Interview de M. Bernard Accoyer, président de l'Assemblée nationale, à RMC le 2 août 2007, sur le travail et l'activité des parlementaires.

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Texte intégral

Guillaume Cahour : Votre dernière interview, dernière discussion avant de partir en  vacances vous aussi, la fin de la session parlementaire qui touche à  sa fin, là, également pour vous ? 
Bernard Accoyer : Oui, session extraordinaire, bien remplie, qui a permis d'adopter des  textes qui constituent une partie des engagements, des premiers  engagements du président de la République. 
QUESTION : Vous partez où ? 
Bernard Accoyer : D'abord, je retourne dans mon beau département de la Haute-Savoie où  l'on travaille beaucoup mais qui est aussi un lieu où beaucoup viennent  en villégiature et je vais aussi en profiter sous cet angle. 
QUESTION : N. Sarkozy vous savez où il va ? 
Bernard Accoyer : Non.
QUESTION : C'est un secret d'Etat ? 
Bernard Accoyer : C'est sa liberté. C'est une très bonne chose qu'il protège sa vie. 
QUESTION : Les ministres avaient l'air soulagés hier, à la sortir du Conseil des  ministres, soulagés de pouvoir partir une quinzaine de jours. Ils ont  eu comme vous certainement les élections, l'élection présidentielle,  les législatives, ensuite un gros travail. Est-ce que vous aussi vous  êtes soulagé ? 
Bernard Accoyer : Nous sommes en train de travailler, en train de remplir les engagements  qui sont les nôtres. Nous sommes contents de pouvoir souffler, parce  qu'il y a eu un travail intense : d'abord un travail au cours des  campagnes présidentielles et législatives, ensuite au cours de cette  session extraordinaire au mois de juillet. Et puis on se prépare à  recommencer à la rentrée parce que les Français attendent de leurs élus,  et c'est ce que fait N. Sarkozy, qu'il travaille pour répondre aux  problèmes qui sont ceux de notre pays. 
QUESTION : Ce n'est pas une question piège. Est-ce que vous sentez un rythme  différent comparé à ce que vous avez pu vivre par le passé dans vos  expériences politiques ? 
Bernard Accoyer : Ce que j'apprécie, c'est qu'il y a un rythme soutenu, c'est vrai. Mais ce  rythme correspond exactement à la déclinaison, à la satisfaction des  engagements. Je pense que c'est bien pour nos compatriotes, c'est bien  pour les élus parce qu'on sait ce qu'on fait, on sait où on va, et comme on dit, on fait ce qui a été annoncé. 
QUESTION : On a appris ce matin une hausse des prix du tabac B. Accoyer : 6  % de hausse. C'est une décision des industriels du tabac, ce n'est  absolument pas le Gouvernement qui a décidé cela. Mais à partir  du 1er janvier prochain, l'amnistie fiscale qui a été décidée en 2003  et 2004 touche à sa fin. Est-ce que vous, vous êtes favorable à une  nouvelle augmentation sensible des prix pour faire baisser la  consommation du tabac ? 
Bernard Accoyer : La France a engagé un programme audacieux et efficace de lutte contre  le tabac. D'ailleurs pour la santé publique en particulier... 
QUESTION : Cela passe notamment par les prix. 
 
Bernard Accoyer : En particulier, pour lutter contre les maladies cardiovasculaires et le  cancer. Je suis oto-rhino, j'ai exercé pendant une trentaine d'années. Je  connais bien les effets catastrophiques du tabac. 
QUESTION : Et vous êtes fumeur ? 
 
Bernard Accoyer : Occasionnellement, j'ai quand même le droit de me faire un petit  plaisir. Mais je suis évidemment contre le tabagisme et je pense que  tout ce qui a été fait est très bien. Je crois qu'il y a des limites. Nous  avons, surtout maintenant, à aller du côté de la pédagogie, et à  développer l'éducation sanitaire, l'information en direction des jeunes.  Le prix du tabac est maintenant très élevé. Les gens se fournissent à  l'étranger, en particulier dans toutes les régions frontalières. Toute  mesure a des limites, et ce qui est très important c'est d'aller plus loin  pour expliquer pourquoi il ne faut pas devenir fumeur dépendant de  telle façon que la santé en profite. 
QUESTION : Donc la pédagogie plus que les prix selon vous ? 
Bernard Accoyer : Mais les prix on a déjà fait beaucoup : le prix du tabac est très élevé.
QUESTION :  42 % de hausse en 2003-2004 ! 
Bernard Accoyer : Et il y a une limite. Après, vous avez des trafics parallèles, de la  contrebande. Il ne faut pas considérer que la lutte contre le tabagisme,  la lutte pour la santé publique, la lutte contre le cancer ce ne soit que les  prix. C'est avant tout dans un pays comme le nôtre, l'éducation,  l'information. 
QUESTION : Pendant cette session parlementaire extraordinaire, un certain  nombre de textes on été votés, notamment le service minimum, le  paquet fiscal, l'autonomie aussi des universités. Quels seront les  premiers textes qui seront étudiés l'Assemblée nationale à votre  retour de vacances au mois de septembre ?
Bernard Accoyer :  Il y a la suite de la déclinaison des priorités qui ont été annoncées dans  le domaine social, dans le domaine de la sécurité. L'ordre du jour n'est  pas encore arrêté. Ce que nous savons, c'est que nous devrons nous  réunir, nous devrons tenir la session extraordinaire du mois de  septembre. 
QUESTION : D'accord. Mais vous ne connaissez pas encore l'ordre du jour, vous  ne connaissez pas encore les principaux textes. Hier, l'Elysée a  rendu publiques les lettres de mission pour X. Bertrand. Dans ces  lettres de mission, il y avait notamment, le régime spéciaux de  retraite. Cela pourrait faire partie des priorités ? 
Bernard Accoyer : Ce sont des engagements. Ce sont les engagements qui ont été pris, ces  engagements ont été annoncés au cours de la campagne. La réforme des  retraites de 2004 est en cours, elle s'applique, elle a permis de sauver  nos régimes de retraite, et dans les engagements de la campagne, il y  avait la nécessité d'aller vers l'équité en ce domaine : c'est-à-dire que  les régimes spéciaux soient réformés, pour que progressivement tous les  Français aient la même durée de cotisation, que les Français aient un  même niveau de retraite à terme. Tout cela doit se faire dans la  concertation, mais il faut aussi satisfaire à ses engagements. 
QUESTION : Dans les engagements donc, vous le dites il y avait les régimes  spéciaux, mais il y avait aussi le service minimum. Et sur le service  minimum, hier, D. Bussereau le reconnaissait : on a fait un petit  moins ambitieux que prévu. Est-ce que sur les régimes spéciaux, on  risque aussi de faire moins ambitieux que prévu ? 
Bernard Accoyer : Je ne suis pas d'accord. Sur le service garanti, nous avons voté un texte  qui permettra aux Français de jouir du droit de pouvoir aller et venir, en  particulier aller travailler, même s'il y a une grève dans les transports  terrestres. 
QUESTION : N. Sarkozy avait parlé de trois heures le matin, trois heures l'après-midi,  trois le soir. On n'en n'est pas là aujourd'hui. Parce qu'il y a  certes un texte qui encadre la possibilité de faire la grève avec  notamment le fait de se déclarer 48 heures à l'avance, et puis un  vote à bulletin secret au bout de huit jours de grève. Mais ensuite ce  sont les collectivités locales, elles, qui détermineront la fréquence de  trafic les jours de grève, les destinations prioritaires. Donc on est  quand même dans un texte moins ambitieux que ce qu'on nous a annoncé pendant la campagne. 
Bernard Accoyer : Excusez-moi, ce qui compte, c'est que celui qui a besoin de se déplacer  sache si le train de 19h30 ou celui de 7h30 sera effectivement en gare,  et s'il pourra effectivement se déplacer. Soyons pragmatiques : c'est  une avancée sur la garantie d'un service permettant de se déplacer et  d'utiliser ce service public des transports terrestres. 
QUESTION : Il y a déjà des questions sur le chat et sur le mail. 
Emma Strack (RMC) : Cette question de Julie : on entend que les  projets de loi sont adoptés pendant la nuit et l'été en session  extraordinaire. Pourquoi si vite ? Est-ce que c'est pour éviter les  conflits sociaux ? Ne faut-il pas règlementer tout ça pour une meilleure  assiduité des députés ? 
Bernard Accoyer : Ca, c'est véritablement une présentation caricaturale de ce qui se passe.  Je pense que nous allons pouvoir parler de la réforme des institutions  que le Président a voulue, et je pourrai expliquer sur sa partie  parlementaire. Mais le travail parlementaire, l'examen des textes, le  vote des lois, se font d'une façon continuelle. Il est assez rare, même si  cela s'est produit cette nuit, parce qu'il fallait bien boucler avant la fin  de la session l'examen du dernier texte, il est assez rare que cela se  passe à des heures extraordinaires. Il n'y a rien de caché, tout est  transparent. Il y a des caméras partout, des micros partout, tout est  public. J'entends souvent dire : "on a fait passer nuitamment ou en  cachette telle ou telle mesure", c'est archi faux. Les mesures, les textes,  les amendements sont connus, et ils sont adoptés, c'est le  fonctionnement de la démocratie. Et il n'y a pas de travail à quatre,  cinq, six heures du matin, ou de mesures qui seraient imaginées  subrepticement pour les faire passer en cachette, ça ne marche pas  comme ça. C'est une caricature qui nuit au travail parlementaire, et à sa  sincérité.
QUESTION : Vous trouvez que l'image des parlementaires est mauvaise  aujourd'hui ? Qu'être député, ce n'est pas évident, dans le regard  des gens ?
Bernard Accoyer : Je pense que nous avons besoin de réformer notre règlement. Parce que  les députés - et je peux en témoigner- travaillent tous beaucoup. Par  contre, il est exact qu'il n'est pas possible, compte tenu de notre  méthode de travail, de la méthode qui existe aujourd'hui pour  construire, élaborer la loi, de donner une image qui soit pleinement  satisfaisante, parce que l'hémicycle n'est pas suffisamment rempli. Les  textes sont examinés nuit et jour pendant parfois plus d'une semaine ;  pendant ce temps là, il y a des centaines de réunions qui se tiennent  simultanément, et avant tout dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.  C'est tout cela qu'il faut réformer pour le mettre en cohérence, de telle  façon que, visuellement, ce travail qui est considérable, puisse  apparaître tel qu'il est réellement aux français 
QUESTION : Vous nous amenez à l'absentéisme, avec une polémique qui a enflé  ces dernières semaines, et c'est même remonté jusqu'à Matignon.  On reparle dans quelques instants : faut-il ponctionner une partie  du salaire des députés qui ne sont pas dans l'Hémicycle ? A tout de  suite...   [Fin de la première partie.]  Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 2 août 2007