Texte intégral
N. Demorand - Journée spéciale sur France Inter sur les douze années de J. Chirac à l'Elysée. Vous qui avez été son ministre de la Défense depuis 2002, quel bilan faites vous ?
R - Je crois que c'est un bilan qui sera jugé comme extrêmement positif, une fois que se seront apaisées toutes les agitations et en même temps toutes les critiques habituelles en politique. D'abord ce que je note, c'est que le président de la République a fait tenir les engagements qu'il avait pris à l'égard des Français, quasiment tous les engagements. Et d'ailleurs, ce qui s'est passé hier au Congrès était aussi dans la ligne de ses engagements tenus. Mais surtout, moi qui connais J. Chirac depuis longtemps, qui étais son ministre de la Défense, qui a été une première fois son secrétaire d'Etat à l'Enseignement, je dis que ce qu'il aura apporté c'est essentiellement trois choses. D'abord, il aura permis à la France de tenir toute sa place et tout son rang à l'international et de reprendre un vrai rôle de premier plan. J. Chirac sera - il a encore des choses à faire, mais il sera - celui qui aura éviter à la France d'entrer dans la guerre d'Irak et qui probablement, aura également évité que ne se crée à cette occasion ce vaste affrontement entre le monde arabe et le monde occidental, que certains et notamment ceux qui sont derrière le terrorisme, auraient souhaité mettre en oeuvre.
Q - Cela c'est le premier point : éviter une guerre et un affrontement de civilisations.
R - Voilà et permettre à la France de tenir totalement son rang. Moi ce qui me frappe, c'est que quand je rencontre le président chinois ou la présidente chilienne, quand je vais aux Etats-Unis ou en Afrique, on demande toujours quelle est la position de la France sur tel point et il y a une grande attente à l'égard de la France. Le deuxième point, qui me paraît très important, c'est que J. Chirac c'est aussi le Président qui a eu une vraie vision de l'évolution du monde. Sa connaissance de l'Antiquité, de la préhistoire lui donne cette profondeur historique sans laquelle on ne peut pas juger de ce qui se passe aujourd'hui et en même temps, il se projette dans l'avenir. Son engagement pour le développement durable, pour ce que la planète que nous allons laisser à nos enfants est fondée là-dessus et je crois effectivement que ce sont les grands enjeux de demain. Et puis le troisième élément, c'est un sens humain de la présidence. J. Chirac remet toujours l'humain au coeur de toutes les politiques. Cela se traduit par tout ce qui a été fait, à la fois lorsqu'il était au Gouvernement, et comme Président, par exemple, pour les personnes handicapées, pour les personnes âgées, mais également toute cette sensibilité qu'il a aux difficultés du monde, aux difficultés des jeunes, cette volonté de réunir tous les Français dans une France qui soit un peu un modèle de cette unité, de cette capacité de vivre ensemble.
Q - Les chroniqueurs politiques soulignent que J. Chirac a passé sa vie à changer d'avis notamment sur l'Europe, sur le libéralisme, sur un tas de petits dossiers. Qu'est-ce qui fait l'unité du personnage par delà ses changements d'orientation parfois radicaux ?
R - Justement, je crois que ce sont les trois données que je viens de rappeler. C'est-à-dire, le sens de l'histoire et la volonté de préserver l'avenir, en même temps, la volonté de mettre l'humain au coeur de tout cela. Je pense que la cohérence justement c'est maintenant qu'on commence à la voir. Il peut y avoir du pragmatisme, du réajustement dans un certain nombre de cas, c'est aussi sa capacité d'écoute. Mais finalement je crois que quand on regarde la totalité, il y a une grande unité, y compris d'ailleurs sur l'Europe. Puisque l'Europe c'est aussi, pour J. Chirac, le moyen de permettre à la France et à l'ensemble des pays qui sont autour d'elle, de pouvoir peser dans une évolution du monde où nous voyons de très grands pôles se développer et émerger sur le plan économique comme sur le plan démographique.
Q - N. Sarkozy est-il son héritier ?
R - Je crois qu'en politique il n'y a jamais d'héritier, que chacun tire sa propre conviction, tire effectivement sa connaissance son savoir faire en regardant les autres, c'est quelque chose de tout à fait normal. Mais il est évident, et d'ailleurs heureusement, qu'il y a des personnalités qui sont extrêmement différentes.
Q - Mais plus personne n'est chiraquien, plus personne en s'en réclame ?
R - Non, je crois qu'il faut vraiment regarder deux choses, qu'il faut à la fois regarder l'accroche politique et qu'il faut d'autre part regarder les valeurs. D'abord, dire que plus personne n'est chiraquien, je pense que ça n'est pas tout à fait exact et d'ailleurs lorsque vous regardez, y compris un certain nombre d'enquêtes, auprès des Français, vous voyez que commencent à venir, après les périodes d'irritation qui ont toujours lieu parce qu'on dit que c'est toujours la faute de celui qui est au pouvoir si tout ne va bien, eh bien aujourd'hui de plus en plus...
Q - Mais là, le candidat sortant se réclame de la "rupture" et non pas de la continuité avec un personnage politique qui vient régner douze ans quand même, de gouverner douze ans sur la France.
R - Je crois que vous pouvez noter que le terme de "rupture" n'est plus employé maintenant dans le vocabulaire, non seulement de N. Sarkozy, mais également de son entourage. Et c'est moins un problème de rupture que de toute façon, un constat qu'effectivement il y a des changements et que ces changements impliquent un certain nombre d'orientations, simplement pour tenir compte d'une réalité qui est une réalité au quotidien. Mais comme je vous le disais tout à l'heure, pour ma part, je crois que faire de la politique à un certain niveau, cela implique d'avoir des valeurs et des convictions profondes et je crois que les valeurs et les convictions profondes que porte J. Chirac et dont nous voyons la totale cohérence, ce sont des valeurs qui sont utiles pour notre pays, qui sont utiles également pour faire face aux évolutions du monde, que ce soit dans le domaine de la sécurité, que ce soit dans le domaine de l'économie, que ce soit dans le domaine de l'équilibre politique global.
Q - Vous avez regardé la télévision hier soir ?
R - J'ai regardé tardivement la télévision hier soir puisqu'il y avait une réunion, un dîner des parlementaires de l'UMP. Vous savez que je suis toujours très proche des parlementaires, ils m'avaient invitée et j'ai passé un long moment avec eux. Ce qui fait que j'ai regardé la télévision. Allez, dites tout, vous me demandez si j'ai regardé Mme Royal ? J'en ai vu effectivement à peu près la dernière demi heure.
Q - Votre réaction à cette prestation télévisée et puis à ce qui a été dit notamment sur les retraites, les salaires, les valeurs, les entreprises et j'en passe ?
R - Ma réaction c'est que d'abord Mme Royal ne pourra pas dire qu'on a été dur avec elle ou agressif avec elle. J'ai trouvé au contraire que c'était quelque chose qui était plutôt très respectueux à cet égard. Maintenant si nous regardons sur le fond, ce que je note, c'est essentiellement trois choses : la première c'est que Mme Royal dit oui un peu à tout le monde...
Q - C'est la règle visiblement dans cette campagne, pour tout le monde.
R - Ce qui est la règle... Oui, ce que je ne trouve pas forcément bien. Je crois que les Français ont droit à avoir la vérité parce que d'abord cette vérité, ils la sentent et ne pas leur dire la vérité, c'est entretenir l'anxiété, l'angoisse qui est la leur, parce qu'ils savent bien que le monde bouge et qu'on ne peut pas dire oui à tout. Et donc ce sont dans un certain nombre de cas, des mensonges que de dire oui à tout. Vouloir être responsable, vouloir gouverner, vouloir présider un pays, c'est dire aussi dans un certain nombre de cas aux gens : "Vous vous trompez !" ou c'est savoir leur dire : "Ce que vous dites n'est pas vrai." Le résultat d'ailleurs c'est que Mme Royal fait des promesses qu'elle ne chiffre pas parce qu'elle est incapable de les chiffrer, elle est incapable de dire cette vérité de ce que coûterait tout ce qu'elle promet aux uns et aux autres. Et moi je crois qu'on doit aux Français la vérité également sur les chiffrages. Nous l'avons fait en ce qui nous concerne, elle ne le fait pas. Je pense que c'est de sa part, une incohérence, une légèreté et je le regrette, dans ce domaine comme dans l'absence de perspective qu'elle a de la place de la France dans le monde. Nous ne sommes pas seuls, nous sommes en Europe, nous sommes dans le monde, il y a des réalités qu'on ne peut pas ignorer, or elle semble les ignorer.
Q - Question piège, pour finir : combien avons nous de porte-avions en France ?
R - Je crois que le problème du porte-avions est justement très caractéristique des insuffisances de Mme Royal.
Q - Vous ne m'avez pas donné le chiffre !
R - Nous avons aujourd'hui le Charles de Gaulles qui est un porte-avions qui nous permet d'être libre de nous défendre et d'amener notre force aérienne n'importe où dans le monde, sans dépendre des autres. Ce porte-avions nécessite régulièrement un entretien, comme votre voiture, sauf que c'est un entretien très long. Si vous voulons être capables d'assumer notre protection en même temps que notre rôle international en permanence, il faut un deuxième porte-avions. Dire le contraire, c'est irresponsable et c'est fallacieux.Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 21 février 2007
R - Je crois que c'est un bilan qui sera jugé comme extrêmement positif, une fois que se seront apaisées toutes les agitations et en même temps toutes les critiques habituelles en politique. D'abord ce que je note, c'est que le président de la République a fait tenir les engagements qu'il avait pris à l'égard des Français, quasiment tous les engagements. Et d'ailleurs, ce qui s'est passé hier au Congrès était aussi dans la ligne de ses engagements tenus. Mais surtout, moi qui connais J. Chirac depuis longtemps, qui étais son ministre de la Défense, qui a été une première fois son secrétaire d'Etat à l'Enseignement, je dis que ce qu'il aura apporté c'est essentiellement trois choses. D'abord, il aura permis à la France de tenir toute sa place et tout son rang à l'international et de reprendre un vrai rôle de premier plan. J. Chirac sera - il a encore des choses à faire, mais il sera - celui qui aura éviter à la France d'entrer dans la guerre d'Irak et qui probablement, aura également évité que ne se crée à cette occasion ce vaste affrontement entre le monde arabe et le monde occidental, que certains et notamment ceux qui sont derrière le terrorisme, auraient souhaité mettre en oeuvre.
Q - Cela c'est le premier point : éviter une guerre et un affrontement de civilisations.
R - Voilà et permettre à la France de tenir totalement son rang. Moi ce qui me frappe, c'est que quand je rencontre le président chinois ou la présidente chilienne, quand je vais aux Etats-Unis ou en Afrique, on demande toujours quelle est la position de la France sur tel point et il y a une grande attente à l'égard de la France. Le deuxième point, qui me paraît très important, c'est que J. Chirac c'est aussi le Président qui a eu une vraie vision de l'évolution du monde. Sa connaissance de l'Antiquité, de la préhistoire lui donne cette profondeur historique sans laquelle on ne peut pas juger de ce qui se passe aujourd'hui et en même temps, il se projette dans l'avenir. Son engagement pour le développement durable, pour ce que la planète que nous allons laisser à nos enfants est fondée là-dessus et je crois effectivement que ce sont les grands enjeux de demain. Et puis le troisième élément, c'est un sens humain de la présidence. J. Chirac remet toujours l'humain au coeur de toutes les politiques. Cela se traduit par tout ce qui a été fait, à la fois lorsqu'il était au Gouvernement, et comme Président, par exemple, pour les personnes handicapées, pour les personnes âgées, mais également toute cette sensibilité qu'il a aux difficultés du monde, aux difficultés des jeunes, cette volonté de réunir tous les Français dans une France qui soit un peu un modèle de cette unité, de cette capacité de vivre ensemble.
Q - Les chroniqueurs politiques soulignent que J. Chirac a passé sa vie à changer d'avis notamment sur l'Europe, sur le libéralisme, sur un tas de petits dossiers. Qu'est-ce qui fait l'unité du personnage par delà ses changements d'orientation parfois radicaux ?
R - Justement, je crois que ce sont les trois données que je viens de rappeler. C'est-à-dire, le sens de l'histoire et la volonté de préserver l'avenir, en même temps, la volonté de mettre l'humain au coeur de tout cela. Je pense que la cohérence justement c'est maintenant qu'on commence à la voir. Il peut y avoir du pragmatisme, du réajustement dans un certain nombre de cas, c'est aussi sa capacité d'écoute. Mais finalement je crois que quand on regarde la totalité, il y a une grande unité, y compris d'ailleurs sur l'Europe. Puisque l'Europe c'est aussi, pour J. Chirac, le moyen de permettre à la France et à l'ensemble des pays qui sont autour d'elle, de pouvoir peser dans une évolution du monde où nous voyons de très grands pôles se développer et émerger sur le plan économique comme sur le plan démographique.
Q - N. Sarkozy est-il son héritier ?
R - Je crois qu'en politique il n'y a jamais d'héritier, que chacun tire sa propre conviction, tire effectivement sa connaissance son savoir faire en regardant les autres, c'est quelque chose de tout à fait normal. Mais il est évident, et d'ailleurs heureusement, qu'il y a des personnalités qui sont extrêmement différentes.
Q - Mais plus personne n'est chiraquien, plus personne en s'en réclame ?
R - Non, je crois qu'il faut vraiment regarder deux choses, qu'il faut à la fois regarder l'accroche politique et qu'il faut d'autre part regarder les valeurs. D'abord, dire que plus personne n'est chiraquien, je pense que ça n'est pas tout à fait exact et d'ailleurs lorsque vous regardez, y compris un certain nombre d'enquêtes, auprès des Français, vous voyez que commencent à venir, après les périodes d'irritation qui ont toujours lieu parce qu'on dit que c'est toujours la faute de celui qui est au pouvoir si tout ne va bien, eh bien aujourd'hui de plus en plus...
Q - Mais là, le candidat sortant se réclame de la "rupture" et non pas de la continuité avec un personnage politique qui vient régner douze ans quand même, de gouverner douze ans sur la France.
R - Je crois que vous pouvez noter que le terme de "rupture" n'est plus employé maintenant dans le vocabulaire, non seulement de N. Sarkozy, mais également de son entourage. Et c'est moins un problème de rupture que de toute façon, un constat qu'effectivement il y a des changements et que ces changements impliquent un certain nombre d'orientations, simplement pour tenir compte d'une réalité qui est une réalité au quotidien. Mais comme je vous le disais tout à l'heure, pour ma part, je crois que faire de la politique à un certain niveau, cela implique d'avoir des valeurs et des convictions profondes et je crois que les valeurs et les convictions profondes que porte J. Chirac et dont nous voyons la totale cohérence, ce sont des valeurs qui sont utiles pour notre pays, qui sont utiles également pour faire face aux évolutions du monde, que ce soit dans le domaine de la sécurité, que ce soit dans le domaine de l'économie, que ce soit dans le domaine de l'équilibre politique global.
Q - Vous avez regardé la télévision hier soir ?
R - J'ai regardé tardivement la télévision hier soir puisqu'il y avait une réunion, un dîner des parlementaires de l'UMP. Vous savez que je suis toujours très proche des parlementaires, ils m'avaient invitée et j'ai passé un long moment avec eux. Ce qui fait que j'ai regardé la télévision. Allez, dites tout, vous me demandez si j'ai regardé Mme Royal ? J'en ai vu effectivement à peu près la dernière demi heure.
Q - Votre réaction à cette prestation télévisée et puis à ce qui a été dit notamment sur les retraites, les salaires, les valeurs, les entreprises et j'en passe ?
R - Ma réaction c'est que d'abord Mme Royal ne pourra pas dire qu'on a été dur avec elle ou agressif avec elle. J'ai trouvé au contraire que c'était quelque chose qui était plutôt très respectueux à cet égard. Maintenant si nous regardons sur le fond, ce que je note, c'est essentiellement trois choses : la première c'est que Mme Royal dit oui un peu à tout le monde...
Q - C'est la règle visiblement dans cette campagne, pour tout le monde.
R - Ce qui est la règle... Oui, ce que je ne trouve pas forcément bien. Je crois que les Français ont droit à avoir la vérité parce que d'abord cette vérité, ils la sentent et ne pas leur dire la vérité, c'est entretenir l'anxiété, l'angoisse qui est la leur, parce qu'ils savent bien que le monde bouge et qu'on ne peut pas dire oui à tout. Et donc ce sont dans un certain nombre de cas, des mensonges que de dire oui à tout. Vouloir être responsable, vouloir gouverner, vouloir présider un pays, c'est dire aussi dans un certain nombre de cas aux gens : "Vous vous trompez !" ou c'est savoir leur dire : "Ce que vous dites n'est pas vrai." Le résultat d'ailleurs c'est que Mme Royal fait des promesses qu'elle ne chiffre pas parce qu'elle est incapable de les chiffrer, elle est incapable de dire cette vérité de ce que coûterait tout ce qu'elle promet aux uns et aux autres. Et moi je crois qu'on doit aux Français la vérité également sur les chiffrages. Nous l'avons fait en ce qui nous concerne, elle ne le fait pas. Je pense que c'est de sa part, une incohérence, une légèreté et je le regrette, dans ce domaine comme dans l'absence de perspective qu'elle a de la place de la France dans le monde. Nous ne sommes pas seuls, nous sommes en Europe, nous sommes dans le monde, il y a des réalités qu'on ne peut pas ignorer, or elle semble les ignorer.
Q - Question piège, pour finir : combien avons nous de porte-avions en France ?
R - Je crois que le problème du porte-avions est justement très caractéristique des insuffisances de Mme Royal.
Q - Vous ne m'avez pas donné le chiffre !
R - Nous avons aujourd'hui le Charles de Gaulles qui est un porte-avions qui nous permet d'être libre de nous défendre et d'amener notre force aérienne n'importe où dans le monde, sans dépendre des autres. Ce porte-avions nécessite régulièrement un entretien, comme votre voiture, sauf que c'est un entretien très long. Si vous voulons être capables d'assumer notre protection en même temps que notre rôle international en permanence, il faut un deuxième porte-avions. Dire le contraire, c'est irresponsable et c'est fallacieux.Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 21 février 2007