Texte intégral
R. Sicard.- Hier, F. Bayrou n'a pas donné de consigne de vote, mais ceux qui étaient sur place ont eu le sentiment qu'il était plus dur pour N. Sarkozy que pour S. Royal. Vous, vous soutenez S. Sarkozy. Que pensez-vous de ce qui s'est passé hier ?
R.- F. Bayrou, a été candidat à l'élection présidentielle, il a annoncé, au fond, qu'il se sentait le meilleur, et qu'il ne voulait pas choisir. C'est son droit le plus strict. Ce qui me semble le plus important, c'est au fond le dialogue direct entre les deux candidats à l'élection présidentielle et les Français. Parce que les Français l'on choisi dimanche dernier...
Q.- Il aura lieu mercredi prochain.
R.-...D'abord, il y a un moment magnifique qui a été pendant toute la journée de dimanche, toutes les écoles : les foules entières rassemblées, ce peuple de France qui avait décidé de tourner la page du premier tour de 2002. Et j'insiste là-dessus parce que...
Q.- C'est-à-dire, une très forte participation, c'est cela qui vous a frappé ?
R.- Participation magnifique, c'est cela l'arc-en-ciel politique français, chacun s'est exprimé, et les Français ont choisi, que se rencontrent et que débattent, deux tenants du titre pour un projet de Gouvernement. Ce sont les Français qui ont choisi, alors il faut respecter le choix des Français, et il faut bien évidemment essayer de créer la dynamique du rassemblement. Ce que N. Sarkozy fait, dans un climat où je trouve que les caricatures et la manière de la violence politique qui sont utilisées à son endroit, sont tout simplement décalées par rapport à la réalité. Parce que c'est certainement un être passionné, quelqu'un qui défend avec flamme son projet pour notre pays, quelqu'un qui s'engage fortement, mais c'est aussi quelqu'un qui tend la main. Dans la France d'aujourd'hui, la violence, c'est de rester les bras croisés. La violence, c'est de ne pas parler de la réalité qui fâche, c'est-à-dire, de ne pas parler des violences qu'il y a dans les écoles, dans les quartiers, dans les immeubles, du chômage, de tout ce qui fâche dans notre pays, des discriminations. Donc, c'est un homme d'action engagé, humaniste. Et donc, on ne peut pas rester...
Q.- F. Bayrou disait hier par exemple que N. Sarkozy pratique "l'intimidation et la menace", c'est dur cela !
R.- C'est honteux de dire cela ! Parce que ce n'est pas conforme à la réalité. Et alors...Chacun a le droit de penser ce qu'il veut. Je dis, haut et fort pour l'avoir constaté, pour faire partie de son équipe, que cette équipe, qui a travaillé depuis cinq ans, que ce projet, c'est un projet républicain, fort, généreux, humaniste, et que dans les grands combats, dans les moments difficiles où il faut avoir du courage, je pense à la question du Front national, est-ce que N. Sarkozy a manqué de courage ? N'a-t-il pas été conforme aux valeurs humanistes que nous défendons tous ensemble ? Bref, sur les dossiers les plus importants, il s'engage avec talent et avec humanisme. Sur l'Europe, grand dossier si il en est, je crois que l'intelligence est de dire aujourd'hui, qu'il faut une Europe politique resserrée, et que dans l'étape actuelle, il faut trouver un système pour l'ensemble des pays de la Méditerranée, mais qu'on ne peut pas laisser la Turquie devenir membre. Est-ce que F. Bayrou, militant, je crois, de l'Europe, cela fait partie de nos convictions communes, je le connais bien, j'ai été dans la même famille politique que lui...
Q.- Vous êtes un ancien de l'UDF...
R.-... est-ce que, sur ce sujet, il va avoir une discussion avec S. Royal ? Il va la convaincre de modifier son jugement ? Bref...
Q.- Ils sont d'accord pour discuter on ne sait pas sous quelles modalités.
R.- Vous savez, le plus important, c'est que chacun ait le courage de dire la vérité aux Français, de dire exactement son projet et son programme. N. Sarkozy, a été le seul à le faire avant le premier tour. S. Royal maintenant, est obligée de clarifier les choses. Et donc, on voit bien...
Q.- Il n'était pas le seul à présenter son programme, tous les candidats...
R.- Non pas vraiment, parce qu'on ne savait pas...elle était assez impressionniste pour dire les choses, c'est-à-dire, c'était l'esquive. Une fois, on avait le sentiment qu'elle était proche d'un courant social-démocrate, D. Strauss-Kahn. D'un autre côté, zigzag vers L. Fabius ou vers la gauche de la gauche...
Q.- Elle avait son pacte présidentiel.
R.- Oui, enfin, son pacte présidentiel c'était le flou artistique absolu. Et donc, aujourd'hui il y a, les Français l'ont décidé, un débat contradictoire, entre deux équipes, deux tenants, qui pourraient être présidents de la République, et qui présentent un projet assez concret aux Français, voilà. Ensuite, que chacun se détermine en son âme et conscience. Je pense que c'est cela aussi le respect du suffrage universel, personne ne doit faire de pression sur quiconque.
Q.- Je reviens sur l'Europe. F. Bayrou et S. Royal disent qu'il faut un référendum pour un nouveau Traité. Ce n'est pas ce que dit N. Sarkozy. Vous, quelle est la solution qui vous paraît la meilleure ?
R.- La solution la plus appropriée c'est celle qui emportera l'adhésion des Français. Donc, il faut faire un travail...
Q.- Mais du peuple dans son ensemble ou au Parlement ?
R.- Non, je n'ai pas parlé du suffrage universel ou du référendum, ou des modalités parlementaires. Ce qu'il faut c'est convaincre les Français que l'Europe c'est utile, que cela protège. Il faut d'ailleurs que l'Europe parfois évolue. Parce qu'il y a des domaines dans lesquels elle devrait s'occuper davantage de la protection de nos intérêts, c'est-à-dire, qu'on ne peut pas avoir les frontières ouvertes à tous les échanges économiques mondiaux, il faut que nous protégions nos emplois à l'intérieur du périmètre de l'Union européenne.
Q.- Alors, l'enjeu pour N. Sarkozy, c'est d'aller au-delà des 31 % qu'il a réalisés au premier tour...
R.- C'est sûr.
Q.- Evidemment. Peut-il facilement maintenant ou plus difficilement rallier les électeurs de F. Bayrou, compte tenu de ce qui s'est passé hier ?
R.- Mais je pense qu'il parle librement et fortement à toutes les Françaises et à tous les Français, avec talent et conviction. Il parle des sujets qui concernent la vie quotidienne de nos concitoyens : de la violence à l'école, de la nécessité que le travail soit davantage reconnu, que si on veut gagner plus on puisse gagner plus, tout simplement pour faire face à ses obligations personnelles, ou à ses projets. Il tient un langage de vérité, les choses sont sur la table, et il le fait encore une fois, avec beaucoup de panache et une expression qui nous est propre, et que S. Royal utilise maintenant, avec le respect de "l'arc-en-ciel" de la société française. C'est-à-dire, l'équipe gouvernementale, l'équipe politique qui est autour de N. Sarkozy, c'est par exemple, dans mon domaine, celles et ceux qui ont ouvert le Grand Palais aux cultures urbaines ; celles et ceux, à l'initiative du président de la République, qui ont milité pour la diversité des expressions culturelles. Bref, nous sommes une équipe de républicains humanistes et généreux. Et c'est cela qui a vocation, j'espère, à rassembler.
Q.- Faut-il aussi rassembler en s'adressant aux électeurs de J.-M. Le Pen ?
R.- Mais on s'adresse indistinctement à toutes les Françaises et à tous les Français pour essayer de leur faire faire un choix utile pour notre pays. Un choix courageux, et donc, pour essayer justement de les extirper vers ce qui était des impasses absolues, au plan des valeurs et au plan des principes, c'est-à-dire, l'extrémisme. N. Sarkozy, a ce résultat brillant : mobilisation politique extraordinaire, parce que nos concitoyens ont voulu tourner la page de ce qui s'était passé en 2002, choisir en tête un candidat extraordinairement dynamique, et donc, cela a réduit les extrêmes. Eh bien, il est responsable de cela, et c'est un enjeu magnifique.
Q.- Vous parliez du débat tout à l'heure, du débat d'entre les deux tours, mercredi prochain. Qu'en attendez-vous, vous ?
R.- J'en attends que chacun exprime sa vérité, dise clairement aux Français ses engagements. N. Sarkozy, l'a déjà fait. J'attends de ce point de vue-là de S. Royal, qu'elle dise les choses avec plus de précision qu'elle ne le fait aujourd'hui. C'est un grand moment. J'espère que les Françaises et les Français verront avec lucidité que N. Sarkozy a été victime de beaucoup de caricatures. Il y a une forme de brutalité, mots utilisés de manière scandaleuse en permanence par S. Royal pour le caricaturer comme ministre de l'Intérieur ! Quand il y a eu des circonstances très difficiles, de lourdes manifestations, grâce, bien sûr, à la sagesse et à l'intelligence de la police et de la gendarmerie, mais grâce aussi à son travail personnel, il n'y a jamais eu d'incidents, il n'y a jamais eu de bavures. Franchement, qu'on ne nous caricature pas, qu'on ne dise pas que nous sommes "une droite autoritaire". Cela, c'est de la polémique politicienne, ce n'est pas la réalité, et je pense que cela apparaîtra.
Q.- Juste un mot sur le problème des intermittents du spectacle, de l'indemnisation de leur système de chômage. Il y en a un certain nombre qui sont sur le toit de l'Unedic. Le problème peut-il être réglé avant le deuxième tour ?
R.- Tous ceux qui sont sur le toit ne sont pas forcément issus du monde du spectacle. Les artistes et les techniciens ont droit à un système d'assurance chômage, complété par l'action de l'Etat. Aujourd'hui, je le dis pour que cela soit clair et que chacun connaisse ses droits, les fameuses 507 heures sur 12 mois sont garanties non pas uniquement par l'assurance chômage, mais également par l'Etat. De la même manière, les 120 heures pour l'éducation artistique. Donc, on a agi, cela reste des métiers parfois très difficiles. Voilà. Mais on a beaucoup agi. Il faut continuer.
Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 26 avril 2007.