Déclarations de M. Alain Savary, ministre de l'éducation nationale, sur la politique de l'enseignement pour 1983, à l'Assemblée nationale et au Sénat les 5 novembre et 6 décembre 1982

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Circonstance : Présentation du budget du ministère de l'Education nationale à l'Assemblée nationale le 5 décembre et au Sénat le 6 décembre 1982

Texte intégral

Le budget du ministère de l'Education nationale que je vous propose au nom du Gouvernement pour 1983 est à la fois un budget en croissance et un budget de priorités.
De ce double point de vue, il porte la marque des choix gouvernementaux dans un contexte économique difficile, au service d'une politique d'éducation dont chacun sait qu'elle ne peut prendre sa pleine signification qu'au regard du long terme.
En effet, la dimension, la complexité et le rythme de notre appareil de formation exigent que les mesures qui ont pour ambition de contribuer à sa rénovation soient situées non seulement dans un ensemble mais également dans une durée.
Par rapport aux mesures acquises, dans le budget de l'Education nationale, les mesures nouvelles peuvent paraître de prime abord modeste tant il est vrai qu'on peut hésiter à qualifier de massif, un effort fait dans un domaine aux proportions aussi considérables que le système éducatif.
Au demeurant, il serait insensé d'imaginer qu'un tel système puisse, sur une période courte et grâce à des moyens importants, changer radicalement de direction, mais les efforts faits deviennent significatifs lorsqu'ils conduisent à infléchir la tendance de manière telle que sur longue période la transformation globale soit assurée.
Rapporté à la masse, le changement est d'abord une inflexion : rapporté à la durée, c'est une rénovation profonde.
Dans cet esprit. je m'attacherai à présenter ce projet de budget à notre assemblée en soulignant les efforts significatifs et les priorités retenues pour 1983.
Le budget qui vous est proposé est un budget en croissance qui poursuit la politique de redressement des moyens du service public d'éducation entamée en juillet 1981.
Je voudrais rappeler qu'il y a la une politique qui tranche avec celle qui était antérieurement poursuivie.
Alors que les trois budgets de 1979, 1980 et 1981 se sont traduits globalement par la suppression de près de 9 000 emplois ou équivalents-emplois, c'est la création de plus de 32 000 emplois ou équivalents-emploi, que représentent le collectif de 1981 et les deux budgets de 1982 et 1983.
Il est préférable, la pudeur étant aussi une vertu politique, de ne pas imaginer ce qu'auraient pu être les dernières rentrées scolaire, et universitaires si un tel effort n'avait pas été engagé, ce que les censeurs des rentrées d'aujourd'hui semblent oublier dans leur analyse.
Pris globalement, le budget de 1983 augmente de 15,02 % par rapport à celui de 1982, en données techniquement homogène. La progression des budgets civils étant de 12,5 %, la priorité accordée à l'Education nationale est ainsi clairement affirmée, non seulement par le taux d'accroissement mais par le rang auquel ce taux la place parmi les autres budgets de l'Etat, en effet, pensions exclues, le budget que je vous propose est désormais le plus important de ceux qui vous sont soumis.
A cela il faut ajouter que près de la moitié des créations d'emplois de l'Etat prévues en 1983 le sont pour l'Education nationale.
Cet effort délibéré, qui est un investissement essentiel pour le pays, donne à notre politique culturelle, sociale et économique la dimension structurelle qui, particulièrement en ces temps difficiles. est la seule qui permette de construire, là où d'aucun auraient seulement colmaté.
Cela étant, un budget réunit un ensemble de moyens finalisés, et c'est à l'examen de ceux-ci qu'il convient maintenant de s'attacher afin de donner un contenu concret aux orientations de politique générale.
Concernant chaque ordre d'enseignement de la maternelle à l'université, trois objectifs principaux ont été et seront poursuivis.
Premièrement : améliorer, en qualité et en quantité, l'accueil des élèves et des étudiants.
Deuxièmement : réduire les inégalités et les échecs scolaires et universitaires.
Troisièmement enfin, engager durablement le système d'enseignement sur la voie de la rénovation dans un cadre de décentralisation et d'autonomie renforcées, en s'appuyant sur le dialogue et sur des relations plus contractuelles que hiérarchiques.
Vis-à-vis de chacun de ces trois objectifs, les actions menées cette année permettent d'établir un premier bilan, qui vient conforter les orientations retenues et suggérer des adaptations limitées.
Concernant tout d'abord l'accueil des élèves et des étudiants, il faut souligner le caractère positif et novateur de l'accroissement des effectifs constaté à la présente rentrée.
La comparaison des taux de scolarisation français avec ceux des autres pays développés fait apparaître un retard de la France qu'il est capital de combler au plus tôt, sauf à compromettre gravement nos chances dans la compétition internationale.
Les mesures prises l'année dernière en la matière, en terme d'implantation de moyens et d'amélioration des procédures d'orientation, ont permis ce redressement de la demande sociale d'éducation ; les moyens inscrits au projet de budget devraient accompagner et soutenir cette tendance. C'est un enjeu dont je ne saurais trop souligner la gravité.
Cet accroissement des effectifs scolaires et universitaires ne va pas sans poser de délicats problèmes lorsque doivent être conduites les opérations d'ajustement des moyens de rentrée ; mais leur solution, quelquefois difficile, ne doit pas faire perdre de vue qu'il n'y a pas là un sujet d'inquiétude mais au contraire un fait porteur d'avenir.
Si j'aborde maintenant le thème de la lutte contre les inégalités et contre les échecs scolaires et universitaires, et sans examiner dans le détail l'inventaire des dispositions prises, je crois nécessaire pour chaque ordre d'enseignement d'en dresser la synthèse.
Concernant le premier degré, les efforts ont été orientés, et continueront de l'être, dans deux voies :
D'un côté, l'extension de l'accueil en maternelle, l'amélioration de l'encadrement à l'école élémentaire, la revalorisation de la fonction du maître, l'adaptation de sa formation.
De l'autre, la définition de zones prioritaires, au nombre de 400 aujourd'hui où on trouve réunies des causes multiples d'échec scolaire et dont les moyens pédagogiques sont renforcés progressivement.
Ceci cependant ne constitue que l'amorce d'un travail en profondeur, et nous venons d'entrer à cet égard dans une deuxième phase qu'il me parait important de préciser.
En prenant en charge leur instruction et en participant à leur éducation l'école doit permettre la réussite de tous les enfants, par une démarche globale qui tire parti de toute la vie de l'enfant pour favoriser la construction de son autonomie personnelle. Cet objectif ambitieux suppose l'ouverture de l'école, c'est-à-dire l'établissement de relations confiantes de coopération entre l'institution scolaire, le milieu environnant et en premier lieu les parents et les représentants de la collectivité. Elle suppose aussi une très grande attention à la continuité scolaire, à la qualité des progressions et des transitions depuis la petite enfance jusqu'à la fin de l'adolescence.
Cette orientation recueille un large accord. Sa mise en oeuvre, qui permettra de traiter à partir de l'école l'ensemble du problème des inégalités et des échecs, ne peut se concevoir sans que l'ensemble des partenaires de l'acte éducatif ait été directement associé à la conception même des actions auxquelles elle devra conduire dans une approche de concertation décentralisée.
C'est la raison pour laquelle je viens de lancer une grande consultation-réflexion nationale, différente d'une mission d'experts, qui a pour but d'établir à la fois, dans un dialogue entre les professionnels, les usagers et les collectivités :
- une évaluation des forces et des faiblesses de l'école primaire aujourd'hui ;
- une sélection des démarches novatrices les plus pertinentes et les plus réalisables ;
- une convergence des volontés, pour que se réalisent les renouvellements nécessaires.
Cette opération, dont je n'ai pas besoin de souligner l'enjeu devrait s'achever au second trimestre de 1983, dans des conditions telles que des projets locaux qui en seraient les fruits puissent prendre corps dès la prochaine rentrée.
Après le redressement apporté aux moyens, et le traitement particulier des secteurs les plus défavorisés, seraient progressivement construits des projets éducatifs, identiques quant aux objectifs principaux mais diversifiés quant aux méthodes, aux moyens et aux rythmes, compris parce que débattus, vécus au plus près de l'enfant, de ses réussites comme de ses difficultés assumés par tous ceux qui ont place dans l'acte éducatif.
Concernant les collèges. Les problèmes qui leur sont posés par la diversité des élèves, les orientations trop précoces. L'inadaptation des programmes officiels à un grand nombre d'enfants, les taux d'échec enfin, m'ont conduit dès l'an dernier à confier à M. Legrand le soin de mener une réflexion concertée. Les conclusions de ce travail vont m'être très prochainement remises. D'ores et déjà un certain nombre de mesures ont été prises, elles ne se limitent pas aux zones prioritaires et elles s'inscrivent toutes dans un fond d'orientations communes :
- améliorer et unifier progressivement la formation des enseignants ;
- intégrer dès leur formation initiale la connaissance théorique et pratique du système éducatif réel ;
- ouvrir le champ des activités éducatives en les intégrant dans le processus de formation, et rééquilibrer les disciplines ;
- reconnaître explicitement que la décentralisation et l'autonomie sont des nécessités vitales pour les établissements ;
- corriger les inégalités importantes qui subsistent entre collèges.
Ces orientations, précisées dans les prochains mois, connaîtrons à la rentrée prochaine une série d'applications de plus grande ampleur, appuyées notamment sur les moyens inscrits au projet de budget qui vous est soumis.
Concernant les lycées, des corrections aux structures pédagogiques actuelles s'imposaient ; elles ont été mises en oeuvre dès la rentrée 1981, avec la création des secondes indifférenciées, poursuivies à la présente rentrée avec celle des premières « scientifiques » et des nouvelles premières B puis en septembre 1983 au niveau des classes terminales.
L'importance du second cycle de l'enseignement secondaire, point de passage de la scolarité obligatoire à la scolarité volontaire et lieu de constats des sorties prématurées du système de formation initiale, méritait aussi qu'au delà des mesures de portée limitée dont je viens de parler, soit engagé un processus plus vaste ; c'est celui que conduit actuellement la commission animée par M. Prost.
Il a été marqué le 6 octobre dernier par l'organisation d'une journée nationale de consultation, attendue par tous comme une innovation offrant aux différents partenaires l'occasion d'une réflexion sur les contenus d'enseignement, la vie des établissements et l'évaluation des connaissances.
Cette consultation a été un succès tant par les échanges qu'elle a permis entre des partenaires de l'acte éducatif jusqu'ici trop distants les uns des autres, que par la qualité des analyses qu'elle a produites.
Cette réflexion entamée le 6 octobre se poursuivra le 13 décembre par une seconde journée ouverte aux parents et aux élèves. Elle permet de construire progressivement dans les lycées les conditions d'un renforcement l'autonomie et de la prise en charge directe de la mission éducative par ceux qui doivent y avoir leur part. Cette orientation connaîtra elle aussi à la rentrée prochaine une nouvelle étape.
Dans l'ensemble des actions menées pour la réduction des inégalités et des échecs, il convient de faire une place à part à l'aide apporter au développement des enseignements technologiques. Il faut absolument mettre un terme, et ce ne sera pas simple, aux pratiques de l'orientation qui donnent au recrutement des élèves de l'enseignement technique un caractère négatif. Cela passe certainement par une vraie diffusion de la culture technologique dans l'ensemble de notre système d'enseignement, et en particulier au collège. Dans le projet de budget, les enseignements technologiques bénéficient d'une priorité marquée à tous les degrés de l'enseignement ; leur situation actuelle comme le rôle qu'ils doivent jouer dans notre stratégie industrielle motivent ce choix. Ces enseignements, qu'ils soient dispensés dans des lycées d'enseignement professionnel, des lycées techniques ou des instituts universitaires de technologie représentent un domaine dans lequel l'investissement que nous faisons aujourd'hui est une partie essentielle de la politique économique à moyen terme du Gouvernement. Les choix faits en faveur de la filière électronique en sont la meilleure illustration.
J'en viens maintenant à l'enseignement supérieur. A cet égard, le budget qui vous est proposé poursuit l'effort amorcé l'année dernière et qui mettait fin à la politique malthusienne qui avait jusque-là prévalu. Mais nos enseignements supérieurs n'avaient pas seulement besoin d'une relance en termes en moyens en emplois et en crédits. Ils vivaient une crise grave qui justifie une réorganisation profonde et une définition nouvelle de leurs missions. C'est le sens du projet de loi qui est maintenant entré dans sa phase d'élaboration ultime, après une année de consultations et de réflexions, conduites par le groupe de travail animé par M. Jeantet.
La discussion de ce projet de loi, et plus particulièrement les mesures concernant l'orientation des étudiants en premier cycle, et la professionnalisation des filières, permettra d'ouvrir devant le Parlement le débat fondamental. Les options qui vous seront proposées engageront durablement l'avenir dans un domaine essentiel pour la France, à l'échelle nationale et internationale.
J'ajoute qu'en dehors de ce projet de loi mais en cohérence avec lui, un certain nombre de mesures ont été prises ou sont en préparation, pour l'aire en sorte que les étudiants qui sont plus nombreux soient aussi mieux formés. L'examen des demandes d'habilitations présentées par les établissements a été plus approfondi et l'ensemble des formations qui est maintenant en place préfigure la carte universitaire, élément essentiel de la planification des enseignements supérieurs. L'amélioration de l'encadrement résulte à la fois des créations d'emplois, de leur meilleure répartition, mais aussi d'une gestion plus rationnelle des personnels.
Enfin les structures d'accueil des étudiants, français ou étrangers, s'améliorent et M. Domenach vient de me remettre un rapport sur « les conditions de vie et le contexte de travail des étudiants » dont certaines propositions pourront être mises en oeuvre à partir de la prochaine rentrée.
J'en viens maintenant au troisième objectif général qui concerne la décentralisation et l'autonomie au sein du système scolaire et universitaire. Au-delà des textes généraux réformant le partage des responsabilités entre l'Etat et les collectivités, et qui ont des applications dans le champ de l'Education nationale, c'est l'organisation même des établissements qui permettra ou freinera la prise de responsabilité à l'échelon le plus décentralisé, mais le plus près des réalités vécues, de l'acte éducatif.
De ce point de vue, le projet de loi relative aux enseignements supérieurs donne à l'autonomie un contenu réel, en renforçant et en précisant les modalités de vie démocratique au sein des établissements, et en développant les rapports contractuels entre les établissements, les collectivités et l'Etat.
Dès maintenant, la concertation est la règle dans les relations avec les établissements d'enseignement supérieur. Et cela a donné des résultats significatifs pour le développement de la recherche universitaire. Certains avaient pu craindre en effet que face aux grands organismes celle-ci s'affaiblisse, voire se marginalise. Tout au contraire, la mise en place d'une politique contractuelle entre les établissements et l'administration centrale a donné à la recherche universitaire une vigoureuse impulsion accentuée avec la mise en oeuvre de contrats quadriennaux avec les établissements d'une même région.
Cependant si cette orientation est importante pour les grandes écoles et les universités, elle l'est aussi pour les établissements scolaires : mais cela pose à ce niveau des problèmes particuliers, puisqu'on s'adresse à des populations de jeunes et d'adultes placés en situation de responsabilité ou de dépendance selon un schéma profondément différent.
C'est notamment pour cette raison qu'un travail a été engagé dans le cadre des missions confiées à MM. Prost, Legrand et Soubré. Il conduirait à des propositions concrètes pouvant être mises en oeuvre à partir de la prochaine rentrée, mais il doit être clair qu'il ne saurait être question de changer brutalement de système. Le développement de l'autonomie des établissements est une démarche graduelle et résolue, dont les opérations de concertation déjà engagées constituent le premier temps. Elle devra certes concerner la gestion administrative, mais surtout le domaine pédagogique avec la gestion du temps, des effectifs et des programmes, et le domaine éducatif en rapport avec l'environnement, le monde associatif et collectivités.
Après avoir précisé à travers trois objectifs généraux, la signification et les étapes de la rénovation globale entreprise, je souhaiterais aborder maintenant un certain nombre de problèmes qui en constituent des points d'application particuliers.
Concernant tout d'abord les relations entre l'enseignement public et et l'enseignement privé, conformément aux dispositions du Conseil des ministres du 4 août 1982, j'ai créé quatre groupes de travail internes au ministère, sur chacun des thèmes retenus : la carte scolaire, le caractère des établissements, le statut des personnels, les activités éducatives. Les conclusions de ces travaux vont m'être remises incessamment et je ferai sur ces bases un ensemble de propositions au Gouvernement. Ensuite, pourra s'ouvrir la phase des négociations, selon le calendrier prévu.
Les crédits ouverts pour l'enseignement privé dans le projet de budget résultent de l'application de la loi. Ils n'appellent par conséquent de ma part aucun commentaire, sinon que les engagements pris sont tenus.
Par ailleurs j'ai évoqué la dimension internationale que prennent certaines des transformations en cours dans notre service public d'enseignement, et je voudrais indiquer maintenant ce qui peut être concrètement fait à propos d'un problème précis : celui des personnels coopérants qui enseignent dans les universités étrangères.
Ce sont pour l'essentiel des personnels contractuels recrutés directement par le ministère des Relations extérieures, et aujourd'hui en poste dans les pays en voie de développement.
Or une véritable coopération universitaire ne peut être mise en oeuvre par des enseignants-chercheurs appartenant à l'enseignement supérieur français.
Il a donc été décidé, en accord étroit avec les autres départements ministériels concernés, de s'orienter vers une coopération confiée essentiellement aux établissements d'enseignement supérieur. Ceux-ci seront chargés de réaliser des programmes élaborés en concertation avec les établissements des pays demandeurs, et recevront les moyens complémentaires nécessaires, pris sur l'enveloppe de l'aide au développement.
Il s'agit là d'un changement profond qui substitue à des initiatives individuelles une responsabilité d'établissements dans le cadre de programmes à moyen terme intégrant formation, recherche et développement. Il se fonde évidemment sur l'utilisation d'un personnel titulaire.
En vertu de cette logique, le Gouvernement vous présente un amendement afin de préciser les conditions dans lesquelles 150 emplois seront utilisés pour intégrer dans l'enseignement supérieur, des enseignants recrutés antérieurement pour servir en coopération selon les modalités que je viens d'indiquer. Il ne s'agit là évidemment que d'une première étape.
Dans un autre domaine mais sur un problème voisin, un deuxième amendement gouvernemental vous est proposé : la titularisation des vacataires de l'enseignement supérieur en qualité d'assistant ou d'adjoint d'enseignement. Il est prévu de réserver 200 emplois à cette opération qui fait suite à la nomination en 1982, de 400 enseignants non-titulaires en qualité d'assistants.
Afin de permettre aux établissements et en particulier aux instituts universitaires de technologie, de bénéficier des mesures d'intégration dans de meilleures conditions, et de préciser les règles de nomination en qualité d'adjoint d'enseignement, il est nécessaire d'amender en ce sens le teste initial.
Enfin, je voudrais faire état d'un des problèmes liés à la mise en oeuvre de la politique de décentralisation, celui de l'indemnité de logement des instituteurs. Le crédit de 650 MF qui figurait en 1982 au budget de l'Education nationale est transféré à l'administration du ministère de l'Intérieur et de la Décentralisation, le Gouvernement ayant décidé d'assurer le remboursement aux communes de la charge du logement des instituteurs, pour un montant supérieur à deux milliards cent six million, de francs dans la dotation globale de fonctionnement des communes.
Dans le même temps une clarification a été apportée au régime d'attribution de cette indemnité. Désormais, les instituteurs titulaires remplaçants, et ceux qui exercent dans les écoles primaires comme psychologue ou conseiller pédagogique, bénéficieront dans leur ensemble de l'indemnité de logement ; cette charge pour les communes sera compensée par le versement global de l'Etat.
Il reste que la fixation du montant de cette indemnité, selon les mêmes règles dans toutes les communes et dans des conditions d'équité, est un problème encore à l'étude, dont j'ai saisi mon collègue de l'Intérieur et de la Décentralisation.
L'objectif, de ce dernier point de vue, est bien sûr d'éviter que la Décentralisation faite pour respecter les différences et les spécificités n'en établisse de nouvelles en forme d'inégalités là où la situation établie était équitable.
Voilà, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, ce que je voulais vous dire du projet de budget pour 1983, et la politique qu'il permet de poursuivre ; mais je voudrais en conclusion, et parce que ceci traverse toutes les réalités éducatives, aborder le problème de l'évaluation.
L'Education nationale, qui a connu tant de changements et de réformes depuis trente ans, ne s'est pas encore dotée d'un outil d'évaluation qui lui permette de suivre régulièrement les résultats de la politique engagée et, plus généralement, d'apprécier la situation de notre système éducatif par rapport à ceux des pays qui peuvent nous être comparés. Cette lacune est grave. Il faut y remédier. C'est pourquoi j'ai demandé à l'Inspection générale de l'Éducation nationale de se consacrer en priorité à ce travail difficile mais de tout premier plan, pour lequel ce corps a d'ailleurs été créé. C'est aussi pourquoi le projet de loi relative aux enseignements supérieurs prévoit une instance d'évaluation, composée de personnalités indépendantes, susceptible de donner en toute liberté, des avis sur la politique de nos établissements. Il ne sert à rien de fixer des orientations si on ne se donne pas les moyens d'examiner leur mise en oeuvre et leurs résultats. Ceci est vrai tant dans le domaine des contenus d'enseignement et des filières de formation que dans celui de la gestion des établissements. Cette activité de réflexion du système éducatif sur lui-même doit prendre de l'importance.
Il faut aussi accepter qu'elle ne soit pas uniquement interne à ce système et que des acteurs économiques et sociaux venus d'autres horizons y participent : le rôle croissant de ce que l'on peut appeler très généralement les personnalités extérieures, à tous les niveaux de notre enseignement, a ce sens profond. Vous reconnaîtrez sans doute qu'il s'agit là d'une entreprise ambitieuse même si ce n'est pas une réforme spectaculaire. Elle ne se mesure pas à l'aune d'un budget mais elle a la prétention d'en mieux suivre l'exécution, dans une perspective pluriannuelle et fondamentalement qualitative.