Déclaration de Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur l'amélioration des conditions de vie étudiante, l'accès au logement et la santé des étudiants, Paris le 16 juillet 2007.

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Circonstance : Bilan d'étape du chantier Vie étudiante à Paris le 16 juillet 2007

Texte intégral


Pour une stratégie pluriannuelle d'amélioration des conditions de vie étudiante
Je voudrais d'abord vous remercier de l'excellent travail que vous avez accompli en si peu de temps. Je pèse mes mots : la plupart d'entre vous ont été sollicités parfois tardivement et vous avez tenu à venir à Paris, parfois de loin, pour présenter votre témoignage d'expert ou vos propositions. Beaucoup d'entre vous étaient également engagés dans un travail parallèle, avec d'autres membres de mon équipe, de réflexion sur la loi autonomie, sur le chantier « licence », sur le chantier « jeunes chercheurs ». L'été a commencé depuis longtemps et certains de vos collègues ou de vos amis sont certainement en vacances. Mais vous avez montré par votre assiduité et votre réactivité, votre volonté de travailler ensemble sur ces sujets essentiels.
Je ne répondrai pas aujourd'hui point par point à vos propositions. Trois raisons à cela :
- Les services de la Direction Générale de l'Enseignement Supérieur ont déjà été saisis de la plupart de vos propositions et sont en train de procéder à des analyses précises de leurs implications techniques et opérationnelles. Je veux leur laisser le temps de cette étude indispensable avant de trancher.
- Ensuite, de nombreux sujets que vous avez abordés relèvent partiellement d'autres ministères. Les cabinets et les services de ces ministères ont été largement associés à vos concertations. Je sais également que mes collègues ministres sont très mobilisés sur ce thème qui les intéresse tous. Mais il nous reste à mener des consultations interministérielles approfondies. Je veux rencontrer certains de mes collègues ministres en tête-à-tête pour les convaincre de la pertinence de vos propositions et de l'importance de leur mobilisation à nos cotés.
Enfin, certaines de vos propositions ont des implications budgétaires importantes. Je les ai écoutées avec attention. Je me suis appuyée sur ces propositions pour construire d'ores et déjà les hypothèses budgétaires que nous avons proposées à Bercy pour obtenir un arbitrage pour le budget 2008. Ces discussions continuent de se dérouler. Nous devrions en connaître l'issue dans quelques semaines. J'examinerai alors, avec les marges de manoeuvre qui seront les nôtres, l'ampleur que nous pourrons donner à vos propositions.
Je partage l'intégralité des constats que vous m'avez présentés. Je ne reviendrai pas dessus. Il faut maintenant agir. Si vous me le permettez, pour vous présenter le calendrier d'actions que je vous propose pour les mois à venir, je vais revenir sur certains points que vous avez soulevés et vous donner mon sentiment et des premiers éléments de réponse.
Je m'appuierai toujours sur les deux principes qui doivent guider nos travaux : l'égalité des chances et l'accomplissement des étudiants.
1. L'égalité des chances
L'égalité des chances réside en effet dans un système d'aides sociales équitable, lisible et efficace.
J'ai voulu marquer cet engagement dès la rentrée 2007 en confortant le pouvoir d'achat des étudiants. Les frais d'inscription pour la rentrée ont été gelés en euros constants.
C'est la première fois en cinq ans qu'ils évoluent si modérément. Les bourses quant à elles seront augmentées de 2,5%, c'est-à-dire de 50% de plus que l'inflation. Je veillerai tout particulièrement aux conditions de leur versement. Nous travaillons de manière très étroite avec les CROUS pour assurer que celui-ci aura lieu le plus tôt possible.
Quant aux frais d'inscription dits illégaux, j'ai rappelé à tous les recteurs la règle en la matière : Les prestations qui sont indissociables de l'inscription et du déroulement normal des études ne peuvent en aucun cas être subordonnées à un paiement autre que le montant des droits d'inscription fixés par arrêté du ministre. Je pense par exemple à l'accès aux bibliothèques, aux polycopiés, aux salles de travail. Des droits complémentaires ne peuvent être légaux que s'ils sont facultatifs et individualisés. Ils ne peuvent être ni obligatoires ni forfaitaires. Je serai attentive à tous les cas que vous me soumettrez et je prendrai des mesures fermes chaque fois que cela s'avèrera nécessaire.
Pour les années à venir, le système d'aides sociales dans son ensemble doit être repensé. Pour ma part, et au-delà de vos préconisations, j'ai deux priorités claires :
- la récompense du mérite, tout au long de la scolarité, et non pas seulement sur la foi de la mention obtenue au bac. Je sais en effet qu'il n'est pas rare qu'un lycéen moyen se révèle excellent dans une filière qu'il aura choisie et qui lui apportera satisfaction. Cette excellence aussi doit être récompensée et valorisée.
- le développement de la mobilité des étudiants. Je pense bien sûr à la mobilité internationale, qu'il convient certainement de faciliter notamment en personnalisant l'aide qui est faite, mais aussi à la mobilité inter académique. Je sais par exemple que de nombreuses places en IUT et en BTS sont laissées vacantes par des étudiants qui aimeraient y postuler mais qui n'ont pas toujours les moyens d'envisager un déménagement loin de leur ville d'origine qui peut se révéler très couteux.
Je suis également très sensible à la demande qui est faite d'élargir l'éligibilité des bourses aux classes moyennes dans le système d'aides sociales et j'ai déjà demandé aux services de travailler à plusieurs hypothèses de linéarisation qui prendraient en compte une assiette élargie pour le calcul des bourses sur critères sociaux.
J'ai également pris la mesure de la forte demande des étudiants en ce qui concerne le rôle et la place des CROUS dans le cadre de la gestion de la vie étudiante. Je pense au système d'aides sociales bien sûr mais aussi à toutes les questions que traitent les CROUS et qui concernent la vie étudiante. Pour mener à bien cette réflexion, que je veux objective et dépassionnée, je confierai dès cette semaine une mission à M. Denis Lambert, président de l'association des directeurs de CROUS, qui a participé aux concertations et que certains d'entre vous connaissent bien. Il me rendra un rapport sur ce thème avant la fin de l'année et nous l'étudierons ensemble.
Enfin nos travaux continuent avec nos partenaires : je pense à la nécessaire harmonisation et à l'accroissement de la lisibilité des aides apportées par les régions, par exemple en termes de critères, travail qui sera mené avec l'Association des régions de France que j'ai rencontrée au début du mois. Nous parlerons aussi des aides aux transports qui sont attribuées.
L'égalité des chances en matière de santé des étudiants
Je veux que notre système donne à tous les étudiants les informations et les moyens nécessaires pour accomplir leur parcours de santé et accompagner leur passage à l'autonomie. Je veux donner aux étudiants « le réflexe santé ».
Je voudrais faire une proposition complémentaire à celles que vous m'avez présentées.
Au-delà de la visite médicale préventive obligatoire, je voudrais étudier, avec Roselyne Bachelot, la possibilité d'offrir à tous les étudiants en licence un pack « santé » gratuit,
comprenant plusieurs consultations. Ces consultations seraient ciblées sur les manques ou les risques auxquels les étudiants sont exposés et que vous avez relevés : je pense notamment à ophtalmologie, dentaire et une troisième qui pourrait être gynécologie pour les jeunes filles.
Je suis sensible à la question des étudiants étrangers que vous avez soulevée. J'ai déjà pris des contacts avec Brice Hortefeux pour étudier avec lui plusieurs options de simplification 4
des contraintes administratives qui leur sont imposées notamment en matière de visite médicale. Je vous dirai rapidement ce qui a pu être fait pour lever les obstacles que vous avez justement relevés.
L'égalité des chances en matière d'accès au logement pour tous les étudiants
Dans un premier temps, il s'agira pour nous de faire un bilan très complet de la mise en oeuvre des premières préconisations du plan Anciaux et de proposer des réponses aux blocages qui ont été identifiés. Mais nous devrons aussi faire des propositions supplémentaires et innovantes pour traiter, par tous les moyens à notre disposition, de la question du logement étudiant. L'accès au logement pour un étudiant est une étape essentielle de son accès à l'autonomie. Les inégalités et les injustices qui existent encore, notamment dans les aides sociales, doivent être combattues. Nous présenterons ainsi un plan d'action interministériel à la fin de l'année 2007, qui viendra compléter la mise en oeuvre du plan Anciaux. Il nous faut faire feu de tout bois sur ce sujet, faire preuve de toutes les audaces, de toutes les initiatives, devant l'ampleur des besoins et l'urgence à les satisfaire.
Enfin, l'égalité des chances pour les étudiants handicapés.
Nous allons signer au début du mois de septembre, avec les présidents d'université, un engagement majeur, inédit et qui répond à de nombreuses attentes exprimées par l'ensemble des professionnels et des non professionnels du secteur : il s'agit de la charte Université-Handicap. Cette charte sera co-signée par Xavier Bertrand, qui a la charge du handicap. Elle prévoira notamment la création d'une structure d'accueil dédiée dans tous les établissements universitaires et l'identification et la mise en oeuvre d'un projet de formation personnalisé de chaque étudiant handicapé en fonction de ses besoins (bilan des acquis fonctionnels et cursus envisagé). C'est une étape majeure et les universités se sont engagées à avancer rapidement sur cette question.
Nous allons également tout mettre en oeuvre pour permettre la mise en accessibilité des bâtiments universitaires prévue pour la fin 2010. Cette mise en accessibilité pourra notamment être l'occasion de rénovations importantes des locaux universitaires.
Enfin, un certain nombre de travaux sont menés par M. Gohet et Parisot, respectivement délégué interministériel aux personnes handicapées, et délégué ministériel aux étudiants handicapés. Ils visent notamment à assurer la coordination des acteurs, une meilleure diffusion de l'information auprès des lycéens handicapés, un vrai travail de liaison avec les MDPH... Nous avançons rapidement et serons bientôt exemplaires en Europe dans ce domaine.
Avec l'égalité des chances, le deuxième grand principe de mon action est l'accomplissement des étudiants.
2. L'accomplissement des étudiants
Je veux que l'université place le développement de la vie associative au coeur de la vie universitaire.
C'est une exigence nouvelle, une ambition nouvelle, que j'assigne à notre modèle universitaire. J'en suis consciente. La vie associative a longtemps été considérée comme secondaire. Je ne le crois pas. Je crois au contraire qu'elle participe pleinement aux études, à la vie universitaire, à l'épanouissement de chacun.
Cependant, je sais que les universités veulent faire preuve de bonne volonté dans ce domaine et je ne veux pas leur imposer de ligne de conduite trop rigide en la matière. Il s'agit de permettre aux bonnes pratiques de se généraliser et aux idées de chacun de s'exprimer.
Ainsi je souhaite que nous élaborions ensemble, au ministère, une convention « pour le développement de la vie associative, culturelle et sportive, et l'accomplissement des étudiants ». Cette convention sera élaborée en concertation avec les organisations représentatives et les grands réseaux associatifs. Le ministère proposera qu'elle soit signée 6
localement, par chaque Président d'Université avec les acteurs de la vie associative de son campus. Elle abordera notamment la question du développement des maisons de l'étudiant, du rôle des bureaux de la vie étudiante, des locaux et des moyens à disposition des associations, des conditions d'exercice de cette vie associative...
Parallèlement et dès à présent, nous réfléchirons avec vous à la reconnaissance pédagogique de cet engagement associatif. Un groupe de travail sera chargé de me remettre une proposition précise et complète dès l'automne sur ce sujet.
L'accomplissement personnel de l'étudiant passe également par une meilleure participation de sa part à tous les aspects de la vie universitaire au premier rang desquels sa vie démocratique.
Je travaille au quotidien avec les syndicats étudiants et j'ai conscience d'un grand défaut de notre système : le travail des organisations représentatives des étudiants est peu connu par les étudiants eux-mêmes, une infime minorité d'entre eux comprend l'importance de leur rôle et les enjeux de leur représentativité, ils ne votent donc qu'en nombre très limité. Parallèlement, les élus de ces organisations fournissent un travail important et qui doit être mieux reconnu et facilité par les universités dans lesquelles ils étudient.
J'ai entendu votre demande. Je peux déjà y répondre favorablement. C'est une demande déjà ancienne, et qui a été longuement travaillé par mes prédécesseurs. Je souhaite donc que nous mettions en place un statut de l'élu étudiant.
Le corollaire de cet important travail de reconnaissance est l'engagement de tous, ministère, universités, mais aussi organisations étudiantes, pour améliorer la participation des étudiants aux différentes élections auxquelles ils prennent part.
Le vote de la loi sur l'autonomie et son application à toutes les universités va entraîner un renouvellement massif des conseils et donc de nombreuses élections étudiantes vont se 7
tenir dans une période restreinte. Ce sera l'occasion pour chacun de faire un effort de communication important.
Je voudrais que l'on réfléchisse aussi à un mécanisme incitatif pour les étudiants. Je suis ouverte à toutes les idées. Certains proposent qu'une carte électorale étudiante soit distribuée à tous lors de l'entrée à l'université. Je trouve cette idée intéressante et nous allons l'étudier.
En conclusion de ces premières analyses, je veux vous affirmer mon souhait de tout faire pour parvenir à mettre en place une véritable stratégie pluriannuelle d'amélioration de la vie étudiante.
Il nous reste vous l'avez vu beaucoup de pistes à creuser et à affiner. Nous pouvons aller vite par endroit, nous devons prendre notre temps dans d'autres cas. Notre temps, ce sont les cinq années à venir. Notre marge de manoeuvre, c'est notre capacité à avancer ensemble, c'est aussi l'engagement du Président et du Premier ministre de donner à l'enseignement supérieur les moyens de ses ambitions.
Je travaille déjà aux arbitrages budgétaires de la rentrée 2008 avec l'équipe d'Eric Woerth et celle de François Fillon. Mais je vois bien au-delà de cette échéance car la tâche est si grande que nous devons l'inscrire dans la durée.
Je vous proposerai à la rentrée des rendez-vous réguliers sur chacun des thèmes de travail pour les faire rapidement progresser et se concrétiser. Il nous faudra encore en préciser le périmètre et les participants.
Je vous donne notamment rendez-vous à la rentrée pour vous faire une première série de propositions une fois les arbitrages budgétaires connus.
Je vous remercie de votre attention et de votre présence aujourd'hui. Mais plus encore je veux vous dire que je compte sur votre présence et votre travail, dans les mois à venir, avec mes équipes, avec mes services, avec les autres ministères et les autres acteurs, pour mener à bien notre ambition commune : repenser les conditions de vie étudiante pour faire de la vie étudiante le plus bel âge de la vie.Source http://www.recherche.gouv.fr, le 17 juillet 2007