Texte intégral
Q - A quoi tient la présidentialisation actuelle du régime ?
Patrick Devedjian. C'est d'abord la conséquence de la logique instituée par le quinquennat : le rythme du mandat présidentiel s'accélère et le chef de l'Etat est davantage en première ligne. Ensuite, la personnalité du président de la République est évidemment pour beaucoup dans cette évolution. Nicolas Sarkozy est un homme politique de la nouvelle génération, beaucoup moins ancré dans la tradition monarcho-républicaine, donc beaucoup plus moderne. Son omniprésence est d'autant plus justifiée qu'il entend rééquilibrer les institutions en faveur du Parlement. C'est l'un des principaux axes de travail de la commission Balladur.
Q - Parmi ses projets de réforme institutionnelle, Nicolas Sarkozy veut aussi que le président s'exprime devant le Parlement. Dès lors, à quoi pourra bien servir encore le Premier ministre ?
Patrick Devedjian. Il s'agit de sortir d'une formidable hypocrisie. Jusqu'à présent, la parole du président ne peut qu'être lue dans l'hémicycle par le président de l'Assemblée ou celui du Sénat. C'est un rituel totalement désuet. En s'exprimant lui-même, le chef de l'Etat rendra la procédure plus vivante et plus authentique. C'est logique car le président est, hors période de cohabitation, l'inspirateur de la politique du gouvernement. Et il est le seul à bénéficier de la légitimité du suffrage universel, en l'occurrence 53 % des suffrages avec 83 % de participation.
Q - Mais selon l'article 20 de la Constitution, c'est « le gouvernement qui détermine et conduit la politique de la nation »...
Patrick Devedjian. Oui, mais l'instance suprême du gouvernement, c'est le Conseil des ministres. Et c'est le chef de l'Etat qui le préside. Il ne peut donc qu'être en harmonie avec des ministres qu'il a nommés. Le général de Gaulle disait qu'« il ne peut y avoir de dyarchie au sommet de l'Etat ».
Q - De Gaulle disait aussi qu'« un Premier ministre, c'est fait pour durer et endurer ». Combien de temps François Fillon peut-il encore « endurer » ?
Patrick Devedjian. François Fillon avait anticipé la situation. Il l'a même théorisée dans un livre où il plaide pour la suppression du poste de Premier ministre. Il n'a pas à se plaindre... et d'ailleurs il ne se plaint pas. Le Premier ministre a vocation à devenir un animateur plus actif de la majorité et à s'appuyer davantage sur un Parlement lui-même revalorisé, un peu comme le vice-président dans le régime américain.
Q - Sommes-nous, de fait, entrés dans la VIe République ?
Patrick Devedjian. Quel que soit le numéro qu'elle porte, ce qui est important c'est que l'on soit toujours en République. Parler de changement de régime me paraît excessif. Mais nous assistons à un vrai changement de pratiques et, souvent, celles-ci évoluent avant que les textes ne suivent. Une Constitution vivante est une Constitution qui évolue comme la société. Source http://www.u-m-p.org, le 21 septembre 2007
Patrick Devedjian. C'est d'abord la conséquence de la logique instituée par le quinquennat : le rythme du mandat présidentiel s'accélère et le chef de l'Etat est davantage en première ligne. Ensuite, la personnalité du président de la République est évidemment pour beaucoup dans cette évolution. Nicolas Sarkozy est un homme politique de la nouvelle génération, beaucoup moins ancré dans la tradition monarcho-républicaine, donc beaucoup plus moderne. Son omniprésence est d'autant plus justifiée qu'il entend rééquilibrer les institutions en faveur du Parlement. C'est l'un des principaux axes de travail de la commission Balladur.
Q - Parmi ses projets de réforme institutionnelle, Nicolas Sarkozy veut aussi que le président s'exprime devant le Parlement. Dès lors, à quoi pourra bien servir encore le Premier ministre ?
Patrick Devedjian. Il s'agit de sortir d'une formidable hypocrisie. Jusqu'à présent, la parole du président ne peut qu'être lue dans l'hémicycle par le président de l'Assemblée ou celui du Sénat. C'est un rituel totalement désuet. En s'exprimant lui-même, le chef de l'Etat rendra la procédure plus vivante et plus authentique. C'est logique car le président est, hors période de cohabitation, l'inspirateur de la politique du gouvernement. Et il est le seul à bénéficier de la légitimité du suffrage universel, en l'occurrence 53 % des suffrages avec 83 % de participation.
Q - Mais selon l'article 20 de la Constitution, c'est « le gouvernement qui détermine et conduit la politique de la nation »...
Patrick Devedjian. Oui, mais l'instance suprême du gouvernement, c'est le Conseil des ministres. Et c'est le chef de l'Etat qui le préside. Il ne peut donc qu'être en harmonie avec des ministres qu'il a nommés. Le général de Gaulle disait qu'« il ne peut y avoir de dyarchie au sommet de l'Etat ».
Q - De Gaulle disait aussi qu'« un Premier ministre, c'est fait pour durer et endurer ». Combien de temps François Fillon peut-il encore « endurer » ?
Patrick Devedjian. François Fillon avait anticipé la situation. Il l'a même théorisée dans un livre où il plaide pour la suppression du poste de Premier ministre. Il n'a pas à se plaindre... et d'ailleurs il ne se plaint pas. Le Premier ministre a vocation à devenir un animateur plus actif de la majorité et à s'appuyer davantage sur un Parlement lui-même revalorisé, un peu comme le vice-président dans le régime américain.
Q - Sommes-nous, de fait, entrés dans la VIe République ?
Patrick Devedjian. Quel que soit le numéro qu'elle porte, ce qui est important c'est que l'on soit toujours en République. Parler de changement de régime me paraît excessif. Mais nous assistons à un vrai changement de pratiques et, souvent, celles-ci évoluent avant que les textes ne suivent. Une Constitution vivante est une Constitution qui évolue comme la société. Source http://www.u-m-p.org, le 21 septembre 2007