Interview de M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, à Canal Plus le 27 mars 2007, sur son soutien à Nicolas Sarkozy pour l'élection présidentielle 2007.

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Média : Canal Plus

Texte intégral


MICHEL DENISOT - Bonsoir à tous, après Dominique VOYNET, Gérard SHIVARDI, ce soir le Grand Journal devait recevoir le candidat Nicolas SARKOZY et ce matin Nicolas SARKOZY a cédé son temps d'antenne à Jean-louis BORLOO qui jusqu'à maintenant n'a toujours pas pris position. Jean-Louis BORLOO sera là dans dix minutes. (...) Alors Jean-Michel en quoi est-ce un moment important de la campagne que nous allons vivre dans quelques instants, donc, avec Jean-Louis BORLOO qui va prendre position aujourd'hui ?
JEAN-MICHEL APHATIE - Au fond c'est le dernier grand acteur qui manque un peu à l'appel, qui va dire quel est son choix. Donc tous les ministres, tous les personnages publics repérés ont déjà dit : pour moi c'est lui, c'est elle, et Jean-Louis BORLOO manquait à l'appel. Il s'est fait beaucoup désirer. Depuis trois, quatre mois il dit : Ah, je réfléchis, il faut que je vois, je discute, il y a des choses importantes à évoquer avant que j'engage ce que je représente, parce que c'est vrai que Jean-Louis BORLOO représente quelque chose avec l'action qu'il mène au gouvernement depuis 2002 et puis surtout depuis 2004 : la rénovation des cités, la cohésion sociale. Donc je réfléchis pour savoir à qui j'apporte ce capital-là. Ce capital acquis auprès des électeurs.
MICHEL DENISOT - Alors pourquoi seulement aujourd'hui ?
JEAN-MICHEL APHATIE - Alors ça, c'est très subtil de la part de Jean-Louis BORLOO. Il y a un parallèle vous voyez. Par exemple Michèle ALLIOT MARIE, si vous vous souvenez bien à l'automne elle était très médiatisée parce qu'on ne savait pas si elle serait candidate, si elle soutiendrait Nicolas SARKOZY etc. donc on a beaucoup parlé de Michèle ALLIOT MARIE, on l'a beaucoup fait parler. En décembre elle a dit : eh bien pour moi c'est SARKOZY. Depuis on n'en parle plus. Jean-louis BORLOO est beaucoup plus malin. Il a beaucoup plus fait durer le plaisir, on est dans la dernière ligne droite ; et puisqu'il représente quelque chose et qu'il arrive dans la dernière ligne droite, son souci c'est d'accompagner le candidat qu'il a choisi - on ne dit pas son nom encore, hein ! - le candidat qu'il a choisi, jusqu'au bout. Il reste 26 jours, on risque de beaucoup voir Jean-louis BORLOO avec le candidat qu'il a choisi pendant tous les jours qui vont arriver, là.
MICHEL DENISOT - Vous pensez que c'est une question de visibilité, plus que de conviction ?
JEAN-MICHEL APHATIE - Je pense que l'un sert l'autre ; c'est-à-dire que pour servir ce à quoi il croit, il veut être visible. Regardez comment se passe la campagne électorale ; on entend beaucoup les candidats. On entend peu de gens à côté des candidats. Et donc Jean-louis BORLOO veut être un peu l'exception. Il veut essayer de peser, de faire passer auprès du public ce à quoi il croit. D'ailleurs il commence ce soir, une émission de télévision, vous voyez. Nicolas SARKOZY parce qu'on va le dire, il va choisir Nicolas SARKOZY, s'efface devant Jean-louis BORLOO. Non, c'est un acte de campagne qu'on ne verra pas souvent.
MICHEL DENISOT - Est-ce que vous pensez qu'il a hésité à soutenir quelqu'un d'autre. Il était directeur de campagne de François BAYROU en 2002. Il va nous dire tout ça dans quelques instants.
JEAN-MICHEL APHATIE - Alors Jean-louis BORLOO avait le choix et il n'avait pas le choix. Il avait le choix de ne soutenir personne en fait ; il avait le choix de dire : bon eh bien voilà, écoutez, il n'y a rien qui me satisfait. Il n'avait pas le choix de soutenir quelqu'un d'autre parce qu'il était au gouvernement depuis cinq ans ; donc c'est difficile ; allez soutenir François BAYROU par exemple avec tout ce que François BAYROU met sur la tête de gouvernement ces jours-ci, c'était quand même difficile. Mais il aurait pu c'est vrai, rester en retrait. Dire : eh bien écoutez, voilà, on va laisser faire les choses, on va... mais en même temps c'était se priver sans doute de pouvoir s'exprimer sur la scène publique. Et puis il aurait porté un coup à Nicolas SARKOZY s'il ne s'était pas engagé derrière lui ; parce que le problème de Nicolas SARKOZY s'est de montrer qu'il rassemble toute sa famille. Il lui manquait Jean-louis BORLOO il n'aurait pas pu dire ça. Et puis Nicolas SARKOZY qui a une image de libéral, qui peut avoir une image un peu dure parfois, avoir aujourd'hui Jean-louis BORLOO dans son jeu c'est adoucir son image, c'est montrer par procuration que le sort des plus pauvres et de ceux qui sont en difficulté, il ne s'en désintéresse pas.
MICHEL DENISOT - Voilà un propos qui va alimenter beaucoup de questions que nous allons poser à Jean-louis BORLOO lui-même dans quelques instants.
(...)
MICHEL DENISOT - Le Grand Journal avec Jean-louis BORLOO qui nous a rejoints. Première question : quel candidat avez-vous décidé de soutenir pour l'élection présidentielle ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Eh bien le suspense n'est pas à son comble, c'est Nicolas SARKOZY, candidat de l'UMP parce que, si vous voulez, moi je crois à des choses assez fortes, que je porte depuis 17 ans ; c'est le progrès social, c'est lutter absolument contre le chômage de masse, c'est faire en sorte qu'il y ait 100% d'une classe d'âge qualifiée ; et puis c'est lutter contre l'injustice territoriale. En gros, nos problèmes de quartiers. On a lancé un premier grand programme de rénovation urbaine, il faut lancer maintenant un programme de plein emploi dans ces quartiers. J'ai beaucoup travaillé avec Nicolas sur ces sujets-là, quand on m'a demandé d'y réfléchir depuis déjà un certain temps. J'ai pris la peine de mettre noir sur blanc...
MICHEL DENISOT - Dans ce livre « l'Architecte et l'Horloger »...
JEAN-LOUIS BORLOO - Oui, avec une méthode pour y parvenir...
ARIANE MASSENET - Mais pourquoi vous avez mis autant de temps à vous décider, ou à nous le dire en tout cas ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Parce qu'il faut du temps pour aller au fond des choses. Nous sommes dans une société qui va à une vitesse folle ; on commente, on est dans l'imprécision et moi je crois beaucoup à la méthode. Je pense qu'on peut parvenir dans notre pays à régler ces problèmes-là avec un peu de méthode de partenariat, définir des objectifs en commun, faire un suivi des opérations, le faire avec les partenaires sociaux, dans le dialogue, dans le respect. Je crois l'avoir un peu prouvé là où je suis passé et j'avais besoin que...
ARIANE MASSENET - Qu'il vous dise qu'il écoutait ce que vous disiez, c'est ça ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Pas seulement. Vous savez entre « je suis d'accord » - parce qu'on est d'accord depuis longtemps - mais entre « je suis d'accord » et « je vais le porter »... si moi demain je disparais, je sais qui va le porter maintenant. Je pense même qu'il va mettre un point d'honneur à réussir ses engagements : plein emploi, ou 5% de chômage ; 1% de moins par an.
MICHEL DENISOT - Et ça, vous l'avez conclu hier soir ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Oui parce que vous savez il faut aller vraiment au fond des choses. Entre « oui je suis d'accord » et puis « je le porte » et puis « comment on fait » et «tu ne crois pas que... » et « là, comment on va organiser entre les universités, les grandes écoles, l'apprentissage, l'alternance avec la formation professionnelle, comment on va faire ? Par quoi on commence ».
ARIANE MASSENET - Il vous a donné des garanties sur tout ça ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Ce ne sont pas des garanties ; vous savez c'est comme dans toute aventure humaine ; entre « oui on est copains » ou « je suis d'accord » et puis vous sentez à un moment donné que l'autre porte parce qu'on est allé au fond des choses. Et en plus c'est des sujets qu'il aime profondément, c'est des sujets qui le fascine, qui le passionne, il n'est pas...
ARIANE MASSENET - Mais ce n'est pas nouveau...
JEAN-LOUIS BORLOO - Culturellement que ministre de l'Intérieur, c'est d'abord un homme politique, il est allé aux finances... pardon ?
ARIANE MASSENET - Ce n'est probablement pas nouveau.
JEAN-LOUIS BORLOO - Non, ce n'est pas nouveau mais lui aussi avait besoin de temps. Lui aussi avait besoin de temps. Vous savez, dans la vie il faut aussi s'apprivoiser, se faire confiance. Eh bien la confiance ce n'est pas quelque chose qu'on décrète comme ça, voilà. Il y a un moment où vous dites : allez, je sais qu'on va le faire !
MICHEL DENISOT - Au-delà de cet engagement que vous avez scellé hier soir près d'Avignon, vous allez participer de quelle façon à la campagne ? Est-ce que vous allez participer comme Dominique de VILLEPIN, ou comme ... d'une façon plus engagée ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Non, d'une manière active mais à ma manière. Par exemple, j'ai envie de l'emmener voir... on a expérimenté... tout le monde parle de la sécurité des parcours professionnels ; on l'a expérimenté en France avec les partenaires sociaux, dans sept sites. Et là il y a des gens qui au lieu de partir en licenciements économiques ont eu un contrat de transition professionnelle, c'est-à-dire payés à 100% de leurs revenus nets antérieurs ; faisant des essais professionnels ou de la formation. J'ai envie de l'emmener voir ces deux dames syndicalistes dans l'Ouest qui ont signé le premier, j'étais là, il y a sept, huit mois ; j'ai envie de l'emmener voir pour... parce que, une a créé son entreprise, l'autre travaille... une entreprise de services à la personne, l'autre travaille dans le secteur médico-social ; elles gagnent mieux leur vie qu'avant. Si vous voulez, j'ai envie de le prendre par la main et puis lui va me prendre par la main sur d'autres sujets.
MICHEL DENISOT - Est-ce que dans les discussions que vous avez eues avec lui, dans le cas d'une victoire de Nicolas SARKOZY, vous savez déjà ce que vous deviendrez ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Aucune espèce d'idée. Alors sincèrement, aucune espèce d'idée...
ARIANE MASSENET - Il ne vous a pas promis Matignon ou un ministère ?
MICHEL DENISOT - Quel est votre souhait ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Vous savez la pudeur ça peut exister, surtout quand des garçons se parlent entre eux et deuxièmement...
ARIANE MASSENET - Mais dans le monde politique aujourd'hui, on a un petit peu de mal à le croire, surtout en ce moment, en pleine campagne...
JEAN-LOUIS BORLOO - Eh bien oui, ça peut vous paraître bizarre mais je vous demande de me croire. Pas une fois, à aucun moment ce sujet a été abordé. Et d'ailleurs il ne mérite pas d'être abordé. Je vais vous dire. Vous savez l'action publique c'est lourd ; il faut vraiment savoir... moi par exemple, je ne saurais pas tout faire, il y a des choses que je saurais mal faire. Alors s'il n'a pas besoin de moi au gouvernement, ce n'est aucun problème. Il ne me doit rien. S'il a besoin de moi quelque part sur quelque chose où je pense que je peux peut-être vraiment bien faire, je suis très consciencieux. Quand je suis arrivé rue de Grenelle, la première nuit je n'ai pas dormi, je me suis dit : mais je ne vais jamais y arriver. Difficile ; je voyais tous les mois 25.000 chômeurs de plus, devenir inexorable, ça faisait quatre ans et demi que ça durait. Quand j'ai été...le drame de l'Hôtel Opéra et que vous savez que sortir de la crise du logement il faut doubler, tripler la production et qu'il y a toujours des gens qui attendent, des gens dans la galère... vous savez, c'est à la fois passionnant l'action publique, mais c'est quelque chose de lourd. Alors, s'il a besoin, très bien, s'il est élu. S'il n'a pas besoin ça ne pose aucun problème. Si je peux continuer à dire : moi j'ai fait douze ans de Valenciennes, je peux donner un conseil, un coup de main, je le ferai, voilà. Je suis à disposition.
JEAN-MICHEL APHATIE - Au fond je regarde la politique depuis un petit moment, c'est une scène assez étrange celle que nous vivons autour de ce plateau. Jean-louis BORLOO rallie Nicolas SARKOZY, c'est très net. Mais à 26 jours du scrutin, Jean-louis BORLOO explique qu'il a fallu beaucoup parler avec Nicolas SARKOZY, allez au fond des choses et c'est à 26 jours du scrutin qu'au fond l'un et l'autre sont convenus qu'ils avaient une base commune pour que vous appeliez à voter pour lui. « J'ai envie de l'emmener voir ces deux femmes syndicalistes dans l'Ouest » ; à 26 jours du scrutin, c'est un scrutin hiérarchique le président de la République ; on n'emmène pas un candidat, il doit être déjà imprégné de tout ça. Au fond, Jean-louis BORLOO dessine là, sur ce plateau, c'est pour cela que la figure est un peu inédite, il dessine, vous dessinez votre personnage, et fort ! Peut-être trop fort. Vous apportez quelque chose à Nicolas SARKOZY aujourd'hui mais effectivement pour la suite Nicolas SARKOZY doit se dire : bon, BORLOO, d'accord, mais quand même, il ne faudra peut-être lui donner trop de pouvoir dans une prochaine équipe, voire peut-être pas lui en donner du tout. C'est-à-dire que si Nicolas SARKOZY est à la recherche, s'il gagne, du profil type du Premier ministre, comme en plus il est un peu interventionniste, peut-être qu'il lui faudra quelqu'un d'un peu plus souple, d'un peu plus malléable. Et là, ce que Jean-louis BORLOO vient de dessiner c'est un égal ; il a discuté d'égal à égal avec Nicolas SARKOZY. Le candidat c'est quand même Nicolas SARKOZY.
JEAN-LOUIS BORLOO - Monsieur APHATIE, les hommes... les hommes, les Etres humains, vous et moi, on est égaux. Et puis après il y a un candidat à la présidence de la République. Mais quand je dis « l'emmener voir ces femmes », pourquoi ? Parce que c'est lui qui m'a dit : il faut qu'on ait la sécurité du parcours professionnel, je m'y engage. Mais j'ai constaté que tous les autres candidats en parlent sauf que aucun ne sait aujourd'hui qu'avec les partenaires sociaux, on l'a déjà expérimenté et on est capable de le mettre en place depuis quatre mois. Ce qui m'étonne dans la campagne c'est quand je vois d'autres candidats dire : il faudrait qu'il y ait une caution de l'Etat pour les loyers pour éviter d'avoir ces garanties impossibles. Elle est mise en place, elle a été votée il y a un an et demi. On l'a fait avec les partenaires sociaux. Les premières sont signées. Alors ce n'est pas lui faire découvrir, c'est simplement, voilà, il se trouve que, humainement, ces dames quand elles ont signé leur premier contrat alors qu'elles étaient en licenciement économique, je les ai vues, elles m'ont dit : « mais on a le sourire parce qu'on pense que si le gouvernement et les partenaires sociaux font un tel effort pour nous, c'est que vous croyez en nous. Et puis nous on a envie aussi de changer de métier, d'univers ». Elles travaillaient dans une usine qui fabriquait des ours. Il y a de très belles aventures humaines. Voilà, c'est ma cote part. pour le reste, il n'y a qu'un candidat à la présidence de la République, ça je vous le garantis.
MICHEL DENISOT - Est-ce que vous avez eu des contacts avec François BAYROU ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Non, pas plus que ça. On a des contacts amicaux parce qu'on est... depuis tout temps c'est quelqu'un pour qui j'ai beaucoup d'estime et d'affection.
MICHEL DENISOT - Alors il dit ce soir en parlant de vous : il a mis trois mois avant de se décider à soutenir le candidat de son Parti, cela montre qu'il devait avoir quelques doutes.
JEAN-LOUIS BORLOO - Pas des doutes. Vous savez, moi je suis quelqu'un de très... à la fois consciencieux et de très honnête, de très... quand je m'engage, je m'engage. Ce n'est pas automatique. J'aurais pu - je vous ai écouté tout à l'heure - effectivement, ne pas m'engager. Voilà. Ca c'était faisable...
ARIANE MASSENET - Vous y avez pensé à un moment donné ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Vous savez, je me suis donné la peine alors que j'avais des lois à l'Assemblée Nationale et au Sénat, la nuit de mettre noir sur blanc ce en quoi je crois.
ARIANE MASSENET - Est-ce que vous y avez pensé à un moment, de dire : eh bien je ne soutiens personne.
JEAN-LOUIS BORLOO - Mais à quel moment vous vous décidez de vivre avec quelqu'un, à quel moment... vous voyez... non, pas vraiment mais voilà, je voulais que le bâtisseur qu'il est, son slogan c'est « Bâtir ensemble, c'est faire ensemble », on avait des points de méthode. C'est normal. J'ai été à Grenelle pendant des années, lui à Beauvau, c'est normal que les responsables se parlent. Aucun d'entre nous n'a la vérité sur tout. L'échange, le respect de l'autre...
ARIANE MASSENET - Mais est-ce que vous n'avez pas peur d'être...
JEAN-LOUIS BORLOO - La palabre africaine est essentielle...
ARIANE MASSENET - L'alibi social de Nicolas SARKOZY ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Mais on m'a déjà dit ça il y a deux ans quand je suis arrivé rue de Grenelle ; ce n'est pas... mais moi j'ai besoin de croire aux choses et de croire c'est aller dans le détail. Voilà. Ce n'est pas des grandes phrases, quoi, ce n'est pas des mots. C'est : maintenant je sais que... voilà... il y a un certain nombre de sujets, il y a des méthodes - il ne va pas appliquer la mienne, hein ! C'est évidemment un mélange de tout ça - mais c'est important que des gens qui ont à assumer des responsabilités différentes, se parlent, regardent comment ils voient la société. Et puis il ne le fait pas qu'avec moi, il le fait avec FILLON, il le fait avec bien d'autres, bien entendu. Je ne suis pas le seul objet de son regard, je vous rassure. Mais je suis un parmi d'autres.
ARIANE MASSENET - Le dernier en tout cas.
MICHEL DENISOT - Comme c'est la règle, il y a le petit papier caustique de Bruno DONNET qui vous est consacré. On le passe un petit peu plus tard que prévu parce qu'on attendait d'abord ce que vous venez de dire.
BRUNO DONNET - Cher Jean-louis BORLOO, je suis drôlement content que vous soyez-là ce soir. Un peu parce que vous avez mis du temps avant de vous rallier à SARKOZY mais surtout parce que depuis le début de ces « Spéciales présidentielles », je n'ai eu droit qu'à des poids lourds de l'élection. Qu'a des candidats sérieux, des gars qui ont de vraies chances de devenir président. Du coup, un peu impressionné par l'enjeu, je n'avais jusqu'à aujourd'hui pas eu la moindre occasion de plaisanter. Mais avec vous c'est différent, car avec la candidature de SARKOZY, on renoue avec une tradition bien française, celle du petit candidat. Le petit candidat, c'est un gars qui n'a pas la moindre chance d'être élu mais qui s'en tape. Depuis toujours le petit candidat fait partie du paysage électoral. On le reconnaît à ses propositions, elles peuvent être un peu farfelues, comme celles de SARKOZY ; gentiment opportuniste, comme celles de SARKOZYR ; ou nettement plus inquiétantes comme... celles de SARKOZY... mais bien ancré dans la tradition on aura quand même noté le supplément d'âme de la candidature de SARKOZY... pour la première fois, un petit candidat aura réussi à pousser le canular jusqu'à son paroxysme. Jusqu'à ce qu'un président en exercice accepte de faire croire à toute la France, qu'il a choisi de voter pour lui... c'est tout pour aujourd'hui et demain ça sera pire.
MICHEL DENISOT - Voilà. Jean-louis BORLOO dans les discussions que vous avez eu avec Nicolas SARKOZY avant d'apporter comme vous l'avez fait ce soir, donc, votre soutien pour l'élection, est-ce qu'il y a des points sur lesquels... des points de divergence qui existent encore aujourd'hui ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Non, non, ce n'est pas des points de divergences, d'abord il n'y en avait pas. La stratégie elle est tout à fait claire, plein emploi, la justice territoriale, par exemple, comment donner plus de moyens financiers aux villes pauvres, notamment celles qui ont des quartiers en grandes difficultés. Il y a plusieurs façons de le faire, moi, je propose une méthode, on avait déjà fait 600 millions d'euros il y a deux ans, 1 milliard 200 millions d'euros, donc on discute de la méthode, comment on va discuter avec les partenaires sur le contrat de travail, sur la sortie de la gestion des conflits, sur la sécurisation des parcours professionnels. Donc vous savez la politique ce n'est pas un catalogue de truc, c'est une approche et une méthode de travail. Donc il n'y a pas de grosses différences non.
JEAN-MICHEL APHATIE - En écoutant, Jean-Louis BORLOO, le plein emploi, c'est quand même intéressant, cette campagne, comment elle se passe. Il y a un pays comme l'Angleterre qui depuis 30 ans a suivi un chemin assez radicalement différent du nôtre. THE ECONOMIST disait, titrait, il y a 15 jours, nous allons beaucoup mieux et effectivement ils ont résolu leur problème d'emploi. Nous, on vit avec un chômage de masse depuis 30 ans. L'Angleterre quand on prenait les sept pays du G7 en 1997, elle était septième. Vous savez où elle est aujourd'hui ? Deuxième. Et jamais dans les campagnes en France, on ne s'inspire d'un exemple tout proche de gens qui nous ressemblent. Et au contraire, j'en termine juste, ce que dit Jean-Louis BORLOO, c'est : on va sécuriser les parcours professionnels. Ce qui paraît être, comment dirais-je, tout le monde le comprend et le souhaiterait, mais qui paraît être tellement à rebours des expériences qui existent autour qu'on a quelquefois du mal à y croire.
JEAN-LOUIS BORLOO - Mais monsieur APHATIE, vous savez le grand enjeu c'est que les pays qui ont en gros, fait reculer le chômage ont en même temps augmenté les inégalités sociales. Et l'enjeu du modèle français de demain, c'est à la fois d'aller vers le plein emploi, 5-6 % et en même temps de réduire les inégalités sociales, ne pas le faire au prix du temps, très, très partiel subi, ne pas le faire au prix, au détriment du pouvoir d'achat. C'est pour ça que c'est compliqué, la France souhaite... faire les deux. Réduire les inégalités et faire baisser le chômage. Mais on prend les Britanniques ont fait une chose formidable, c'est les « job center » c'est-à-dire un seul endroit, avoir toutes les fonctions, formation, information, indemnisation, suivi, échange d'information. C'est pour ça qu'on veut un guichet unique, que le demandeur d'emploi ne passe pas de l'UNEDIC à l'ANPE. Ca ne veut pas dire forcément fusionner d'ailleurs, on en discutait hier soir avec Nicolas SARKOZY, est-ce qu'il faut passer absolument par la fusion de l'UNEDIC et de l'ANPE ? Peut-être pas, mais en tous les cas mutualiser les moyens avec les partenaires sociaux, avec les centres de formation, avec les différentes chambres professionnelles, oui. Mais la flexibilité ou la sécurité des parcours, c'est le modèle suédois et c'est le modèle danois. Donc prenons...
JEAN-MICHEL APHATIE - Mais à part vous, personne ne saura faire ça. A part vous, personne ne saura faire ça ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Mais si, vous savez...
MICHEL DENISOT - Il fait rarement des compliments.
JEAN-LOUIS BORLOO - Les bonnes méthodes, elles peuvent être appliquées par tous. Sinon ce n'est pas de la bonne méthode, c'est juste un peu de tour de main.
MICHEL DENISOT - Alors on va passer maintenant au « Petit journal actu » de Yann BARTHES et ensuite vous nous direz si vous êtes candidat aux législatives qui suivront les présidentielles en juin et si oui, à quel endroit ?
(...)
MICHEL DENISOT - Tous droits réservés TNS Alors cette première question : est-ce que vous serez candidat aux législatives en juin ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Ecoutez, c'est probable, c'est probable.
MICHEL DENISOT - A Valenciennes ou à Paris ?
JEAN-LOUIS BORLOO - A Valenciennes.
MICHEL DENISOT - Oui, parce qu'on vous annonce à Paris de temps en temps.
JEAN-LOUIS BORLOO - Oui, oui, on m'annonçait à Lille aussi, mais je ne suis pas nomade, j'adore le valenciennois, c'est un arrondissement qui a énormément souffert et qui repart, encore des difficultés, mais qui est passionnant. Et puis vous savez, la confiance est quelque chose, quand on vous l'accorde, vous avez des devoirs, vous avez des dettes.
MICHEL DENISOT - Tout à l'heure quand je vous demandais, s'il y avait des sujets de divergences avec Nicolas SARKOZY, vous m'avez dit « non. » Vous êtes d'accord sur le ministère de l'Immigration et l'identité nationale ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Je vais vous dire, tous les pays ont un ministère de l'Immigration, moi, j'ai été très frappé, on a mis en place, les contrats d'accueil et d'intégration...
ARIANE MASSENET - Oui, là vous parlez que de l'immigration, il y a aussi l'identité nationale ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Attendez, attendez, non, non, mais il y a deux sujets. Je trouve hallucinant qu'il ait fallu attendre 30 ans pour qu'on accueille les gens. Aujourd'hui dans chaque département vous avez, une plate-forme d'accueil, vous avez des gens qui arrivent avec une envie de France, des sourires, des visages qui viennent du bout du monde, ils ont 500 heures de français, qu'on leur met à disposition. Un système médical, une information sur les droits et les devoirs, ça existe et c'est formidable. Et je pense que des gens qui viennent dans notre pays, ce n'est pas juste des quotas, ce n'est pas juste pour du travail, l'accueil, le contrôle, mais l'accueil ça fait partie du minimum qu'il faille faire.
MICHEL DENISOT - Attendez, il reste 32 secondes de temps de parole, Ariane.
JEAN-LOUIS BORLOO - Quant à l'identité, qui est un grand sujet, je crois que enjeu de l'identité, c'est notre pays il est génial, parce qu'aujourd'hui avec 62 millions de passeports voilà vous avez des Français bretons, des Français d'origine arabe, noire voilà et c'est ça l'identité nationale, c'est ce qu'il y a devant nous, et c'est notre communauté de destin et c'est notre fraternité.
MICHEL DENISOT - Et il vous reste 12 secondes, vous, vous rendez compte jusqu'à 19 heures 50. On va passer à la météo maintenant, avec Louise BOURGOIN.
(...)
MICHEL DENISOT - Il vous reste 12 secondes de temps, pour vous exprimer, Jean-Louis BORLOO, est-ce que vous avez un message personnel à transmettre dans ces 12 secondes ?
JEAN-LOUIS BORLOO - Je pense qu'on est vraiment à un virage là, il faut l'énergie de quelqu'un qui a l'autorité, mais il faut aussi, beaucoup d'humanité, de tolérance et de respect dans notre pays.
MICHEL DENISOT - Pile ! Très pro.
JEAN-MICHEL APHATIE - C'est du talent.
MICHEL DENISOT - Vous avez 30 secondes, Jean-Michel pour résumer cette première partie ?
JEAN-MICHEL APHATIE - Je pense que Nicolas SARKOZY doit être content ce soir, puisqu'il enregistre un renfort qui était important pour lui. On voit, les études d'opinions un climat de campagne, que ça se resserre en tête de la compétition, Nicolas SARKOZY dit lui-même que le Front national est très sous-évalué, que François BAYROU ne sera pas le troisième homme, dit-il, plutôt Jean-Marie LE PEN, ce qui incitera je pense Nicolas SARKOZY à faire une campagne très à droite, ces 26 jours ce ne sera peut-être pas facile pour Jean-Louis BORLOO de trouver toute la place qu'il souhaiterait y trouver. Source http://www.partiradical.net, le 29 mars 2007