Entretien de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, avec France Inter le 24 décembre 2006, sur le dossier nucléaire iranien, notamment le vote de sanctions à l'ONU contre l'Iran.

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Média : France Inter

Texte intégral

Q - Première réaction officielle française, elle émane du ministre des Affaires étrangères. En exclusivité pour France-Inter, Philippe Douste-Blazy est l'invité de ce journal. Philippe Douste-Blazy, bonjour...
R - Bonjour.
Q - Philippe Douste-Blazy, d'abord, la réaction française au vote intervenu hier au conseil de sécurité des Nations unies, avec les sanctions décrétées contre Téhéran.
R - Nous nous étions mis d'accord, depuis maintenant plusieurs semaines, avec les partenaires du Conseil de Sécurité des Nations unies pour voter des sanctions. C'est fait depuis hier soir, à l'unanimité. Et je me félicite de cette résolution 1737 parce que, conformément à nos engagements antérieurs, nous avons pris des sanctions à l'égard de l'Iran à la suite du refus de Téhéran de suspendre ses activités nucléaires sensibles. Comme vous le savez, il s'agit essentiellement de l'enrichissement et du retraitement de l'uranium.
Q - Philippe Douste-Blazy, des mesures efficaces selon vous ?
R - Ce sont des mesures qui visent à empêcher toute contribution à l'Iran de l'extérieur, sur quelque forme que ce soit, pour l'aider à mener des activités nucléaires sensibles et balistiques. La résolution impose aussi des sanctions financières à l'encontre des organismes et des individus qui sont responsables de ces activités nucléaires et balistiques. Enfin, la résolution renforce les pouvoirs de l'Agence internationale pour l'Energie atomique afin qu'elle puisse vérifier, très régulièrement et très minutieusement, la nature du programme nucléaire iranien.
Q - D'ores et déjà Téhéran a décidé de réduire ou de restreindre les actions de l'AIEA sur place. Qu'en pensez-vous ?
R - Notre but est évidemment de convaincre l'Iran de se conformer à ses engagements internationaux. Et l'Iran est donc, maintenant, face à un choix clair : soit il coopère avec la communauté internationale, soit il poursuit ses activités d'enrichissement et de retraitement, et alors, il fera face à un isolement croissant. Je ne voudrais pas que l'Iran rentre dans une spirale qui serait celle de l'isolement. J'invite au contraire les autorités iraniennes à faire le choix du dialogue et à revenir à la table des négociations.
Q - Aujourd'hui, Mahmoud Ahmadinejad, le président iranien, a déjà répondu indirectement à la décision des Nations unies puisqu'il à qualifié de "brouillon" cette résolution adoptée hier par le Conseil de sécurité ; et il estime en outre que les sanctions contenues dans le texte n'empêcheraient pas Téhéran de poursuivre son programme nucléaire. Est-ce déjà une réponse, à votre avis, définitive ?
R - Je ne peux pas penser un seul instant que l'ensemble des autorités iraniennes puissent décider de l'isolement total de leur pays. Je crois au contraire que leur intérêt est de se tourner vers la négociation, pour que, d'un côté, nous puissions reprendre des discussions avec eux, et de l'autre, qu'ils cessent leurs activités nucléaires sensibles. Je rappelle que la Russie et la Chine ont voté ces sanctions. Je rappelle qu'il y a eu unanimité de l'ensemble du Conseil de sécurité. Unanimité et fermeté aboutissent, si l'Iran ne le comprenait pas, à l'isolement de ce pays.
Q - Philippe Douste-Blazy, une dernière question : Téhéran s'est donné jusqu'au mois de juin pour installer un certain nombre de centrifugeuses, pour pouvoir aboutir sur son programme nucléaire. Vous pensez que c'est également le délai du calendrier pour relancer la diplomatie ?
R - Je pense que, plus que jamais, après une résolution comme celle qui a été votée à l'unanimité, et qui est ferme, le temps est venu de laisser place à la négociation. Il est nécessaire d'avoir une discussion. Oui, bien sûr, à l'énergie nucléaire civile, puisque l'Iran a signé le Traité de non-prolifération ; mais non à tout ce qui pourrait être un programme nucléaire ou balistique qui ne serait pas pacifique.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 décembre 2006