Interview de M. François Sauvadet, président du groupe parlementaire Le Nouveau centre à l'Assemblée nationale, à LCP Assemblée nationale le 24 juillet 2007, sur la libération des infirmières bulgares, otages en Libye, le projet d'autonomie des universités, le service minimum et l'organisation du travail parlementaire.

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Média : LCP Assemblée nationale

Texte intégral

Katia Gilder : La libération de ces infirmières Bulgares, pour vous, c'est une victoire de la France ou de l'Europe ?
François Sauvadet : C'est d'abord aux infirmières qu'il faut penser. Celles qui ont vécu un calvaire pendant ces 7 à 8 années et vous savez les descriptions faites du sort qui était le leur. Donc c'est d'abord à elles, à leur famille, ceux qui recouvrent cette liberté.
Tant de Français y aspiraient, tant d'Européens et je crois que c'est d'abord l'émotion que l'on doit avoir devant cette libération. À dire vrai, je trouve que la polémique est mesquine. Ce qui compte aujourd'hui et c'est ce que les Français attendaient, c'est d'avoir un Président de la République qui s'engage. Il a envoyé un émissaire, le meilleur émissaire puisque c'est son épouse, pour tenter de parachever le travail engagé par l'Union Européenne. Aujourd'hui le résultat est là. C'est ce qui compte. Elles sont libérées, elles sont rentrées dans leur pays. C'est un avion français qui les a ramené. Ça montre aussi toute la place, et Monsieur Barroso l'a dit Il y a quelques instants, que la France a reprise dans l'Union Européenne et dans l'initiative européenne. Voila, moi j'entendais les mêmes socialistes qui hier se plaignaient d'avoir un Président pas assez impliqué dans la vie politique française et internationale. On a un Président comme les français le souhaitaient, c'est à dire qui s'engage. Moi je me réjouis qu'il se soit engagé. À lui de savoir quel émissaire il doit envoyer. En tout cas, Cécilia Sarkozy, compte naturellement en France. Et je crois que le signe qui a été donné, qu'il entendait confier à celle qui lui était très proche des missions humanitaires, on est là dans une tradition, mais c'est un choix qui lui appartient, mais ce qui compte pour la France, c'est cette liberté recouvrée.
Katia Gilder : Au-delà de ces signes, de ces gestes forts, comme toujours dans ce genre d'affaires, il y a le dessous des cartes, le contenu dans l'accord passé avec le colonel Kadhafi, qui a payé dans cette affaire. Quel est votre sentiment sur cette affaire ?
François Sauvadet : Je crois que le plus important c'était d'être au rendez-vous de cette liberté recouvrée. Les négociations, les discussions, elles présentent toujours un caractère difficile naturellement et le caractère de mystère. Je pense que le temps viendra où devra être mis sur la table les conditions dans lesquelles cette libération a été obtenue mais aujourd'hui vous conviendrez que ce qui compte c'est cette libération. Je crois que les Français doivent être fier aujourd'hui de voir que la France, le Président, son épouse, ont contribué à cette libération. Cela montre bien le rôle qu'a pris la France avec Nicolas Sarkozy dans des négociations internationales et en particulier dans le retour de l'Europe sur la scène internationale.
Katia Gilder : Est-ce que vous pensez, sur le dossier de la gouvernance des universités, qu'il y a un risque de dérive ?
François Sauvadet : Il y a un point sur lequel tout le monde est d'accord et c'est l'autonomie et je voudrais simplement dire d'un mot que la méthode employée était la bonne puisque aujourd'hui, plus personne ne conteste la légitimité d'un texte visant à obtenir d'avantage d'autonomie des universités y compris sur leur organisation matérielle. On voit bien dans quelle complexité étaient plongées nos universités, il s'agit donc de leur donner tous les moyens de fonctionner. Et puis le deuxième sujet sur lequel il y a débat, c'est la gouvernance. C'est à dire quel rôle doit avoir le Président et au rang desquels on doit le choisir. D'ailleurs le Nouveau Centre, vous l'avez oublié et il existe à l'Assemblée, s'est associé actuellement à cette amendement visant à faire en sorte que les enseignants chercheurs, prennent et conservent une place importante dans l'université, contre le gouvernement, mais c'est une discussion et un gouvernement ça sert à ça. On parle en ce moment de la revalorisation du Parlement. Le projet est proposé par le gouvernement et il nous appartient à nous de l'amender. C'est ce que nous faisons et puis derrière, il y a aussi la question posée de la représentation notamment des étudiants. Il faut qu'ils soient partie prenante responsables. Le tout, c'est de ne pas recommencer à se situer dans des chapelles dans lesquelles on a trop souvent vécu dans les universités. Au contraire, il faut ouvrir dans les universités. Faire de façon construite. En respectant aussi le rôle majeur que doit avoir les enseignants et les chercheurs. C'est le sens de l'amendement qui a été soutenu par l'ensemble des groupes contre l'avis du gouvernement en effet.
Katia Gilder : Est-ce qu'il y a d'autres points sur lesquels vous avez des réserves ?
François Sauvadet : Écoutez, sur l'ensemble du texte, on est plutôt d'accord sur la façon dont il a été abordé, il a fait d'abord l'objet de nombreuses discussions, auxquelles nous avons participé et Yvan Lachaud, qui est notre porte-parole sur ce texte l'a rappelé. Sur l'équilibre général, on est plutôt d'accord. Il y a des points de gouvernance sur lesquels nous sommes en discussion dont celui ci.
Katia Gilder : Le texte, le projet de loi sur la gouvernance, ne nous en dit pas plus sur la question des moyens ?
François Sauvadet : La question des moyens, nous l'avons posée. Notre groupe a insisté sur le fait qu'il fallait donner des moyens à l'université et la recherche - il en manque cruellement non ?
Elle manque de moyens mais aussi d'organisation, notamment d'organisation en réseaux. Je crois que l'université doit travailler davantage dans les réseaux et je me suis réjoui de voir l'émergence des pôles de compétitivité dans lesquels on a essayé de mettre autour de la table, pas seulement des enseignants chercheurs, mais aussi tous ceux qui contribuent à la vitalité de la recherche et de la recherche appliquée, pas seulement fondamentale. Puis un amendement, vous savez, on était attaché à ce que conserve la spécificité pour les enseignants en médecine, notamment pour le recrutement et leur présence. Donc nous avons fait quelques propositions sur ces sujets mais je crois d'une manière très générale, que l'université doit s'ouvrir, le fait qu'elle s'inscrive dans son temps. Que l'on mette aussi autour de la table, pas seulement des universitaires mais aussi des personnes qualifiées. Le débat était aussi de savoir a quel moment on devait faire intervenir ces personnes qualifiées. Donc nous avons proposé que ça se fasse après l'élection du Président. Donc il y a un débat qui s'est ouvert et qui va se poursuivre.
Katia Gilder : Et il faut, pour vous, renforcer les passerelles entre l'université en le monde de l'entreprise ?
François Sauvadet : Bien sur, je pense qu'il faut renforcer les passerelles, parce que l'on voit bien qu'il y a un mal Français. C'est celui de faire en sorte qu'il faut renforcer les maillages entre recherche fondamentale, recherché appliquée, recherche et développement, et on voit tout les bienfaits que nous pourrions en tirer. Et d'ailleurs, il faudra revaloriser le travail des chercheurs. Je me souviens il n'y a pas encore si longtemps leur cris d'alarme et le fait que l'on a eu beaucoup de chercheurs de grande qualité formés dans les universités françaises et qui sont parties à l'extérieur donc je crois que nous avons beaucoup à progresser dans la revalorisation du travail des chercheurs et notamment dans la considération financière et matérielle pour qu'il ne partent pas à l'étranger.
Katia Gilder : Concernant le projet de loi sur le service minimum, ne pensez-vous pas que le gouvernement a revu ses projets à la baisse ?
François Sauvadet : Je ne sais pas si il les a revus à la baisse en tout cas la question du service minimum est directement posée, vous savez qu'à l'occasion des différentes grèves que l'on a connu, il y avait bon nombre de nos concitoyens qui se sont sentis pris en otage, avec des grèves parfois intempestives et donc il faut bien considérer que partout ou il y a service public, il y a aussi devoir minimum. Et là, ce qui est prévu dans le texte c'est tout simplement d'organiser et précisément d'organiser le droit de grève, naturellement et tout le monde y est attaché mais en même temps d'organiser un minimum de service pour éviter que ne soit pris en otage des milliers de personnes qui vont travailler et qui aspirent à le faire en utilisant les transports publics. Ce qu'il est prévu dans le texte c'est des choses très simples. D'abord d'informer pour chaque salariés 48 heures à l'avance de son droit à utiliser la grève pour se manifester. Il y aura aussi des préventions avec des médiations que devront être organisées, c'est toute la partie du dialogue sociale pour éviter préalablement les grèves et les prévenir. Et puis au bout de 8 jours, il y aura un vote à bulletin secret pour déterminer l'issue que doit avoir cette grève. Ce sont des mesures qui sont saines qui visent à encourager le dialogue social. Mais les collectivités territoriales devront prendre leurs responsabilités puisqu'elles seront en charge et qu'elles seront impliquées dans l'organisation de ce service minimum. Tout cela participe à une démarche de responsabilité. Et d'ailleurs le Premier Ministre a très bien fait de lancer le débat sur un service minimum dans d'autres secteurs. Quand on voit les grèves dans l'éducation nationale, avec des enfants dont les parents ne sont pas prévenus, les responsabilités d'accueil dans les classes sont des responsabilités minimums. C'est un devoir minimum que doit avoir toute personne qui travaille dans le service public. Et donc je crois que cette responsabilisation, cette prévention du dialogue, cette organisation du dialogue social est plutôt un mieux. En tout cas c'est attendu par les français, vous avez vu les derniers sondages qui montrent bien que le gouvernement est tout à fait dans son rôle.
C'était un engagement qui était pris durant la campagne présidentielle et que nous, au Nouveau Centre nous avions défendu dès le premier tour de la présidentielle.
Katia Gilder : Alors François Sauvadet, une question sur votre groupe, est-ce que vous avez trouvé votre place au sein de la majorité ?
François Sauvadet : Dès lors que nous avions un groupe parlementaire à l'Assemblée, nous avions notre place puisque comme vous le savez on a une capacité à s'exprimer, à organiser, à participer à l'organisation des travaux à l'Assemblée, c'est précisément d'avoir un groupe. Donc il fallait au moins vingt députés, nous avons plus de vingt députés, c'est déjà une première étape de franchie. Puis vous avez entendu que l'on est pas inerte dans les débats. D'emblée lorsque le groupe UMP a voulu demander si nous avions un pied en dehors ou dedans de la majorité au motif que nous avions déposé un amendement, avec Charles Amédée de Courson, très fort, très vigoureux, sur le bouclier fiscal. Nous avons assumé très simplement les propositions. On sera très engagé dans la réussite du Gouvernement, très engagé dans la réussite du quinquennat, très loyaux par rapport aux engagements qui ont été pris. Mais on entend aussi porter ce que nous sommes, nos différences, nos valeurs. C'est d'ailleurs ce que le Président de la République nous avait proposé en nous disant, " venez former cette majorité à nos côtés, restez ce que vous êtes. Participez pleinement avec ce que vous êtes sans renier vos convictions" et bien c'est ce que nous sommes en train de faire. Vous le verrez lors de nos prochaines journées parlementaires, on sera très engagés sur des sujets sur lesquels les Français nous attendent dont celui de la santé.
Katia Gilder : Pensez-vous que le fait de sanctionner les députés absents de l'hémicycle est pertinent, comme le propose monsieur Carcassonne ?
François Sauvadet : Vous savez, il y a un vrai problème d'organisation de nos travaux. Avec Monsieur Seguin, nous étions passés à une session unique qui était sur trois jours, donc organiser le travail parlementaire. Vous avez vu maintenant, on a la session sur neuf mois. Auparavant, nous avions deux sessions parlementaires, aujourd'hui on a neuf mois et vous avez vu l'encombrement des textes. Il y a une masse de législation que nous produisons qui est beaucoup trop importante.
Il faut toiletter d'abord nos textes avant d'imaginer de nouveaux textes. Chaque année, on en vote 230, vous imaginez chacun y va de sa loi. Donc il y a un gros travail de codification, d'organisation, puis il y a un vrai travail de contrôle que nous ne faisons pas suffisamment. Au-delà de la question de la présence dans l'hémicycle, il y a la question du rôle du Parlement, d'ailleurs dans la réforme des institutions, la réflexion qui est engagée à la fois par la commission présidée par Edouard Balladur et à la fois par la commission mise en place par Monsieur Accoyer, nous allons participer pour moderniser notre façon de travailler. Regardez des textes qui arrivent dans l'urgence, que l'on traite en quelques jours, sans avoir, nous même le temps de mener nos auditions, tout ça montre bien que si nous voulons un Parlement vivant, actif, force de proposition, force d'initiative, force de contrôle, il faut évidemment poser la question de la présence mais aussi l'organisation du travail et notamment de l'initiative et de l'ordre du jour qui nous a été fixé par le gouvernement pour l'essentiel.
Katia Gilder : Et aussi de la présence en commission ?
François Sauvadet : Bien sur c'est la présence en commission mais pas seulement c'est la présence en commission d'enquête, dans les commissions d'informations. J'ai présidé la commission d'enquête sur la vache folle, le travail a duré de 5 à 6 mois. Pendant ce temps là, je dois vous avouer que je n'ai pas été dans l'hémicycle. N'étais-je pas dans mon rôle de parlementaire? Donc on voit bien que la question de la présence en hémicycle trouve ses limites assez rapidement.
Katia Gilder : Concernant la coupe du monde de rugby, parlementaires, sport et politique font bonne alliance finalement...
François Sauvadet : Oui, c'est une très belle image. En tout cas, vous avez vu que l'on a Philippe Folliot qui est un très bon rugbyman, je pense que l'on va faire une bonne performance, donc on lui souhaite bonne chance.Source http://www.le-nouveaucentre.org, le 30 juillet 2007