Texte intégral
R. Sicard.- N. Sarkozy est arrivé en tête du premier tour avec plus de 31 % des voix, c'est un bon score, mais ce n'est pas suffisant pour gagner au deuxième tour.
M. Alliot-Marie.- Il faut 50 % + 1 voix au moins.
Q.- Il faut 50 % + 1 voix. Qu'est-ce qu'il peut faire pour rallier les électeurs de F. Bayrou ?
R.- Ecoutez, je crois que N. Sarkozy s'adresse à tous les électeurs qui n'ont pas voté pour lui au premier tour, c'est ça d'abord. Il faut les convaincre qu'ils ont quelque chose à apporter. Alors, N. Sarkozy, effectivement, a fait un très bon score au premier tour, je crois que c'est lui qui a réuni sur son programme, sur son projet le plus d'électeurs depuis très longtemps dans notre famille politique. Ceci dit, bien entendu, cela crée aussi une obligation. Une obligation d'abord de continuer à dire la vérité aux Français, parce que je suis persuadée que ce score N. Sarkozy l'a fait aussi parce qu'un certain nombre de Français, et notamment dans les couches populaires, ont eu le sentiment qu'il posait les bons thèmes de campagne, ceux dont on ne parlait pas auparavant. Mais maintenant, il est vrai qu'il faut élargir et donc il s'adresse à tous ceux qui ont envie que les choses bougent dans notre société, qui ont envie d'être...
Q.- Alors, ils sont où ceux-là ? Ils ont voté pour qui ceux-là au premier tour ?
R.- Ça peut être extrêmement variable parce qu'on sait très bien qu'au premier tour, il y a des tas d'éléments qui peuvent intervenir. Au deuxième tour, c'est autre chose, c'est le choix et un choix très clair entre deux modèles de société, entre deux visions de la France. Il y a une vision portée par madame Royal, qui est finalement assez conservatrice, dont nous avons vu déjà...
Q.- Elle dit c'est le changement, elle dit exactement le contraire.
R.- Oui, mais quand vous regardez son projet, vous savez moi je retrouve exactement ce que L. Jospin avait fait quand il était au gouvernement entre 1997 et 2002. Ce que dit N. Sarkozy c'est autre chose, il dit : nous sommes dans une compétition internationale qui va être une compétition difficile dans un monde qui est aussi un monde dangereux sur le plan de la sécurité. Face à cela, il faut bien voir que la France a des atouts, beaucoup d'atouts et on ne le dit pas suffisamment. Par exemple, la France est en dehors des pays pétroliers, le pays qui est le plus indépendant énergétiquement. Or, nous voyons bien que l'énergie c'est quelque chose qui devient essentiel.
Q.- C'est grâce à l'énergie nucléaire, ce n'est pas ce qui va rallier les écologistes.
R.- Peut-être, mais c'est aussi grâce à cela et moi ce que je constate, c'est que pratiquement tous les pays, des Etats-Unis aux pays nordiques dont nous savons traditionnellement qu'ils sont très soucieux de l'environnement se rallient et disent « c'est la France qui a raison ». Ce que je constate également, c'est que la France est le premier exportateur de produits agro-alimentaires dans un monde dont la population augmente de plus en plus - elle augmentera de près de 50 % dans les trente années qui viennent - en même temps avec des terres cultivables qui se rétrécissent de plus en plus. La France est également un pays qui sur le plan industriel, sur le plan de la recherche, là aussi contrairement à ce que l'on dit, est un pays qui est à la pointe de ce qui se fait et donc qui a beaucoup d'atouts. A côté de ces atouts dans la compétition internationale, si nous voulons les mettre en oeuvre, il faut effectivement quelque chose qui d'abord valorise le travail et l'activité des Français. Nous avons besoin des Français, ce sont les Français qui ont créé ces atouts.
Q.- Donc, il faut travailler plus comme le dit N. Sarkozy, c'est ça que vous voulez dire ?
R.- Et donc, ce que je dis, c'est qu'il faut permettre à ceux qui ont envie de travailler plus pour gagner plus de pouvoir le faire parce que c'est bon pour eux et que c'est en même temps bon pour notre pays. Et il faut également faire en sorte que ceux qui n'ont pas pu avoir les éléments qui leur permettent une réussite professionnelle au début, et en particulier les jeunes, puissent avoir une deuxième, voire une troisième chance pour pouvoir eux aussi participer à cette action qui leur permet une promotion sociale et professionnelle, et permet également à notre pays d'avancer. Je crois que la France peut envisager l'avenir avec beaucoup de confiance à condition de prendre un certain nombre de mesures qui libèrent les énergies qui permettent de ne laisser personne au bord du chemin, qui permettent en même temps de soutenir les plus fragiles et ce projet cohérent ce n'est que N. Sarkozy qui le porte.
Q.- Je reviens aux centristes. L'une des revendications des centristes c'est la proportionnelle. Est-ce que l'UMP est prête à faire un geste pour instiller, instaurer une dose de proportionnelle ?
R.- A titre personnel, ce que je pense c'est que le scrutin majoritaire est non seulement celui qui permet la plus grande clarté mais je pense que c'est aussi le scrutin qui est le plus démocratique parce que dans le scrutin uninominal, oui majoritaire, l'électeur connaît celui qu'il a élu, et donc il peut suivre exactement ce qu'est son attitude, s'il respecte les engagements qu'il a pris à son égard, il peut le sanctionner et il peut même d'ailleurs quand il le croise dans la semaine ou le dimanche, lui dire très franchement et très directement ce qu'il pense.
Q.- Donc, pour vous...
R.-... moi, c'est ce qui se passe.
Q.- Donc, pour vous, pas de proportionnelle.
R.- Moi, vous savez, je suis gaulliste, une gaulliste du renouveau mais fidèle à un certain nombre de principes, et à titre personnel, effectivement, je le dis, je suis favorable au scrutin uninominal.
Q.- Si N. Sarkozy est élu président de la République, est-ce qu'on peut imaginer envisager des ministres UDF dans le gouvernement ?
R.- Bien entendu ! Je crois que N. Sarkozy a toujours dit qu'il faisait preuve d'une grande ouverture en ne demandant à personne de renier ses convictions. Je crois que c'est ça aussi ce qu'il faut voir et je suis peut-être la mieux placée pour le dire. Vous le savez, au départ, je voulais défendre moi-même dans cette élection présidentielle mes convictions de gaulliste du renouveau.
Q.- Vous étiez vous-mêmes candidate.
R.- Donc, j'ai envisagé, effectivement, d'être candidate. C'est vrai que face à des risques extrémistes, je n'ai pas voulu diviser notre famille politique mais j'ai dit à N. Sarkozy que je lui apporterais mon soutien si mes convictions étaient prises en compte, ce qui a été fait. Et dans cette campagne, j'ai pu faire campagne pour N. Sarkozy en femme libre, en développant mes convictions. Donc, N. Sarkozy est quelqu'un qui sait rassembler en respectant l'identité des uns et des autres. A partir de ce moment-là, il est effectivement tout à fait normal que certains qui au départ n'étaient pas forcément avec lui soient là. Je rappelle d'autre part que les idées centristes sont représentées aussi au sein de l'UMP, car nous avons des personnes qui sont des centristes au sein de l'UMP - l'UMP c'est un vaste rassemblement. Je rappelle également que G. de Robien est un centriste qui n'était pas dans l'UMP et...
Q.-... G. de Robien, justement, il a consulté des parlementaires de l'UDF qui disent qu'ils vont rallier la candidature de N. Sarkozy, donc il y a des contacts qui existent entre partis.
R.- De toute façon, il y a des contacts - pas entre partis mais il y a des contacts - entre personnes et ça me paraît normal que nous nous parlions. Et, encore une fois, je crois que pour beaucoup de centristes leurs convictions, leur vision de la société est franchement plus proche de ce que présente N. Sarkozy que de ce que présente S. Royal. Et d'autre part, je dirais quand même aussi une chose, vous savez, moi, comme ministre de la Défense, je vois les grands problèmes, notamment internationaux, qui sont devant la France, le problème iranien, le problème de Corée du Nord. Très franchement, je pose la question : est-ce que vous pensez que pour la France et pour les Français il serait très prudent de confier les rênes à madame Royal dont nous avons vu tout au cours de cette campagne les approximations sur un certain nombre de grands sujets touchant à la fois au domaine international ou au domaine de la défense nationale ?
Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 24 avril 2007.