vous avez décidé de travailler, lors de ces treizièmes rencontres parlementaires, sur le thème de la longévité et des nouvelles technologies de l'information et de la communication. C'est un sujet passionnant. Passionnant parce que, dans ce domaine, nous devons être curieux et aller voir ce que font nos partenaires européens confrontés au même défi démographique. Passionnant parce que les technologies les plus innovantes peuvent être mises au service du grand âge, c'est-à-dire au service de l'homme au moment où sa fragilité s'accentue. Passionnant enfin parce que, dans ce domaine, beaucoup reste à inventer.
Je voudrais d'abord aborder avec vous un phénomène récent : l'appropriation, par nos concitoyens âgés, des nouvelles technologies.
. Nous constatons aujourd'hui l'émergence d'un nouvel âge actif. Par leur implication dans la vie de la cité, les personnes âgées apportent une expérience incomparable que nous ne pouvons pas négliger. Être actif, c'est rester en forme plus longtemps, c'est éviter les risques de désocialisation et conjurer l'isolement.
- Au premier rang de ces activités, bien sûr, il y a le bénévolat. Sans celles et ceux que l'on appelle les « seniors », le monde associatif de notre pays s'effondrerait. Toutes les associations me le disent. Parmi les 60-70 ans, une personne sur trois est engagée dans une activité bénévole. Et nous avons pris des mesures, lors de la Conférence de la Famille 2006, pour encourager le bénévolat.
. Être actif, c'est aussi avoir des loisirs, partir en vacances.
- Les achats effectués sur l'Internet par les 60-70 ans, qu'il s'agisse de billets de train, de billets d'avion ou de séjours de vacances, connaissent une véritable explosion.
- Les jeunes retraités sont parmi les plus importants consommateurs de produits informatiques ou de nouvelles technologies.
. Mais être actif, ne l'oublions pas, c'est aussi être en lien avec sa famille et avec ses proches. A cet égard, nous devons tout mettre en oeuvre pour éviter qu'une fracture technologique s'ajoute à une différence d'âge.
- Les personnes de 70 ans ont souvent eu moins d'enfants que leurs parents. Et ces enfants devenus adultes vivent loin d'eux. Les liens se distendent. Il est alors essentiel de renforcer ces solidarités naturelles. Les nouvelles technologies, au travers notamment des messageries électroniques, sont ici un auxiliaire indispensable.
. Pour accompagner ce mouvement et pour le favoriser, nous devons rendre ces technologies encore plus accessibles. Les constructeurs informatiques et les opérateurs de téléphonie prennent conscience de cette nécessaire adaptation aux personnes âgées ou handicapées.
- Tous ces nouveaux produits doivent être simples, ergonomiques et fiables.
- Je pense à la téléphonie mobile. Plusieurs opérateurs ont proposé des téléphones au clavier plus large.
- Je pense à un ordinateur au clavier plus accessible, pour lequel chaque touche correspond à une unique fonction. Ce produit, conçu et commercialisé par une société française, connaît un franc succès.
- Ces initiatives doivent être encouragées.
Je voudrais ensuite vous dire à quel point les nouvelles technologies sont susceptibles de rendre service à nos concitoyens les plus âgés.
. Deux domaines principaux vont se développer fortement dans les années à venir grâce aux nouvelles technologies.
- Je pense à la télé-prévention médicale, particulièrement en milieu rural. Les professionnels de santé seront ainsi plus efficaces, et les personnes âgées plus autonomes.
- Je pense aussi à la télé-détection d'événements dangereux pour une personne fragilisée par l'âge, comme l'oubli d'un médicament important. Ainsi, l'on est parvenu récemment à intégrer un ordinateur dans une boîte à pharmacie, qui vérifie que les médicaments ont bien été pris. Et si le patient se trompe de médicaments, une sonnerie l'avertit de son erreur.
. Les nouvelles technologies vont donc améliorer l'autonomie des personnes. Cette amélioration est rendue possible par le développement de la gérontechnologie, une discipline nouvelle consacrée à l'usage des nouvelles technologies dans le champ du vieillissement.
- Il existe ainsi depuis peu un téléphone aide-mémoire destiné aux personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer. Ce téléphone affiche automatiquement la photo de l'appelant et rappelle à la personne âgée l'historique de ses communications.
- Il y a aussi des téléphones avec une touche bien visible, correspondant à un appel
d'urgence.
. Les nouvelles technologies vont ensuite faciliter le rôle de l'entourage et de la famille. Le nombre des aidants traditionnels, les enfants ou les petits-enfants, devrait diminuer, pour des raisons démographiques et d'éclatement géographique. L'enjeu, c'est donc de restaurer des liens et une attention vigilante. C'est aussi de pouvoir prévenir les secours d'un accident, même si l'on est loin du lieu où il survient.
- Je pense, à cet égard, aux nouveaux revêtements de sol, capables de suivre les mouvements des personnes qui marchent dessus, et de donner l'alarme si elles tombent.
- Je pense aussi aux nouveaux lits capables de détecter des modifications anormales
dans la respiration de la personne âgée et d'alerter automatiquement les services médicaux compétents.
. Ainsi, le maintien à domicile, qui est le souhait de beaucoup de nos concitoyens, est rendu plus facile. C'est une réelle opportunité pour venir compléter l'aide humaine, toujours indispensable.
- La technologie, si elle est employée judicieusement, peut améliorer de manière décisive la qualité de vie des personnes âgées en leur permettant de rester chez elles plus longtemps, et en leur offrant un suivi médical à la fois plus souple et plus efficace.
. De ces expériences, nous devons tirer des enseignements simples.
- Tout d'abord, nous savons désormais que moins la technologie est intrusive, plus elle peut se fondre dans l'environnement des personnes âgées et plus les résultats de ces expérimentations sont positifs.
- Nous devons donc rendre la technologie plus transparente, plus diffuse et la plus intuitive possible.
- Ensuite, nous devons prendre en compte les capacités des personnes âgées et ne pas en faire des sujets passifs, ce qui augmenterait encore leur niveau de dépendance.
- Enfin, il faut leur procurer une aide adaptée le plus possible à leurs besoins réels, à leur psychologie, à leur physiologie, et susceptible d'évoluer. La technologie au service de la longévité doit être une technologie évolutive.
Mesdames, Messieurs,
Vous avez de la chance ! Vous vous apprêtez, aujourd'hui, à travailler sur un sujet novateur et passionnant. La longévité et les nouvelles technologies sont un véritable enjeu de société. Beaucoup reste à inventer pour améliorer la vie des personnes âgées, pour favoriser la cohésion sociale, pour réduire la dépendance.
Car tout ce qui peut aider nos concitoyens les plus fragiles doit être résolument encouragé. Et les nouvelles technologies de l'information et de la communication ont à cet égard un rôle essentiel à jouer. Un rôle au service de la dignité de la personne.
Je vous remercie.Source http://www.personnes-agees.gouv.fr, le 30 novembre 2006