Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Avec Thierry Breton, Renaud Dutreil et François Goulard, nous venons de réunir la première conférence sur la croissance.
Après la conférence de décembre sur l'emploi et les revenus et celle de février dernier sur les finances publiques, nous voulons affirmer une méthode de travail fondée sur le dialogue et la concertation. En rassemblant des acteurs venant de tous les horizons - élus, partenaires sociaux, acteurs économiques, experts - nous voulons construire un consensus large qui dépasse les clivages politiques. Car il y a des sujets qui appellent des débats et des controverses. Mais sur la croissance, sur l'emploi, sur le désendettement, je suis convaincu que nous avons besoin avant tout de nous rassembler pour tenir le cap de notre action. Si nous voulons franchir de nouvelles étapes, nous avons besoin de choix poursuivis sur le long terme, pendant 10 ans, pendant 15 ans. Une croissance de 3 %, un taux de chômage de 6 % et une dette publique ramenée à 55 % du PIB à l'horizon 2012, ce sont des objectifs qui doivent être aujourd'hui partagés par tous.
Ce consensus, nous en avons particulièrement besoin en matière de croissance. Parce que la croissance, ce n'est pas seulement une question économique. C'est aussi un choix de société :
Nous devons construire une croissance qui ait un sens plus large que la seule augmentation du PIB. Les Français veulent une économie dynamique, mais ils veulent aussi une économie juste, un environnement préservé, un système de santé de qualité, des services publics efficaces.
Comme pour le pouvoir d'achat, nous devons désormais disposer de nouveaux outils de mesure plus en phase avec ces aspirations. Je demande à l'Insee de mettre à la disposition de tous les Français deux ou trois indicateurs qui ne soient pas seulement des indicateurs de croissance mais également des indicateurs de progrès durable.
1. Partant de là, quelle est la situation aujourd'hui ?
D'abord, nous avons réussi à consolider la croissance. Les efforts que nous avons accomplis, avec Thierry Breton et Renaud Dutreil, pour faciliter le développement des entreprises et pour améliorer le pouvoir d'achat des salariés, la relance de l'investissement public, le désendettement, toutes ces mesures ont porté leurs fruits. En quelques années, malgré la montée du prix du pétrole, malgré le niveau de l'euro, nous sommes passés d'une croissance qui oscillait autour d'1 % à une croissance solidement établie sur un rythme de 2 %.
Devons-nous pour autant nous en satisfaire ? Certainement pas.
Si nous regardons le long terme, nous constatons que nous avons un écart structurel de croissance de l'ordre d'un point avec les Etats-Unis, la Suède ou le Royaume-Uni. Cet écart, cela veut dire des emplois et du pouvoir d'achat en moins pour les Français : avec un taux de croissance comparable à celui des Etats-Unis au cours des 15 dernières années, le salaire moyen annuel des Français serait aujourd'hui supérieur de près de 9 000 euros à ce qu'il est actuellement.
Pour combler cet écart et atteindre ces objectifs, nous avons des atouts exceptionnels. La qualité de nos infrastructures et la compétence de nos salariés font que la France est aujourd'hui l'un des pays les plus attractifs au monde. Nous sommes la troisième destination mondiale et la première destination de la zone euro pour les investissements directs étrangers. L'an dernier, ces investissements ont permis de créer 40 000 emplois, ce qui est le meilleur chiffre depuis près de 15 ans. La vigueur de notre démographie est un atout supplémentaire.
Pour autant, je sais qu'il y a des interrogations : pouvons-nous combler notre écart de croissance avec les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne sans renier ce que nous sommes ? Pouvons-nous marquer davantage de points dans la mondialisation et préserver notre modèle social fondé sur la justice et la solidarité ? Ma conviction, c'est qu'il n'y a aucune contradiction entre le dynamisme économique et la justice sociale. Comme l'a souligné Edmund Phelps, qui nous fait l'honneur de sa présence, notre modèle social est un atout dans la mondialisation. Il est un gage de justice mais aussi d'efficacité, car une société qui accompagne chacun et qui avance rassemblée, c'est une société plus forte dans la compétition économique. Pour élever encore notre croissance, appuyons-nous sur ce qui fait notre force. Poursuivons les efforts de modernisation que nous avons engagés depuis maintenant plusieurs années. La France a des réserves d'énergie et de talent qui sont encore considérables. Offrons leur la possibilité de s'exprimer davantage. C'est comme cela que nous parviendrons à faire la course en tête dans la mondialisation.
2. Pour atteindre une croissance de 3 %, nous devons donc avant tout poursuivre et enraciner dans le temps les grands choix économiques et sociaux que nous avons faits.
Le premier, c'est celui de l'emploi.
Mon gouvernement en a fait une priorité absolue. Et la politique pragmatique que nous avons menée nous a permis d'engager un véritable redressement français dans ce domaine. En 19 mois, nous sommes passés de 10,2 % à 8,6 % de chômage. Au total, cela représente 380 000 chômeurs de moins dans notre pays. Nous atteignons désormais les plus bas niveaux de chômage depuis 25 ans.
Mais nous le savons, nos concitoyens sont encore trop nombreux à être tenus à l'écart du marché du travail. Ils sont encore trop nombreux à ne pas pouvoir travailler autant qu'ils le souhaiteraient. Je pense en particulier aux femmes qui subissent des temps partiels. Je pense aux jeunes et aux seniors qui se heurtent à une véritable barrière à l'embauche. Je pense à tous ceux, notamment parmi les jeunes, qui sont prêts à échanger un peu de leur temps libre contre un peu plus de pouvoir d'achat. Cette situation est d'autant plus inacceptable que dans le même temps, certains secteurs peinent à recruter et qu'environ 500 000 emplois ne sont pas pourvus, ce qui représente autant de croissance et de pouvoir d'achat perdus pour notre économie.
Aujourd'hui, nous devons définitivement sortir des logiques malthusiennes. Si nous voulons créer davantage de richesse et consolider notre croissance, nous devons offrir du travail à tous les Français. Et nous devons leur permettre de travailler autant qu'ils le souhaitent. Les réponses, nous les connaissons. Ce sont celles que nous avons commencé à mettre en oeuvre et que nous devrons impérativement poursuivre dans les prochaines années :
Je pense à la revalorisation du travail par rapport à l'assistance, avec notamment le doublement de la prime pour l'emploi, qui représente désormais un véritable 13e mois pour les salariés au Smic.
Je pense à l'amélioration de l'orientation et de la formation professionnelle pour que chacun puisse trouver facilement un emploi et construire sa carrière tout au long de sa vie.
Je pense à la mise en place d'une véritable flexisécurité à la française qui donne plus de souplesse aux entreprises, plus de capacités d'insertion aux nouveaux entrants et qui offre des garanties fortes aux salariés. Nous avons montré que c'était possible avec les 400 000 CNE conclus fin 2006 qui ont induit, à eux seuls, plus de 50 000 emplois supplémentaires.
Je pense enfin à toutes les mesures pour permettre aux chômeurs de retrouver plus rapidement du travail. Avançons vers la fusion de l'ANPE et de l'Unedic, renforçons le suivi de la recherche d'emploi dans une logique de droits et de devoirs, rendons notre système d'allocation chômage plus généreux pour les jeunes et plus exigeant dans la reprise d'emploi. C'est comme cela que nous atteindrons 6 % de chômage à l'horizon 2010.
Le deuxième grand choix économique, c'est celui du développement de nos entreprises.
A côté de nos grands champions internationaux qui sont des leaders dans leurs secteurs et qui profitent pleinement de la mondialisation, nos PME peinent encore à se développer. Comme nous le dit le Conseil d'analyse économique que je remercie de son investissement sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres, elles se heurtent trop souvent à des effets de seuil ou à une insuffisante rentabilité. Aujourd'hui, 97 % des petites entreprises françaises ont moins de 20 salariés.
Si nous voulons produire davantage de richesses, nous devons créer un environnement encore plus favorable à l'entrée de nouvelles entreprises dans les différents secteurs de l'activité économique. Car ce sont elles qui portent le plus efficacement les idées nouvelles et les techniques innovantes. Comme nous le rappelle Edmund Phelps, ceci doit nous amener à nous interroger sur le bien-fondé de réglementations qui peuvent, parfois, freiner l'arrivée de nouveaux entrants, en particulier les jeunes entreprises et les jeunes salariés. Pour créer un environnement plus favorable à la croissance de nos PME, nous avons pris des mesures fortes. Nous avons augmenté leurs sources de financement en leur allouant 3 milliards d'euros de fonds propres et en encourageant le capital-risque. Nous avons également facilité leur accès aux marchés publics des grandes entreprises et fait reconnaître au niveau de l'Union européenne l'urgence d'un projet de "Small Business Act" pour l'Europe. Il faudra continuer le combat sur ce terrain dans les mois à venir. Avec Renaud Dutreil, nous avons mis en oeuvre des mesures fiscales spécifiques pour accompagner les entreprises à fort potentiel de croissance, les "gazelles". Enfin, nous avons largement simplifié les procédures administratives. Tout cela produit des résultats. Plus d'un million d'entreprises ont été créées en cinq ans, soit 15 % de plus que sous la précédente législature.
Vous le voyez, l'engagement qui a été depuis le début celui de mon gouvernement, c'est de donner une chance à chacun, c'est de permettre à chaque projet, à chaque idée nouvelle de s'exprimer et de réussir. Nos entreprises ont besoin qu'on continue de leur faire confiance : des règles stables et lisibles, une fiscalité adaptée, notamment au moment de leur création, un Etat qui soit à leurs côtés pour les aider à grandir et à exporter, voilà ce qui leur donnera la souplesse et la réactivité indispensable dans l'économie d'aujourd'hui.
Le troisième grand choix économique que nous avons fait, c'est celui de l'innovation.
Car l'innovation, c'est la clé de l'avenir français. Dans la bataille économique mondiale actuelle, nous ne gagnerons pas grâce à des prix plus bas que ceux des pays émergents. Nous gagnerons par des produits plus innovants. Nous gagnerons par notre savoir-faire et par notre excellence. Je vois essentiellement deux pistes pour renforcer la compétitivité de nos entreprises et leurs capacités d'innovation :
La première, c'est de poursuivre l'effort en faveur de l'éducation supérieure et de la recherche que nous avons engagé avec François Goulard notamment à travers la mise en place des réseaux thématiques de recherche avancés. Mais il faudra aller plus loin. J'ai fait récemment des propositions très concrètes pour cela : créer en 5 ans une dizaine de campus universitaires aux meilleurs standards internationaux ; donner aux universités de nouvelles sources de financement en modulant les droits d'inscription et en développant les partenariats avec les entreprises ; réformer la gouvernance des universités pour leur permettre d'être plus efficaces, plus autonomes et plus réactives. Ce sont de telles mesures qui feront de notre système d'enseignement supérieur et de recherche l'un des tout premiers dans le monde.
La deuxième piste, c'est de diffuser davantage l'innovation.
Nous le faisons depuis plusieurs années dans l'industrie pour permettre une montée en gamme de notre appareil productif, aider les entreprises à franchir de nouveaux caps technologiques et renforcer notre compétitivité industrielle. Je pense par exemple au soutien que nous apportons à Airbus, en investissant 100 millions d'euros supplémentaires dans la filière des matériaux composites.
Mais la diffusion de l'innovation doit aussi concerner l'ensemble des services et des collectivités publiques. Ces dernières représentent le quart de l'emploi et de l'activité nationale. Il y a là de formidables gisements de productivité et de croissance. Pour moi, cela veut dire essentiellement deux choses :
D'abord, un esprit ouvert à l'initiative et au changement. Les agents publics ont une volonté de service et un désir d'excellence qui font l'honneur de leur métier. Reconnaissons-les et encourageons-les davantage. Récompensons le mérite. Favorisons l'émulation dans nos établissements publics. Facilitons la mobilité au sein des administrations pour que chacun puisse donner le meilleur de lui-même et valoriser ses compétences là où elles sont le plus utiles à l'action publique.
Diffuser l'innovation dans nos services publics, c'est également développer l'administration électronique afin d'être partout plus efficace et entrer de plain pied dans l'économie de la connaissance et de l'immatériel.
Pour diffuser l'innovation dans l'industrie comme dans les services, la clé c'est de regrouper davantage nos forces et de faire travailler ensemble entreprises, universités, grandes écoles, administrations et centres de recherche. Les pôles de compétitivité ont permis d'engager le mouvement. A nous de le poursuivre au cours des prochaines années.
Mesdames, Messieurs,
Derrière les grands choix économiques que nous avons fait, il y a une conviction simple : la croissance, c'est avant tout un état d'esprit.
La croissance se gagne au jour le jour. Elle se gagne quand un jeune diplômé prolonge un projet de recherche en créant un produit innovant. Elle se gagne quand un demandeur d'emploi choisit de créer sa propre entreprise. Elle se gagne quand un patron de PME parvient à rassembler ses salariés autour d'un projet ambitieux. A chaque fois, c'est du souffle en plus pour notre économie, c'est de la croissance en plus pour les Français.
Cette envie de se battre, cette envie de construire et de réaliser ses projets, je l'ai vue partout en France, lors de chacun de mes déplacements. Alors donnons à chacun les moyens de réaliser ses ambitions, encourageons l'esprit d'entreprise, favorisons tous les talents et tous les enthousiasmes. C'est comme cela que nous construirons une croissance forte et généreuse. C'est comme cela que nous construirons un progrès durable.
Je vous remercie.Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 8 mars 2007
Avec Thierry Breton, Renaud Dutreil et François Goulard, nous venons de réunir la première conférence sur la croissance.
Après la conférence de décembre sur l'emploi et les revenus et celle de février dernier sur les finances publiques, nous voulons affirmer une méthode de travail fondée sur le dialogue et la concertation. En rassemblant des acteurs venant de tous les horizons - élus, partenaires sociaux, acteurs économiques, experts - nous voulons construire un consensus large qui dépasse les clivages politiques. Car il y a des sujets qui appellent des débats et des controverses. Mais sur la croissance, sur l'emploi, sur le désendettement, je suis convaincu que nous avons besoin avant tout de nous rassembler pour tenir le cap de notre action. Si nous voulons franchir de nouvelles étapes, nous avons besoin de choix poursuivis sur le long terme, pendant 10 ans, pendant 15 ans. Une croissance de 3 %, un taux de chômage de 6 % et une dette publique ramenée à 55 % du PIB à l'horizon 2012, ce sont des objectifs qui doivent être aujourd'hui partagés par tous.
Ce consensus, nous en avons particulièrement besoin en matière de croissance. Parce que la croissance, ce n'est pas seulement une question économique. C'est aussi un choix de société :
Nous devons construire une croissance qui ait un sens plus large que la seule augmentation du PIB. Les Français veulent une économie dynamique, mais ils veulent aussi une économie juste, un environnement préservé, un système de santé de qualité, des services publics efficaces.
Comme pour le pouvoir d'achat, nous devons désormais disposer de nouveaux outils de mesure plus en phase avec ces aspirations. Je demande à l'Insee de mettre à la disposition de tous les Français deux ou trois indicateurs qui ne soient pas seulement des indicateurs de croissance mais également des indicateurs de progrès durable.
1. Partant de là, quelle est la situation aujourd'hui ?
D'abord, nous avons réussi à consolider la croissance. Les efforts que nous avons accomplis, avec Thierry Breton et Renaud Dutreil, pour faciliter le développement des entreprises et pour améliorer le pouvoir d'achat des salariés, la relance de l'investissement public, le désendettement, toutes ces mesures ont porté leurs fruits. En quelques années, malgré la montée du prix du pétrole, malgré le niveau de l'euro, nous sommes passés d'une croissance qui oscillait autour d'1 % à une croissance solidement établie sur un rythme de 2 %.
Devons-nous pour autant nous en satisfaire ? Certainement pas.
Si nous regardons le long terme, nous constatons que nous avons un écart structurel de croissance de l'ordre d'un point avec les Etats-Unis, la Suède ou le Royaume-Uni. Cet écart, cela veut dire des emplois et du pouvoir d'achat en moins pour les Français : avec un taux de croissance comparable à celui des Etats-Unis au cours des 15 dernières années, le salaire moyen annuel des Français serait aujourd'hui supérieur de près de 9 000 euros à ce qu'il est actuellement.
Pour combler cet écart et atteindre ces objectifs, nous avons des atouts exceptionnels. La qualité de nos infrastructures et la compétence de nos salariés font que la France est aujourd'hui l'un des pays les plus attractifs au monde. Nous sommes la troisième destination mondiale et la première destination de la zone euro pour les investissements directs étrangers. L'an dernier, ces investissements ont permis de créer 40 000 emplois, ce qui est le meilleur chiffre depuis près de 15 ans. La vigueur de notre démographie est un atout supplémentaire.
Pour autant, je sais qu'il y a des interrogations : pouvons-nous combler notre écart de croissance avec les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne sans renier ce que nous sommes ? Pouvons-nous marquer davantage de points dans la mondialisation et préserver notre modèle social fondé sur la justice et la solidarité ? Ma conviction, c'est qu'il n'y a aucune contradiction entre le dynamisme économique et la justice sociale. Comme l'a souligné Edmund Phelps, qui nous fait l'honneur de sa présence, notre modèle social est un atout dans la mondialisation. Il est un gage de justice mais aussi d'efficacité, car une société qui accompagne chacun et qui avance rassemblée, c'est une société plus forte dans la compétition économique. Pour élever encore notre croissance, appuyons-nous sur ce qui fait notre force. Poursuivons les efforts de modernisation que nous avons engagés depuis maintenant plusieurs années. La France a des réserves d'énergie et de talent qui sont encore considérables. Offrons leur la possibilité de s'exprimer davantage. C'est comme cela que nous parviendrons à faire la course en tête dans la mondialisation.
2. Pour atteindre une croissance de 3 %, nous devons donc avant tout poursuivre et enraciner dans le temps les grands choix économiques et sociaux que nous avons faits.
Le premier, c'est celui de l'emploi.
Mon gouvernement en a fait une priorité absolue. Et la politique pragmatique que nous avons menée nous a permis d'engager un véritable redressement français dans ce domaine. En 19 mois, nous sommes passés de 10,2 % à 8,6 % de chômage. Au total, cela représente 380 000 chômeurs de moins dans notre pays. Nous atteignons désormais les plus bas niveaux de chômage depuis 25 ans.
Mais nous le savons, nos concitoyens sont encore trop nombreux à être tenus à l'écart du marché du travail. Ils sont encore trop nombreux à ne pas pouvoir travailler autant qu'ils le souhaiteraient. Je pense en particulier aux femmes qui subissent des temps partiels. Je pense aux jeunes et aux seniors qui se heurtent à une véritable barrière à l'embauche. Je pense à tous ceux, notamment parmi les jeunes, qui sont prêts à échanger un peu de leur temps libre contre un peu plus de pouvoir d'achat. Cette situation est d'autant plus inacceptable que dans le même temps, certains secteurs peinent à recruter et qu'environ 500 000 emplois ne sont pas pourvus, ce qui représente autant de croissance et de pouvoir d'achat perdus pour notre économie.
Aujourd'hui, nous devons définitivement sortir des logiques malthusiennes. Si nous voulons créer davantage de richesse et consolider notre croissance, nous devons offrir du travail à tous les Français. Et nous devons leur permettre de travailler autant qu'ils le souhaitent. Les réponses, nous les connaissons. Ce sont celles que nous avons commencé à mettre en oeuvre et que nous devrons impérativement poursuivre dans les prochaines années :
Je pense à la revalorisation du travail par rapport à l'assistance, avec notamment le doublement de la prime pour l'emploi, qui représente désormais un véritable 13e mois pour les salariés au Smic.
Je pense à l'amélioration de l'orientation et de la formation professionnelle pour que chacun puisse trouver facilement un emploi et construire sa carrière tout au long de sa vie.
Je pense à la mise en place d'une véritable flexisécurité à la française qui donne plus de souplesse aux entreprises, plus de capacités d'insertion aux nouveaux entrants et qui offre des garanties fortes aux salariés. Nous avons montré que c'était possible avec les 400 000 CNE conclus fin 2006 qui ont induit, à eux seuls, plus de 50 000 emplois supplémentaires.
Je pense enfin à toutes les mesures pour permettre aux chômeurs de retrouver plus rapidement du travail. Avançons vers la fusion de l'ANPE et de l'Unedic, renforçons le suivi de la recherche d'emploi dans une logique de droits et de devoirs, rendons notre système d'allocation chômage plus généreux pour les jeunes et plus exigeant dans la reprise d'emploi. C'est comme cela que nous atteindrons 6 % de chômage à l'horizon 2010.
Le deuxième grand choix économique, c'est celui du développement de nos entreprises.
A côté de nos grands champions internationaux qui sont des leaders dans leurs secteurs et qui profitent pleinement de la mondialisation, nos PME peinent encore à se développer. Comme nous le dit le Conseil d'analyse économique que je remercie de son investissement sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres, elles se heurtent trop souvent à des effets de seuil ou à une insuffisante rentabilité. Aujourd'hui, 97 % des petites entreprises françaises ont moins de 20 salariés.
Si nous voulons produire davantage de richesses, nous devons créer un environnement encore plus favorable à l'entrée de nouvelles entreprises dans les différents secteurs de l'activité économique. Car ce sont elles qui portent le plus efficacement les idées nouvelles et les techniques innovantes. Comme nous le rappelle Edmund Phelps, ceci doit nous amener à nous interroger sur le bien-fondé de réglementations qui peuvent, parfois, freiner l'arrivée de nouveaux entrants, en particulier les jeunes entreprises et les jeunes salariés. Pour créer un environnement plus favorable à la croissance de nos PME, nous avons pris des mesures fortes. Nous avons augmenté leurs sources de financement en leur allouant 3 milliards d'euros de fonds propres et en encourageant le capital-risque. Nous avons également facilité leur accès aux marchés publics des grandes entreprises et fait reconnaître au niveau de l'Union européenne l'urgence d'un projet de "Small Business Act" pour l'Europe. Il faudra continuer le combat sur ce terrain dans les mois à venir. Avec Renaud Dutreil, nous avons mis en oeuvre des mesures fiscales spécifiques pour accompagner les entreprises à fort potentiel de croissance, les "gazelles". Enfin, nous avons largement simplifié les procédures administratives. Tout cela produit des résultats. Plus d'un million d'entreprises ont été créées en cinq ans, soit 15 % de plus que sous la précédente législature.
Vous le voyez, l'engagement qui a été depuis le début celui de mon gouvernement, c'est de donner une chance à chacun, c'est de permettre à chaque projet, à chaque idée nouvelle de s'exprimer et de réussir. Nos entreprises ont besoin qu'on continue de leur faire confiance : des règles stables et lisibles, une fiscalité adaptée, notamment au moment de leur création, un Etat qui soit à leurs côtés pour les aider à grandir et à exporter, voilà ce qui leur donnera la souplesse et la réactivité indispensable dans l'économie d'aujourd'hui.
Le troisième grand choix économique que nous avons fait, c'est celui de l'innovation.
Car l'innovation, c'est la clé de l'avenir français. Dans la bataille économique mondiale actuelle, nous ne gagnerons pas grâce à des prix plus bas que ceux des pays émergents. Nous gagnerons par des produits plus innovants. Nous gagnerons par notre savoir-faire et par notre excellence. Je vois essentiellement deux pistes pour renforcer la compétitivité de nos entreprises et leurs capacités d'innovation :
La première, c'est de poursuivre l'effort en faveur de l'éducation supérieure et de la recherche que nous avons engagé avec François Goulard notamment à travers la mise en place des réseaux thématiques de recherche avancés. Mais il faudra aller plus loin. J'ai fait récemment des propositions très concrètes pour cela : créer en 5 ans une dizaine de campus universitaires aux meilleurs standards internationaux ; donner aux universités de nouvelles sources de financement en modulant les droits d'inscription et en développant les partenariats avec les entreprises ; réformer la gouvernance des universités pour leur permettre d'être plus efficaces, plus autonomes et plus réactives. Ce sont de telles mesures qui feront de notre système d'enseignement supérieur et de recherche l'un des tout premiers dans le monde.
La deuxième piste, c'est de diffuser davantage l'innovation.
Nous le faisons depuis plusieurs années dans l'industrie pour permettre une montée en gamme de notre appareil productif, aider les entreprises à franchir de nouveaux caps technologiques et renforcer notre compétitivité industrielle. Je pense par exemple au soutien que nous apportons à Airbus, en investissant 100 millions d'euros supplémentaires dans la filière des matériaux composites.
Mais la diffusion de l'innovation doit aussi concerner l'ensemble des services et des collectivités publiques. Ces dernières représentent le quart de l'emploi et de l'activité nationale. Il y a là de formidables gisements de productivité et de croissance. Pour moi, cela veut dire essentiellement deux choses :
D'abord, un esprit ouvert à l'initiative et au changement. Les agents publics ont une volonté de service et un désir d'excellence qui font l'honneur de leur métier. Reconnaissons-les et encourageons-les davantage. Récompensons le mérite. Favorisons l'émulation dans nos établissements publics. Facilitons la mobilité au sein des administrations pour que chacun puisse donner le meilleur de lui-même et valoriser ses compétences là où elles sont le plus utiles à l'action publique.
Diffuser l'innovation dans nos services publics, c'est également développer l'administration électronique afin d'être partout plus efficace et entrer de plain pied dans l'économie de la connaissance et de l'immatériel.
Pour diffuser l'innovation dans l'industrie comme dans les services, la clé c'est de regrouper davantage nos forces et de faire travailler ensemble entreprises, universités, grandes écoles, administrations et centres de recherche. Les pôles de compétitivité ont permis d'engager le mouvement. A nous de le poursuivre au cours des prochaines années.
Mesdames, Messieurs,
Derrière les grands choix économiques que nous avons fait, il y a une conviction simple : la croissance, c'est avant tout un état d'esprit.
La croissance se gagne au jour le jour. Elle se gagne quand un jeune diplômé prolonge un projet de recherche en créant un produit innovant. Elle se gagne quand un demandeur d'emploi choisit de créer sa propre entreprise. Elle se gagne quand un patron de PME parvient à rassembler ses salariés autour d'un projet ambitieux. A chaque fois, c'est du souffle en plus pour notre économie, c'est de la croissance en plus pour les Français.
Cette envie de se battre, cette envie de construire et de réaliser ses projets, je l'ai vue partout en France, lors de chacun de mes déplacements. Alors donnons à chacun les moyens de réaliser ses ambitions, encourageons l'esprit d'entreprise, favorisons tous les talents et tous les enthousiasmes. C'est comme cela que nous construirons une croissance forte et généreuse. C'est comme cela que nous construirons un progrès durable.
Je vous remercie.Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 8 mars 2007