Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Académiciens,
C'est un grand honneur pour moi de pouvoir aujourd'hui m'exprimer devant une aussi illustre assemblée. Je vous remercie pour votre accueil et espère que cette discussion pourra être la plus libre possible. Je souhaite saisir cette opportunité pour poursuivre le dialogue exigeant et parfois sans concessions que l'Académie entretient avec les responsables politiques depuis ses plus de 300 ans d'existence.
Cela est d'autant plus vrai, que je souhaite vous parler aujourd'hui de notre politique environnementale, et du rôle que pourrait y jouer l'Académie des Sciences. Comme vous le savez, avec le Grenelle de l'environnement, processus de consultation des parties-prenantes voulu par le Président Nicolas SARKOZY, la France s'est engagée dans une rénovation en profondeur de ses politiques. Or un certain nombre de mythes obscurcissent encore une compréhension claire et distincte du projet qui est le nôtre, au premier rang desquels cette idée saugrenue qui voudrait que le développement durable soit en contradiction avec la recherche, avec le progrès, avec l'innovation.
Ma conviction est exactement l'inverse. Je pense que la nouvelle donne politique proposée par le Grenelle de l'environnement doit s'appuyer sur des connaissances scientifiques solides et nous invite à redoubler d'efforts en matière de recherche. Il en va de la crédibilité de notre démarche, mais aussi de la responsabilité sociale de la science. Le Prix Nobel de la paix décerné l'an dernier aux scientifiques du GIEC a envoyé un signal fort au public et aux scientifiques quant aux bénéfices réciproques d'une plus étroite collaboration entre eux. Et cela n'est pas sans importance à l'heure où, paradoxalement, on semble assister à un éloignement tressé de malentendus entre la science et le public.
C'est là un constat qui a déjà été fait devant vous par le Ministre de l'Education nationale Luc FERRY en 2003. D'un côté, la société est de plus en plus consommatrice de produits technologiques, comme l'illustre le succès des téléphones portables, des technologies nomades ou du GPS. Mais, parallèlement, on assiste à une baisse inquiétante du recrutement des filières scientifiques. Pour moi, l'une des traductions les plus immédiatement visibles de ce phénomène est le faible nombre aujourd'hui, au sein de la représentation nationale, des parlementaires de formation scientifique.
Pourtant, dans un monde toujours plus traversé d'incertitudes, c'est de plus de sciences que nous avons besoin. Je veux parler non seulement des solutions 'clé en main' proposées par les 'experts', mais aussi du questionnement scientifique, de cette démarche exigeante qui nous pousse toujours plus loin dans le progrès, dans un progrès responsable et qui ne se satisfait pas de solutions toutes faites.
Le principe de précaution ne dit rien de contraire à cela, même s'il continue toujours de faire débat. Récemment encore, le rapport Attali a cru déceler dans son inscription constitutionnelle l'une des causes des retards de la France en matière de recherche, d'innovation et de compétitivité. Vous connaissez mes convictions sur l'importance de ce principe. Mais je ne veux pas laisser croire à ceux qui ne les partagent pas que je n'entends pas leurs arguments, même s'ils ne sont pas pour moi assez convaincants. A l'époque où j'étais rapporteuse de la Charte de l'environnement, l'Académie des Sciences avait émis un avis opposé à l'inscription du principe de précaution dans la Constitution, tout en appelant à une intensification de la recherche sur les risques environnementaux dont elle ne nie pas l'existence. J'avais alors été frappée par l'argumentaire de certains de mes contradicteurs. Ceux-ci exprimaient la crainte que le principe de précaution ne se trouve appliqué avec excès dès que, devant certains risques, une peur irrationnelle traverserait la population (amplifiée le cas échéant par la caisse de résonance médiatique). Alors le principe de précaution finirait par stopper net toute recherche. Dans ces conditions, il ne serait rien d'autre que l'expression d'un rejet de la science et des risques qu'elle comporte. Eh bien, peut-être faut-il avoir davantage de confiance dans le caractère rationnel de l'esprit citoyen. Comme l'a illustré avec éclat le Grenelle de l'environnement, lorsque la consultation du public n'est pas un exercice purement démagogique cherchant à donner satisfaction aux préjugés idéologiques les plus lourds des uns et des autres, lorsque, au contraire, on sait faire appel à leur intelligence citoyenne, alors le public se révèle loin d'être déraisonnable. Il sait alors écouter les arguments des uns et des autres pour promouvoir un dialogue véritable et rechercher le consensus plutôt que la dissension. Il faut donner sa chance au public. Dans cette attitude, ce n'est d'ailleurs ni plus ni moins que l'esprit des Lumières que l'on retrouve. Car celui-ci ne prétendait pas contribuer à l'avancement de la science dans la solitude des laboratoires et contre l'opinion obscurantiste du plus grand nombre. Au contraire, il souhaitait réconcilier science et public, en faisant appel à la 'lumière naturelle' de tout un chacun.
Non, le principe de précaution n'est pas un principe d'inaction qui interdirait certaines recherches au motif qu'elles seraient un facteur de risques. C'est, au contraire, un principe d'action. Il implique, face à un risque potentiel, un appel à davantage de recherches avant la mise sur le marché d'un produit. Même les plus ardents défenseurs des OGMs ne sauraient accepter que leur exploitation se fasse sans certains garde-fous. Par ailleurs, le principe de précaution ne peut s'appliquer qu'en cas de suspicion d'un dommage grave et irréversible. Et l'on ne connaît pas de cas où une innovation n'aurait pu aboutir à cause du déclenchement d'une clause de précaution. Ainsi, l'application tardive du principe de précaution au risque de dégradation de la couche d'ozone, loin de bloquer l'innovation, a incité à redoubler d'efforts en vue de la mise au point de produits de substitution. Et les risques eux-mêmes qui sont identifiés ne doivent pas être de purs fantasmes mais reposer sur des hypothèses scientifiques suffisantes.
On ne saurait donc pas faire passer les gardiens du principe de précaution, pour des ennemis de la science. Peut-être certaines franges de l'activisme écologique ont-elles de réelles difficultés avec l'idée de progrès. Mais ce n'est pas notre cas ni, j'en suis convaincu, celui de la majorité du public.
C'est main dans la main que la politique environnementale et de développement durable doit avancer avec la science. Cette conviction qui est la mienne, je la retrouve aussi bien dans le processus et les conclusions du Grenelle de l'environnement, que dans les structures existantes du Ministère de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement Durables (MEDAD), qui peuvent même être encore davantage renforcées.
Je connais l'attention particulière que l'Académie des Sciences accorde aux questions environnementales. Depuis 1996, vous avez publié 26 rapports sur ce thème, soit plus de deux rapports par an, et sur des sujets particulièrement actuels tels que les sols pollués, les ressources halieutiques, les effets des faibles doses ou la toxicologie. Les services du MEDAD ont souvent d'ailleurs été associés aux travaux préparatoires à la rédaction de ces rapports.
Cet intérêt de l'Académie des Sciences pour certains des débats les plus vifs et les plus actuels en matière environnementale s'est traduit dans la part active qu'un certain nombre d'entre vous a bien voulu prendre dans le Grenelle de l'environnement. Je souhaite en particulier adresser mes remerciements les plus sincères au Prof. Yvon LE MAHO, de la section 'biologie intégrative', pour sa participation active aux travaux du groupe « Préserver la biodiversité et les ressources naturelles ». Et je remercie également le Président Jules HOFFMANN, ainsi que les auteurs de la Recommandation en matière de « plantes génétiquement modifiées », pour leur contribution remarquée à ce débat difficile.
La science et la recherche occupent une place de choix dans les conclusions du Grenelle. Les exemples sont nombreux, qu'il s'agisse :
- des biocarburants de deuxième génération (engagement #59),
- des énergies renouvelables (#60),
- des technologies de captage et de stockage géologique du CO2 (#61),
- de la politique de R&D pour les innovations éco-responsables (#69),
- de la mise en place, au sein de l'ADEME, d'un fonds de soutien aux démonstrateurs de technologies éco-responsables (#70),
- du plan d'adaptation climatique national (#71),
- d'un observatoire de la biodiversité (#79),
- des recherches en microbiologie des sols (#80),
- du renforcement des disciplines naturalistes (#81),
- des recherches appliquées en agronomie, production intégrée et agroforesterie (#125),
- des recherches sur les OGMs, sur la préservation de la diversité génétique ou du renforcement des disciplines des sciences écologiques (#132, #133 et #134),
- d'une politique de substitution des substances chimiques préoccupantes (#137)
- ou de la création de pôles de compétence pluridisciplinaires santé-environnement (#142).
Le Président de la République a annoncé que, dans le cadre du Grenelle de l'environnement, la France mobiliserait un milliard d'euros de moyens nouveaux pour la recherche, afin de mieux connaître le changement climatique, l'évolution de la biodiversité et de poursuivre les expérimentations sur les nouvelles technologies agricoles, énergétiques et sur les écotechnologies. Le volet santé-environnement est particulièrement fourni, avec l'annonce de la création de 400 postes de chercheurs, notamment en toxicologie et éco-toxicologie.
Les défis à relever sont considérables. Aussi, l'importance que nous accordons au rôle de la science à nos côtés est-elle considérable. Un certain nombre d'initiatives ont été entreprises au sein du MEDAD, qui mériteraient de se voir encore davantage renforcées. Deux conseils scientifiques ont été institués afin de mieux orienter notre action :
* le Comité de la Prévention et de la Précaution (CPP), depuis 1996, dans les domaines de l'environnement et de la santé ;
* et le Conseil Scientifique du Patrimoine Naturel et de la Biodiversité (CSPNB), créé en 2004, qui a une fonction de veille, de conseil, d'alerte et de réflexion prospective sur l'ensemble des questions scientifiques concernant le patrimoine naturel terrestre et aquatique (paysages, écosystèmes, espèces ou génomes). Depuis sa création, le CSPNB, présidé par Yvon LE MAHO, a émis un certain nombre d'avis destinés à éclairer les politiques publiques et à anticiper sur les enjeux de la biodiversité. Il vient de remettre au Ministre d'Etat Jean-Louis BORLOO une étude sur les corridors rivulaires qui sera très utile pour la mise en oeuvre des recommandations du Grenelle concernant les trames vertes et bleues.
Par ailleurs, le MEDAD assure la tutelle recherche d'un certain nombre d'établissements, qu'il subventionne à hauteur de 280Meuros : l'INERIS (Institut national de l'environnement industriel et des risques), l'IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire), l'ADEME (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie), l'AFSSET (Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail). Il exerce également la co-tutelle du BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières), de l'IFREMER (Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer) ou encore du Muséum national d'histoire naturelle.
Il met enfin en oeuvre des programmes de recherche dans le domaine de l'écologie et du développement durable, pour un montant annuel de 8Meuros. Une vingtaine de programmes sont en cours, qui concernent les pesticides, les sols, les eaux et les territoires, le littoral, les politiques territoriales de développement durable, la concertation, les perturbateurs endocriniens, les impacts du changement climatique, la qualité de l'air, l'agriculture et la biodiversité, les invasions biologiques, les paysages, les risques, etc. A titre d'exemple, dans le cadre de la mise en oeuvre de la directive-cadre sur l'eau et de la révision des Schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) et des autres politiques territoriales (SCOT, PLU, etc.), un appel à projets a été lancé. Celui-ci se situe à l'interface du programme de recherche nationale 'Eau & Territoires', de la coopération franco-québécoise et d'un réseau européen de financeurs de la recherche IWRM financé par la Commission européenne, dans le cadre du programme ERA-Net. Beaucoup de ces programmes sont d'ailleurs conduit en coopération avec d'autres Etats membres de l'Union européenne. C'est le cas également pour le projet ERA-Net CIRCLE (coordination de la recherche sur l'impact climatique dans une Europe élargie), qui réunit les Etats du pourtour de la Méditerranée (France, Espagne/région de la Galice, Portugal, Italie et Israël), et dont le budget total est de 2150 Keuros. Au sein de ce projet, les consortiums doivent comporter des équipes d'au moins deux pays partenaires, plus un participant d'un pays méditerranéen ne faisant pas partie du groupe des pays financeurs (Croatie, Albanie, Maroc et Tunisie).
Tous ces programmes de recherche font l'objet d'une évaluation régulière, dont les rapports sont disponibles sur le site du MEDAD.
Nous tâchons donc de faire au mieux. Cependant, force est de constater que nous avons encore trop souvent un profond sentiment de solitude sur beaucoup de ces questions. Pourtant, un véritable élan a vu le jour grâce au Grenelle de l'environnement, qui a démontré que, par-delà les rôles, les postures ou les lignes idéologiques des uns et des autres, il était possible de se mettre d'accord sur un projet de société commun, dans lequel la science joue un rôle décisif.
Parce qu'il est d'autant plus important qu'une expertise solide et indépendante des intérêts des uns et des autres puisse constituer un socle commun de dialogue et de débat, j'espère pouvoir compter sur une participation active de l'Académie des Sciences à cet élan qui a vu le jour. Car une véritable attente s'est manifestée dans ce sens à l'occasion du Grenelle de l'environnement, unanimité d'autant plus frappante que les scientifiques, et singulièrement les académiciens des sciences, y étaient assez peu représentés...
Bien sûr, il ne faut pas être dupes des attitudes de circonstance de certains des acteurs en présence. Il y en aura bien toujours quelques-uns qui ne verront dans la demande de recherche scientifique qu'un moyen de retarder toujours davantage le moment où il faut prendre des mesures effectives. Mais ce n'est pas là la majorité, et c'est le plus souvent de bonne foi que l'on en appelle à la science pour nous aider à donner une réalité à l'idée de développement durable. Car la science est seule à même d'apporter cette objectivité dans les diagnostics, qui peut en définitive achever de convaincre les parties-prenantes qu'elles n'ont plus d'autre alternative que de se ranger à des choix qui peuvent être douloureux, et qui peuvent même dans une certaine mesure remettre en question leurs modes de vie ou leurs avantages compétitifs. Cela est vrai pour la recherche halieutique, qui seule peut-être pourra un jour convaincre les marins-pêcheurs de la nécessité de réduire les quotas de pêche sur certaines espèces. Cela a été vrai en matière de changement climatique, lorsque l'émergence d'un consensus jusque-là improbable dans les travaux du GIEC a représenté un signal fort que certaines évidences ne pouvaient plus à présent être mises en doute. Bien sûr, cela n'empêchera pas certains de continuer à nier ce sur quoi les scientifiques s'accordent. Même dans les rangs des scientifiques, certains préfèrent parfois la posture au dialogue, et leur combat contre ce qu'ils appellent 'l'écologisme' (sic) aura peut-être finalement contribué à démontrer par l'absurde que les mythes et les caricatures auxquels on s'efforce parfois de réduire l'engagement environnemental ne doivent pas masquer le désir de rigueur qui caractérise notre approche.
C'est dans ce même souci de rigueur qu'il faut défendre le développement des sciences écologiques en France. Car, contrairement aux affirmations de ceux qui veulent y voir un reste d'obscurantisme et estiment qu'on en fait toujours trop, l'écologie demeure le parent pauvre de la recherche dans notre pays. Certains expliquent cela par l'importance des cloisonnements disciplinaires dans les modalités de financement - y compris dans le cadre de l'ANR, la nouvelle structure de financement de la recherche qui vient de voir le jour. Par ailleurs, dans le contexte d'une concurrence internationale toujours plus vive pour le recrutement des jeunes chercheurs, il n'est pas déraisonnable d'encourager un certain nombre de disciplines d'excellence, telles que la génomique. Mais pourquoi les sciences environnementales ne pourraient pas également devenir un tel domaine d'excellence ? Faut-il se ranger sans discuter à l'avis de ceux qui jugent que les sciences de l'environnement n'ont pas la même rigueur scientifique que la recherche médicale ? On ne pourra longtemps laisser la recherche en sciences de l'environnement se limiter à quelques disciplines telles que les biomathématiques, sous prétexte que ce sont celles qui requièrent le moins de moyens financiers. Il est clair également que les écologues français, certes peu nombreux, sont plus cités que la moyenne des chercheurs français dans les revues internationales. Ce petit groupe est donc excellent !
Il convient également d'encourager davantage les approches pluridisciplinaires. Car, au regard de la complexité du fonctionnement des écosystèmes, l'écologie de demain ne pourra se satisfaire de la compartimentation des disciplines. Le développement d'une chimie 'verte' a tout à gagner d'une plus étroite collaboration entre chimistes et spécialistes de la biodiversité. De même, l'étude de l'impact des changements climatiques sur la biodiversité suppose de faire travailler ensemble les climatologues, les biologistes, les spécialistes du comportement, de l'immunologie, de la biologie du développement, etc. Et nul ne niera l'intérêt que représente la biodiversité pour la recherche biomédicale ou biotechnologique, ni l'intérêt des nouveaux instruments miniaturisés de traçabilité pour le suivi et la gestion des espèces, y compris dans certains milieux difficilement accessibles à l'homme tels que l'océan ou la banquise.
Toutes ces recherches sont utiles, aussi bien pour éclairer les débats sur nos choix de société, que pour mettre les politiques à l'abri des 'fausses bonnes idées' environnementales. Les choix de développement de biocarburants ont ainsi beaucoup gagné à accorder davantage de crédit aux recherches en faveur d'une agriculture plus respectueuse de la biodiversité, telles celles du programme DIVA (Action publique agriculture et biodiversité). Suite à l'alerte initiale émise en octobre 2006, les études commandées ont confirmé les craintes sur l'impact environnemental des biocarburants, questionné l'intérêt réel de cette filière sur le plan énergétique et montré son impact sur les prix des marchés de produits alimentaires. Ici, la science a joué pleinement son rôle.
Vous l'aurez compris : une forte volonté politique nous anime. Mais celle-ci ne suffit pas. Pour être à la hauteur des défis qu'il s'agit de relever, nous espérons pouvoir compter sur le soutien et la participation de chacun, conformément aux convictions qui sont les siennes. Une science indépendante et responsable est une condition indispensable au succès du développement durable. Je suis confiante que l'Académie des Sciences y mettra toute son énergie, comme elle y a toujours été attachée.
Mesdames et Messieurs les Académiciens,
Entendez cette clameur qui a salué, l'an dernier, la décision de remettre le Prix Nobel de la paix aux scientifiques du GIEC. Sans doute, elle perturbe la quiétude des hautes tours d'ivoire et des salons lambrissés où l'on recherche, inépuisablement, la lumière de quelques vérités scientifiques. Sans doute, elle oblige parfois à travailler dans l'urgence et à lui sacrifier l'élégance d'une démonstration. Mais la planète a besoin des sciences de la nature pour l'aider à guérir de ses dérèglements. Ne lui en veuillez pas si parfois ses appels sont maladroits, impatients ou désabusés. Sachez demeurer à l'écoute - tant nous aurons besoin de vous pour mener à bien l'importante tâche qui nous attend.
Je vous remercie de votre attention.Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 20 février 2008
Mesdames et Messieurs les Académiciens,
C'est un grand honneur pour moi de pouvoir aujourd'hui m'exprimer devant une aussi illustre assemblée. Je vous remercie pour votre accueil et espère que cette discussion pourra être la plus libre possible. Je souhaite saisir cette opportunité pour poursuivre le dialogue exigeant et parfois sans concessions que l'Académie entretient avec les responsables politiques depuis ses plus de 300 ans d'existence.
Cela est d'autant plus vrai, que je souhaite vous parler aujourd'hui de notre politique environnementale, et du rôle que pourrait y jouer l'Académie des Sciences. Comme vous le savez, avec le Grenelle de l'environnement, processus de consultation des parties-prenantes voulu par le Président Nicolas SARKOZY, la France s'est engagée dans une rénovation en profondeur de ses politiques. Or un certain nombre de mythes obscurcissent encore une compréhension claire et distincte du projet qui est le nôtre, au premier rang desquels cette idée saugrenue qui voudrait que le développement durable soit en contradiction avec la recherche, avec le progrès, avec l'innovation.
Ma conviction est exactement l'inverse. Je pense que la nouvelle donne politique proposée par le Grenelle de l'environnement doit s'appuyer sur des connaissances scientifiques solides et nous invite à redoubler d'efforts en matière de recherche. Il en va de la crédibilité de notre démarche, mais aussi de la responsabilité sociale de la science. Le Prix Nobel de la paix décerné l'an dernier aux scientifiques du GIEC a envoyé un signal fort au public et aux scientifiques quant aux bénéfices réciproques d'une plus étroite collaboration entre eux. Et cela n'est pas sans importance à l'heure où, paradoxalement, on semble assister à un éloignement tressé de malentendus entre la science et le public.
C'est là un constat qui a déjà été fait devant vous par le Ministre de l'Education nationale Luc FERRY en 2003. D'un côté, la société est de plus en plus consommatrice de produits technologiques, comme l'illustre le succès des téléphones portables, des technologies nomades ou du GPS. Mais, parallèlement, on assiste à une baisse inquiétante du recrutement des filières scientifiques. Pour moi, l'une des traductions les plus immédiatement visibles de ce phénomène est le faible nombre aujourd'hui, au sein de la représentation nationale, des parlementaires de formation scientifique.
Pourtant, dans un monde toujours plus traversé d'incertitudes, c'est de plus de sciences que nous avons besoin. Je veux parler non seulement des solutions 'clé en main' proposées par les 'experts', mais aussi du questionnement scientifique, de cette démarche exigeante qui nous pousse toujours plus loin dans le progrès, dans un progrès responsable et qui ne se satisfait pas de solutions toutes faites.
Le principe de précaution ne dit rien de contraire à cela, même s'il continue toujours de faire débat. Récemment encore, le rapport Attali a cru déceler dans son inscription constitutionnelle l'une des causes des retards de la France en matière de recherche, d'innovation et de compétitivité. Vous connaissez mes convictions sur l'importance de ce principe. Mais je ne veux pas laisser croire à ceux qui ne les partagent pas que je n'entends pas leurs arguments, même s'ils ne sont pas pour moi assez convaincants. A l'époque où j'étais rapporteuse de la Charte de l'environnement, l'Académie des Sciences avait émis un avis opposé à l'inscription du principe de précaution dans la Constitution, tout en appelant à une intensification de la recherche sur les risques environnementaux dont elle ne nie pas l'existence. J'avais alors été frappée par l'argumentaire de certains de mes contradicteurs. Ceux-ci exprimaient la crainte que le principe de précaution ne se trouve appliqué avec excès dès que, devant certains risques, une peur irrationnelle traverserait la population (amplifiée le cas échéant par la caisse de résonance médiatique). Alors le principe de précaution finirait par stopper net toute recherche. Dans ces conditions, il ne serait rien d'autre que l'expression d'un rejet de la science et des risques qu'elle comporte. Eh bien, peut-être faut-il avoir davantage de confiance dans le caractère rationnel de l'esprit citoyen. Comme l'a illustré avec éclat le Grenelle de l'environnement, lorsque la consultation du public n'est pas un exercice purement démagogique cherchant à donner satisfaction aux préjugés idéologiques les plus lourds des uns et des autres, lorsque, au contraire, on sait faire appel à leur intelligence citoyenne, alors le public se révèle loin d'être déraisonnable. Il sait alors écouter les arguments des uns et des autres pour promouvoir un dialogue véritable et rechercher le consensus plutôt que la dissension. Il faut donner sa chance au public. Dans cette attitude, ce n'est d'ailleurs ni plus ni moins que l'esprit des Lumières que l'on retrouve. Car celui-ci ne prétendait pas contribuer à l'avancement de la science dans la solitude des laboratoires et contre l'opinion obscurantiste du plus grand nombre. Au contraire, il souhaitait réconcilier science et public, en faisant appel à la 'lumière naturelle' de tout un chacun.
Non, le principe de précaution n'est pas un principe d'inaction qui interdirait certaines recherches au motif qu'elles seraient un facteur de risques. C'est, au contraire, un principe d'action. Il implique, face à un risque potentiel, un appel à davantage de recherches avant la mise sur le marché d'un produit. Même les plus ardents défenseurs des OGMs ne sauraient accepter que leur exploitation se fasse sans certains garde-fous. Par ailleurs, le principe de précaution ne peut s'appliquer qu'en cas de suspicion d'un dommage grave et irréversible. Et l'on ne connaît pas de cas où une innovation n'aurait pu aboutir à cause du déclenchement d'une clause de précaution. Ainsi, l'application tardive du principe de précaution au risque de dégradation de la couche d'ozone, loin de bloquer l'innovation, a incité à redoubler d'efforts en vue de la mise au point de produits de substitution. Et les risques eux-mêmes qui sont identifiés ne doivent pas être de purs fantasmes mais reposer sur des hypothèses scientifiques suffisantes.
On ne saurait donc pas faire passer les gardiens du principe de précaution, pour des ennemis de la science. Peut-être certaines franges de l'activisme écologique ont-elles de réelles difficultés avec l'idée de progrès. Mais ce n'est pas notre cas ni, j'en suis convaincu, celui de la majorité du public.
C'est main dans la main que la politique environnementale et de développement durable doit avancer avec la science. Cette conviction qui est la mienne, je la retrouve aussi bien dans le processus et les conclusions du Grenelle de l'environnement, que dans les structures existantes du Ministère de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement Durables (MEDAD), qui peuvent même être encore davantage renforcées.
Je connais l'attention particulière que l'Académie des Sciences accorde aux questions environnementales. Depuis 1996, vous avez publié 26 rapports sur ce thème, soit plus de deux rapports par an, et sur des sujets particulièrement actuels tels que les sols pollués, les ressources halieutiques, les effets des faibles doses ou la toxicologie. Les services du MEDAD ont souvent d'ailleurs été associés aux travaux préparatoires à la rédaction de ces rapports.
Cet intérêt de l'Académie des Sciences pour certains des débats les plus vifs et les plus actuels en matière environnementale s'est traduit dans la part active qu'un certain nombre d'entre vous a bien voulu prendre dans le Grenelle de l'environnement. Je souhaite en particulier adresser mes remerciements les plus sincères au Prof. Yvon LE MAHO, de la section 'biologie intégrative', pour sa participation active aux travaux du groupe « Préserver la biodiversité et les ressources naturelles ». Et je remercie également le Président Jules HOFFMANN, ainsi que les auteurs de la Recommandation en matière de « plantes génétiquement modifiées », pour leur contribution remarquée à ce débat difficile.
La science et la recherche occupent une place de choix dans les conclusions du Grenelle. Les exemples sont nombreux, qu'il s'agisse :
- des biocarburants de deuxième génération (engagement #59),
- des énergies renouvelables (#60),
- des technologies de captage et de stockage géologique du CO2 (#61),
- de la politique de R&D pour les innovations éco-responsables (#69),
- de la mise en place, au sein de l'ADEME, d'un fonds de soutien aux démonstrateurs de technologies éco-responsables (#70),
- du plan d'adaptation climatique national (#71),
- d'un observatoire de la biodiversité (#79),
- des recherches en microbiologie des sols (#80),
- du renforcement des disciplines naturalistes (#81),
- des recherches appliquées en agronomie, production intégrée et agroforesterie (#125),
- des recherches sur les OGMs, sur la préservation de la diversité génétique ou du renforcement des disciplines des sciences écologiques (#132, #133 et #134),
- d'une politique de substitution des substances chimiques préoccupantes (#137)
- ou de la création de pôles de compétence pluridisciplinaires santé-environnement (#142).
Le Président de la République a annoncé que, dans le cadre du Grenelle de l'environnement, la France mobiliserait un milliard d'euros de moyens nouveaux pour la recherche, afin de mieux connaître le changement climatique, l'évolution de la biodiversité et de poursuivre les expérimentations sur les nouvelles technologies agricoles, énergétiques et sur les écotechnologies. Le volet santé-environnement est particulièrement fourni, avec l'annonce de la création de 400 postes de chercheurs, notamment en toxicologie et éco-toxicologie.
Les défis à relever sont considérables. Aussi, l'importance que nous accordons au rôle de la science à nos côtés est-elle considérable. Un certain nombre d'initiatives ont été entreprises au sein du MEDAD, qui mériteraient de se voir encore davantage renforcées. Deux conseils scientifiques ont été institués afin de mieux orienter notre action :
* le Comité de la Prévention et de la Précaution (CPP), depuis 1996, dans les domaines de l'environnement et de la santé ;
* et le Conseil Scientifique du Patrimoine Naturel et de la Biodiversité (CSPNB), créé en 2004, qui a une fonction de veille, de conseil, d'alerte et de réflexion prospective sur l'ensemble des questions scientifiques concernant le patrimoine naturel terrestre et aquatique (paysages, écosystèmes, espèces ou génomes). Depuis sa création, le CSPNB, présidé par Yvon LE MAHO, a émis un certain nombre d'avis destinés à éclairer les politiques publiques et à anticiper sur les enjeux de la biodiversité. Il vient de remettre au Ministre d'Etat Jean-Louis BORLOO une étude sur les corridors rivulaires qui sera très utile pour la mise en oeuvre des recommandations du Grenelle concernant les trames vertes et bleues.
Par ailleurs, le MEDAD assure la tutelle recherche d'un certain nombre d'établissements, qu'il subventionne à hauteur de 280Meuros : l'INERIS (Institut national de l'environnement industriel et des risques), l'IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire), l'ADEME (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie), l'AFSSET (Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail). Il exerce également la co-tutelle du BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières), de l'IFREMER (Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer) ou encore du Muséum national d'histoire naturelle.
Il met enfin en oeuvre des programmes de recherche dans le domaine de l'écologie et du développement durable, pour un montant annuel de 8Meuros. Une vingtaine de programmes sont en cours, qui concernent les pesticides, les sols, les eaux et les territoires, le littoral, les politiques territoriales de développement durable, la concertation, les perturbateurs endocriniens, les impacts du changement climatique, la qualité de l'air, l'agriculture et la biodiversité, les invasions biologiques, les paysages, les risques, etc. A titre d'exemple, dans le cadre de la mise en oeuvre de la directive-cadre sur l'eau et de la révision des Schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) et des autres politiques territoriales (SCOT, PLU, etc.), un appel à projets a été lancé. Celui-ci se situe à l'interface du programme de recherche nationale 'Eau & Territoires', de la coopération franco-québécoise et d'un réseau européen de financeurs de la recherche IWRM financé par la Commission européenne, dans le cadre du programme ERA-Net. Beaucoup de ces programmes sont d'ailleurs conduit en coopération avec d'autres Etats membres de l'Union européenne. C'est le cas également pour le projet ERA-Net CIRCLE (coordination de la recherche sur l'impact climatique dans une Europe élargie), qui réunit les Etats du pourtour de la Méditerranée (France, Espagne/région de la Galice, Portugal, Italie et Israël), et dont le budget total est de 2150 Keuros. Au sein de ce projet, les consortiums doivent comporter des équipes d'au moins deux pays partenaires, plus un participant d'un pays méditerranéen ne faisant pas partie du groupe des pays financeurs (Croatie, Albanie, Maroc et Tunisie).
Tous ces programmes de recherche font l'objet d'une évaluation régulière, dont les rapports sont disponibles sur le site du MEDAD.
Nous tâchons donc de faire au mieux. Cependant, force est de constater que nous avons encore trop souvent un profond sentiment de solitude sur beaucoup de ces questions. Pourtant, un véritable élan a vu le jour grâce au Grenelle de l'environnement, qui a démontré que, par-delà les rôles, les postures ou les lignes idéologiques des uns et des autres, il était possible de se mettre d'accord sur un projet de société commun, dans lequel la science joue un rôle décisif.
Parce qu'il est d'autant plus important qu'une expertise solide et indépendante des intérêts des uns et des autres puisse constituer un socle commun de dialogue et de débat, j'espère pouvoir compter sur une participation active de l'Académie des Sciences à cet élan qui a vu le jour. Car une véritable attente s'est manifestée dans ce sens à l'occasion du Grenelle de l'environnement, unanimité d'autant plus frappante que les scientifiques, et singulièrement les académiciens des sciences, y étaient assez peu représentés...
Bien sûr, il ne faut pas être dupes des attitudes de circonstance de certains des acteurs en présence. Il y en aura bien toujours quelques-uns qui ne verront dans la demande de recherche scientifique qu'un moyen de retarder toujours davantage le moment où il faut prendre des mesures effectives. Mais ce n'est pas là la majorité, et c'est le plus souvent de bonne foi que l'on en appelle à la science pour nous aider à donner une réalité à l'idée de développement durable. Car la science est seule à même d'apporter cette objectivité dans les diagnostics, qui peut en définitive achever de convaincre les parties-prenantes qu'elles n'ont plus d'autre alternative que de se ranger à des choix qui peuvent être douloureux, et qui peuvent même dans une certaine mesure remettre en question leurs modes de vie ou leurs avantages compétitifs. Cela est vrai pour la recherche halieutique, qui seule peut-être pourra un jour convaincre les marins-pêcheurs de la nécessité de réduire les quotas de pêche sur certaines espèces. Cela a été vrai en matière de changement climatique, lorsque l'émergence d'un consensus jusque-là improbable dans les travaux du GIEC a représenté un signal fort que certaines évidences ne pouvaient plus à présent être mises en doute. Bien sûr, cela n'empêchera pas certains de continuer à nier ce sur quoi les scientifiques s'accordent. Même dans les rangs des scientifiques, certains préfèrent parfois la posture au dialogue, et leur combat contre ce qu'ils appellent 'l'écologisme' (sic) aura peut-être finalement contribué à démontrer par l'absurde que les mythes et les caricatures auxquels on s'efforce parfois de réduire l'engagement environnemental ne doivent pas masquer le désir de rigueur qui caractérise notre approche.
C'est dans ce même souci de rigueur qu'il faut défendre le développement des sciences écologiques en France. Car, contrairement aux affirmations de ceux qui veulent y voir un reste d'obscurantisme et estiment qu'on en fait toujours trop, l'écologie demeure le parent pauvre de la recherche dans notre pays. Certains expliquent cela par l'importance des cloisonnements disciplinaires dans les modalités de financement - y compris dans le cadre de l'ANR, la nouvelle structure de financement de la recherche qui vient de voir le jour. Par ailleurs, dans le contexte d'une concurrence internationale toujours plus vive pour le recrutement des jeunes chercheurs, il n'est pas déraisonnable d'encourager un certain nombre de disciplines d'excellence, telles que la génomique. Mais pourquoi les sciences environnementales ne pourraient pas également devenir un tel domaine d'excellence ? Faut-il se ranger sans discuter à l'avis de ceux qui jugent que les sciences de l'environnement n'ont pas la même rigueur scientifique que la recherche médicale ? On ne pourra longtemps laisser la recherche en sciences de l'environnement se limiter à quelques disciplines telles que les biomathématiques, sous prétexte que ce sont celles qui requièrent le moins de moyens financiers. Il est clair également que les écologues français, certes peu nombreux, sont plus cités que la moyenne des chercheurs français dans les revues internationales. Ce petit groupe est donc excellent !
Il convient également d'encourager davantage les approches pluridisciplinaires. Car, au regard de la complexité du fonctionnement des écosystèmes, l'écologie de demain ne pourra se satisfaire de la compartimentation des disciplines. Le développement d'une chimie 'verte' a tout à gagner d'une plus étroite collaboration entre chimistes et spécialistes de la biodiversité. De même, l'étude de l'impact des changements climatiques sur la biodiversité suppose de faire travailler ensemble les climatologues, les biologistes, les spécialistes du comportement, de l'immunologie, de la biologie du développement, etc. Et nul ne niera l'intérêt que représente la biodiversité pour la recherche biomédicale ou biotechnologique, ni l'intérêt des nouveaux instruments miniaturisés de traçabilité pour le suivi et la gestion des espèces, y compris dans certains milieux difficilement accessibles à l'homme tels que l'océan ou la banquise.
Toutes ces recherches sont utiles, aussi bien pour éclairer les débats sur nos choix de société, que pour mettre les politiques à l'abri des 'fausses bonnes idées' environnementales. Les choix de développement de biocarburants ont ainsi beaucoup gagné à accorder davantage de crédit aux recherches en faveur d'une agriculture plus respectueuse de la biodiversité, telles celles du programme DIVA (Action publique agriculture et biodiversité). Suite à l'alerte initiale émise en octobre 2006, les études commandées ont confirmé les craintes sur l'impact environnemental des biocarburants, questionné l'intérêt réel de cette filière sur le plan énergétique et montré son impact sur les prix des marchés de produits alimentaires. Ici, la science a joué pleinement son rôle.
Vous l'aurez compris : une forte volonté politique nous anime. Mais celle-ci ne suffit pas. Pour être à la hauteur des défis qu'il s'agit de relever, nous espérons pouvoir compter sur le soutien et la participation de chacun, conformément aux convictions qui sont les siennes. Une science indépendante et responsable est une condition indispensable au succès du développement durable. Je suis confiante que l'Académie des Sciences y mettra toute son énergie, comme elle y a toujours été attachée.
Mesdames et Messieurs les Académiciens,
Entendez cette clameur qui a salué, l'an dernier, la décision de remettre le Prix Nobel de la paix aux scientifiques du GIEC. Sans doute, elle perturbe la quiétude des hautes tours d'ivoire et des salons lambrissés où l'on recherche, inépuisablement, la lumière de quelques vérités scientifiques. Sans doute, elle oblige parfois à travailler dans l'urgence et à lui sacrifier l'élégance d'une démonstration. Mais la planète a besoin des sciences de la nature pour l'aider à guérir de ses dérèglements. Ne lui en veuillez pas si parfois ses appels sont maladroits, impatients ou désabusés. Sachez demeurer à l'écoute - tant nous aurons besoin de vous pour mener à bien l'importante tâche qui nous attend.
Je vous remercie de votre attention.Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 20 février 2008