Déclaration de M. Beranard Thibault, secrétaire général de la CGT, sur les conditions de travail et notamment la pénibilité au travail, Dunkerque le 4 juin 2007.

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Circonstance : Meeting "Pénibilité au travail" à Dunkerque le 4 juin 2007

Texte intégral


Cher(e)s camarades,
Salut à vous qui êtes venus si nombreux aujourd'hui pour ce rassemblement national à Dunkerque.
Salut à vous les gens du Nord et à toutes celles et ceux venus des autres régions.
Merci aux militants, aux adhérents de la CGT de cette belle région Nord Pas de Calais qui ont préparé et organisé cette grande initiative pour la reconnaissance de la pénibilité au travail, à l'amélioration de la santé et des conditions de travail.
Sur ces sujets, vous les salariés du Nord, vous savez de quoi on parle !
Des maladies liées aux activités minières, textiles, portuaires, métallurgiques, jusqu'à aujourd'hui l'amiante et les autres produits à risque, rien ne vous a été épargné !
Néanmoins, vous avez toujours lutté pour vos droits, votre dignité, la réparation et la reconnaissance des dommages que l'on vous a infligés depuis tant d'années. Les différentes interventions des témoins qui m'ont précédé à cette tribune font foi.
Merci enfin à nos unions départementales du Nord et du Pas de Calais, à notre région CGT pour les batailles qu'elles mènent, pour les efforts qu'elles déploient pour tous les salariés afin que la santé au travail, en ce début du 21ème siècle, soit enfin un objectif reconnu, une cause nationale.
Nous tenons notre meeting alors qu'un cycle d'élections politiques importantes est en cours. Celui-ci a déjà été marqué par l'élection de Nicolas SARKOZY à la Présidence de la République.
Bien prendre la mesure du nouveau contexte dans lequel nous exerçons nos responsabilités syndicales est indispensable pour avoir des résultats, c'est-à-dire obtenir des avancées sur les revendications des salariés.
C'est la raison pour laquelle il ne serait pas responsable d'examiner dans le détail les objectifs revendicatifs qui nous réunissent aujourd'hui sans vous faire part du diagnostic que la CGT porte sur la situation actuelle.
Je commencerai par formuler trois constats :
Le premier tient au niveau de participation élevé aux élections, révélateur de l'ampleur des attentes des citoyens. La démonstration est faite que les français ne sont pas indifférents ou fatigués de la politique ou des affaires publiques. Une période où prédominaient la résignation, le repli sur soi semble donc s'achever. Il dépend de nous que cet intérêt à participer aux rendez-vous ayant une influence sur son propre avenir se traduise aussi par un engagement syndical renforcé. J'y reviendrai.
Le deuxième point que je voudrais relever c'est la profonde aspiration au changement que les citoyens ont exprimé à cette occasion. Aucun des candidats en compétition ne s'est présenté en se réclamant des politiques mises en oeuvre par les gouvernements RAFFARIN et VILLEPIN et la majorité parlementaire UMP. En prônant la « rupture », Nicolas SARKOZY est parvenu, avec habileté, à s'affranchir d'un bilan économique et social désastreux qui est pourtant celui du parti qu'il présidait et donc le sien.
Cette aspiration, pour être forte, n'est pas sans ambiguïté. Le slogan doublement trompeur « travailler plus pour gagner plus » a pu laisser entendre à des travailleurs pauvres qu'enfin leur situation était prise en compte ; l'exaltation du mérite individuel a pu diffuser l'impression que chacun allait être reconnu. Le dénigrement de la solidarité taxée d'assistanat et d'autres procédés d'intoxication destinés à désigner des boucs émissaires ont émaillé la campagne en permanence et n'ont pas été sans écho.
Ce serait cependant une erreur de conclure que les citoyens ont systématiquement adhéré et plébiscité le programme et la machine libérale dont le nouveau Président est porteur. Si les citoyens ont indiqué une forte volonté de sortir d'une société à maints égards bloquée, nous devons considérer que cette élection ne met pas un terme à la définition des réformes à entreprendre. Ce sont bien les préoccupations sociales qui sont jugées prioritaires - emploi, salaires, inégalités sociales - c'est-à-dire le terrain privilégié de l'intervention syndicale.
Le discours volontariste et la détermination affichés par l'équipe gouvernementale ne peuvent masquer une évidence : après les discours et les promesses de campagne, toute majorité politique est confrontée à l'exercice concret du pouvoir, à ses imprévus et à ses réalités.
La démocratie sociale, la négociation avec les syndicats sont des éléments de la démocratie tout court. Le débat sur la nature des changements sociaux reste ouvert et il l'est d'autant plus que, je le rappelle, ni la CGT ni aucune autre organisation syndicale n'a donné de procuration à personne ni remis l'exercice de sa responsabilité sous un quelconque parrainage.
La CGT aussi a un mandat : celui du premier syndicat de notre pays. Celui de défendre, en toutes circonstance, les intérêts des salariés face aux employeurs et au gouvernement, quel qu'il soit.
La CGT n'est ni une organisation d'opposition par principe, ni un syndicat d'accompagnement de politiques ou de réformes dont les salariés seraient les victimes.
La CGT continuera, dans le contexte politique que les citoyens préciseront lors des élections législatives, d'assumer pleinement ses responsabilités d'organisation syndicale indépendante.
La CGT continuera d'informer en permanence les salariés sur ce qui se trame concernant leur avenir, de proposer des alternatives aux schémas simplistes des employeurs.
Le troisième point à relever tient à la persistance des mobilisations et des actions syndicales pendant la période des élections. La campagne présidentielle, comme nous le souhaitions, n'a pas engendré de pause revendicative. Elle a, au contraire, été marquée par des mobilisations nombreuses, souvent unitaires pour les salaires, l'emploi, les conditions de travail, contre les délocalisations et fermetures d'entreprises dans différents secteurs. Beaucoup de salariés confrontés à des difficultés n'ont pas cédé à l'attentisme ni à la délégation de leur pouvoir d'intervention aux politiques. C'est cette attitude qu'il faut conserver pour la période à venir.
C'est sur elle qu'il va falloir compter pour emporter le morceau sur des objectifs revendicatifs urgents bénéficiant d'un large consensus parce qu'ils relèvent de la justice sociale.
C'est un de ces objectifs qui nous réunit aujourd'hui.
Pouvoir bénéficier d'une retraite anticipée d'un niveau convenable, parce qu'on a exercé, pendant de longues années, un métier pénible diminuant votre espérance de vie en bonne santé, c'est une mesure urgente qu'attendent des centaines de milliers de travailleurs usés prématurément à la tâche !
C'est une mesure simple qu'un gouvernement s'honorerait de mettre en oeuvre.
La CGT n'a eu de cesse de porter cette revendication ces dernières années. C'est le mot d'ordre clamé aujourd'hui dans toute la France au travers de dizaines d'initiatives revendicatives et ici, à ce rassemblement national de Dunkerque, au travers de vos témoignages qui font éclater cette face cachée de la réalité du travail. Peut-on admettre en ce début de XXIème siècle qu'on puisse voir son espérance de vie diminuer du fait du travail que l'on exerce ? Peut-on admettre qu'un ouvrier du bâtiment, une aide-soignante, un travailleur du verre ait une retraite amputée de sept ans par rapport à un cadre supérieur du même secteur ? Où est la justice, où est l'égalité tant prônée ?
« Mais l'espérance de vie progresse pour tout le monde » nous dit-on. Vrai et faux à la fois. Vrai, et c'est une bonne nouvelle que vient de confirmer l'INSEE : le français dit « moyen » vit de plus en plus longtemps. Faux également, car cela s'opère de manière inégale puisque l'espérance de vie s'accroît pour les catégories où elle est déjà élevée. Cela veut dire que les inégalités face à la mort s'accroissent et pénalisent les catégories de travailleurs les plus modestes.
En fait si l'on ne fait rien, avec le recul programmé de l'âge de la retraite, certains salariés pourront, comme autrefois, passer de l'usine au cimetière sans bénéficier d'une retraite à part entière. Est-ce ce temps là que voudrait voir revenir le patronat ?
En 2003, François FILLON, à l'époque ministre du Travail, avait hypocritement enterré le problème, se contentant de prévoir dans un délai de 3 ans, une négociation interprofessionnelle sur le sujet. A t il aujourd'hui l'intention de continuer sur cette voie ?
En ce domaine, comme dans d'autres, la CGT est tenace. Elle porte les revendications des salariés. Nous sommes revenus à la charge dès le lendemain du vote de la Loi FILLON exigeant que la négociation interprofessionnelle prévue à l'article 12 s'ouvre au plus vite.
Je rappelle ici ce que disait la CGT il y a maintenant plus de 2 ans à l'ouverture des discussions :
« Des centaines de milliers de salariés voient leur espérance de vie à la retraite réduite à cause de conditions de travail particulièrement pénibles ou dégradant gravement leur santé... Ce ne serait que justice d'ouvrir à ces salariés un droit à la retraite avant 60 ans pour leur permettre d'envisager une durée de retraite sensiblement égale à celle des autres salariés. Ce droit est à imposer à un patronat qui est très loin d'accéder à une telle démarche. Il s'agit donc de faire admettre ce principe d'un départ anticipé en retraite pour pénibilité, d'en définir le champ d'application, les modalités et d'aborder le financement de ce droit. » C'est simple. C'est clair. Nous proposions un dispositif concret, réalisable permettant à la fois d'organiser et de financer ces départs et de s'engager dans l'éradication de l'usure au travail.
Le MEDEF n'a pas pu rester totalement immobile devant notre pression. D'abord, la discussion a dû s'ouvrir. Ensuite, au fur et à mesure des réunions, le MEDEF a été obligé d'abandonner sa posture qui renvoyait la solution du problème à la reconnaissance d'un « handicap » comme cela a été fait en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas. Fini la responsabilité patronale. La pénibilité serait d'abord un problème individuel et médical. Vous verrez que si on les laisse faire, ils nous diront un jour que c'est la génétique qui explique les travailleurs usés !
Mais à quoi bon tenir des réunions de négociation presque chaque mois pendant plus d'un an si c'est pour ne pas avancer ? En dehors de généralités sur la prévention, le patronat a finalement bloqué sur tout ce qui pouvait apparaître comme une mesure de reconnaissance et de réparation de la pénibilité. La seule proposition qu'il a faite relève de la provocation : le patronat a demandé de retirer les primes de nuits, les primes de risques, d'insalubrité et de pénibilité qui existent actuellement pour les transférer dans des comptes épargne temps. Ainsi ce serait au salarié de subir les dégâts et de payer de sa poche les réparations, c'est un comble ! Le MEDEF ajoute donc deux variantes à la formule magique de Nicolas SARKOZY : vous avez le choix entre « travailler toujours aussi durement pour gagner moins qu'avant » ou « vivre mal tout le temps pour un petit peu de bon temps ».
Aujourd'hui, 4 juin 2007, la CGT pose solennellement au MEDEF une question toute simple : avez-vous la volonté que cette négociation aboutisse rapidement avec une proposition de dispositif dédié à la cessation d'activité pour les salariés usés par le travail ? C'est oui ou c'est non ! Mais cela doit être clair !
Le gouvernement ne peut parallèlement se sentir quitte. J'entends tous les jours des représentants du nouveau pouvoir s'abriter derrière les choix des citoyens et de l'opinion publique. Je les prends au mot.
Selon les chiffres d'une enquête du Ministère du travail et de la solidarité, c'est 96 % des Français qui estiment que les personnes exposées à des conditions de travail pénibles doivent pouvoir prendre leur retraite plus tôt que les autres.
Au nom de la CGT, je fais aujourd'hui une proposition qui permet de traiter l'urgence des situations et qui nous donne le temps de mettre en place un système élaboré conjuguant la prévention de la pénibilité et la réparation de la pénibilité.
Le premier volet immédiat doit être un dispositif de départ en retraite anticipé pour les salariés qui ont aujourd'hui entre 55 et 60 ans et qui ont exercé pendant au moins 15 ans des travaux pénibles, astreignants ou des emplois qui les ont exposés à des produits dangereux. L'essentiel des financements pourrait venir de la réallocation des fonds publics et d'entreprises qui sont utilisés pour faciliter les suppressions d'emplois des salariés les plus âgés. Nous réclamons un changement de nature du système. Au lieu de faciliter les suppressions d'emplois voulues par les entreprises, les sommes correspondantes qui s'élèvent à plusieurs milliards d'euros doivent servir à reconnaître la pénibilité du travail et permettre des départs anticipés à la retraite.
Il faut sortir de la situation de blocage. Une loi cadre peut décider de cette mesure d'ordre social même avec un seul volet d'urgence. Permettre tout de suite des milliers de départs anticipés en retraite pour pénibilité répondrait à l'urgence sociale et ouvrirait la voie pour une négociation sur un dispositif de long terme.
Nous ne laisserons pas plus longtemps usurper la valeur travail et le respect qu'on lui doit pour les convertir en leçon de morale patronale ou en poudre aux yeux électorale. Le respect de la valeur travail c'est d'abord le respect de l'intégrité physique et mentale de l'être humain au travail. Le travail est une dimension majeure du développement humain. Voilà pourquoi la CGT ne lâchera rien sur le travail. Oui, les droits, les protections, la liberté, le bien-être peuvent et doivent exister dans et au travail.
Quand des salariés sont victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles par défaut de prévention, on ne respecte pas le travail !
Quand des salariés ne supportent plus leurs conditions de travail ou les exigences de celui-ci on ne respecte pas le travail !
Quand des salariés sont soumis à des pressions telles qu'ils en arrivent à la dépression où au suicide, on ne respecte pas le travail.
La CGT revendique que le bien-être au travail devienne un critère absolu de respect du travail. Ce serait la meilleure façon de mobiliser toutes les capacités productives humaines de la nation. Il y a là un vaste chantier de réformes économiques et sociales à engager sans attendre.
Le nouveau gouvernement annonce la tenue d'une conférence sur les conditions de travail en septembre prochain.
Si elle se confirme, nous entendons nous y rendre dans un état d'esprit offensif et rassembleur pour y porter les exigences des salariés.
Nous voulons des résultats concrets, des mesures de réparation pour tous ceux qui souffrent ou ont souffert dans leur chair de mauvaises conditions de travail.
Je pense à tous ceux - et ils sont nombreux dans cette région - qui ont été les victimes de l'amiante et de tous les autres produits à risque.
Je suis venu ici, à Dunkerque, il y a un mois, rencontrer les associations et les militants syndicaux qui luttent pour la reconnaissance de leurs droits et de leur dignité. Je veux leur renouveler le soutien de toute la CGT.
Saluons leur engagement, leur détermination, leur courage. Leur lutte est notre lutte à tous !
Les salariés qui ont subi de mauvaises conditions de travail durant des décennies, qui subissent le stress au travail - nouvelle méthode de management - ne peuvent se satisfaire d'une amélioration promise pour demain. C'est d'une réponse pour aujourd'hui dont ils ont besoin. Pour eux, la nécessité d'un départ anticipé pour pénibilité est incontournable. On ne peut s'en remettre aux sorties de l'emploi pour invalidité ou aux congés de longue maladie car ils ne concernent que ceux dont les atteintes à la santé sont déjà déclarées. Nous refusons de faire peser sur l'assurance maladie ce qui relève de la responsabilité du patronat. Il y a toute une population de salariés dont l'espérance de vie en bonne santé à 60 ans est hypothéquée, c'est une situation d'alerte signalée au travers des études et enquêtes menées par des experts des questions de santé et travail. C'est tout de suite qu'il faut agir.
Assez tergiversé Messieurs, Madame du Patronat : les salariés usés, cabossés, écrasés par votre soif de profit attendent de votre part autant d'enthousiasme pour leur apporter enfin réparation, que celui dont vous faites preuve lorsque vous rencontrez le nouveau pouvoir. Nous sommes à un moment de vérité pour le patronat et pour le gouvernement. Passer à l'acte ce serait rendre justice aux gens de peu, entendre la voix de tous ceux qui ont bâti vos usines, le pays, produit la richesse durant tant d'années et, parmi eux, de nombreux travailleurs étrangers, émigrés n'ayant trop souvent pour horizon de fin de vie que les foyers SONACOTRA.
Et je souhaite le réaffirmer dans une période où le travailleur immigré continue régulièrement d'être montré du doigt dans bien des discours politiques. La CGT ne fait pas de distinction de nationalité quant elle lutte contre la surexploitation des travailleurs.
Comment accepter qu'une industrie comme l'industrie automobile continue à considérer comme normale l'éviction de dizaines de milliers de salariés prématurément usés par leurs conditions de travail ? C'est un choix de gestion qui doit être récusé pour l'avenir !
Qui pourrait sérieusement prétendre que l'accumulation, années après années, du travail en horaire décalé ou dans des conditions physiquement ou mentalement éprouvantes n'aurait pas d'incidence sur la santé et que le risque augmente fortement avec l'âge ?
Voilà pourquoi des départs anticipés en retraite pour les salariés soumis à de fortes sujétions existent déjà dans certains régimes spéciaux de retraite. C'est le cas des personnels soignants des hôpitaux, ceux des entreprises publiques de transport ou de l'énergie fonctionnant 24 heures sur 24 selon des procédures de sécurité strictement maîtrisées, ou de certains régimes spéciaux dans le privé comme chez les marins. Cela concerne aussi les fonctionnaires de police, les militaires mais, curieusement, pas les pompiers qui pourtant le revendiquent avec force.
Ainsi les pourfendeurs de tout poil des régimes spéciaux n'ont qu'une idée en tête c'est de remettre en cause, ici, ce qu'ils ne veulent pas accorder ailleurs à d'autres salariés aux conditions de travail similaires.
Les initiatives revendicatives d'aujourd'hui sur la reconnaissance de la pénibilité au travail et sa réparation sont un volet important de la campagne que nous engageons dans la perspective du rendez-vous de 2008 sur les retraites. Mais il y a des exigences à satisfaire sans attendre 2008 ! Celle bien sûr des départs anticipés qui nous réunit aujourd'hui, mais aussi celle des revalorisations de toutes les pensions de retraite qui décrochent de l'évolution des salaires des actifs, celle de l'instauration d'un minimum de pension à la hauteur du SMIC.
A ce propos rappelons qu'à l'occasion de sa loi de réforme de 2003, Monsieur Fillon s'était engagé sur l'objectif de 85 % du SMIC... Eh bien on peut juger sur pièces aujourd'hui ! Faudra-t-il demander à toutes les ouvrières du textile, qui ont moins de 750 euros de retraite par mois tout compris, d'envoyer à la Presse la copie de leur bulletin de pension, ou le Premier Ministre souhaite-t-il les recevoir directement sur son bureau ? Cet exemple du peu de considération et du peu de valeur accordées à plusieurs décennies de travail suffit à lui seul à dégonfler certains slogans et à rendre suspects les trémolos qui les accompagnent.
Si on fait le parallèle avec les systèmes que les principaux dirigeants des grands groupes se sont concoctés pour financer leurs propres retraites, on ne parle plus en centaines d'euros mais en millions d'euros ! C'est bien la business class qui a une vraie conscience de classe !
La CGT ne nie pas les questions réelles posées à notre système de retraite par les évolutions de la démographie en France. Mais la première cause du besoin de financement des retraites est le déficit d'emplois, la précarisation et la politique des bas salaires. Financer une bonne retraite pour 6 millions de personnes supplémentaires d'ici 15 ans est possible sans écraser les jeunes générations sous une charge insupportable. Discutons de la relance de l'emploi, discutons des modalités de financement par les entreprises. Les sujets ne manquent pas.
Chers camarades,
La droite est maintenant une droite décomplexée n'hésitant pas à afficher sa proximité, pour ne pas dire sa complicité, avec un patronat lui-même aux anges.
Nous sommes conscients que le mouvement syndical en général et la CGT en particulier vont devoir faire face à des questions décisives. Plus encore que précédemment il leur faudra, dans l'action et la négociation, combiner la résistance et la proposition et que cette double attitude, à la fois ferme et responsable, soit portée par un intense travail de mobilisation.
Le dernier bilan des élections aux comités d'entreprise, publié par le Ministère du travail début mai, place la CGT largement en tête des organisations syndicales et ce résultat doit nous conduire à honorer cette confiance grandissante. Il doit nous encourager à poursuivre les efforts que nous avons déployés pour promouvoir une démarche syndicale qui, en toutes circonstances, part de ce que pensent et expriment les salariés, valorise l'élaboration collective des revendications et crée les conditions de la mobilisation et de l'unité syndicale.
C'est cette démarche qu'il nous faut plus que jamais déployer dans la période à venir. Nous allons donc aborder cette nouvelle période avec un état d'esprit offensif et responsable.
Offensif, parce que les impatiences sur le terrain social sont énormes et que les réponses que s'apprête à leur apporter le gouvernement apparaîtront pour ce qu'elles sont : inadaptées et source de plus grandes injustices.
Responsable, c'est-à-dire conscient que pour se faire entendre il faudra rassembler largement les salariés et non miser sur une avant garde isolée.
Nous jugeons aux actes et nous avons bien l'intention d'être partout où l'intérêt des salariés est en cause avec la volonté de faire avancer leurs revendications.
Nous ne travaillons pas en fonction de l'annonce des « plats du jour » ou des « surprises du chef » du menu gouvernemental - même s'il faut nous y préparer - mais en fonction des exigences sociales que les salariés n'ont cessé d'exprimer depuis de longues années.
Nous avons avant tout besoin d'être présents dans le débat d'idées, sur les solutions à mettre en oeuvre et cela dépend de notre capacité à porter des messages cohérents sur tous les lieux de travail, sur tous les lieux où nous sommes déjà organisés et ceux où nous sommes capables de nous redéployer.
Le premier semestre a vu une montée en puissance de la revendication salariale, elle peut prendre une nouvelle dimension au moment où le gouvernement affiche son intention de ne pas donner de coup de pouce à la revalorisation du SMIC au 1er juillet. Pourtant, 1 500 euros bruts ce n'est vraiment pas de trop pour vivre décemment.
Réussir l'initiative d'aujourd'hui, c'est déjà concrétiser notre démarche offensive face à ce nouveau gouvernement et au patronat.
Pour porter les aspirations des salariés de notre pays qui demeurent dans leur intégralité, pour proposer des alternatives au programme brutal que le nouveau gouvernement nous annonce, nous avons absolument besoin d'organisations de la CGT plus réactives, d'une CGT plus agile, plus présente, plus rassembleuse, plus conquérante.
Face à un pouvoir entreprenant et manoeuvrier, qui ne fait pas mystère de sa volonté, selon les cas, d'ignorer, de contourner, d'affronter ou de diviser les organisations syndicales, nous ne pèserons que par notre nombre, par notre rayonnement et notre détermination.
A ce propos, le gouvernement confirme son intention de faire adopter, en juillet, de nouvelles dispositions concernant un service garanti dans les transports.
Nous ne redirons jamais assez que les premières lacunes dont souffrent les usagers dans les transports ce sont celles relatives à la vétusté des matériels ou des infrastructures, à l'insuffisance de personnel sur certains réseaux qui multiplie les risques de pannes et d'interruption des trafics.
C'est d'ailleurs ce que viennent de rappeler plusieurs associations d'usagers des transports.
Mais curieusement, ou plutôt délibérément, le gouvernement ne semble s'intéresser qu'aux situations dues aux grèves.
Alors, je profite de notre rencontre d'aujourd'hui pour redire que je ne connais pas, pas plus dans les transports qu'ailleurs, de salariés qui font le choix de recourir à la grève par plaisir ! Lorsqu'il y a grève, c'est que l'on refuse d'entendre qu'il y a des problèmes et des revendications qui appellent des réponses appropriées.
Nous avons dit que nous étions extrêmement vigilants sur les dispositions précises qui figureront dans la loi et nous rappellerons, dès mercredi lorsque nous rencontrerons le Ministre du travail, que la CGT - comme les autres syndicats - est opposée à une loi remettant en cause les conditions d'exercice du droit de grève.
Cher(e)s camarades,
Nous avons du pain sur la planche et, encore une fois, l'heure n'est pas aux atermoiements, dans une situation où il va nous falloir être réactifs en permanence, ce qui suppose d'être organisés à tous les niveaux pour jouer en équipe.
Oui, il nous faut maintenant aller bien au-delà de ce que nous sommes aujourd'hui et je voudrais vous faire part d'une conviction : la CGT ne dispose pas des forces syndiquées correspondant à la place qu'elle occupe dans la société française, dans le débat public et à la hauteur de son influence dans les élections professionnelles.
Nous avons de grandes ambitions sur le terrain des revendications, nous sommes conscients des obstacles à surmonter, du rapport de force qu'il nous faut créer pour parvenir à être entendus.
Nous constatons, chaque jour, que c'est vers la CGT que l'on se tourne lorsqu'une difficulté apparaît avec son employeurs, ou pour le simple respect du droit au travail.
Il est temps de tenir le langage de la vérité parce qu'il y a urgence. Les salariés savent pouvoir compter sur la CGT, mais la meilleure des garanties pour l'avenir c'est qu'un plus grand nombre de salariés prennent conscience qu'ils doivent eux-mêmes s'organiser, qu'ils doivent se syndiquer, créer leur syndicat CGT sur leur lieu de travail comme l'ont fait plus de 20 000 personnes qui, depuis le début de l'année, ont adhéré au syndicat.
Pour améliorer sa propre situation et participer à la défense des droits des salariés dans un cadre collectif, il faut se syndiquer à la CGT.
Aussi, j'invite l'ensemble des syndicats CGT déjà constitués, l'ensemble des militants à être offensifs aussi sur le terrain de l'adhésion à la CGT.
Allons vers les jeunes, dont nous savons bien, depuis la belle victoire contre le CPE, qu'ils sont disponibles pour agir sur la construction de leur propre avenir.
Allons vers les travailleurs de toutes qualifications, parce qu'aujourd'hui ni le diplôme, ni la position hiérarchique ne protègent de la précarité et des restructurations.
Allons vers tous les salariés, parce qu'à la CGT on a sa place quelles que soient la couleur de sa peau, sa religion ou sa préférence politique.
Cher(e)s camarades,
Nous avons déjà su faire la démonstration par le passé que, lorsque nous étions capables de rassembler toutes nos énergies, des résultats étaient possibles.
De l'énergie nous en avons et, dès demain, elle doit servir à faire reconnaître le droit à la retraite anticipée et, après-demain, elle servira pour d'autres conquêtes sociales !Source http://www.cgt.fr, le 6 juin 2007